Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 août et 2 décembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean ;Marc X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 17 juin 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté, d'une part, son appel formé à l'encontre du jugement du 28 juin 2001 du tribunal administratif d'Amiens rejetant sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1991 à 1993 et, d'autre part, sa demande tendant au sursis à exécution des articles du rôle correspondants ;
2°) statuant au fond, de le décharger des suppléments d'impôt litigieux ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des assurances ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Anne Egerszegi, chargée des fonctions d'Auditeur,
- les observations de la SCP Le Griel, avocat de M. X,
- les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité de la société Sometam, dont il présidait le conseil d'administration, M. X a été assujetti, au titre des années 1991 à 1993, à des suppléments d'impôt sur le revenu fondés sur la réintégration dans son revenu imposable des cotisations de retraite et de prévoyance complémentaires versées par la société dans le cadre d'un contrat de groupe souscrit au bénéfice des cadres de direction ; que M. X se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 17 juin 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 28 juin 2001 du tribunal administratif d'Amiens rejetant sa demande en décharge des suppléments d'impôt litigieux ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête ;
Considérant qu'aux termes de l'article 82 du code général des impôts : Pour la détermination des bases d'imposition, il est tenu compte du montant net des traitements, indemnités et émoluments, salaires, pensions et rentes viagères, ainsi que de tous les avantages en argent ou en nature accordés aux intéressés (…) ; qu'aux termes de l'article 83 du même code dans sa rédaction alors applicable : Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés : 1° Les cotisations de sécurité sociale ; (…) 2° Les cotisations ou les primes versées aux organismes de retraite et de prévoyance complémentaires auxquels le salarié est affilié à titre obligatoire (…) ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que si le contrat de retraite et de prévoyance complémentaires souscrit par un employeur s'applique de plein droit à la totalité ou à une catégorie déterminée de ses salariés, les cotisations ou les primes versées par l'employeur en exécution de ce contrat ne sont pas au nombre des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés aux salariés ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Sometam a souscrit un contrat de retraite et de prévoyance complémentaires au profit de ses cadres de direction ; que les cadres de direction constituent une catégorie déterminée de salariés ; qu'il suit de là qu'en refusant à M. X le bénéfice des dispositions du 2° de l'article 83 du code général des impôts au seul motif qu'il était, à la date de souscription du contrat, le seul cadre de direction de la société Sometam et donc la seule personne susceptible de bénéficier des avantages de ce contrat, la cour administrative d'appel de Douai a commis une erreur de droit ; que son arrêt doit, pour ce motif, être annulé ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte des stipulations du contrat de retraite et de prévoyance complémentaires conclu par la société Sometam que le régime s'applique de plein droit à la catégorie des cadres de direction ; que sont, à cet égard, sans incidence la circonstance que l'assureur se réserve la possibilité de refuser ou de limiter certaines garanties aux personnes qui constitueraient un risque aggravé ou la circonstance que l'assuré doive remplir un bulletin d'affiliation, afin de satisfaire aux dispositions, dans leur rédaction alors en vigueur, de l'article L. 132-2 du code des assurances, applicable notamment aux contrats d'assurance de groupe à assurance obligatoire, en vertu desquelles l'assurance en cas de décès contracté par un tiers sur la tête de l'assuré est nulle, si ce dernier n'y a pas donné son consentement par écrit (…) ; qu'il suit de là que les cotisations versées par la société Sometam en exécution de ce contrat ne peuvent, en application du 2° de l'article 83 du code général des impôts, être comprises dans les revenus imposables de M. X ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1991 à 1993 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 17 juin 2003 de la cour administrative d'appel de Douai et le jugement du 28 juin 2001 du tribunal administratif d'Amiens sont annulés.
Article 2 : M. X est déchargé des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1991 à 1993.
Article 3 : L'Etat versera à M. X la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Marc X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.