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22/10/2010 | FRANCE | N°324614

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 22 octobre 2010, 324614


Vu, 1°) sous le n° 324614, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 30 janvier et 28 avril 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE VORTEX, dont le siège est 37 bis rue Greneta à Paris (75002) ; la SOCIETE VORTEX demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 22 juillet 2008 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel lui a infligé une sanction d'un montant de 200 000 euros ainsi que la décision du 2 décembre 2008 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel a rejeté son re

cours gracieux contre cette sanction ;

Vu, 2°) sous le n° 329280...

Vu, 1°) sous le n° 324614, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 30 janvier et 28 avril 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE VORTEX, dont le siège est 37 bis rue Greneta à Paris (75002) ; la SOCIETE VORTEX demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 22 juillet 2008 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel lui a infligé une sanction d'un montant de 200 000 euros ainsi que la décision du 2 décembre 2008 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel a rejeté son recours gracieux contre cette sanction ;

Vu, 2°) sous le n° 329280, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 juin et 29 septembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE VORTEX ; la SOCIETE VORTEX demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision du 28 avril 2009 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel a rejeté un nouveau recours gracieux qu'elle a formé à l'encontre de la sanction prononcée le 22 juillet 2008 ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Domitille Duval-Arnould, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Boutet, avocat de la SOCIETE VORTEX,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, rapporteur public,

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Boutet, avocat de la SOCIETE VORTEX ;

Considérant que les requêtes visées ci-dessus sont relatives à la même sanction ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur la requête n° 324614 :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, dans sa rédaction résultant de la loi du 1er août 2000 : (...) Le Conseil supérieur de l'audiovisuel (...) veille à la qualité (...) des programmes (...) / Il peut adresser aux éditeurs et distributeurs de services de communication audiovisuelle des recommandations relatives au respect des principes énoncés dans la présente loi (...) ; qu'aux termes de l'article 15 de la même loi : Le Conseil supérieur de l'audiovisuel veille à la protection de l'enfance et de l'adolescence (...) dans les programmes mis à la disposition du public par un service de communication audiovisuelle. / Il veille à ce que les programmes susceptibles de nuire à l'épanouissement physique, mental ou moral des mineurs ne soient pas mis à disposition du public par un service de radiodiffusion sonore et de télévision, sauf lorsqu'il est assuré, par le choix de l'heure de diffusion ou par tout procédé technique approprié, que des mineurs ne sont normalement pas susceptibles de les voir ou de les entendre (...) ; que, sur le fondement de ces dispositions, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a, par une délibération du 10 février 2004 publiée au Journal officiel de la République française du 26 février 2004, recommandé aux éditeurs de services radiophoniques de s'abstenir de diffuser entre 6 heures et 22 heures 30 de programmes susceptibles de heurter la sensibilité des auditeurs de moins de seize ans ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le Conseil supérieur de l'audiovisuel a, par décision du 17 décembre 2004, mis en demeure la SOCIETE VORTEX de ne plus diffuser de programmes susceptibles de heurter la sensibilité des auditeurs de moins de seize ans entre 6 heures et 22 h 30 sur l'antenne de la radio Skyrock ; qu'en raison de propos tenus le 13 septembre 2007 entre 21 heures et 22 h 30 lors de l'émission Radio libre et alors que, par décision du 31 janvier 2006, de précédents propos tenus au cours de la même émission avaient déjà été sanctionnés, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a, après avoir engagé la procédure prévue à l'article 42-7 de la loi du 30 septembre 1986, infligé à la SOCIETE VORTEX, par décision du 22 juillet 2008, une sanction pécuniaire s'élevant à 200 000 euros ;

Sur la régularité de la sanction :

Considérant qu'aux termes de l'article 42 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, dans sa rédaction issue de la loi du 9 juillet 2004 : Les éditeurs et distributeurs de services de radio ou de télévision (...) peuvent être mis en demeure de respecter les obligations qui leur sont imposées par les textes législatifs et réglementaires (...) ; que l'article 42-1 donne la liste des sanctions susceptibles d'être prononcées à l'encontre d'une personne ayant fait l'objet d'une mise en demeure qui ne s'y est pas conformée, au nombre desquelles : 3° Une sanction pécuniaire assortie éventuellement d'une suspension de l'édition ou de la distribution du ou des services ou d'une partie du programme ; que l'article 42-7 fixe les règles de la procédure contradictoire préalable au prononcé de la sanction ; qu'il ne résulte ni de ces dispositions ni d'aucun autre texte ou principe général du droit que les mises en demeure adressées sur le fondement de l'article 42 de la loi auraient une validité limitée dans le temps ; qu'une même mise en demeure peut donner lieu à plusieurs sanctions à raison de la réitération d'agissements contraires aux obligations auxquelles elle invite le service à se conformer ; qu'ayant, par une décision du 17 décembre 2004, mis en demeure la SOCIETE VORTEX de respecter les obligations lui incombant en matière de diffusion de programmes susceptibles de heurter la sensibilité des auditeurs de moins de seize ans entre 6 heures et 22 h 30 sur l'antenne de Skyrock, et cette société, en dépit d'une sanction prononcée le 31 janvier 2006, ayant réitéré des agissements jugés contraires à ces obligations, le Conseil supérieur de l'audiovisuel n'était pas tenu d'adresser à la société une nouvelle mise en demeure avant de décider de la sanction attaquée, alors même que cette mise en demeure portait sur des faits remontant à plus de quatre ans ;

Considérant que le moyen tiré de ce que le Conseil supérieur de l'audiovisuel n'aurait pas procédé à un examen particulier des faits de l'espèce avant de prononcer la sanction manque en fait ;

Sur le bien-fondé de la sanction :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les propos tenus à l'antenne de Skyrock lors de l'émission Radio Libre le 13 septembre 2007 entre 21 heures et 22 heures 30, décrivaient de façon crue, détaillée et banalisée des pratiques sexuelles ; qu'ils étaient susceptibles de heurter la sensibilité des auditeurs de moins de seize ans et entraient donc dans le champ d'application de la recommandation du 10 février 2004 ; que le Conseil supérieur de l'audiovisuel a pu légalement sanctionner la SOCIETE VORTEX pour avoir, de nouveau, diffusé des propos de cette nature ; qu'eu égard à la gravité du manquement et au caractère répété des agissements de la SOCIETE VORTEX contraires à ses obligations, la sanction prononcée n'est pas excessive ;

Sur la requête 329280 :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le Conseil supérieur de l'audiovisuel ;

Considérant qu'en refusant de substituer à la sanction pécuniaire de 200 000 euros la mise en place d'un comité de suivi médico-psychologique, lequel n'est pas au nombre des sanctions limitativement énumérées par l'article 42-1 qu'il peut prononcer et ne constitue d'ailleurs pas une sanction, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a fait une exacte application des dispositions combinées des articles 1er, 15 et 42-1 de la loi du 30 septembre 1986 sans porter au principe de liberté d'expression et de communication une atteinte excessive au regard de l'objectif poursuivi de protection de l'enfance et de l'adolescence ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requêtes de la SOCIETE VORTEX doivent être rejetées ;

D E C I D E :

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Article 1er : Les requêtes de la SOCIETE VORTEX sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE VORTEX et au Conseil supérieur de l'audiovisuel.

Copie en sera adressée pour information au Premier ministre et au ministre de la culture et de la communication.


Synthèse
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 324614
Date de la décision : 22/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 22 oct. 2010, n° 324614
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: Mme Domitille Duval-Arnould
Rapporteur public ?: M. Thiellay Jean-Philippe
Avocat(s) : SCP BOUTET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:324614.20101022
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