La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/07/2010 | FRANCE | N°335132

France | France, Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 23 juillet 2010, 335132


Vu le pourvoi, enregistré le 30 décembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour la REGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS, dont le siège social est 54, quai de la Rapée à Paris (75012) et la SA PROMO METRO, dont le siège social est 35, boulevard de Sébastopol à Paris (75001) ; la REGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS et la SA PROMO METRO demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 14 décembre 2009 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande présentée sur le fondement de

l'article L. 521-3 du code de justice administrative et tendant à ce que...

Vu le pourvoi, enregistré le 30 décembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour la REGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS, dont le siège social est 54, quai de la Rapée à Paris (75012) et la SA PROMO METRO, dont le siège social est 35, boulevard de Sébastopol à Paris (75001) ; la REGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS et la SA PROMO METRO demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 14 décembre 2009 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande présentée sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative et tendant à ce que soit ordonnée l'expulsion de la société Parfumerie Douglas France des locaux qu'elle occupe dans la station du réseau express régional de La Défense, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard ;

2°) statuant en référé, d'ordonner l'expulsion de la société Parfumerie Douglas ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Nicolas Agnoux, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de Me Luc-Thaler, avocat de la REGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS et de la SA PROMO METRO et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la société Parfumerie Douglas France,

- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Luc-Thaler, avocat de la REGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS et de la SA PROMO METRO et à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la société Parfumerie Douglas France ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Versailles que par une convention en date du 21 mai 2003, la SA PROMO METRO a concédé à la société Parfumerie Douglas France l'occupation privative, pour une durée de six ans, d'un local d'une surface de 81 m² situé sur le domaine public dans les dépendances de la station La Défense sur la ligne A du réseau express régional, en l'autorisant à y exploiter un commerce contre paiement d'une redevance ; qu'à l'expiration de cette convention, la SA PROMO METRO, après avoir sollicité les offres de plusieurs sociétés, dont la société Parfumerie Douglas France, en vue de la passation d'une convention domaniale portant sur le même local et sur un local contigu d'une surface de 41 m² auquel il devait être joint, a informé cette société qu'elle avait retenu une autre offre et l'a invitée à quitter les lieux dans un délai finalement porté au 31 octobre 2009 ; que, la société s'étant maintenue dans les lieux à l'issue de ce délai, la REGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS et la SA PROMO METRO ont saisi, sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles d'une demande d'expulsion ; qu'elles se pourvoient en cassation contre l'ordonnance du 14 décembre 2009 rejetant leur demande ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-3 du code de justice administrative : En cas d'urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l'absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes mesures utiles sans faire obstacle à l'exécution d'aucune mesure administrative ; que lorsque le juge des référés est saisi, sur le fondement de ces dispositions, d'une demande d'expulsion d'un occupant du domaine public, il lui appartient de rechercher si, au jour où il statue, cette demande présente un caractère d'urgence et ne se heurte à aucune contestation sérieuse ; que, s'agissant de cette dernière condition, dans le cas où la demande d'expulsion fait suite à la décision du gestionnaire du domaine de retirer ou de refuser de renouveler le titre dont bénéficiait l'occupant et où, alors que cette décision exécutoire n'est pas devenue définitive, l'occupant en conteste devant lui la validité, le juge des référés doit rechercher si, compte tenu tant de la nature que du bien-fondé des moyens ainsi soulevés à l'encontre de cette décision, la demande d'expulsion doit être regardée comme se heurtant à une contestation sérieuse ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que la société Parfumerie Douglas France contestait la validité de la décision, non encore définitive, par laquelle la SA PROMO METRO lui avait indiqué qu'elle avait retenu un autre candidat à l'issue de l'appel d'offres restreint portant sur une nouvelle convention domaniale devant prendre effet à l'issue de la convention conclue en 2003 avec la société Parfumerie Douglas France, laquelle ne prévoyait aucune clause de reconduction tacite; qu'en jugeant que le moyen tiré de ce que la décision d'éviction procédait d'une consultation irrégulière était de nature à faire regarder la demande d'expulsion comme se heurtant à une contestation sérieuse, alors que la société Parfumerie Douglas France ne disposait plus, à la date de la décision litigieuse, d'aucun titre l'autorisant à occuper le domaine public, de sorte que l'illégalité de la décision attaquée était sans incidence sur le litige qui lui était soumis, le juge des référés a commis une erreur de droit ; que la REGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS et la SA PROMO METRO sont fondées, pour ce motif, à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;

