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27/10/2016 | FRANCE | N°393640

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre jugeant seule, 27 octobre 2016, 393640


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 21 septembre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, la société d'exercice libéral par actions simplifiée (SELAS) Sylvie Ricour-Brunier, Notaire et Associés et Mme D...H...demandent au Conseil d'État :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 22 juin 2015 par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice, a, d'une part, accepté le retrait de M. A...F...et de M. B... E..., notaires associés de la société civile professionnelle (SCP) Alain F...et de M. B...E..., titulaire d'un of

fice de notaire à la résidence de Basse-Terre, dissout cette SCP, et nommé Mme...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 21 septembre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, la société d'exercice libéral par actions simplifiée (SELAS) Sylvie Ricour-Brunier, Notaire et Associés et Mme D...H...demandent au Conseil d'État :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 22 juin 2015 par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice, a, d'une part, accepté le retrait de M. A...F...et de M. B... E..., notaires associés de la société civile professionnelle (SCP) Alain F...et de M. B...E..., titulaire d'un office de notaire à la résidence de Basse-Terre, dissout cette SCP, et nommé Mme G...notaire à la résidence de Basse-Terre en remplacement de cette SCP et, d'autre part, transformé le bureau annexe de la même SCP à Saint-Barthélemy, autorisé le 24 septembre 1996, en office distinct et nommé cette dernière notaire à la résidence de Saint-Barthélemy, et MM. A...F...et B...E...notaires associés ;

2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3.000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi organique n° 2007-223 du 21 février 2007 ;

- le décret n° 67-868 du 2 octobre 1967 ;

- le décret n° 71-942 du 26 novembre 1971 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Cyrille Beaufils, auditeur,

- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de la SELAS Sylvie Ricour-Brunier, Notaire et Associés et de Mme D... H...et de Maître Ricard, avocat de la SCP Alain F...et Michel E...et de MM. F...etE....

1. Considérant que, par un arrêté du 22 juin 2015, le garde des sceaux, ministre de la justice, a, d'une part, accepté le retrait de M. A...F...et de M. B...E..., notaires associés de la SCP Alain F...et Michel E...notaires, titulaire d'un office de notaire à la résidence de Basse-Terre, dissout cette SCP, et nommé Mme I...notaire à la résidence de Basse-Terre en remplacement de la même SCP et, d'autre part, transformé le bureau annexe de cette SCP à Saint-Barthélemy, autorisé le 24 septembre 1996, en office distinct et nommé cette dernière notaire à la résidence de Saint-Barthélemy et MM. A...F...et B...E...notaires associés ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 2 du décret du 26 novembre 1971 relatif aux créations, transferts et suppressions d'office de notaire, à la compétence d'instrumentation et à la résidence des notaires, à la garde et à la transmission des minutes et registres professionnels des notaires, dans sa rédaction applicable au litige : " Il est institué auprès du garde des sceaux, ministre de la justice, une commission chargée de donner son avis ou d'émettre des recommandations sur la localisation des offices de notaires en fonction des besoins du public et de la situation géographique, démographique et économique. (...) " ; que l'article 2-5 du même décret, dans sa rédaction applicable au litige, dispose : " Saisie par le garde des sceaux, la commission donne son avis sur tout projet de création, de transfert ou de suppression d'un office de notaire, sur l'ouverture de bureaux annexes ou leur transformation en offices distincts. Cet avis peut être assorti de conditions particulières. / Les chambres départementales et les conseils régionaux de notaires sont préalablement consultés. A défaut de réponse de leur part dans les quarante-cinq jours, leur avis est réputé favorable. / Le procureur général est également consulté. / Si dans les six mois de sa saisine par le garde des sceaux, ministre de la justice, la commission ne s'est pas prononcée sur le projet envisagé, son avis est réputé favorable " ; qu'aux termes de l'article 29 du même décret, dans sa rédaction applicable au litige : " Les dispositions du présent décret sont applicables aux départements d'outre-mer dans la mesure où elles sont compatibles avec l'organisation professionnelle du notariat dans ces départements et notamment sous réserve des dispositions ci-après. / Dans tous les cas où l'avis de la chambre ou du conseil régional des notaires est prévu, il est suppléé à l'avis de la chambre par celui du syndic des notaires et à l'avis du conseil régional par une délibération du tribunal de grande instance dans le ressort duquel est établi ou prévu l'office ou le bureau annexe. / (...) " ; que l'article 5 du décret du 2 octobre 1967 pris pour l'application à la profession de notaire de la loi du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles prévoit que la nomination d'une société civile professionnelle dans un office de notaire et la nomination de chacun des associés sont prononcées par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, pris après consultation, dans les conditions fixées par les articles 7 et 8 du même décret, du procureur général près la cour d'appel dans le ressort de laquelle est ou doit être fixé le siège de l'office dont la société est titulaire et de la chambre départementale des notaires et, en cas de création, transfert ou suppression d'office, après avis de la commission prévue à l'article 2 du décret du 26 novembre 1971 ;

