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13/12/2013 | FRANCE | N°368750

France | France, Conseil d'État, 6ème ssjs, 13 décembre 2013, 368750


Vu le pourvoi, enregistré le 16 mai 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance n° 1202281 du 11 octobre 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Toulon, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a suspendu, à la demande de l'association Environnement Méditerranée, l'exécution de l'arrêté du 29 juin 2012 par lequel le préfet du Var a autorisé la société Pr

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Vu le pourvoi, enregistré le 16 mai 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance n° 1202281 du 11 octobre 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Toulon, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a suspendu, à la demande de l'association Environnement Méditerranée, l'exécution de l'arrêté du 29 juin 2012 par lequel le préfet du Var a autorisé la société Provence Granulats à exploiter sur la commune de Mazaugues au lieu-dit "Le Caire de Sarrasin", une carrière à ciel ouvert de calcaire dolomitique ainsi qu'une installation de broyage, concassage, criblage et lavage de minéraux ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 5 décembre 2013, présentée pour l'association Environnement Méditerranée ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code forestier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Pichon de Vendeuil, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de l'association Environnement Méditerranée et à Me Georges, avocat de la société Provence Granulats ;

1. Considérant que, par une ordonnance du 11 octobre 2012, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a, à la demande de l'association Environnement Méditerranée, ordonné la suspension de l'arrêté du 29 juin 2012 par lequel le préfet du Var a autorisé la société Provence Granulats à exploiter sur le territoire de la commune de Mazaugues une carrière à ciel ouvert de calcaire dolomitique ainsi qu'une installation de broyage, concassage, criblage et lavage de minéraux ; que le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie se pourvoit en cassation contre cette ordonnance ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) " ;

3. Considérant que l'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par les requérants, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ; que l'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce ;

4. Considérant que, pour estimer la condition d'urgence remplie, le juge des référés a relevé que l'arrêté contesté " consiste à autoriser l'exploitation d'une carrière à ciel ouvert sur un site qui nécessite le défrichement de la végétation existante et renferme une nappe aquifère importante " ; que, toutefois, l'autorisation de défricher les parcelles en cause résulte non de l'arrêté contesté mais d'un arrêté du 15 décembre 2010 délivré par le préfet du Var en application des dispositions des articles L. 311-1 et R. 311-1 du code forestier alors applicable ; qu'au surplus, il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que la première phase de défrichement était achevée lorsque le juge des référés a statué et que la seconde ne devait pas débuter avant 2017 ; qu'ainsi, le juge des référés a commis une erreur de droit dans l'appréciation de la condition d'urgence ; que le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie est, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, fondé à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

6. Considérant que l'association Environnement Méditerranée soutient que l'exécution de l'arrêté attaqué entraînera sur le site exploité une atteinte grave et immédiate à la faune, à la flore et au potentiel aquifère ainsi que des nuisances pour les riverains des lieux ; que toutefois, ainsi qu'il vient d'être dit, le défrichement des parcelles du lieu d'exploitation ne peut être regardé comme une conséquence de l'arrêté attaqué ; que, par ailleurs, l'autorisation d'exploitation est conditionnée au respect de prescriptions particulières tendant à prévenir toute atteinte à l'environnement et à limiter les nuisances pour les riverains ; qu'il ne ressort pas des éléments du dossier, notamment des différentes études produites par les parties, que, ainsi encadrée, l'exploitation de la carrière serait de nature à porter de manière grave et immédiate atteinte aux intérêts de la requérante ; que, dans ces conditions, il n'apparaît pas, en l'état de l'instruction, que l'urgence justifie la suspension de cet arrêté ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande présentée par l'association Environnement Méditerranée doit être rejetée ;

8. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser la contribution pour l'aide juridique à la charge de l'association Environnement Méditerranée ;

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il n'y a en revanche pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par l'Etat au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 11 octobre 2012 du juge des référés du tribunal administratif de Toulon est annulée.

Article 2 : La demande de l'association Environnement Méditerranée devant le juge des référés du tribunal administratif de Toulon et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 devant le Conseil d'Etat sont rejetées.

Article 3 : La contribution pour l'aide juridique est laissée à la charge de l'association Environnement Méditerranée.

Article 4 : Les conclusions de l'Etat présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et à l'association Environnement Méditerranée.


Synthèse
Formation : 6ème ssjs
Numéro d'arrêt : 368750
Date de la décision : 13/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 13 déc. 2013, n° 368750
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Marc Pichon de Vendeuil
Rapporteur public ?: M. Xavier de Lesquen
Avocat(s) : SCP POTIER DE LA VARDE, BUK LAMENT ; GEORGES

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:368750.20131213
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