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27/07/2009 | FRANCE | N°309157

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 27 juillet 2009, 309157


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 septembre et 5 décembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMPAGNIE D'ASSURANCES AREAS DOMMAGES, anciennement dénommée CAISSE MUTUELLE D'ASSURANCES ET DE PREVOYANCE, dont le siège est 47-49 rue de Miromesnil à Paris (75380 Cedex 08) ; la COMPAGNIE D'ASSURANCES AREAS DOMMAGES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 3 juillet 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 28

juin 2005 du tribunal administratif de Paris rejetant ses demandes t...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 septembre et 5 décembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMPAGNIE D'ASSURANCES AREAS DOMMAGES, anciennement dénommée CAISSE MUTUELLE D'ASSURANCES ET DE PREVOYANCE, dont le siège est 47-49 rue de Miromesnil à Paris (75380 Cedex 08) ; la COMPAGNIE D'ASSURANCES AREAS DOMMAGES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 3 juillet 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 28 juin 2005 du tribunal administratif de Paris rejetant ses demandes tendant à la réduction des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1995, 1996, 1998, 1999 et 2001 et, d'autre part, à l'obtention des réductions sollicitées ;

2°) réglant l'affaire au fond, de lui accorder les réductions sollicitées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 80-10 du 10 janvier 1980 ;

Vu les décrets n° 94-481 et n° 94-482 du 8 juin 1994 et n° 95-153 du 7 février 1995 modifiant le plan comptable particulier à l'assurance et à la capitalisation ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Benoit Bohnert, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de la COMPAGNIE D'ASSURANCES AREAS DOMMAGES,

- les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de la COMPAGNIE D'ASSURANCES AREAS DOMMAGES ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la COMPAGNIE D'ASSURANCES AREAS DOMMAGES, société d'assurance mutuelle régie par le code des assurances, a saisi l'administration fiscale, sur le fondement des dispositions de l'article 1647 B sexies du code général des impôts relatives au plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée, de réclamations tendant à l'obtention d'un dégrèvement partiel des cotisations mises à sa charge pour cette taxe au titre des années 1995, 1996, 1998 1999 et 2001 ; que, dans le cadre de l'instruction de ces réclamations, l'administration a estimé qu'il y avait lieu d'inclure dans le calcul de la valeur ajoutée produite par cette société les plus et moins-values de cession de valeurs mobilières de placements constatées au cours de chacun des exercices susmentionnés ; qu'à la suite de ces rectifications, l'administration a rejeté les demandes de dégrèvement introduites par la société au titre des années 1995, 1996 et 1998, le montant résultant du plafonnement à 4 % de la valeur ajoutée produite par l'entreprise pour chacune de ces années, tel que calculé par le service, étant supérieur à celui des cotisations de taxe professionnelle éligibles à ce plafonnement, et n'a que partiellement fait droit aux réclamations visant les cotisations de taxe professionnelle des années 1999 et 2001 ; que la COMPAGNIE D'ASSURANCES AREAS DOMMAGES se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 3 juillet 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 28 juin 2005 du tribunal administratif de Paris rejetant ses demandes tendant à la réduction, au titre du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée, des cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1995, 1996, 1998, 1999 et 2001 ;

