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02/12/2016 | FRANCE | N°385469

France | France, Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 02 décembre 2016, 385469


Vu la procédure suivante :

M. B...C...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Lille d'étendre la mission d'expertise qui lui a été confiée au sujet des désordres affectant l'ouvrage de la plateforme du tramway de l'agglomération douaisienne aux sociétés OAT et Cominex. Par une ordonnance n° 1403443 du 9 juillet 2014, le président du tribunal a fait droit à cette demande en tant seulement qu'elle concernait la société OAT.

Par une ordonnance n° 14DA01290 du 9 octobre 2014, le président de la cour administrative d'appel de Douai a, sur appel d

es sociétés Entreprise Jean Lefebvre Nord et Eurovia Béton, annulé l'ordonnance...

Vu la procédure suivante :

M. B...C...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Lille d'étendre la mission d'expertise qui lui a été confiée au sujet des désordres affectant l'ouvrage de la plateforme du tramway de l'agglomération douaisienne aux sociétés OAT et Cominex. Par une ordonnance n° 1403443 du 9 juillet 2014, le président du tribunal a fait droit à cette demande en tant seulement qu'elle concernait la société OAT.

Par une ordonnance n° 14DA01290 du 9 octobre 2014, le président de la cour administrative d'appel de Douai a, sur appel des sociétés Entreprise Jean Lefebvre Nord et Eurovia Béton, annulé l'ordonnance du 9 juillet 2014 en tant qu'elle mettait hors de cause la société Cominex et rejeté la demande présentée par M.C..., expert, en tant qu'elle concernait l'extension des opérations d'expertise à cette société.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 3 et 17 novembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les sociétés Entreprise Jean Lefebvre Nord et Eurovia Béton demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de mettre à la charge de la société Cominex la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil du 29 mai 2000 ;

- le code civil ;

- le code de commerce ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Karin Ciavaldini, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de la société Entreprise Jean Lefebvre Nord et de la société Eurovia Beton et à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat du syndicat mixte des transports du douaisis ;

Considérant ce qui suit :

1. Par une ordonnance du 6 juin 2013, le juge des référés du tribunal administratif de Lille, saisi par le syndicat mixte des transports du Douaisis (SMTD) sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, a prescrit une expertise, confiée à M. B...C..., portant sur les désordres affectant l'ouvrage de la plateforme du tramway de l'agglomération douaisienne. M. C... a demandé l'extension des opérations d'expertise aux sociétés OAT et Cominex. Par une ordonnance du 9 juillet 2014, le juge des référés du tribunal administratif de Lille a fait droit à cette demande en tant seulement qu'elle concernait la société OAT et mis la société Cominex hors de cause, au motif que la procédure de faillite de cette société avait été clôturée par jugement du tribunal d'arrondissement du Luxembourg du 31 janvier 2014. Par une ordonnance du 9 octobre 2014, le président de la cour administrative d'appel de Douai, sur appel des sociétés Entreprise Jean Lefebvre Nord et Eurovia Béton, a annulé l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Lille en tant qu'elle mettait hors de cause la société Cominex et rejeté la demande des sociétés tendant à ce que les opérations d'expertise soient étendues à cette société. Les sociétés Entreprise Jean Lefebvre Nord et Eurovia Béton se pourvoient en cassation contre cette ordonnance.

2. Aux termes du troisième alinéa de l'article 1844-8 du code civil : " La personnalité morale de la société subsiste pour les besoins de la liquidation jusqu'à la publication de la clôture de celle-ci ". Cette règle est reprise à l'article L. 237-2 du code de commerce. En vertu du 7° de l'article 1844-7 du code civil, dans sa version antérieure au 1er juillet 2014, une société prend fin par l'effet d'un jugement ordonnant la liquidation judiciaire. Toutefois, la personnalité morale d'une société subsiste aussi longtemps que les droits et obligations à caractère social ne sont pas liquidés. En conséquence, une société peut, s'il y a lieu, alors même que la clôture de la liquidation judiciaire aurait été prononcée, être incluse dans le champ d'une expertise après désignation d'un mandataire chargé de la représenter.

3. Pour rejeter la demande tendant à ce que les opérations d'expertise soient étendues à la société Cominex, le président de la cour a relevé que la procédure de faillite de cette société avait été clôturée par un jugement du 31 janvier 2014 et en a déduit que la responsabilité de cette société ne pouvait plus être utilement recherchée. En statuant ainsi, il a méconnu les règles rappelées au point 2.

4. En tout état de cause, aux termes du troisième alinéa de l'article 3 du code civil : " Les lois concernant l'état et la capacité des personnes régissent les Français, même résidant en pays étranger ". En vertu de l'article 4, paragraphe 2, sous j), du règlement du Conseil du 29 mai 2000 relatif aux procédures d'insolvabilité, la loi de l'Etat d'ouverture détermine les conditions d'ouverture, le déroulement et la clôture de la procédure d'insolvabilité, et notamment les conditions et les effets de la clôture de la procédure d'insolvabilité.

5. Il résulte des textes mentionnés au point 4 qu'en n'examinant pas d'office la demande d'inclure la société Cominex dans le champ de l'expertise au regard des règles de droit luxembourgeois applicables en matière de faillite et en statuant au regard du droit français, alors qu'il ressortait des pièces du dossier qui lui était soumis que la procédure de faillite de la société Cominex était régie par le droit luxembourgeois, le président de la cour a commis une autre erreur de droit.