Considérant qu'il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

Considérant que la SA PROMO METRO a produit au dossier la convention conclue le 13 janvier 1992 avec la REGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS et lui donnant mandat pour la gestion des locaux commerciaux du domaine public ; que la société Parfumerie Douglas France n'est, par suite, pas fondée à soutenir que, faute d'un tel mandat, la SA PROMO METRO n'aurait pas qualité pour agir ;

Considérant, d'une part, qu'il n'est pas contesté que la société Parfumerie Douglas France n'est plus titulaire d'aucun titre l'autorisant à occuper la parcelle litigieuse depuis le 31 mai 2009, date à laquelle est arrivée à échéance la convention domaniale conclue le 21 mai 2003, qui ne prévoit aucune clause de reconduction tacite ; qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, le moyen tiré de l'illégalité de la décision par laquelle la SA PROMO METRO a rejeté la candidature de la société Parfumerie Douglas France à l'issue de l'appel d'offres restreint auquel elle a procédé en vue de la conclusion d'une nouvelle convention domaniale est inopérant pour contester le bien-fondé de la demande d'expulsion ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que le maintien irrégulier de la société Parfumerie Douglas France dans les lieux fait obstacle à la réalisation des travaux rendus nécessaires par le projet de réunir les deux parcelles contiguës dans le cadre de la nouvelle concession domaniale à conclure ; que, dans ces conditions, tant l'urgence que l'utilité de la mesure d'expulsion demandée par la REGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS et la SA PROMO METRO est justifiée sans que l'intéressée puisse utilement faire valoir que la convention avec le nouvel occupant n'aurait pas encore été signée ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre à la société Parfumerie Douglas France d'évacuer la parcelle qu'elle occupe irrégulièrement dans les dépendances de la station La Défense sur la ligne A du réseau express régional, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la notification de la présente décision ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la REGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS et de la SA PROMO METRO, qui ne sont pas, dans la présence instance, les parties perdantes, la somme que demande la société Parfumerie Douglas France ; qu'en revanche, il y a lieu, sur le fondement des mêmes dispositions, de mettre à la charge de la société Parfumerie Douglas France le versement conjointement à la REGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS et à la SA PROMO METRO de la somme globale de 3 000 euros ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Versailles du 14 décembre 2009 est annulée.

Article 2 : Il est enjoint à la société Parfumerie Douglas France d'évacuer la parcelle qu'elle occupe dans les dépendances de la station La Défense sur la ligne A du réseau express régional sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 3 : La société Parfumerie Douglas France versera conjointement à la REGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS et à la SA PROMO METRO une somme globale de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les conclusions de la société Parfumerie Douglas France présentées sur le fondement des mêmes dispositions sont rejetées.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par la REGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS et la SA PROMO METRO est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la REGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS, à la SA PROMO METRO et à la société Parfumerie Douglas France.


Synthèse
Formation : 8ème et 3ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 335132
Date de la décision : 23/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

DOMAINE - DOMAINE PUBLIC - PROTECTION DU DOMAINE - PROTECTION CONTRE LES OCCUPATIONS IRRÉGULIÈRES - DEMANDE D'EXPULSION D'UN OCCUPANT DU DOMAINE PUBLIC PRÉSENTÉE AU JUGE DES RÉFÉRÉS (ARTICLE L - 521-3 DU CJA) - CONDITION - ABSENCE DE CONTESTATION SÉRIEUSE [RJ1] - OCCUPANT FAISANT VALOIR L'ILLÉGALITÉ DE LA DÉCISION DU GESTIONNAIRE DU DOMAINE REJETANT SA CANDIDATURE EN VUE DE LA CONCLUSION D'UNE NOUVELLE CONVENTION DOMANIALE - MOYEN INOPÉRANT - DÈS LORS QU'À LA DATE DE CETTE DÉCISION - IL NE POUVAIT PLUS SE PRÉVALOIR D'AUCUN TITRE D'OCCUPATION DU DOMAINE.

