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25/10/2004 | FRANCE | N°252591

France | France, Conseil d'État, 3eme et 8eme sous-sections reunies, 25 octobre 2004, 252591


Vu le recours du MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION, DE LA PECHE ET DES AFFAIRES RURALES, enregistré le 16 décembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION, DE LA PECHE ET DES AFFAIRES RURALES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 3 octobre 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté son recours tendant à l'annulation du jugement du 2 septembre 1997 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé pour excès de pouvoir la décision du préfet des A

rdennes du 22 février 1995 refusant à M. X le bénéfice de l'indem...

Vu le recours du MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION, DE LA PECHE ET DES AFFAIRES RURALES, enregistré le 16 décembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION, DE LA PECHE ET DES AFFAIRES RURALES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 3 octobre 2002 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté son recours tendant à l'annulation du jugement du 2 septembre 1997 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé pour excès de pouvoir la décision du préfet des Ardennes du 22 février 1995 refusant à M. X le bénéfice de l'indemnité pour abandon définitif de production laitière et au rejet de la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif ;

2°) statuant au fond, d'annuler le jugement du 2 septembre 1997 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne et de rejeter la demande présentée devant ce tribunal par M. X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement n° 3950/92/CEE du Conseil du 28 décembre 1992 modifié ;

Vu le décret n° 94-1055 du 7 décembre 1994 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Edouard Crépey, Auditeur,

- les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que l'article 8 du règlement n° 3950/92/CEE du Conseil du 28 décembre 1992 établissant un prélèvement supplémentaire dans le secteur du lait et des produits laitiers, aujourd'hui remplacé par le règlement n° 1788/2003/CE du Conseil du 29 septembre 2003, autorise notamment les Etats membres, afin de mener à bien la restructuration de la production laitière, à accorder une indemnité aux producteurs qui s'engagent à abandonner définitivement une partie ou la totalité de leur production laitière ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 7 décembre 1994 : Tout producteur (...) ayant droit à une quantité de référence à la date de présentation de sa demande (...) peut solliciter le bénéfice d'une indemnité pour abandon définitif de tout ou partie de la production en vue de la commercialisation de lait ou de produits laitiers ; qu'aux termes de l'article 2 du même décret : Le droit au bénéfice de cette indemnité est ouvert dans la limite des sommes recueillies dans les conditions prévues par l'article 2, paragraphe 4, du règlement (CEE) n° 3950/92 puis, le cas échéant, dans la limite des financements des collectivités territoriales, de l'interprofession laitière définie par la loi du 12 juillet 1974 susvisée et des acheteurs de lait et de produits laitiers (...) ; qu'aux termes de l'article 6 du même décret : Le producteur dépose sa demande auprès du préfet de département du siège de son exploitation (...). Celui-ci en accuse réception et la transmet au C.N.A.S.E.A., qui l'enregistre au niveau national selon les régions concernées ; qu'aux termes de l'article 8 dudit décret : Si, au niveau régional, le montant de l'enveloppe prévue au dernier alinéa de l'article 2 n'est pas utilisé en totalité, il fera l'objet d'une péréquation interrégionale, en fin de programme, par décision du ministre de l'agriculture et de la pêche./ Si, après péréquation, le nombre de demandes excède les financements prévus, elles seront acceptées, au niveau régional, en retenant en priorité les demandes d'abandon d'au plus 30 p. 100 des quantités de référence laitières du producteur au titre des livraisons en laiterie et en suivant l'ordre croissant des quantités de référence laitières indemnisées./ Ces mêmes critères sont appliqués aux demandes éligibles aux financements des collectivités territoriales, de l'interprofession laitière ou des acheteurs mentionnés à l'article 2 ; qu'aux termes enfin de l'article 9 du même décret : Le préfet notifie la décision d'attribution de l'indemnité (...) ;

