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20/04/2005 | FRANCE | N°260223

France | France, Conseil d'État, 6eme sous-section jugeant seule, 20 avril 2005, 260223


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 12 septembre 2003, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 17 juillet 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 3 juillet 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Lofti X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Paris ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenn

e de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 4...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 12 septembre 2003, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 17 juillet 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 3 juillet 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Lofti X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Paris ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mlle Maud Vialettes, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1°) Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et qu'il n'est pas contesté, qu'à la date de l'arrêté attaqué, M. X, de nationalité algérienne, n'avait pas été en mesure de justifier de son entrée régulière en France et n'était titulaire d'aucun titre de séjour ; que, par suite, il entrait dans le cas prévu au 1° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut ordonner la reconduite à la frontière d'un étranger ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du PREFET DE POLICE du 3 juillet 2003, prononçant la reconduite à la frontière de M. X, comportait, dans les termes où il était rédigé, une décision distincte, fixant l'Algérie comme pays de destination ; que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur les risques encourus par M. X en cas de retour dans son pays d'origine et sur les liens qui l'unissaient à un ressortissant français pour annuler, pour erreur manifeste d'appréciation, l'arrêté du 3 juillet 2003 dans son intégralité ;

Considérant, d'une part, que le moyen tiré de ce que M. X courrait des risques en cas de retour dans son pays d'origine est inopérant à l'encontre de l'arrêté attaqué en tant qu'il décide la reconduite à la frontière de l'intéressé ;

Considérant, d'autre part, que si M. X fait valoir qu'il vit depuis un an avec un ressortissant français avec lequel il a pour projet de conclure un pacte civil de solidarité, il ne ressort pas des pièces du dossier, qu'eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du 3 juillet 2003 serait, dans les circonstances de l'espèce, entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Considérant que c'est, dès lors à tort, que pour prononcer l'annulation de cet arrêté, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ces deux motifs ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le tribunal administratif de Paris ;

Sur l'arrêté attaqué en tant qu'il ordonne la reconduite à la frontière de M. X ;

Considérant que compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce rappelées ci-dessus, l'arrêté attaqué ne porte pas au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et ne méconnaît donc pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en outre, que le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne est inopérant à l'encontre de la mesure de reconduite à la frontière ;

Sur l'arrêté attaqué en tant qu'il fixe l'Algérie comme pays de destination ;

Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne est inopérant à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ;

Considérant que si M. X fait état des risques qu'il encourt en cas de retour en Algérie en raison de son homosexualité et de sa profession de professeur d'éducation physique, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision attaquée l'exposerait personnellement à des peines ou traitements inhumains et dégradants et méconnaîtrait ainsi les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 3 juillet 2003 ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement en date du 7 juillet 2003 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Paris par M. X est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Lofti X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 6eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 260223
Date de la décision : 20/04/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 20 avr. 2005, n° 260223
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Bonichot
Rapporteur ?: Mlle Maud Vialettes
Rapporteur public ?: M. Guyomar

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2005:260223.20050420
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