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24/09/2010 | FRANCE | N°334005

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 24 septembre 2010, 334005


Vu la requête, enregistrée le 20 novembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Gérard B, M. Jean-Luc G, M. Jean A, M. Yves C, M. Gérard D, M. Philippe H, M. Jean-Paul F et M. Claude E, tous domiciliés à ..., ainsi que pour la CAISSE AUTONOME DE RETRAITE DES MEDECINS DE FRANCE (CARMF), dont le siège est à la même adresse ; M. B et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarit

et de la ville sur leur demande en date du 17 juillet 2009 tendant à ...

Vu la requête, enregistrée le 20 novembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Gérard B, M. Jean-Luc G, M. Jean A, M. Yves C, M. Gérard D, M. Philippe H, M. Jean-Paul F et M. Claude E, tous domiciliés à ..., ainsi que pour la CAISSE AUTONOME DE RETRAITE DES MEDECINS DE FRANCE (CARMF), dont le siège est à la même adresse ; M. B et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville sur leur demande en date du 17 juillet 2009 tendant à la modification de l'article 5 de l'arrêté du 4 juin 1959 allouant des indemnités aux administrateurs de la caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales et des sections professionnelles ;

2°) d'enjoindre au ministre, dans un certain délai à compter de la décision à intervenir, de mettre l'article 5 de cet arrêté en conformité avec les dispositions de l'article L. 231-12 du code de la sécurité sociale ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 8 septembre 2010, présentée pour M. B et autres ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et son premier protocole additionnel ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean Lessi, Auditeur,

- les observations de Me Foussard, avocat de M. B et autres,

- les conclusions de M. Luc Derepas, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Foussard, avocat de M. B et autres ;

Sur la légalité de la décision attaquée :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 231-12 du code de la sécurité sociale : Les organismes de sécurité sociale ne peuvent, en aucun cas, allouer un traitement à leurs membres du conseil ou administrateurs. Toutefois, ils leur remboursent leurs frais de déplacement. / Ils remboursent également aux employeurs des membres du conseil ou administrateurs salariés les salaires maintenus pour leur permettre d'exercer leurs fonctions pendant le temps de travail ainsi que les avantages et les charges sociales y afférents. / Les membres du conseil ou administrateurs des organismes de sécurité sociale ayant la qualité de travailleur indépendant peuvent percevoir des indemnités pour perte de leurs gains, fixées par arrêté ministériel ; qu'aux termes de l'article 5 de l'arrêté du 4 juin 1959 pris pour l'application de ces dispositions, les administrateurs de la caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL) et des sections professionnelles de cet organisme qui ont la qualité de travailleur indépendant bénéficient pour chaque réunion d'une indemnité pour perte de gain fixée forfaitairement à six fois le montant brut horaire du SMIC, dans la limite de deux indemnités par jour ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que si l'indemnité pour perte de gains mentionnée à l'article L. 231-12 du code de la sécurité sociale n'a pas à tenir compte des pertes individuelles de revenus subies par les administrateurs et membres des conseils des organismes de sécurité sociale ayant la qualité de travailleurs indépendants en raison de l'exercice de leurs fonctions, et si elle peut en conséquence être légalement établie sous une forme forfaitaire, son montant ne saurait, eu égard à son objet, être manifestement sans rapport avec le niveau moyen de rémunération de l'ensemble des professions libérales concernées ; qu'il ressort du dossier, et notamment des montants moyens de revenus de plusieurs professions libérales, fournis par les requérants sans que le ministre justifie son arrêté par un autre mode de calcul, que le ministre ne pouvait, sans entacher son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation, retenir un montant forfaitaire égal à six fois le taux brut horaire du SMIC par demi-journée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, les requérants sont fondés à demander l'annulation du refus de modification de l'arrêté du 4 juin 1959 que leur a opposé le ministre ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; que la présente décision implique nécessairement que le ministre chargé de la sécurité sociale modifie les dispositions de l'article 5 de l'arrêté du 4 juin 1959 afin de les rendre compatibles avec les exigences découlant de l'article L. 231-12 du code de la sécurité sociale ; qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat d'enjoindre au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique de procéder à cette modification dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B et autres d'une somme globale de 3 000 euros ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision implicite du ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville refusant de modifier l'article 5 de l'arrêté du 4 juin 1959 allouant des indemnités aux administrateurs de la caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales et des sections professionnelles est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique de modifier les dispositions de l'article 5 de l'arrêté du 4 juin 1959 afin de les rendre compatibles avec les exigences découlant de l'article L. 231-12 du code de la sécurité sociale dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera à M. B et autres une somme globale de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Gérard B, à la CAISSE AUTONOME DE RETRAITE DES MEDECINS DE FRANCE, à M. Jean-Luc G, à M. Jean A, à M. Yves C, à M. Gérard D, à M. Philippe H, à M. Jean-Paul F, à M. Claude E et au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.


Synthèse
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 334005
Date de la décision : 24/09/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

62-01 SÉCURITÉ SOCIALE. ORGANISATION DE LA SÉCURITÉ SOCIALE. - ORGANISMES DE SÉCURITÉ SOCIALE - INDEMNISATION DES ADMINISTRATEURS ET MEMBRES DES CONSEILS (ART. L. 231-12 DU CSS) - ADMINISTRATEURS ET MEMBRES AYANT LA QUALITÉ DE TRAVAILLEUR INDÉPENDANT - INDEMNITÉS POUR PERTE DE GAINS - 1) MODALITÉS DE CALCUL - 2) FIXATION DU MONTANT - CONTRÔLE RESTREINT - 3) APPLICATION EN L'ESPÈCE.

62-01 En vertu de l'article L. 231-12 du code de la sécurité sociale (CSS), les administrateurs et les membres du conseil des organismes de sécurité sociale ayant la qualité de travailleur indépendant peuvent percevoir des indemnités pour perte de leurs gains. 1) Ces indemnités n'ont pas à tenir compte des pertes individuelles de revenus subies par les administrateurs et membres des conseils en raison de l'exercice de leurs fonctions et peuvent ainsi être légalement établies sous une forme forfaitaire. En revanche, leur montant ne saurait, eu égard à leur objet, être manifestement sans rapport avec le niveau moyen de rémunération de l'ensemble des professions concernées. 2) Le juge de l'excès de pouvoir exerce un contrôle restreint sur le montant de l'indemnité pour perte de gains allouée aux administrateurs et membres des conseils des organismes de sécurité sociale. 3) S'agissant des administrateurs de la caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL), le montant de l'indemnité, fixé à six fois le taux brut horaire du SMIC par demi-journée, est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des éléments au dossier relatifs à la rémunération moyenne de plusieurs professions libérales.


Publications
Proposition de citation : CE, 24 sep. 2010, n° 334005
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Jean Lessi
Rapporteur public ?: M. Derepas Luc
Avocat(s) : FOUSSARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:334005.20100924
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