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09/07/2010 | FRANCE | N°322079

France | France, Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 09 juillet 2010, 322079


Vu la requête, enregistrée le 31 octobre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SOCIETE LABORATOIRES NEGMA, dont le siège est 10, rue Paul Dautier à Velizy Villacoublay (78140), représentée par son président en exercice ; la SOCIETE LABORATOIRES NEGMA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 4 septembre 2008 par laquelle le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) a délivré à la société Qualimed une autorisation de mise sur le marché pour la

spécialité Diacéréine Qualimed ;

2°) d'enjoindre à l'Agence française de séc...

Vu la requête, enregistrée le 31 octobre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SOCIETE LABORATOIRES NEGMA, dont le siège est 10, rue Paul Dautier à Velizy Villacoublay (78140), représentée par son président en exercice ; la SOCIETE LABORATOIRES NEGMA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 4 septembre 2008 par laquelle le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) a délivré à la société Qualimed une autorisation de mise sur le marché pour la spécialité Diacéréine Qualimed ;

2°) d'enjoindre à l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé de ne pas inscrire cette spécialité générique au registre des spécialités génériques ;

3°) de mettre à la charge de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 2008-435 du 6 mai 2008 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Laure Bédier, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Roger, Sevaux, avocat de la SOCIETE LABORATOIRES NEGMA et de Me Haas, avocat de la société Qualimed,

- les conclusions de M. Luc Derepas, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Roger, Sevaux, avocat de la SOCIETE LABORATOIRES NEGMA et à Me Haas, avocat de la société Qualimed ;

Considérant que, par une décision en date du 4 septembre 2008, le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé a délivré à la société Qualimed une autorisation de mise sur le marché pour la spécialité générique Diacéréine Qualimed ; que la SOCIETE LABORATOIRES NEGMA, titulaire depuis 1992 d'une autorisation de mise sur le marché pour la spécialité pharmaceutique ART 50 mg, dont la substance active est la diacéréine, demande l'annulation pour excès de pouvoir de cette autorisation ;

Sur la légalité externe de la décision attaquée :

Considérant qu'en vertu de l'article R. 5121-50 du code de la santé publique, les décisions d'autorisation de mise sur le marché sont prises par le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé après avis de la commission d'autorisation de mise sur le marché ; qu'il ressort des pièces du dossier que cette commission a rendu, dans sa séance du 27 mars 2008, après avoir examiné le compte-rendu du groupe de travail sur les médicaments génériques n° 146 du 21 février 2008, un avis sur la demande d'autorisation présentée par la société Qualimed ; que le quorum prévu par le règlement intérieur de cette commission était atteint ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les membres de la commission n'auraient pas reçu une convocation pour cette séance sept jours au moins avant celle-ci, ni que les conclusions du groupe de travail sur les médicaments génériques, créé par une décision du 17 septembre 1997 publiée au Journal officiel, et qui a instruit préalablement ces demandes, n'auraient pas été annexées à cette convocation ; que, par suite, les moyens tirés de la méconnaissance du règlement intérieur de la commission d'autorisation de mise sur le marché doivent également, en tout état de cause, être écartés ;

Considérant par ailleurs que si l'article R. 5121-29 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue du décret du 6 mai 2008 et applicable en l'espèce dès lors que les décisions attaquées sont postérieures à l'entrée en vigueur de ce décret, prévoit que le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé peut, après avis de la commission d'autorisation de mise sur le marché, et dans certaines hypothèses, exonérer le demandeur d'une autorisation de mise sur le marché d'une spécialité générique de fournir les études de biodisponibilité prévues à l'article L. 5121-1, il ressort des pièces du dossier qu'aucune dispense n'a été accordée en l'espèce ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la commission d'autorisation de mise sur le marché aurait dû également se prononcer sur l'octroi de cette dispense ne peut qu'être écarté ;

Sur la légalité interne de la décision attaquée :

