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24/09/2010 | FRANCE | N°328887

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 24 septembre 2010, 328887


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 juin et 15 septembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la SOCIETE PFIZER, dont le siège est 23-25 avenue du Dr Lannelongue à Paris (75014), représentée par son vice-président juridique ; la SOCIETE PFIZER demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le ministre de la santé, de la jeunesse et des sports a rejeté sa demande tendant à l'inscription de la spécialité Ecalta sur la liste des spécialités pouvant ê

tre prises en charge par les régimes obligatoires d'assurance maladie en sus...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 juin et 15 septembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la SOCIETE PFIZER, dont le siège est 23-25 avenue du Dr Lannelongue à Paris (75014), représentée par son vice-président juridique ; la SOCIETE PFIZER demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le ministre de la santé, de la jeunesse et des sports a rejeté sa demande tendant à l'inscription de la spécialité Ecalta sur la liste des spécialités pouvant être prises en charge par les régimes obligatoires d'assurance maladie en sus des prestations d'hospitalisation prévue à l'article L. 162-22-7 du code de la sécurité sociale ;

2°) d'enjoindre au ministre chargé de la santé de procéder à cette inscription dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 10 septembre 2010, présentée par le ministre de la santé et des sports ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Christine Grenier, chargée des fonctions de Maître des requêtes,

- les conclusions de M. Luc Derepas, rapporteur public ;

Considérant qu'en application du 1° de l'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable en l'espèce, un décret en Conseil d'Etat détermine les catégories de prestations d'hospitalisation pour les activités de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie donnant lieu à une prise en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale ; qu'aux termes de l'article L. 162-22-7 du même code : L'Etat fixe la liste des spécialités pharmaceutiques bénéficiant d'une autorisation de mise sur le marché dispensées aux patients hospitalisés dans les établissements de santé mentionnés à l'article L. 162-22-6 qui peuvent être prises en charge, sur présentation des factures, par les régimes obligatoires d'assurance maladie en sus des prestations d'hospitalisation mentionnées au 1° du même article (...) ;

Considérant que la SOCIETE PFIZER demande l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre chargé de la santé sur sa demande du 19 février 2009 tendant à l'inscription de la spécialité Ecalta sur la liste mentionnée à l'article L. 162-22-7 ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 162-21-2 du code de la sécurité sociale : Il est créé, auprès des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, un conseil de l'hospitalisation. Ce conseil contribue à l'élaboration de la politique de financement des établissements de santé ainsi qu'à la détermination des objectifs de dépenses d'assurance maladie relatives aux frais d'hospitalisation. / Les décisions relatives au financement des établissements de santé, à la détermination des objectifs de dépenses d'assurance maladie relatives aux frais d'hospitalisation (...) sont prises sur la recommandation de ce conseil. / Lorsque la décision prise est différente de la recommandation du conseil, elle est motivée. En cas de carence du conseil, les ministres compétents l'informent de la décision prise et le conseil donne un avis sur la décision (...) ; que l'article R. 162-22 du même code énonce que : Sont prises sur recommandation du conseil de l'hospitalisation les décisions fixant : (...) / 6° La liste et les conditions dans lesquelles certaines spécialités pharmaceutiques et certains produits et prestations peuvent faire l'objet d'une prise en charge en sus des prestations d'hospitalisation mentionnée à l'article L. 162-22-7 (...) ; qu'en vertu de l'article R. 162-42-7, la liste des spécialités pharmaceutiques qui peuvent être facturées en sus des prestations d'hospitalisation et les conditions de leur prise en charge sont fixées par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale sur recommandation du conseil de l'hospitalisation ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions combinées que la liste prévue à l'article L. 162-22-7 précité est établie sur recommandation du conseil de l'hospitalisation et que les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale ne peuvent pas prendre de décision tendant soit à l'inscription, soit au refus d'inscription d'une spécialité pharmaceutique sur cette liste, soit à sa radiation de cette même liste, sans avoir mis le conseil de l'hospitalisation à même d'émettre, dans un délai raisonnable, une recommandation préalable ; qu'en application de l'article L. 162-21-2 précité, ce n'est qu'en cas de carence du conseil de l'hospitalisation à émettre une telle recommandation alors qu'il a été saisi dans un délai raisonnable, que les ministres compétents peuvent prendre régulièrement une telle décision, en le saisissant a posteriori pour qu'il émette un avis sur cette décision ;

