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30/12/2014 | FRANCE | N°376476

France | France, Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 30 décembre 2014, 376476


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C...et Mme B...A...ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nîmes, d'une part, de suspendre, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de l'arrêté du 7 février 2014 par lequel le maire de Saint-Quentin-la-Poterie (Gard) a refusé de leur délivrer un permis de construire et, d'autre part, d'enjoindre au maire de la commune de leur délivrer un permis de construire dans un délai de dix jours sous astreinte de 1 000 euros par

jour de retard.

Par une ordonnance n° 1400543 du 28 février 2014, le juge...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C...et Mme B...A...ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nîmes, d'une part, de suspendre, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de l'arrêté du 7 février 2014 par lequel le maire de Saint-Quentin-la-Poterie (Gard) a refusé de leur délivrer un permis de construire et, d'autre part, d'enjoindre au maire de la commune de leur délivrer un permis de construire dans un délai de dix jours sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard.

Par une ordonnance n° 1400543 du 28 février 2014, le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.

Procédure devant le Conseil d'Etat

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 19 mars, 31 mars, 12 mai et 28 novembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme A...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nîmes du 28 février 2014 ;

2°) statuant en référé, de faire droit à leur demande ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Quentin-la-Poterie la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Frédéric Puigserver, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de M. et MmeA..., et à Me Haas, avocat de la commune de Saint-Quentin-la-Poterie.

Considérant ce qui suit :

Sur le pourvoi :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".

2. L'administration peut faire valoir devant le juge des référés que la décision dont il lui est demandé de suspendre l'exécution, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge des référés, après avoir mis à même l'auteur de la demande, dans des conditions adaptées à l'urgence qui caractérise la procédure de référé, de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher s'il ressort à l'évidence des données de l'affaire, en l'état de l'instruction, que ce motif est susceptible de fonder légalement la décision et que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative et à condition que la substitution demandée ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué, le juge des référés peut procéder à cette substitution pour apprécier s'il y a lieu d'ordonner la suspension qui lui est demandée.

3. Pour rejeter la demande de M. et Mme A...tendant à la suspension, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de l'exécution de l'arrêté du 7 février 2014 par lequel le maire de Saint-Quentin-la-Poterie a refusé de leur délivrer un permis de construire, le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a relevé qu'" eu égard à la substitution de motifs invoquée par la commune et fondée sur les dispositions générales du règlement du plan d'occupation des sols ", aucun des moyens invoqués n'était de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision litigieuse. En se prononçant ainsi, le juge des référés a insuffisamment motivé son ordonnance.

4. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A...sont fondés à demander l'annulation de l'ordonnance qu'ils attaquent. L'insuffisance de motivation ainsi relevée suffisant à entraîner cette annulation, il n'est pas nécessaire d'examiner l'autre moyen du pourvoi.

5. Il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée.

Sur l'urgence :

6. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés, saisi de conclusions tendant à la suspension d'un acte administratif, d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue.

7. Il ressort des pièces du dossier que M. et Mme A...ont conclu avec le propriétaire des parcelles constituant le terrain d'assiette du projet de construction envisagé une promesse de vente, sous la condition suspensive de la délivrance, avant le 31 janvier 2013, d'une autorisation de construire sur ces parcelles. A la suite de la suspension, par le juge des référés, d'une première décision de refus de permis de construire puis d'une décision de sursis à statuer opposée par le maire de la commune de Saint-Quentin-la-Poterie à leur demande de permis de construire, cette échéance a été prorogée jusqu'au 31 janvier 2015. La décision litigieuse est ainsi de nature à empêcher les requérants de mener à bien l'acquisition et leur projet immobilier. Si la commune fait valoir que les parcelles en cause sont soumises au droit de préemption, une telle circonstance n'est pas de nature à faire obstacle à ce qu'une situation d'urgence soit reconnue au profit de M. et MmeA.... Par suite, la condition d'urgence prévue à l'article L. 521-1 du code de justice administrative doit être regardée comme remplie.

Sur l'existence de moyens propres à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision litigieuse :

8. En l'état de l'instruction, le moyen tiré de ce que le maire de la commune de Saint-Quentin-la-Poterie a fait, en ce qui concerne le nombre total de places de stationnement, celui des places créées en annexe des voies et l'exigence d'une aire de stationnement pour les véhicules des visiteurs, une inexacte application des dispositions de l'article II NA 12 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune est de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision litigieuse.

9. En revanche, pour l'application des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, le moyen tiré de ce que la décision litigieuse serait entachée d'un détournement de pouvoir n'est pas de nature à faire naître un tel doute.

10. Ainsi qu'il est rappelé au point 2, l'administration peut faire valoir devant le juge des référés que la décision dont il lui est demandé de suspendre l'exécution est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision.

11. En l'espèce, la commune fait valoir que le refus de permis de construire est justifié par les motifs tirés de ce que les dispositions du 2 de l'article 3 du règlement du plan d'occupation des sols interdisent toute construction à usage de commerce dans la zone II NA et, subsidiairement, de ce que le projet de construction envisagé méconnaît les dispositions de l'article II NA 12 qui imposent une surface de stationnement de 150 % de la surface de vente pour les commerces de plus de 50 mètres carrés. Toutefois, il ne ressort pas à l'évidence des données de l'affaire, en l'état de l'instruction, que des chambres d'hôtes devraient être regardées comme des constructions à usage de commerce au sens du règlement du plan d'occupation des sols de la commune ni, à supposer même que tel soit le cas, que les dispositions invoquées de ce règlement seraient méconnues. La commune n'est, par suite, pas fondée à demander que l'un ou l'autre des motifs qu'elle invoque soient substitués à ceux indiqués dans la décision attaquée.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A...sont fondés à demander la suspension de l'exécution de l'arrêté du maire de Saint-Quentin-la-Poterie du 7 février 2014.

Sur les conclusions à fins d'injonction et d'astreinte :

13. La présente décision implique seulement que le maire de Saint-Quentin-la-Poterie procède à un nouvel examen de la demande de M. et MmeA.... Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au maire de Saint-Quentin-la-Poterie de procéder à ce réexamen dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présence décision. Il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée par M. et MmeA....

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M. et MmeA..., qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Saint-Quentin-la-Poterie, sur le fondement des mêmes dispositions, une somme de 4 000 euros à verser à M. et Mme A...au titre des frais exposés par eux tant devant le juge des référés que devant le Conseil d'Etat.

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nîmes du 28 février 2014 est annulée.

Article 2 : L'exécution de l'arrêté du maire de Saint-Quentin-la-Poterie du 7 février 2014 est suspendue.

Article 3 : Il est enjoint au maire de Saint-Quentin-la-Poterie de procéder au réexamen de la demande de M. et Mme A...dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente décision.

Article 4 : La commune de Saint-Quentin-la-Poterie versera à M. et Mme A...une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions présentées par la commune de Saint-Quentin-la-Poterie au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et le surplus des conclusions présentées par M. et Mme A...devant le juge des référés sont rejetés.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. C...et Mme B...A...et à la commune de Saint-Quentin-la-Poterie.


Synthèse
Formation : 1ère sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 376476
Date de la décision : 30/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 déc. 2014, n° 376476
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Frédéric Puigserver
Rapporteur public ?: Mme Maud Vialettes
Avocat(s) : SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN ; HAAS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:376476.20141230
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