La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/05/2012 | FRANCE | N°350393

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 15 mai 2012, 350393


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 juin et 26 septembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la FEDERATION INTERCO CFDT dont le siège est 47/49, avenue Simon Bolivar à Paris (75950), représentée par sa secrétaire générale ; la FEDERATION INTERCO CFDT demande au Conseil d'Etat

1°) d'annuler l'arrêté du ministre du travail, de l'emploi et de la santé du 26 avril 2011 établissant la liste des organisations syndicales habilitées à désigner des représentants au comité national de concertation des ag

ences régionales de santé et le nombre de sièges auquel elles ont droit ;

2°...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 juin et 26 septembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la FEDERATION INTERCO CFDT dont le siège est 47/49, avenue Simon Bolivar à Paris (75950), représentée par sa secrétaire générale ; la FEDERATION INTERCO CFDT demande au Conseil d'Etat

1°) d'annuler l'arrêté du ministre du travail, de l'emploi et de la santé du 26 avril 2011 établissant la liste des organisations syndicales habilitées à désigner des représentants au comité national de concertation des agences régionales de santé et le nombre de sièges auquel elles ont droit ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le décret n° 82-451 du 28 mai 1982 ;

Vu le décret n° 2010-1733 du 30 décembre 2010 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Marie Grosset, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de la FEDERATION INTERCO CFDT,

- les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de la FEDERATION INTERCO CFDT ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 1432-127 du code de la santé publique, qui fixe les conditions de désignation des représentants du personnel au sein du Comité national de concertation des agences régionales de santé : " Les représentants des personnels au sein du Comité sont désignés, parmi les élus aux comités d'agences des agences régionales de santé, par les organisations syndicales représentées dans ces comités. Les sièges sont répartis entre les organisations syndicales, sur la base des résultats des dernières élections, proportionnellement aux suffrages cumulés qu'elles ont obtenus dans chacun des collèges lors des élections des représentants du personnel au sein des comités d'agence, avec répartition des restes à la plus forte moyenne. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 1432-128 du même code : " La liste des organisations syndicales habilitées à désigner des représentants ainsi que le nombre de sièges auquel elles ont droit sont fixées par arrêté des ministres chargés de la santé, de l'assurance maladie, des personnes âgées et des personnes handicapées. (...) " ; qu'à la suite des élections aux comités d'agences des agences régionales de santé qui se sont déroulées le 15 mars 2011, le ministre du travail, de l'emploi et de la santé et le ministre des solidarités et de la cohésion sociale ont, par un arrêté du 26 avril 2011 pris sur le fondement de ces dernières dispositions, fixé la liste des organisations syndicales habilitées à désigner des représentants des personnels au Comité national de concertation des agences régionales de santé, ainsi que le nombre de sièges attribués à chacune d'elles ; que, compte tenu de ses écritures, la FEDERATION INTERCO CFDT doit être regardée comme demandant l'annulation du seul article 1er de cet arrêté, divisible du reste de l'arrêté, qui fixe le nombre de sièges auxquels ont droit les organisations syndicales représentant les personnels de droit public des agences régionales de santé ;

Sur les moyens tirés, par voie d'exception, de l'illégalité du décret du 30 décembre 2010 :

Considérant que la fédération requérante soutient que l'arrêté litigieux est illégal en raison de ce qu'il a été pris sur le fondement de l'article R. 1432-127 introduit dans le code de la santé publique par le décret du 30 décembre 2010 relatif aux comités d'agence, à la représentation syndicale et aux délégués du personnel et aux emplois de direction dans les agences régionales de santé, lequel serait entaché d'illégalité ;

Considérant qu'il ressort de la copie de la minute de la section de l'administration et de la section sociale du Conseil d'Etat, produite par le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, que le texte publié du décret du 30 décembre 2010 ne contient pas de dispositions qui diffèreraient à la fois du projet initial du Gouvernement et du texte adopté par le Conseil d'Etat ; que la FEDERATION INTERCO CFDT n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que ce décret a été pris selon une procédure irrégulière ;

Considérant que la FEDERATION INTERCO CFDT ne peut utilement soutenir que les consultations préalables à l'édiction du décret du 30 décembre 2010 auraient méconnu les stipulations des articles 12 et 28 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, lesquelles ne peuvent être invoquées que pour des dispositions mettant en oeuvre le droit de l'Union européenne ; qu'elle ne saurait davantage utilement soutenir que de l'article 11 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, découlerait une obligation de consultation préalable des organisations syndicales sur le décret litigieux ; qu'enfin, eu égard à l'objet de ce décret, la FEDERATION INTERCO CFDT ne saurait invoquer la méconnaissance des dispositions de l'article L. 1 du code du travail aux termes desquelles : " Tout projet de réforme envisagé par le Gouvernement qui porte sur les relations individuelles et collectives du travail, (...) et qui relève du champ de la négociation nationale et interprofessionnelle fait l'objet d'une concertation préalable avec les organisations syndicales de salariés et d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel (...) " ;