24-01-03-02 Lorsque le juge des référés est saisi, sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative (CJA), d'une demande d'expulsion d'un occupant du domaine public, il lui appartient de rechercher si, au jour où il statue, cette demande présente un caractère d'urgence et ne se heurte à aucune contestation sérieuse. S'agissant de cette dernière condition, dans le cas où la demande d'expulsion fait suite à la décision du gestionnaire du domaine de retirer ou de refuser de renouveler le titre dont bénéficiait l'occupant et où, alors que cette décision exécutoire n'est pas devenue définitive, l'occupant en conteste devant lui la validité, le juge des référés doit rechercher si, compte tenu tant de la nature que du bien-fondé des moyens ainsi soulevés à l'encontre de cette décision, la demande d'expulsion doit être regardée comme se heurtant à une contestation sérieuse. Cas d'un occupant se prévalant, en défense, de l'illégalité de la décision du gestionnaire du domaine par laquelle celui-ci a rejeté sa candidature en vue de la conclusion d'une nouvelle convention d'occupation domaniale. A la date de cette décision, l'occupant ne disposait plus d'aucun titre en raison de l'expiration de la convention d'occupation du domaine dont il était titulaire, qui ne prévoyait aucune clause tacite de reconduction. Le moyen qu'il soulève est donc inopérant.

PROCÉDURE - PROCÉDURES INSTITUÉES PAR LA LOI DU 30 JUIN 2000 - RÉFÉRÉ TENDANT AU PRONONCÉ DE TOUTES AUTRES MESURES UTILES (ART - L - 521-3 DU CODE DE JUSTICE ADMINISTRATIVE) - CONDITIONS D'OCTROI DE LA MESURE DEMANDÉE - EXPULSION D'UN OCCUPANT DU DOMAINE PUBLIC - CONDITION - ABSENCE DE CONTESTATION SÉRIEUSE [RJ1] - OCCUPANT FAISANT VALOIR L'ILLÉGALITÉ DE LA DÉCISION DU GESTIONNAIRE DU DOMAINE REJETANT SA CANDIDATURE EN VUE DE LA CONCLUSION D'UNE NOUVELLE CONVENTION DOMANIALE - MOYEN INOPÉRANT - DÈS LORS QU'À LA DATE DE CETTE DÉCISION - IL NE POUVAIT PLUS SE PRÉVALOIR D'AUCUN TITRE D'OCCUPATION DU DOMAINE.

54-035-04-03 Lorsque le juge des référés est saisi, sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, d'une demande d'expulsion d'un occupant du domaine public, il lui appartient de rechercher si, au jour où il statue, cette demande présente un caractère d'urgence et ne se heurte à aucune contestation sérieuse. S'agissant de cette dernière condition, dans le cas où la demande d'expulsion fait suite à la décision du gestionnaire du domaine de retirer ou de refuser de renouveler le titre dont bénéficiait l'occupant et où, alors que cette décision exécutoire n'est pas devenue définitive, l'occupant en conteste devant lui la validité, le juge des référés doit rechercher si, compte tenu tant de la nature que du bien-fondé des moyens ainsi soulevés à l'encontre de cette décision, la demande d'expulsion doit être regardée comme se heurtant à une contestation sérieuse. Cas d'un occupant se prévalant, en défense, de l'illégalité de la décision du gestionnaire du domaine par laquelle celui-ci a rejeté sa candidature en vue de la conclusion d'une nouvelle convention d'occupation domaniale. A la date de cette décision, l'occupant ne disposait plus d'aucun titre en raison de l'expiration de la convention d'occupation du domaine dont il était titulaire, qui ne prévoyait aucune clause tacite de reconduction. Le moyen qu'il soulève est donc inopérant.


Références :

[RJ1]

Cf. Section, 16 mai 2003, SARL Icomatex, n° 249880, p. 228.


Publications
Proposition de citation : CE, 23 jui. 2010, n° 335132
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vigouroux
Rapporteur ?: M. Nicolas Agnoux
Rapporteur public ?: Mme Escaut Nathalie
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ ; LUC-THALER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:335132.20100723
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award