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14/03/2013 | FRANCE | N°366346

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 14 mars 2013, 366346


Vu la requête, enregistrée le 4 mars 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par les sociétés Allianz IARD et Allianz Vie, dont le siège est situé 87, rue de Richelieu à Paris (75002), représentées par leur représentant légal ; les sociétés requérantes demandent au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'article 15 de l'arrêté du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social du 1

9 décembre 2012 portant extension de l'accord du 8 décembre 2011 relatif au r...

Vu la requête, enregistrée le 4 mars 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par les sociétés Allianz IARD et Allianz Vie, dont le siège est situé 87, rue de Richelieu à Paris (75002), représentées par leur représentant légal ; les sociétés requérantes demandent au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'article 15 de l'arrêté du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social du 19 décembre 2012 portant extension de l'accord du 8 décembre 2011 relatif au régime de prévoyance des salariés cadres et assimilés, conclu dans le cadre de la convention collective nationale de la pharmacie d'officine ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elles soutiennent que :

- la condition d'urgence est remplie, dès lors que l'entrée en vigueur de l'arrêté porte un préjudice grave et immédiat à leurs intérêts économiques et perturbe gravement le régime de prévoyance ;

- il existe un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté contesté ;

Vu l'arrêté dont la suspension de l'exécution est demandée ;

Vu la copie de la requête à fin d'annulation ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 mars 2013, présenté pour la fédération des syndicats pharmaceutiques de France, qui conclut au rejet de la requête pour les mêmes motifs que ceux invoqués par le ministre et à ce que soit mise à la charge des sociétés Allianz IARD et Allianz Vie la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 mars 2013, présenté par le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que :

- la condition d'urgence n'est pas remplie ;

- aucun des moyens soulevés n'est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 mars 2013, présenté pour l'Institution de prévoyance du Groupe Mornay (IPGM), qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des sociétés Allianz IARD et Allianz Vie la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que :

- la requête est irrecevable, l'arrêté ayant produit tous ses effets ;

- la condition d'urgence n'est pas remplie ;

- aucun des moyens soulevés n'est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 mars 2013, présenté pour la fédération nationale du personnel de l'encadrement des industries chimiques et connexes (CFE-CGC), la fédération nationale de la pharmacie (Force Ouvrière), la fédération nationale des syndicats chrétiens des services de santé et sociaux (CFTC) et l'union des syndicats de pharmaciens d'officine, qui concluent au rejet de la requête pour les mêmes motifs que ceux invoqués par le ministre et à ce que soit mise à la charge des sociétés Allianz IARD et Allianz Vie la somme de 3 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 11 mars 2013, présenté pour les sociétés Allianz IARD et Allianz Vie, qui reprennent les conclusions de leur requête et les mêmes moyens et soutiennent en outre que l'arrêté n'a pas encore reçu exécution ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, les sociétés Allianz IARD et Allianz Vie et, d'autre part, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ainsi que l'Institution de prévoyance du Groupe Mornay (IPGM), la fédération des syndicats pharmaceutiques de France, la fédération nationale du personnel d'encadrement des industries chimiques et connexes (CFE-CGC), la fédération nationale FO des métiers de la pharmacie des laboratoires, la fédération nationale des industries chimiques (CGT), la fédération nationale des syndicats chrétiens des services de santé et sociaux (CFTC), l'union nationale des pharmacies de France et l'union des syndicats de pharmaciens d'officine ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 12 mars 2013 à 10 heures, au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Baraduc, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat des sociétés Allianz IARD et Allianz Vie ;

- les représentants des sociétés Allianz IARD et Allianz Vie ;

- les représentants du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ;

- Me Gatineau, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de l'Institution de prévoyance du Groupe Mornay (IPGM) ;

- les représentants de l'IPGM ;

- Me Blancpain, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la fédération des syndicats pharmaceutiques de France ;

- Me Trichet, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la fédération nationale du personnel d'encadrement des industries chimiques et connexes (CFE-CGC), de la fédération nationale FO des métiers de la pharmacie des laboratoires, de la fédération nationale des syndicats chrétiens des services de santé et sociaux (CFTC) et de l'union des syndicats de pharmaciens d'officine ;

- le représentant de l'union des syndicats de pharmaciens d'officine ;

et à l'issue de laquelle le juge des référés a prolongé l'instruction jusqu'au 12 mars 2013 à 18 heures ;

Vu les observations, enregistrées le 12 mars 2013, présentées pour les sociétés Allianz IARD et Allianz Vie ;

Vu les observations, enregistrées le 12 mars 2013, présentées par le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Sur la demande de suspension :