Considérant que l'article L. 2323-19 du code du travail dispose que " Le comité d'entreprise est informé et consulté sur les modifications de l'organisation économique ou juridique de l'entreprise (...) " ; que la FEDERATION INTERCO CFDT n'est pas fondée à soutenir que les comités d'entreprise des organismes locaux d'assurance maladie auraient dû être préalablement consultés, le décret du 30 décembre 2010 n'entraînant par lui-même aucune modification de l'organisation juridique ou économique de ces organismes ; qu'elle ne saurait par ailleurs ailleurs se prévaloir, sur ce point, d'un prétendu principe de parallélisme des formes qui imposerait à un texte modificatif d'être soumis aux respect de toutes les consultations ayant précédé le texte qu'il modifie ;

Considérant que le moyen tiré de ce que le comité technique paritaire ministériel des affaires sociales n'a pas été consulté sur le projet de décret manque en fait ; qu'il ne ressort pas du dossier que la consultation du comité technique paritaire ministériel aurait été entaché d'irrégularité ;

Considérant que si l'article 2 du décret du 28 mai 1982 relatif au conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat dispose que celui-ci est notamment chargé d'examiner " les questions d'ordre général relatives (...) aux restructurations administratives (...) ", le décret du 30 décembre 2010 n'a pas pour objet de mettre en oeuvre une restructuration administrative ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat aurait dû être consulté préalablement à son édiction doit, en tout état de cause, être écarté ;

Considérant, enfin, qu'aucun des articles R. 1432-116, R. 1432-121, R. 1432-124 ou R. 1432-155 du code de la santé publique, introduits dans ce code par le décret du 30 décembre 2010, ne constitue la base légale de l'arrêté litigieux, lequel n'a pas davantage été pris pour leur application ; que la FEDERATION INTERCO CFDT ne saurait, dès lors, utilement contester la légalité de ces articles à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 26 avril 2011 ;

Sur les autres moyens :

Considérant que l'arrêté litigieux étant directement pris, conformément aux dispositions de l'article R. 1432-128 du code de la santé publique cité ci-dessus, sur la base des résultats des élections du 15 mars 2011 aux comités d'agence des agences régionales de santé, la FEDERATION INTERCO CFDT ne saurait utilement invoquer les illégalités dont seraient entachés les différents procès-verbaux établis à l'occasion de ces élections ;

Considérant que l'article L. 2122-3 du code du travail, qui fixe une règle de répartition des suffrages entre organisations syndicales ayant établi une liste commune pour des élections professionnelles, n'est pas applicable à l'appréciation, pour la fixation du nombre de sièges au sein du Comité national de concertation des agences régionales de santé, du nombre de voix obtenues par les syndicats représentant les agents de droit public des agences régionales de santé ; que la FEDERATION INTERCO CFDT, qui doit être regardée, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, comme ne contestant que le seul article 1er de l'arrêté relatif aux syndicats représentant les agents de droit public, ne saurait, dès lors, utilement soutenir que cet article méconnaît l'article L. 2122-3 du code du travail ;

Considérant, enfin, qu'il ressort des pièces du dossier que, alors même que les listes présentées par le syndicat UNSA aux élections du 15 mars 2011 aux comités d'agence des agences régionales de santé se présentaient comme des listes réunissant à la fois des adhérents de l'UNSA et des adhérents d'autres syndicats, ces listes avaient néanmoins le caractère de listes visant à recueillir des voix au profit de la seule UNSA ; que, par suite, le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a pu légalement, en application des dispositions citées ci-dessus de l'article R. 1432-127 du code de la santé publique, considérer que les suffrages qui s'étaient portés sur ces listes avaient été obtenus par l'UNSA, et attribuer en conséquence à l'UNSA le nombre de sièges correspondants au sein du comité national de concertation des agences régionales de santé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de la FEDERATION INTERCO CFDT doivent être rejetées, y compris, l'Etat n'étant pas la partie perdante, celles qu'elle présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la FEDERATION INTERCO CFDT est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la FEDERATION INTERCO CFDT et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

Copie en sera adressée pour information à la confédération générale du travail, à la confédération générale du travail - force ouvrière et l'union nationale des syndicats autonomes.


