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08/10/2012 | FRANCE | N°345013

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 08 octobre 2012, 345013


Vu le pourvoi, enregistré le 15 décembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour la Société Entreprise de Travaux et de Matériaux, dont le siège est 17, route d'Eschau à Illkirch-Graffenstaden (67411), représentée par son président-directeur-général en exercice ; la société demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09NC01420 du 18 octobre 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a annulé le jugement n° 0504645 du 11 juin 2009 du tribunal administratif de Strasbourg ainsi que l'arrêté du 16 juin 2005 du préfet

du Bas-Rhin modifiant les prescriptions applicables à la remise en état de la...

Vu le pourvoi, enregistré le 15 décembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour la Société Entreprise de Travaux et de Matériaux, dont le siège est 17, route d'Eschau à Illkirch-Graffenstaden (67411), représentée par son président-directeur-général en exercice ; la société demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09NC01420 du 18 octobre 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a annulé le jugement n° 0504645 du 11 juin 2009 du tribunal administratif de Strasbourg ainsi que l'arrêté du 16 juin 2005 du préfet du Bas-Rhin modifiant les prescriptions applicables à la remise en état de la carrière qu'elle exploitait sur le territoire de la commune d'Illkirch-Graffenstaden et enjoint au préfet de la mettre en demeure de respecter les prescriptions des articles 25 et 27 de l'arrêté préfectoral du 12 mai 1999 interdisant le remblayage de la carrière par des matériaux extérieurs au site ;

2°) de mettre à la charge de la commune d'Illkirch-Graffenstaden la somme de 3000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 :

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Pichon de Vendeuil, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les observations de la SCP Roger, Sevaux, avocat de la Société Entreprise de Travaux et de Matériaux et de Me Ricard avocat, de la commune d'Illkirch-Graffenstaden ;

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Roger, Sevaux, avocat de la Société Entreprise de Travaux et de Matériaux et à Me Ricard avocat, de la commune d'Illkirch-Graffenstaden ;

1. Considérant qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la Société Entreprise de Travaux et de Matériaux (SETM) exploitait depuis 1989 une carrière de sables et de graviers sur le territoire de la commune d'Illkirch-Graffenstaden ; qu'un arrêté du 12 mai 1999 du préfet du Bas-Rhin a fixé les conditions de remise en état du site après la cessation d'activité, en indiquant notamment qu'il devait être procédé au remblayage uniquement avec du granulat, des enrochements et des matériaux existant naturellement sur le site ; qu'à la suite de la cessation de l'exploitation intervenue en 2002 et à l'occasion des opérations de remise en état du site, de nouveaux risques pour la sécurité et l'environnement sont apparus, qui ont conduit le préfet, par un arrêté complémentaire du 16 juin 2005, à autoriser la SETM à remblayer le site avec des matériaux extérieurs ; que, par un jugement du 11 juin 2009, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de cette commune dirigée contre l'arrêté du 16 juin 2005 ; que, par un arrêt du 18 octobre 2010, contre lequel la SETM se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Nancy a annulé ce jugement et cet arrêté et a enjoint au préfet de mettre en demeure la société de respecter les prescriptions de l'arrêté initial du 12 mai 1999 ;

2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 511-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté litigieux : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature et de l'environnement, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. " ; que l'article L. 512-3 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur, dispose : " Les conditions d'installation et d'exploitation jugées indispensables pour la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, les moyens d'analyse et de mesure et les moyens d'intervention en cas de sinistre sont fixés par l'arrêté d'autorisation et, éventuellement, par des arrêtés complémentaires pris postérieurement à cette autorisation. " ; qu'enfin, le I de l'article L. 514-1 du même code prévoit que : " Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, et lorsqu'un inspecteur des installations classées ou un expert désigné par le ministre chargé des installations classées a constaté l'inobservation des conditions imposées à l'exploitant d'une installation classée, le préfet met en demeure ce dernier de satisfaire à ces conditions dans un délai déterminé. (...) " ;

3. Considérant qu'il appartient à l'autorité administrative compétente en matière de police des installations classées de prendre à tout moment les mesures nécessaires à la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 ; qu'elle peut à cet effet, même après la mise à l'arrêt de l'installation, modifier les prescriptions de remise en état du site sur le fondement de l'article L. 512-3, afin de prévenir des dangers ou inconvénients qui n'auraient pas été antérieurement pris en compte ; qu'une telle modification dispense nécessairement l'exploitant de respecter celles des prescriptions initiales qui ont ainsi été modifiées ; que, par suite, en jugeant que le préfet ne pouvait légalement prendre un arrêté complémentaire modifiant les prescriptions de son arrêté du 12 mai 1999 relatives à la remise en état du site et à son remblayage dès lors qu'il était tenu, après avoir constaté que les prescriptions initiales correspondantes n'avaient pas été respectées, de mettre en demeure la SETM de s'y conformer en application de l'article L. 514-1 du code de l'environnement, la cour administrative d'appel de Nancy a entaché son arrêt d'une erreur de droit ; que la SETM est dès lors fondée, pour ce motif et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;

4. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SETM, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la commune d'Illkirch-Graffenstaden au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette commune la somme de 3000 euros qui sera versée à la SETM au même titre ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 18 octobre 2010 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nancy.

Article 3 : La commune d'Illkirch-Graffenstaden versera une somme de 3000 euros à la Société Entreprise de Travaux et de Matériaux au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune d'Illkirch-Graffenstaden au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la Société de Travaux et de Matériaux, à la commune d'Illirch-Graffenstaden et à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Délibéré dans la séance du 12 septembre 2012 où siégeaient : M. Jacques Arrighi de Casanova, Président adjoint de la Section du Contentieux, Président ; Mme Christine Maugüé, M. Denis Piveteau, Présidents de sous-section ; M. Marc Sanson, M. Yves Doutriaux, M. François Delion, M. Mattias Guyomar, M. Nicolas Boulouis, Conseillers d'Etat et M. Marc Pichon de Vendeuil, Maître des Requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Lu en séance publique le 8 octobre 2012


Synthèse
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 345013
Date de la décision : 08/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 08 oct. 2012, n° 345013
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Jacques Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Marc Pichon de Vendeuil
Rapporteur public ?: M. Xavier de Lesquen
Avocat(s) : SCP ROGER, SEVAUX ; RICARD

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:345013.20121008
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