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22/10/2010 | FRANCE | N°323896

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 22 octobre 2010, 323896


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 janvier et 3 avril 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE AGRICOLE DE FRANCIERES, dont le siège est 54, rue du bout du monde, boîte postale 13, à Francières (60190), représentée par son président-directeur général en exercice ; la société demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 30 octobre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a annulé, d'une part, le jugement du 22 mars 2007 du tribunal administratif d'Amiens rejetant la deman

de de M. et Mme Jean-Marie A et du GFA Saint Eutrope dirigée contre la dé...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 janvier et 3 avril 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE AGRICOLE DE FRANCIERES, dont le siège est 54, rue du bout du monde, boîte postale 13, à Francières (60190), représentée par son président-directeur général en exercice ; la société demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 30 octobre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a annulé, d'une part, le jugement du 22 mars 2007 du tribunal administratif d'Amiens rejetant la demande de M. et Mme Jean-Marie A et du GFA Saint Eutrope dirigée contre la décision du 17 mai 2005 de la commission départementale d'aménagement foncier de l'Oise ayant statué sur sa réclamation relative au remembrement dans la commune de Grandvillers-aux-Bois et, d'autre part, cette dernière décision ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de M. et Mme A et du GFA Saint Eutrope ;

3°) de mettre la charge de M. et Mme A et du GFA Saint Eutrope la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Rousselle, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat de la SOCIETE AGRICOLE DE FRANCIERES et de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de M. et Mme Jean-Marie A et de la G.F.A. Saint-Eutrope,

- les conclusions de Mme Catherine de Salins, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Peignot, Garreau, avocat de la SOCIETE AGRICOLE DE FRANCIERES et à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de M. et Mme Jean-Marie A et de la G.F.A. Saint-Eutrope ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 121-11 du code rural : Les intéressés présentent par écrit à la commission départementale d'aménagement foncier leurs observations et réclamations. Sur la demande adressée par écrit au président de cette commission, ils sont entendus par celle-ci ; qu'il résulte de ces dispositions que les intéressés doivent être mis en mesure de porter leurs observations à la connaissance de la commission départementale préalablement à toute décision concernant leur propriété ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 17 mai 2005, prise sur la réclamation de la SOCIETE AGRICOLE DE FRANCIERES relative au remembrement de la commune de Grandvillers-au-Bois, la commission départementale d'aménagement foncier de l'Oise a modifié notamment les attributions du GFA Saint Eutrope et de M. et Mme Jean-Marie A ; que ces propriétaires ont demandé l'annulation de cette décision au tribunal administratif d'Amiens qui a rejeté leur demande ; que, en revanche, la cour administrative d'appel de Douai a, par l'arrêt attaqué, accueilli leur appel et annulé la décision de la commission départementale ;