Considérant, en premier lieu, qu'en jugeant que la circonstance que les courriers par lesquels l'administration a notifié le rejet partiel ou total des réclamations de la COMPAGNIE D'ASSURANCES AREAS DOMMAGES comportaient des éléments chiffrés erronés était sans influence sur la régularité du rejet de ces réclamations et sur le bien-fondé des impositions en litige, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 310-1 du code des assurances : Le contrôle de l'Etat s'exerce dans l'intérêt des assurés, souscripteurs et bénéficiaires de contrats d'assurance et de capitalisation. Sont soumises à ce contrôle : / 1° les entreprises qui sous forme d'assurance directe contractent des engagements dont l'exécution dépend de la durée de la vie humaine, s'engagent à verser un capital en cas de mariage ou de naissance d'enfants, ou font appel à l'épargne en vue de la capitalisation et contractent à cet effet des engagements déterminés ; / 2° les entreprises qui sous forme d'assurance directe couvrent les risques de dommages corporels liés aux accidents et à la maladie ; / 3° les entreprises qui sous forme d'assurance directe couvrent d'autres risques y compris ceux liés à une activité d'assistance (...) ; qu'aux termes de l'article R. 331-1 du même code : Les engagements réglementés dont les entreprises mentionnées à l'article L. 310-1 (...) doivent, à toute époque, être en mesure de justifier l'évaluation sont les suivants : / 1° Les provisions techniques suffisantes pour le règlement intégral de leurs engagements vis-à-vis des assurés, des entreprises réassurées et bénéficiaires de contrats ; / 2° Les postes du passif correspondant aux autres créances privilégiées ; / 3° Les dépôts de garantie des agents, des assurés et des tiers, s'il y a lieu ; / 4° Une réserve d'amortissement des emprunts pour les entreprises d'assurance ; / 5° Une provision de prévoyance en faveur des employés et agents destinée à faire face aux engagements pris par l'entreprise envers son personnel et ses collaborateurs (...) ; que selon l'article R. 332-1 du même code : 1. Les engagements réglementés mentionnés à l'article R. 331-1 doivent, à toute époque, être représentés par des actifs équivalents (...) ; que les entreprises d'assurance mentionnées à l'article L. 310-1 représentent leurs engagements réglementés mentionnés à l'article R. 331-1 au moyen de valeurs mobilières et titres assimilés, actifs immobiliers, prêts et dépôts dont la liste est mentionnée à l'article R. 332-2 du même code ; qu'il résulte de la combinaison de ces textes que la gestion des actifs mentionnés par ces dispositions procède de l'essence même de l'activité d'assurance, les placements dont il s'agit ayant pour objet de garantir le règlement intégral des engagements pris envers les assurés ; qu'il ressort des pièces du dossier que la COMPAGNIE D'ASSURANCES AREAS DOMMAGES était, en sa qualité de société d'assurance mutuelle régie par le code des assurances, soumise aux obligations prudentielles décrites ci-dessus ; qu'il suit de là, d'une part, qu'en estimant, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que les cessions de valeurs mobilières réalisées par la société requérante au cours des années en litige relevaient de l'activité ordinaire d'une société d'assurances telle qu'elle est définie par son objet social, et, d'autre part, qu'en regardant comme inopérant, dans les circonstances de l'espèce, l'argument tiré par la société requérante de la spécificité de ses statuts de société mutuelle d'assurance, la cour administrative d'appel de Paris n'a ni inexactement qualifié les faits de l'espèce, ni entaché d'une erreur de droit son arrêt, lequel est suffisamment motivé ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : I. Sur demande du redevable, la cotisation de taxe professionnelle de chaque entreprise est plafonnée en fonction de la valeur ajoutée produite au cours de l'année au titre de laquelle l'imposition est établie ou au cours du dernier exercice de douze mois clos au cours de cette même année lorsque cet exercice ne coïncide pas avec l'année civile. La valeur ajoutée est définie selon les modalités prévues au II (...) ; que, selon le deuxième alinéa du I. précité, le taux de plafonnement était fixé, pour les impositions établies au titre des années 1995, 1996, 1998, 1999 et 2001, à 4 % pour les entreprises dont le chiffre d'affaires excédait 500 millions de francs ; qu'aux termes du II. de cet article : 1. La valeur ajoutée mentionnée au I est égale à l'excédent hors taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance de tiers constaté pour la période définie au I. (...) / 4. En ce qui concerne les entreprises d'assurance, de capitalisation et de réassurance de toute nature, la production est égale à la différence entre : / D'une part, les primes ou cotisations ; les produits financiers ; les produits accessoires ; les