Vu la requête, enregistrée le 29 octobre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Oscar X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler les décisions des 7 et 14 octobre 2004 par lesquelles la ministre de l'outre-mer a rejeté ses demandes de dissolution par le Président de la République de l'assemblée de la Polynésie française ;
2°) d'enjoindre au Président de la République de soumettre au Conseil des ministres dans un délai de 15 jours un projet de décret procédant à la dissolution de ladite assemblée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'article 74 de la Constitution ;
Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-François Debat, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. X...,
- les conclusions de Mme Marie-Hélène Mitjavile, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que le président de la Polynésie française a saisi le Président de la République de deux demandes formées respectivement les 6 et 12 octobre 2004 tendant à ce que celui-ci prononce la dissolution de l'assemblée de la Polynésie française par application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 157 de la loi organique du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ; que la requête de M. X... doit être regardée comme tendant à l'annulation des décisions des 7 et 14 octobre 2004 par lesquelles la ministre de l'outre-mer a rejeté respectivement chacune de ces demandes ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir présentée par la ministre de l'outre-mer ;
Considérant qu'aux termes de l'article 156 de la loi organique du 27 février 2004 : L'assemblée de la Polynésie française peut mettre en cause la responsabilité du gouvernement de la Polynésie française par le vote d'une motion de censure… L'adoption de la motion de censure met fin aux fonctions du gouvernement de la Polynésie française. Celui-ci assure toutefois l'expédition des affaires courantes jusqu'à l'élection du nouveau président de la Polynésie française. ; qu'aux termes de son article 157 : Lorsque le fonctionnement des institutions de la Polynésie française se révèle impossible, l'assemblée de la Polynésie française peut être dissoute par décret motivé du Président de la République délibéré en conseil des ministres, après avis du président de l'assemblée de la Polynésie française et du président de la Polynésie française./ L'assemblée de la Polynésie française peut également être dissoute, par décret du Président de la République délibéré en conseil des ministres, à la demande du gouvernement de la Polynésie française… ;
En ce qui concerne la légalité de la décision de la ministre de l'outre-mer du 7 octobre 2004 :
Considérant, en premier lieu, que le refus de prendre un décret n'a pas à être pris par décret ; que, dès lors, la ministre de l'outre-mer, sur le rapport de laquelle aurait dû, le cas échéant, en application des dispositions précitées, être pris un décret portant dissolution de l'assemblée de la Polynésie française, était compétente pour prendre la décision du 7 octobre 2004, comme d'ailleurs celle du 12 octobre 2004, par laquelle elle a rejeté la demande tendant à cette dissolution présentée par le président de la Polynésie française au Président de la République ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des termes mêmes du deuxième alinéa de l'article 157 de la loi organique que le Président de la République n'est pas tenu de faire droit à la demande du gouvernement de la Polynésie française de dissoudre l'assemblée de cette collectivité ; qu'il lui appartient alors, en toute hypothèse, d'apprécier l'opportunité de cette dissolution ;
Considérant, en troisième lieu, que pour rejeter la demande de dissolution dont elle était saisie, la ministre de l'outre-mer s'est fondée sur le fonctionnement normal des institutions de la Polynésie française, sur le caractère récent de l'élection de l'assemblée de cette collectivité et enfin sur l'intérêt d'attendre l'issue du contentieux formé devant le Conseil d'Etat contre les opérations électorales du 23 mai 2004 ; qu'en fondant sa décision sur de tels motifs, elle n'a commis, dans l'appréciation de l'opportunité d'une dissolution au titre du deuxième alinéa de l'article 157 de la loi organique, ni erreur de droit ni erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision de la ministre de l'outre-mer du 14 octobre 2004 :
Considérant qu'à la date du 12 octobre 2004 à laquelle le président de la Polynésie française a saisi le Président de la République d'une seconde demande de dissolution de l'assemblée de cette collectivité, une motion de censure avait mis fin aux fonctions du gouvernement de la Polynésie française dont la compétence se trouvait ainsi limitée à l'expédition des affaires courantes ; que ce gouvernement n'était donc pas compétent à cette date pour solliciter du Président de la République la dissolution de l'assemblée de la Polynésie française ; que dès lors, la ministre de l'outre-mer était tenue de rejeter cette demande ; qu'en conséquence, les moyens articulés par M. X... contre cette décision sont inopérants ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de la requête de M. X... dirigées contre les décisions des 7 et 14 octobre 2004 de la ministre de l'outre-mer doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à ce que le Conseil d'Etat enjoigne au Président de la République de prononcer la dissolution de l'assemblée de la Polynésie française :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public… prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ;
Considérant que la présente décision, qui rejette les conclusions de M. X..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par ce dernier sont irrecevables ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Oscar X..., au président de l'assemblée de la Polynésie française, au président de la Polynésie française, à la ministre de l'outre-mer et au Premier ministre.