Considérant que, pour juger que la décision litigieuse de la commission départementale d'aménagement foncier avait été adoptée à l'issue d'une procédure irrégulière, la cour administrative d'appel s'est fondée sur ce que, d'une part, les lettres de convocation à la séance de cette commission adressées au GFA Saint Eutrope et à M. et Mme Jean-Marie A ne comportaient aucune indication sur les modifications demandées par les réclamants et qu'elle a ultérieurement adoptées et, d'autre part, il ne ressortait pas des pièces du dossier que ces propriétaires auraient été avisés en temps utile par la commission de ces modifications ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il est constant que les convocations que la cour a jugées incomplètes avertissaient leurs destinataires que leurs attributions étaient susceptibles d'être modifiées et mentionnaient que la réclamation sur laquelle il allait être statué émanait de la SOCIETE AGRICOLE DE FRANCIERES, et sans rechercher si, comme le soutenait devant elle cette société, M. et Mme A et le GFA avaient eu connaissance, lors des phases précédentes du remembrement, de la modification proposée par la réclamante et adoptée par la commission et s'ils avaient fait connaître à celle-ci qu'ils désapprouvaient cette modification, comme le soutenait également la société, la cour a commis une erreur de droit ; que, dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, l'arrêt attaqué doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'un membre de la commission départementale d'aménagement foncier a siégé en qualité de représentant des propriétaires exploitants lors de la réunion de la commission départementale d'aménagement foncier qui a examiné la réclamation formée par la SOCIETE AGRICOLE DE FRANCIERES, alors qu'il possédait des actions de la société réclamante ; que, dès lors, et sans qu'il y ait lieu de rechercher ce qu'ont pu être le comportement ou les propos de l'intéressé, celui-ci ne présentait pas les garanties d'impartialité requises pour participer à la délibération de la commission départementale ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de leur appel, M. et Mme A et le GFA Saint Eutrope sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 22 mars 2007, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 17 mai 2005 de la commission départementale d'aménagement foncier de l'Oise, en tant que celle-ci a statué sur la réclamation de la SOCIETE AGRICOLE DE FRANCIERES ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le remboursement des frais exposés par la SOCIETE AGRICOLE DE FRANCIERES et non compris dans les dépens soit mis à la charge de M. et Mme A et du GFA Saint Eutrope ; qu'il y a lieu en revanche, en application des mêmes dispositions, de mettre à la charge de la SOCIETE AGRICOLE DE FRANCIERES une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par M. et Mme A et le GFA saint Eutrope devant le Conseil d'Etat, la cour administrative d'appel et le tribunal administratif et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais que ceux-ci ont exposés devant la cour administrative d'appel et le tribunal administratif ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel Douai du 30 octobre 2008, le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 22 mars 2007 et la décision de la commission départementale d'aménagement foncier de l'Oise du 17 mai 2005, en tant qu'elle statue sur la réclamation de la SOCIETE AGRICOLE DE FRANCIERES, sont annulés.

Article 2 : La SOCIETE AGRICOLE DE FRANCIERES versera à M. et Mme A et au GFA Saint Eutrope la somme globale de 3 000 euros au titre de l'article L. 761 -1 du code de justice administrative.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme A et au GFA Saint Eutrope la somme globale de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE AGRICOLE DE FRANCIERES, à M. et Mme Jean-Marie A, au GFA Saint Eutrope et au ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.


Synthèse
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 323896
Date de la décision : 22/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-04-03-02-03 AGRICULTURE, CHASSE ET PÊCHE. REMEMBREMENT FONCIER AGRICOLE. COMMISSIONS DE REMEMBREMENT. COMMISSION DÉPARTEMENTALE. OBLIGATIONS AU COURS DE L'INSTRUCTION. - POSSIBILITÉ DE PRÉSENTER PAR ÉCRIT DES OBSERVATIONS (ART. R. 121-11 DU CODE RURAL) - OBLIGATION DE METTRE EN MESURE LES INTÉRESSÉS DE LES PRÉSENTER PRÉALABLEMENT À TOUTE DÉCISION CONCERNANT LEUR PROPRIÉTÉ - OBLIGATION REMPLIE SI L'INFORMATION À ÉTÉ PORTÉE À LEUR CONNAISSANCE LORS DES PHASES PRÉCÉDENTES DU REMEMBREMENT [RJ1].

03-04-03-02-03 Pour l'application de l'article R. 121-11 du code rural - aux termes duquel « les intéressés présentent par écrit à la commission départementale d'aménagement foncier leurs observations et réclamations. (...) » - les intéressés doivent être mis en mesure de porter leurs observations à la connaissance de la commission départementale préalablement à toute décision concernant leur propriété. Tel est le cas, alors même que les lettres de convocation à la réunion de la commission départementale ne comporteraient aucune indication sur les modifications demandées par les réclamants, si l'information sur les modifications envisagées a été portée à leur connaissance lors des phases précédentes du remembrement.


Références :

[RJ1]

Rappr. 10 avril 1974, Epoux Lamiot, n° 80787, p. 223.


Publications
Proposition de citation : CE, 22 oct. 2010, n° 323896
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Olivier Rousselle
Avocat(s) : SCP PEIGNOT, GARREAU ; SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:323896.20101022
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