3. Considérant que la chambre départementale des notaires de la Guadeloupe, dès lors que cette collectivité est à la fois un département et une région, doit être regardée comme agissant, pour l'application des dispositions la concernant, en tant que conseil régional des notaires, ce qui dispense de procéder à la consultation du tribunal de grande instance lorsque celle-ci est en principe requise en vertu des dispositions de l'article 29 décret du 26 novembre 1971 rappelées ci-dessus ; qu'il ressort des pièces du dossier que la chambre a, par une délibération du 29 mai 2013, rendu un avis favorable sur l'ensemble du projet objet de l'arrêté attaqué ; qu'après réception de cet avis et instruction du dossier, le procureur général près la cour d'appel de Basse-Terre a rendu, le 23 septembre 2013, un rapport motivé avec un avis favorable sur l'ensemble du projet ; que la commission de localisation des offices de notaire a émis, le 21 mai 2014, un avis favorable sur la demande de transformation du bureau annexe de Saint-Barthélemy en office distinct ; que, par suite, les moyens tirés de ce que l'arrêté attaqué aurait été pris au terme d'une procédure irrégulière, faute d'avoir été précédé des avis exigés par la réglementation en vigueur, doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que l'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l'application du premier acte ou s'il en constitue la base légale ; que les requérantes invoquent, au soutien de leur recours dirigé contre l'arrêté transformant le bureau annexe de la SCP Alain F...et Michel E...notaires en office distinct, l'illégalité de la décision du 9 décembre 2013 par laquelle le procureur général près la cour d'appel de Basse-Terre a rejeté la demande de suppression de ce bureau annexe ; que, toutefois, elles ne peuvent en tout état de cause utilement exciper de l'illégalité de cette décision, dès lors qu'elle ne constitue pas la base légale de l'arrêté attaqué transformant le bureau annexe en office distinct, qui n'a pas été pris pour son application ;

5. Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article 2 du décret du 26 novembre 1971 citées au point 2 que dans l'exercice des pouvoirs qui lui sont conférés par ce décret, et notamment lorsqu'il est appelé à statuer sur une demande de suppression et de transfert d'un office de notaire, le garde des sceaux, ministre de la justice, doit se fonder, dans l'intérêt du service public, sur les besoins du public et la situation géographique, démographique et économique ;

6. Considérant que les requérantes soutiennent, d'une part, qu'en raison de la création d'un premier office notarial principal à Saint-Barthélemy en 2011, les besoins de la population peu nombreuse de cette île ne nécessitent pas la création d'un nouvel office et qu'une telle création aurait pour effet de mettre en péril la viabilité économique du premier office ; qu'elles font valoir, d'autre part, que l'arrêté attaqué réduit le nombre de notaires dans le canton de Basse-Terre, en méconnaissance des intérêts de la population de la Guadeloupe ; que, toutefois, l'arrêté attaqué maintient un office notarial en résidence à Basse-Terre répondant aux besoins du public ; qu'il ressort, par ailleurs, des pièces du dossier qu'eu égard au nombre important d'actes que réalise le bureau annexe implanté sur l'île de Saint-Barthélemy depuis près de vingt ans et à l'importance de son chiffre d'affaires, supérieur à celui de l'office principal en résidence à Basse-Terre, à la situation économique et démographique de l'île de Saint-Barthélemy, le garde des sceaux, ministre de la justice, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en décidant d'y créer un deuxième office notarial ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SELAS Sylvie Ricour-Brunier, Notaire et Associés et Mme D...H...ne sont pas fondées à demander l'annulation de l'arrêté qu'elles attaquent ; qu'il suit de là que leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SELAS Sylvie Ricour-Brunier, Notaire et Associés et de Mme D...H...la somme globale de 3.000 euros à verser à la SCP F...Alain et E...Michel, à M. A...F...et à M. B...E...au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la SELAS Sylvie Ricour-Brunier, Notaire et Associés et de Mme D... H...est rejetée.

Article 2 : La SELAS Sylvie Ricour-Brunier, Notaire et Associés et Mme D...H...verseront une somme globale de 3.000 euros à la SCP F...Alain et E...Michel, à M. A... F...et à M. B...E...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SELAS Sylvie Ricour-Brunier, Notaire et Associés, premier requérant dénommé, à la SCP F...Alain et E...Michel notaires associés, premier défendeur dénommé, et au garde des sceaux, ministre de la justice.

L'autre requérante sera informée de la présente décision par la SCP Potier de la Varde, Buck Lament, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, qui la représente devant le Conseil d'Etat. Les autres défendeurs seront informés de la présente décision par Me C...Ricard, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, qui les représente devant le Conseil d'Etat.

Copie en sera adressée à MmeI....


Synthèse
Formation : 6ème chambre jugeant seule
Numéro d'arrêt : 393640
Date de la décision : 27/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 27 oct. 2016, n° 393640
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Cyrille Beaufils
Rapporteur public ?: Mme Suzanne von Coester
Avocat(s) : SCP POTIER DE LA VARDE, BUK LAMENT ; RICARD

Origine de la décision
Date de l'import : 29/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:393640.20161027
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