Synthèse
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 350393
Date de la décision : 15/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

PROCÉDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - CONTRÔLE DU JUGE DE L'EXCÈS DE POUVOIR - APPRÉCIATIONS SOUMISES À UN CONTRÔLE NORMAL - ARS - COMITÉ NATIONAL DE CONCERTATION - RÉPARTITION DES SIÈGES ENTRE ORGANISATIONS SYNDICALES (ART - R - 1432-127 DU CSP) [RJ1].

54-07-02-03 Le juge de l'excès de pouvoir exerce un contrôle normal sur l'attribution par le ministre des sièges au sein du comité national de concertation des agences régionales de santé (ARS) en application de l'article R. 1432-127 du code de la santé publique (CSP), pour laquelle ce dernier ne dispose d'aucune marge de manoeuvre.

SANTÉ PUBLIQUE - ADMINISTRATION DE LA SANTÉ - COMITÉ NATIONAL DE CONCERTATION - 1) LISTE PRÉSENTÉE PAR UN SYNDICAT COMPORTANT DES REPRÉSENTANTS D'AUTRES SYNDICATS - RÉPARTITION DES SIÈGES (ART - R - 1432-127 DU CSP) - 2) CONTRÔLE DU JUGE DE L'EXCÈS DE POUVOIR SUR LA RÉPARTITION DES SIÈGES AU SEIN DU COMITÉ NATIONAL DE CONCERTATION - CONTRÔLE NORMAL [RJ1].

61-09-02-02 1) Alors même que les listes présentées par le syndicat UNSA aux élections du 15 mars 2011 aux comités d'agence des agences régionales de santé (ARS) se présentaient comme des listes réunissant à la fois des adhérents de l'UNSA et des adhérents d'autres syndicats, ces listes avaient néanmoins le caractère de listes visant à recueillir des voix au profit de la seule UNSA. Par suite, le ministre a pu légalement, en application des dispositions de l'article R. 1432-127 du code de la santé publique (CSP), considérer que les suffrages qui s'étaient portés sur ces listes avaient été obtenus par l'UNSA, et attribuer en conséquence à l'UNSA le nombre de sièges correspondants au sein du comité national de concertation des ARS.,,2) Le juge de l'excès de pouvoir exerce un contrôle normal sur l'attribution par le ministre des sièges au sein du comité national de concertation des agences régionales de santé en application de l'article R. 1432-127 du CSP, pour laquelle ce dernier ne dispose d'aucune marge de manoeuvre.

TRAVAIL ET EMPLOI - INSTITUTIONS REPRÉSENTATIVES DU PERSONNEL - ARS - COMITÉ NATIONAL DE CONCERTATION - 1) LISTE PRÉSENTÉE PAR UN SYNDICAT COMPORTANT DES REPRÉSENTANTS D'AUTRES SYNDICATS - RÉPARTITION DES SIÈGES (ART - R - 1432-127 DU CSP) - 2) CONTRÔLE DU JUGE DE L'EXCÈS DE POUVOIR SUR LA RÉPARTITION DES SIÈGES AU SEIN DU COMITÉ NATIONAL DE CONCERTATION - CONTRÔLE NORMAL [RJ1].

66-04 1) Alors même que les listes présentées par le syndicat UNSA aux élections du 15 mars 2011 aux comités d'agence des agences régionales de santé (ARS) se présentaient comme des listes réunissant à la fois des adhérents de l'UNSA et des adhérents d'autres syndicats, ces listes avaient néanmoins le caractère de listes visant à recueillir des voix au profit de la seule UNSA. Par suite, le ministre a pu légalement, en application des dispositions de l'article R. 1432-127 du code de la santé publique (CSP), considérer que les suffrages qui s'étaient portés sur ces listes avaient été obtenus par l'UNSA, et attribuer en conséquence à l'UNSA le nombre de sièges correspondants au sein du comité national de concertation des ARS.,,2) Le juge de l'excès de pouvoir exerce un contrôle normal sur l'attribution par le ministre des sièges au sein du comité national de concertation des agences régionales de santé en application de l'article R. 1432-127 du CSP, pour laquelle ce dernier ne dispose d'aucune marge de manoeuvre.


Références :

[RJ1]

Cf. CE, 21 décembre 2007, Syndicat FO du personnel du ministère des affaires étrangères, n° 298420, p. 911.


Publications
Proposition de citation : CE, 15 mai. 2012, n° 350393
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Marie Grosset
Rapporteur public ?: Mme Maud Vialettes
Avocat(s) : SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:350393.20120515
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award