6. Il résulte de ce qui précède que les sociétés Entreprise Jean Lefebvre Nord et Eurovia Béton sont fondées, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elles attaquent.

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux demandes présentées devant le Conseil d'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative respectivement par les sociétés Entreprise Jean Lefebvre Nord et Eurovia Béton et par le syndicat mixte des transports du Douaisis.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'article 2 de l'ordonnance du 9 octobre 2014 du président de la cour administrative d'appel de Douai est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Douai dans la mesure de la cassation prononcée ci-dessus.

Article 3 : Les conclusions présentées respectivement par les sociétés Entreprise Jean Lefebvre Nord et Eurovia Béton et par le syndicat mixte des transports du Douaisis devant le Conseil d'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Entreprise Jean Lefebvre Nord, à la société Eurovia Béton et au syndicat mixte des transports du Douaisis.

Copie en sera adressée à M. B...C..., expert devant le tribunal administratif de Lille, ainsi qu'aux sociétés OAT, Ingerop Conseil et ingénierie, Boucher, Forclum, Reichen et Robert Architectes et à la société Cominex et à MaîtreA....


Synthèse
Formation : 8ème - 3ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 385469
Date de la décision : 02/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

PROCÉDURE - PROCÉDURES DE RÉFÉRÉ AUTRES QUE CELLES INSTITUÉES PAR LA LOI DU 30 JUIN 2000 - RÉFÉRÉ TENDANT AU PRONONCÉ D'UNE MESURE D'EXPERTISE OU D'INSTRUCTION - DEMANDE TENDANT À L'INCLUSION D'UNE SOCIÉTÉ FAISANT L'OBJET D'UNE PROCÉDURE DE LIQUIDATION DANS LE CHAMP D'UNE EXPERTISE - 1) POSSIBLILITÉ D'INCLUSION DANS LE CHAMP D'UNE EXPERTISE - EXISTENCE - Y COMPRIS EN CAS DE CLÔTURE DE LA PROCÉDURE DE LIQUIDATION - 2) OFFICE DU JUGE DES RÉFÉRÉS - EXAMEN D'UNE TELLE DEMANDE AU REGARD DU DROIT DE L'ETAT D'OUVERTURE DE LA PROCÉDURE DE LIQUIDIATION - INCLUSION.

54-03-011 1) L'article 1844-8 du code civil prévoit que la personnalité morale de la société subsiste pour les besoins de la liquidation jusqu'à la publication de la clôture de celle-ci et le 7° de l'article 1844-7 de ce code prévoit qu'une société prend fin par l'effet d'un jugement ordonnant la liquidation judicaire. Toutefois, la personnalité morale d'une société subsiste aussi longtemps que les droits et obligations à caractère social ne sont pas liquidés. En conséquence, une société peut, s'il y a lieu, alors même que la clôture de la liquidation judiciaire aurait été prononcée, être incluse dans le champ d'une expertise après désignation d'un mandataire chargé de la représenter.... ,,2) Le juge des référés doit examiner d'office la demande d'inclusion d'une société liquidée dans le champ d'une expertise au regard du droit de l'Etat d'ouverture de la procédure de liquidation.

PROCÉDURE - PROCÉDURES DE RÉFÉRÉ AUTRES QUE CELLES INSTITUÉES PAR LA LOI DU 30 JUIN 2000 - RÉFÉRÉ TENDANT AU PRONONCÉ D'UNE MESURE D'EXPERTISE OU D'INSTRUCTION - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - DEMANDE TENDANT À L'INCLUSION D'UNE SOCIÉTÉ FAISANT L'OBJET D'UNE PROCÉDURE DE LIQUIDATION DANS LE CHAMP D'UNE EXPERTISE - 1) POSSIBLILITÉ D'INCLUSION DANS LE CHAMP D'UNE EXPERTISE - EXISTENCE - Y COMPRIS EN CAS DE CLÔTURE DE LA PROCÉDURE DE LIQUIDATION - 2) OFFICE DU JUGE DES RÉFÉRÉS - EXAMEN D'UNE TELLE DEMANDE AU REGARD DU DROIT DE L'ETAT D'OUVERTURE DE LA PROCÉDURE DE LIQUIDIATION - INCLUSION.

54-03-011-03 1) L'article 1844-8 du code civil prévoit que la personnalité morale de la société subsiste pour les besoins de la liquidation jusqu'à la publication de la clôture de celle-ci et le 7° de l'article 1844-7 de ce code prévoit qu'une société prend fin par l'effet d'un jugement ordonnant la liquidation judicaire. Toutefois, la personnalité morale d'une société subsiste aussi longtemps que les droits et obligations à caractère social ne sont pas liquidés. En conséquence, une société peut, s'il y a lieu, alors même que la clôture de la liquidation judiciaire aurait été prononcée, être incluse dans le champ d'une expertise après désignation d'un mandataire chargé de la représenter.... ,,2) Le juge des référés doit examiner d'office la demande d'inclusion d'une société liquidée dans le champ d'une expertise au regard du droit de l'Etat d'ouverture de la procédure de liquidation.


Publications
Proposition de citation : CE, 02 déc. 2016, n° 385469
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Karin Ciavaldini
Rapporteur public ?: M. Romain Victor
Avocat(s) : SCP GADIOU, CHEVALLIER ; SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:385469.20161202
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