subventions d'exploitation ; les ristournes, rabais et remises obtenus ; les commissions et participations reçues des réassureurs ; les travaux faits par l'entreprise pour elle-même ; les provisions techniques au début de l'exercice ; / Et, d'autre part, les prestations ; les réductions et ristournes de primes ; les frais financiers ; les provisions techniques à la fin de l'exercice (...) ; que ces dispositions fixent la liste limitative des catégories d'éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée en fonction de laquelle sont plafonnées les cotisations de taxe professionnelle ; que pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l'une de ces catégories, il y a lieu de se reporter aux normes comptables dans leur rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition concernée ; que si, antérieurement à sa modification entrée en vigueur le 1er janvier 1995, le plan comptable particulier à l'assurance et à la capitalisation classait les moins et les plus-values sur cession d'éléments d'actif dans le compte 84 pertes et profits exceptionnels et comportait un compte 77 produits financiers, le même plan, modifié à compter du 1er janvier 1995 par les décrets susvisés des 8 juin 1994 et 7 février 1995, classe les pertes sur réalisation et réévaluation de placements dans le compte 66 charges des placements et les profits provenant de la réalisation ou de la réévaluation des placements dans le compte 76 produits des placements, et comporte les sous-comptes 760 et 764 intitulés respectivement revenus des placements et profits provenant de la réalisation ou la réévaluation des placements ; qu'il suit de là qu'en se fondant sur le constat que les cessions de valeurs mobilières en litige étaient effectuées pour les besoins de l'activité d'assurances de la société pour juger, d'une part, que les plus et moins-values constatées à l'occasion de ces opérations, devaient être regardées, alors même que ledit plan prescrit la comptabilisation des revenus de placement et des revenus tirés de la réalisation de ces placements dans deux comptes distincts, comme des produits et frais financiers au sens des dispositions précitées de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, et être pris en compte, à ce titre, en application des dispositions précitées du 4 du II de ce même article pour la détermination de la production des exercices concernés, et, d'autre part, que la COMPAGNIE D'ASSURANCES AREAS DOMMAGES ne pouvait utilement se prévaloir de ce que le plan comptable des sociétés d'assurances en vigueur jusqu'au 31 décembre 1994 prescrivait la comptabilisation des plus-values et moins-values de cession de valeurs mobilières dans les produits et charges exceptionnels, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant, en quatrième lieu, que le moyen invoqué par la COMPAGNIE D'ASSURANCES AREAS DOMMAGES et tiré de ce que les gains constatés lors de la cession de valeurs immobilières de placement ne pouvaient être regardés comme des produits financiers est nouveau en cassation ; que, n'étant pas d'ordre public, il n'est pas recevable ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration ; que le rejet, par l'administration fiscale, des réclamations présentées par la société requérante tendant au plafonnement de ses cotisations de taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée ne constituait pas un rehaussement d'impositions antérieures au sens des dispositions précitées et n'entrait, par suite, pas dans le champ d'application de ces dispositions ; que ce motif d'ordre public, qui n'implique aucune appréciation de fait de la part du juge de cassation, doit être substitué à celui retenu par la cour pour écarter le moyen invoqué par la société requérante ; qu'il suit de là que la cour n'a, en tout état de cause, ni insuffisamment motivé son arrêt, ni commis d'erreur de droit en jugeant que la SA LA FEDERATION CONTINENTALE ne pouvait se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des instructions administratives qu'elle invoquait ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMPAGNIE D'ASSURANCES AREAS DOMMAGES n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par la COMPAGNIE D'ASSURANCES AREAS DOMMAGES au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la COMPAGNIE D'ASSURANCES AREAS DOMMAGES est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la COMPAGNIE D'ASSURANCES AREAS DOMMAGES et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.


Synthèse
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 309157
Date de la décision : 27/07/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 2009, n° 309157
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Benoit Bohnert
Rapporteur public ?: M. Collin Pierre
Avocat(s) : SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:309157.20090727
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