Considérant, d'une part, qu'en vertu du a) du 5° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique, a le caractère d'une spécialité générique d'une spécialité de référence, sans préjudice des dispositions des articles L. 611-2 et suivants du code de la propriété intellectuelle, (...) celle qui a la même composition qualitative et quantitative en principe actif, la même forme pharmaceutique et dont la bioéquivalence avec la spécialité de référence est démontrée par des études de biodisponibilité appropriées (...) ; qu'aux termes de l'article R. 5121-1 du même code : Pour l'application du présent livre, on entend par : 1° Biodisponibilité, la vitesse et l'intensité de l'absorption dans l'organisme, à partir d'une forme pharmaceutique, du principe actif ou de sa fraction thérapeutique destinée à devenir disponible au niveau des sites d'action ; / 2° Bioéquivalence, l'équivalence des biodisponibilités (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour qu'une entreprise puisse obtenir l'identification d'une spécialité qu'elle exploite en qualité de générique d'une spécialité de référence, ces deux spécialités doivent avoir la même composition qualitative et quantitative en principe actif ainsi que la même forme pharmaceutique et cette entreprise doit en outre démontrer, par des études de biodisponibilité appropriées, que la vitesse et l'intensité de l'absorption dans l'organisme du principe actif de sa spécialité ou de la fraction thérapeutique de celui-ci sont équivalentes à celles de la spécialité de référence ;

Considérant, d'autre part, que l'article L. 5121-9 du code de la santé publique prévoit que l'autorisation de mise sur le marché d'une spécialité pharmaceutique est refusée, notamment, lorsque la documentation et les renseignements fournis ne sont pas conformes au dossier qui doit être présenté à l'appui de la demande ; qu'en vertu des dispositions des articles R. 5121-21 et R. 5121-25 du même code, la demande d'autorisation de mise sur le marché doit être accompagnée d'un dossier comprenant notamment les données chimiques, pharmaceutiques et biologiques ainsi que les résultats des essais précliniques et des essais cliniques ; que, cependant, aux termes de l'article R. 5121-28 du même code : Par dérogation à l'article R. 5121-25 : 1° Lorsque la demande porte sur une spécialité générique d'une spécialité de référence qui est ou a été autorisée depuis au moins huit ans en France, le dossier fourni à l'appui de la demande comprend, outre les données chimiques, pharmaceutiques et biologiques, les études de biodisponibilité démontrant la bioéquivalence à la spécialité de référence. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société Qualimed a produit, à l'appui de sa demande, des études de biodisponibilité de sa spécialité concluant à une équivalence avec la spécialité de référence ART 50 mg exploitée par la SOCIETE LABORATOIRES NEGMA ; que si le taux de purification des produits sur lesquels ont porté ces études était moins élevé que le taux de purification de la spécialité de référence, les autorisations de mise sur le marché n'ont été accordées qu'à la condition que ce taux soit aligné sur celui de ART 50 mg ; que si cette contrainte implique une modification du procédé de purification, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment des nombreux tests réalisés par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, qu'elle se traduirait par une modification des caractéristiques physiques de la substance active, et notamment par l'apparition d'un phénomène de polymorphisme, de sorte que la biodisponibilité de la substance active en serait affectée ; que, dans ces conditions, la substance active utilisée dans les études de biodisponibilité produites par la société Qualimed doit être regardée, alors même que le taux de purification initial et le fournisseur de la matière première étaient différents de ceux de la spécialité de référence ART 50 mg, comme ayant la même composition qualitative et quantitative en principe actif que cette dernière ; que c'est donc sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, qui n'était dès lors pas tenu d'exiger la production d'autres études de biodisponibilité, a pu estimer que la spécialité en litige était bioéquivalente à la spécialité de référence, autorisée depuis au moins huit ans en France, et que, par suite, les conditions dérogatoires de délivrance des autorisations de mise sur le marché, prévues à l'article R. 5121-28 du code de la santé publique, étaient remplies ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE LABORATOIRES NEGMA n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du 4 septembre 2008 par laquelle le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé a délivré à la société Qualimed une autorisation de mise sur le marché pour la spécialité Diacéréine Qualimed ; que ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les conclusions de la SOCIETE LABORATOIRES NEGMA tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, en application de ces dispositions, au titre des frais exposés dans la présente instance, ne peuvent qu'être rejetées, dès lors qu'en application de l'article L. 5322-2 du code de la santé publique, la décision en litige dans la présente affaire a été prise par le directeur général de l'agence au nom de l'Etat ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SOCIETE LABORATOIRES NEGMA le versement à la société Qualimed de la somme de 3 000 euros au titre des mêmes dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la SOCIETE LABORATOIRES NEGMA est rejetée.

Article 2 : La SOCIETE LABORATOIRES NEGMA versera à la société Qualimed la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE LABORATOIRES NEGMA, à l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé et à la société Qualimed.


Synthèse
Formation : 1ère sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 322079
Date de la décision : 09/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 09 jui. 2010, n° 322079
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Chantepy
Rapporteur ?: Mme Laure Bédier
Rapporteur public ?: M. Derepas Luc
Avocat(s) : HAAS ; SCP ROGER, SEVAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:322079.20100709
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