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13/07/2012 | FRANCE | N°352571

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 13 juillet 2012, 352571


Vu l'ordonnance n° 11MA01719 du 25 août 2011, enregistrée le 9 septembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi présenté à cette cour par Mme Muriel B ;

Vu le pourvoi, enregistré le 3 mai 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, et le mémoire complémentaire, enregistré le 24 janvier 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mm

e Muriel B, demeurant ...; Mme B demande au Conseil d'Etat :

1°) d...

Vu l'ordonnance n° 11MA01719 du 25 août 2011, enregistrée le 9 septembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi présenté à cette cour par Mme Muriel B ;

Vu le pourvoi, enregistré le 3 mai 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, et le mémoire complémentaire, enregistré le 24 janvier 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Muriel B, demeurant ...; Mme B demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0902129 du 11 mars 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 23 juin 2009 par laquelle le ministre de la défense lui a refusé le bénéfice d'une pension de réversion du chef de M. Max C, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au ministre de procéder à la liquidation de la pension de réversion du chef de M. C à son profit ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande présentée devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros à verser à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, son avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, l'avocat désigné au titre de l'aide juridictionnelle renonçant en contrepartie à percevoir la part contributive de l'Etat ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le décret n° 2004-1056 du 5 octobre 2004 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Dominique Nuttens, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de Mme B,

- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de Mme B ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article 30 du décret du 5 octobre 2004 relatif au régime des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'Etat : " Le conjoint séparé de corps et le conjoint divorcé ont droit à la pension prévue soit au I de l'article 25, soit à l'article 33. / Le conjoint divorcé qui s'est remarié avant le décès du fonctionnaire et qui, à la cessation de cette union, ne bénéficie d'aucun droit à pension de réversion peut faire valoir ce droit s'il n'est pas ouvert au profit d'un autre ayant cause. " ; qu'aux termes de l'article 32 du même décret : " Le conjoint survivant ou divorcé qui contracte un nouveau mariage ou vit en état de concubinage notoire perd son droit à pension. / Les droits qui lui appartenaient ou qui lui auraient appartenu passent aux enfants âgés de moins de vingt et un ans, dans les conditions prévues au III de l'article 27. / Le conjoint survivant ou divorcé dont la nouvelle union est dissoute ou qui cesse de vivre en état de concubinage notoire peut, s'il le désire, recouvrer son droit à pension et demander qu'il soit mis fin à l'application qui a pu être faite des dispositions du deuxième alinéa du présent article. (...) " ;

2. Considérant que le second alinéa de l'article 30 du décret du 5 octobre 2004 n'est applicable qu'au conjoint divorcé qui s'est remarié avant le décès de l'ouvrier relevant du régime des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'Etat ; que ce conjoint divorcé ne peut, à la cessation de cette seconde union, faire valoir son droit à pension de réversion que s'il n'est pas ouvert au profit d'un autre ayant cause ; que l'article 32 du même décret est applicable en cas de nouveau mariage ou de concubinage notoire postérieurs au décès de l'ouvrier et permet au conjoint survivant ou divorcé de recouvrer son droit à pension en cas de dissolution de la nouvelle union ou cessation du concubinage notoire ; qu'en application de ces dispositions, le conjoint divorcé vivant en concubinage notoire avant ou après le décès de l'ouvrier voit son droit à pension de réversion suspendu mais peut le recouvrer lorsque cesse le concubinage, sans que puisse lui être opposée l'ouverture de ce droit à un autre ayant cause ; qu'ainsi, en jugeant que Mme B, épouse divorcée de M. C, ne pouvait prétendre à une pension de réversion après la fin de son concubinage, au motif que ce droit avait été ouvert à la seconde épouse de M. C, le tribunal administratif de Toulon a commis une erreur de droit ; que, par suite, son jugement doit être annulé ;

3. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

4. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, il résulte des dispositions de l'article 32 du décret du 5 octobre 2004 que le conjoint divorcé de l'ouvrier décédé qui cesse de vivre en concubinage peut recouvrer son droit à pension ; que c'est à tort que le ministre de la défense a opposé à la demande de Mme B le fait que le droit à pension de réversion du chef de M. C avait été ouvert à la veuve de ce dernier ; que, par suite, sa décision doit être annulée ;

5. Considérant que Mme B a droit à la liquidation d'une pension de réversion du chef de M. C à compter de la date de sa demande ; qu'il y a lieu de la renvoyer devant le ministre de la défense pour que celui-ci procède à cette liquidation ;

6. Considérant que Mme B a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme B, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Lyon-Caen et Thiriez ; qu'il y a lieu, en outre, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à Mme B en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre de la procédure engagée devant le tribunal administratif de Toulon ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulon en date du 11 mars 2011 est annulé.

Article 2 : La décision du ministre de la défense en date du 23 juin 2009 est annulée.

Article 3 : Mme B est renvoyée devant le ministre de la défense pour que celui-ci procède à la liquidation de sa pension de réversion.

Article 4 : L'Etat versera à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de Mme B, une somme de 3 000 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 5 : L'Etat versera à Mme B une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à Mme Muriel B, au ministre de la défense et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 352571
Date de la décision : 13/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Analyses

48-03-01 PENSIONS. RÉGIMES PARTICULIERS DE RETRAITE. OUVRIERS DES ÉTABLISSEMENTS INDUSTRIELS DE L'ETAT. - PENSION DE RÉVERSION - CAS DES CONJOINTS REMARIÉS - DÉCRET DU 5 OCTOBRE 2004 - CHAMPS D'APPLICATION RESPECTIFS DES ARTICLES 30 ET 32 - 1) ARTICLE 30 - APPLICABILITÉ AU CONJOINT DIVORCÉ S'ÉTANT REMARIÉ AVANT LE DÉCÈS DE L'OUVRIER RELEVANT DU RÉGIME - CONSÉQUENCE - IMPOSSIBILITÉ DE FAIRE DE NOUVEAU VALOIR SON DROIT À PENSION DE RÉVERSION À LA CESSATION DE CETTE UNION S'IL A ÉTÉ OUVERT AU PROFIT D'UN AUTRE AYANT CAUSE - 2) ARTICLE 32 - APPLICABILITÉ EN CAS DE REMARIAGE OU DE CONCUBINAGE NOTOIRE POSTÉRIEURS AU DÉCÈS - CONSÉQUENCE - POSSIBILITÉ DE FAIRE DE NOUVEAU VALOIR SON DROIT À PENSION DE RÉVERSION À LA CESSATION DE CETTE UNION MÊME S'IL A ÉTÉ OUVERT AU PROFIT D'UN AUTRE AYANT CAUSE.

48-03-01 1) Le second alinéa de l'article 30 du décret n° 2004-1056 du 5 octobre 2004 relatif au régime des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'Etat n'est applicable qu'au conjoint divorcé qui s'est remarié avant le décès de l'ouvrier relevant du régime des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'Etat. Ce conjoint divorcé ne peut, à la cessation de cette seconde union, faire valoir son droit à pension de réversion que s'il n'est pas ouvert au profit d'un autre ayant cause.,,2) L'article 32 du même décret est applicable en cas de nouveau mariage ou de concubinage notoire postérieurs au décès de l'ouvrier et permet au conjoint survivant ou divorcé de recouvrer son droit à pension en cas de dissolution de la nouvelle union ou cessation du concubinage notoire. En application de ces dispositions, le conjoint divorcé vivant en concubinage notoire avant ou après le décès de l'ouvrier voit son droit à pension de réversion suspendu mais peut le recouvrer lorsque cesse le concubinage, sans que puisse lui être opposée l'ouverture de ce droit à un autre ayant cause.


Publications
Proposition de citation : CE, 13 jui. 2012, n° 352571
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Philippe Martin
Rapporteur ?: M. Jean-Dominique Nuttens
Rapporteur public ?: M. Bertrand Dacosta
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:352571.20120713
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