Considérant qu'il résulte des dispositions rappelées ci-dessus qu'il appartient au préfet, saisi d'une demande d'attribution de l'indemnité pour abandon définitif de la production laitière, de constater, d'une part, le montant des financements disponibles et, d'autre part, l'ordre de priorité de l'ensemble des demandes tel qu'il résulte des critères purement quantitatifs mentionnés à l'article 8 du décret du 7 décembre 1994 précité ; qu'il est ensuite tenu, en fonction de ces constatations et sans avoir à porter une appréciation sur les faits de l'espèce, de faire droit à la demande ou de la rejeter ; qu'ainsi, en jugeant que le décret du 7 décembre 1994 donnait au préfet des Ardennes un pouvoir d'appréciation pour octroyer ou refuser à M. X le bénéfice de ladite indemnité, la cour administrative d'appel de Nancy a entaché son arrêt d'erreur de droit ; que, par suite, le ministre requérant est fondé pour ce motif, et sans qu'il y soit besoin d'examiner les autres moyens du recours, à demander l'annulation de l'arrêt du 3 octobre 2002 ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Considérant que la demande de M. X tendant à l'obtention du bénéfice de l'indemnité pour abandon définitif de production laitière, sur laquelle il n'avait pas été statué lors de l'entrée en vigueur du décret du 7 décembre 1994, devait être traitée suivant les règles de procédure et de fond fixées par ce texte réglementaire dès lors que ce dernier n'avait pas prévu de dispositions transitoires à l'effet de soustraire à son champ d'application les demandes formées antérieurement et sur lesquelles l'administration ne s'était pas encore prononcée avant l'entrée en vigueur de la réglementation nouvelle ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, si la décision contestée mentionne que la quantité indemnisable dépasse un litrage butoir de 54 466 litres, le préfet des Ardennes n'a pas entendu, pour rejeter la demande que lui avait présentée M. X, appliquer un plafonnement non prévu par le décret du 7 décembre 1994, mais s'est borné à constater qu'il résultait de la combinaison, d'une part, du montant des sommes disponibles pour le financement de l'indemnité dans la région Champagne-Ardennes au titre de la campagne 1995 et, d'autre part, de l'ordre de priorité établi par le Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles au vu de l'ensemble des demandes émanant des producteurs établis dans cette région et en fonction des critères quantitatifs fixés par l'article 8 dudit décret, que le dernier dossier pouvant obtenir satisfaction dans la région correspondait à l'abandon d'une production autorisée de 54 466 litres et pour une proportion inférieure à 30 %, et que par suite la demande de M. X, fondée sur un abandon total de production ne pouvait faire l'objet d'une réponse favorable ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION, DE LA PECHE ET DES AFFAIRES RURALES est fondé à soutenir que c'est à tort qu'en se fondant sur un motif tiré de ce que le préfet des Ardennes s'est cru lié par un critère non prévu par les textes, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision litigieuse ;

Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X à l'appui de son recours pour excès de pouvoir ;

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit plus haut que le moyen tiré de ce que le préfet des Ardennes aurait entaché sa décision d'erreur de droit en se fondant sur le décret du 7 décembre 1994 pour statuer sur la demande de M. X doit être écarté ; que la circonstance que l'état de santé de M. X, reconnu invalide à 90 %, était fortement dégradé est sans incidence sur la légalité de la décision litigieuse ; que, de même, M. X ne pouvait utilement se prévaloir de ce qu'il n'aurait été informé, lors du dépôt de sa demande, ni de l'existence ni du montant du litrage butoir mentionné ci-dessus ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION, DE LA PECHE ET DES AFFAIRES RURALES est fondé à demander l'annulation du jugement du 2 septembre 1997 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 22 février 1995 du préfet des Ardennes refusant à M. X le bénéfice de l'indemnité pour abandon définitif de la production laitière ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy en date du 3 octobre 2002 est annulé.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du 2 septembre 1997 est annulé.

Article 3 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est rejetée.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION, DE LA PECHE ET DES AFFAIRES RURALES et à Mme veuve Michel X.


Synthèse
Formation : 3eme et 8eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 252591
Date de la décision : 25/10/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-05-03-02 AGRICULTURE, CHASSE ET PÊCHE - PRODUITS AGRICOLES - ÉLEVAGE ET PRODUITS DE L'ÉLEVAGE - PRODUITS LAITIERS - INDEMNITÉ POUR ABANDON DÉFINITIF DE LA PRODUCTION LAITIÈRE (DÉCRET DU 7 DÉCEMBRE 1994) - CRITÈRES D'ATTRIBUTION [RJ1].

03-05-03-02 En vertu des dispositions combinées des articles 1er, 6, 8 et 9 du décret n° 94-1055 du 7 décembre 1994, il appartient au préfet, saisi d'une demande d'attribution de l'indemnité pour abandon définitif de la production laitière, de constater, d'une part, le montant des financements disponibles et, d'autre part, l'ordre de priorité de l'ensemble des demandes tel qu'il résulte des critères purement quantitatifs mentionnés à cet article. Le préfet est ensuite tenu, en fonction de ces constatations et sans avoir à porter une autre appréciation sur les faits de l'espèce, de faire droit à la demande ou de la rejeter.


Références :

[RJ1]

Rappr. 5 décembre 1974, Pétillon, T. p. 774, pour les conditions d'attribution applicables sous l'empire des dispositions du décret n° 86-883 du 28 juillet 1986.


Publications
Proposition de citation : CE, 25 oct. 2004, n° 252591
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: M. Edouard Crépey
Rapporteur public ?: M. Glaser

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2004:252591.20041025
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