Considérant qu'il est constant que le ministre chargé de la santé n'a pas saisi le conseil de l'hospitalisation de la demande de la SOCIETE PFIZER tendant à l'inscription de la spécialité Ecalta sur la liste prévue à l'article L. 162-22-7 précité, afin qu'il émette une recommandation sur cette demande ; que la décision de refus implicite née du silence gardé par l'administration sur cette demande est ainsi intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, la SOCIETE PFIZER est donc fondée à en demander l'annulation ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que la SOCIETE PFIZER demande qu'il soit enjoint au ministre de la santé et des sports de procéder à l'inscription de la spécialité Ecalta sur la liste des spécialités pouvant être prises en charge par les régimes obligatoires d'assurance maladie en sus des prestations d'hospitalisation dans le délai maximum d'un mois à compter de la notification de la présente décision ; que l'annulation de la décision contestée n'implique pas par elle-même cette inscription ; que, par suite, ces conclusions ne peuvent être accueillies ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision implicite par laquelle le ministre de la santé et des sports a rejeté la demande de la SOCIETE PFIZER tendant à l'inscription de la spécialité commercialisée par cette société sous le nom d' Ecalta sur la liste des spécialités prises en charge par les régimes obligatoires d'assurance maladie en sus des forfaits d'hospitalisation est annulée.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE PFIZER et à la ministre de la santé et des sports.


Synthèse
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 328887
Date de la décision : 24/09/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME ET PROCÉDURE - PROCÉDURE CONSULTATIVE - CONSULTATION OBLIGATOIRE - OBLIGATION DE CONSULTATION D'UN ORGANISME PRÉALABLEMENT À L'ÉDICTION DE CERTAINES DÉCISIONS - REFUS DE PRENDRE CES DÉCISIONS - INCLUSION [RJ1] - APPLICATION EN L'ESPÈCE.

01-03-02-02 Lorsqu'un texte prévoit qu'un organisme doit être obligatoirement consulté avant l'édiction des décisions qu'il énumère, cet organisme doit également être consulté préalablement au refus de prendre de telles décisions, sauf disposition contraire. En l'espèce, le conseil de l'hospitalisation, qui doit être consulté avant la fixation de la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables par la sécurité sociale en sus des prestations d'hospitalisation, prévue par l'article L. 162-22-7 du code de la sécurité sociale, aurait dû être consulté préalablement au refus du ministre chargé de la santé de modifier cette liste. Le ministre n'ayant pas procédé à cette consultation, son refus est annulé.

SÉCURITÉ SOCIALE - PRESTATIONS - PRESTATIONS D'ASSURANCE MALADIE - LISTE DES SPÉCIALITÉS PHARMACEUTIQUES REMBOURSABLES - OBLIGATION DE CONSULTATION DU CONSEIL DE L'HOSPITALISATION PRÉALABLEMENT À LA FIXATION DE CETTE LISTE (ART - R - 162-22 DU CSS) - OBLIGATION DE CONSULTATION DE CE CONSEIL AVANT UN REFUS DE MODIFICATION DE LA LISTE - EXISTENCE [RJ1].

62-04-01 L'article R. 162-22 du code de la sécurité sociale (CSS) prévoit que les décisions fixant la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables en sus des prestations d'hospitalisation, prévue à l'article L. 162-22-7 de ce code, sont prises sur la recommandation du conseil de l'hospitalisation. Cette obligation de consultation du conseil de l'hospitalisation s'impose également avant tout refus opposé à une demande de modification de la liste, soit pour y ajouter une spécialité, soit pour en radier une. Annulation du refus de modification de la liste intervenu sans cette recommandation.


Références :

[RJ1]

Cf., à propos de la liste des médicaments remboursables, 12 juin 2002, Société Janssen-Cilag, n° 231314, T. p. 590.


Publications
Proposition de citation : CE, 24 sep. 2010, n° 328887
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: Mme Christine Grenier
Rapporteur public ?: M. Derepas Luc

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:328887.20100924
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