1. Considérant qu'en vertu de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la possibilité pour le juge des référés d'ordonner la suspension de l'exécution d'une décision administrative est subordonnée notamment à la condition qu'il y ait urgence ; qu'il lui appartient d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à porter à sa situation ou à un intérêt public une atteinte suffisamment grave et immédiate pour caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ;

2. Considérant que, pour justifier de l'urgence à suspendre l'exécution de l'article 15 de l'arrêté du ministre chargé du travail du 19 décembre 2012, qui étend l'accord du 8 décembre 2011 relatif au régime de prévoyance des salariés cadres et assimilés conclu dans le cadre de la convention collective nationale de la pharmacie d'officine, les sociétés requérantes soutiennent que l'application sans délai de ces dispositions porte à leurs intérêts une atteinte grave et immédiate ; qu'en particulier, la désignation par l'accord étendu de l'Institution de prévoyance du Groupe Mornay pour assurer la gestion de ce régime représente pour elles une perte de 7,6 millions d'euros dans le domaine de la santé et de 5,3 millions d'euros dans le domaine de la prévoyance ; que l'application de cet arrêté aura, selon elles, des effets difficilement réversibles, notamment en ce que la désignation qu'il rend obligatoire pour toutes les officines aura pour effet de les évincer, ainsi que plus généralement les assureurs, du marché des assurances collectives en matière de prévoyance et de santé ;

3. Considérant, toutefois, d'une part, que l'atteinte à la situation des sociétés requérantes doit s'apprécier au regard des effets propres respectifs de l'accord lui-même et de l'arrêté d'extension ; qu'il résulte des indications fournies à l'audience que, sur un nombre total de 22 700 officines - dont 3 700 étaient jusque là assurées auprès d'Allianz - environ la moitié d'entre elles sont adhérentes à des organisations d'employeurs signataires de l'accord, et donc liées par celui-ci, de sorte que l'arrêté ne produit d'effets propres qu'en tant qu'il fait obstacle à ce que les autres officines puissent choisir de s'assurer auprès des sociétés Allianz ;

4. Considérant, d'autre part, qu'eu égard à la faible part du chiffre d'affaires que représentait l'activité en cause pour chacune des sociétés requérantes, rapporté à leur chiffre d'affaires global, la perte invoquée n'est pas de nature à porter, par elle-même, une atteinte grave à leur situation financière, ainsi que cela a d'ailleurs été reconnu à l'audience ; que la circonstance que leur éviction affaiblirait durablement leur position et, plus généralement, celle des sociétés d'assurance sur le marché de la prévoyance dans les branches professionnelles n'apparaît pas non plus, au vu des éléments fournis par les sociétés requérantes, de nature à caractériser une situation d'urgence ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la condition d'urgence exigée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative ne peut être regardée comme remplie ; que, dès lors et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par l'Institution de prévoyance du Groupe Mornay, les conclusions aux fins de suspension présentées par les sociétés Allianz IARD et Allianz Vie doivent être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées à ce titre par les sociétés requérantes ; qu'en revanche il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à leur charge, au même titre, la somme de 3 000 euros à verser, respectivement, à l'Institution de prévoyance du Groupe Mornay et à la fédération des syndicats pharmaceutiques de France, ainsi que la même somme à verser, globalement, à la fédération nationale du personnel d'encadrement des industries chimiques et connexes (CFE-CGC), la fédération nationale FO des métiers de la pharmacie, la fédération nationale des syndicats chrétiens des services de santé et sociaux (CFTC) et l'union des syndicats de pharmaciens d'officine ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête des sociétés Allianz IARD et Allianz Vie est rejetée.

Article 2 : Les sociétés Allianz IARD et Allianz Vie verseront solidairement la somme de 3 000 euros à l'Institution de prévoyance du Groupe Mornay, à la fédération des syndicats pharmaceutiques de France et, globalement, à la fédération nationale du personnel d'encadrement des industries chimiques et connexes (CFE-CGC), la fédération nationale FO des métiers de la pharmacie, la fédération nationale des syndicats chrétiens des services de santé et sociaux et l'union des syndicats de pharmaciens d'officine, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée aux sociétés Allianz IARD et Allianz Vie, au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, à l'Institution de prévoyance du Groupe Mornay (IPGM), à la fédération des syndicats pharmaceutiques de France et à la fédération nationale du personnel d'encadrement des industries chimiques et connexes (CFE-CGC). Les autres défendeurs en seront informés par Maître Trichet, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, qui les représente devant le Conseil d'Etat.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 366346
Date de la décision : 14/03/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 14 mar. 2013, n° 366346
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP GATINEAU, FATTACCINI ; SCP BARADUC, DUHAMEL

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:366346.20130314
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