La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/12/2023 | FRANCE | N°23PA00427

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 07 décembre 2023, 23PA00427


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société S.E.M.E.H a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2020 par lequel le maire de Paris a fait opposition à l'exécution de travaux sur l'immeuble situé 22 rue Hippolyte Maindron dans le XIVème arrondissement, et d'enjoindre à la Ville de Paris d'autoriser les travaux déclarés



Par un jugement n° 2109493 du 1er décembre 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.





Procédure devant la Cour :



Par une requête enregistrée le 30 janvier 2023 et un mémoire enregistré le 26...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société S.E.M.E.H a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2020 par lequel le maire de Paris a fait opposition à l'exécution de travaux sur l'immeuble situé 22 rue Hippolyte Maindron dans le XIVème arrondissement, et d'enjoindre à la Ville de Paris d'autoriser les travaux déclarés

Par un jugement n° 2109493 du 1er décembre 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 30 janvier 2023 et un mémoire enregistré le 26 mai 2023, la société S.E.M.E.H représentée par Me Meilhac, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2109493 du 1er décembre 2023 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la décision du maire de Paris du 2 novembre 2020 ;

3°) d'enjoindre à la Ville de Paris de réexaminer la demande dans le délai d'un mois suivant l'arrêt à intervenir, puis de faire droit à la demande dans le délai de deux mois suivant cette notification ;

4°) de mettre à la charge de la Ville de Paris le versement d'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté litigieux insuffisamment motivé; l'avis défavorable de l'architecte des Bâtiments de France auquel se réfère la décision contestée ne lui a pas été communiqué ;

- il est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation des dispositions du 2° de l'article UG 11.1.4 du règlement du plan local d'urbanisme de la Ville de Paris ;

- il méconnaît le principe d'égalité, dès lors qu'un traitement différent a été réservé à des travaux comparables effectués par des établissements placés dans la même situation.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 mai 2023, la Ville de Paris, représenté par Me Falala conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis la somme de 2 000 euros à la charge de la société requérante en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Diémert,

- les conclusions de M. Doré, rapporteur public,

- les observations de Me Falala, avocat de la Ville de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. La société S.E.M.E.H exploite à Paris un établissement hôtelier à enseigne " Ibis Style -Paris Maine Montparnasse " ; elle a déposé, le 18 septembre 2020, une déclaration préalable à l'exécution de travaux portant sur la modification de la façade de l'immeuble situé 22 rue Hippolyte Maindron dans le XIVème arrondissement. Par un arrêté du 2 novembre 2020, le maire de Paris s'est opposé à l'exécution de ces travaux. La société a formé, le 4 janvier 2021, un recours gracieux contre cet arrêté, dont il est né une décision implicite de rejet qu'elle a contestée pour excès de pouvoir, ainsi que l'arrêté du 2 novembre 2020, devant le tribunal administratif de Paris lequel a, pour un jugement du 1er décembre 2022, rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux actes. La société S.E.M.E.H relève appel de ce jugement.

2. En premier lieu, l'arrêté litigieux expose, dans ses motifs, que " par sa situation, son aspect, sa coloration (fresques composées de figures géométriques peintes de couleurs vives inadaptées à la devanture), le projet est de nature à porter atteinte à la qualité architecturale de l'immeuble concerné ", en méconnaissance des dispositions du 2° de l'article UG 11.1.4 du règlement du plan local d'urbanisme. Comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges, il énonce ainsi les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde de manière telle que son destinataire peut, à sa seule lecture, être en mesure d'en comprendre la motivation. En outre, la circonstance que l'avis de l'architecte des Bâtiments de France ne soit pas annexé à l'arrêté contesté est sans incidence sur la régularité de cette motivation. Il suit de là que le moyen de l'insuffisance de motivation doit être écarté doit être écarté comme manquant en fait.

3. En deuxième lieu, aux termes des dispositions du 2° de l'article UG 11.1.4 du règlement du plan local d'urbanisme de la Ville de Paris, relatif au traitement des rez-de-chaussée et devantures en façade sur les espaces publics : " Les devantures, qui participent de façon très importante à l'animation commerciale et visuelle de la ville, doivent s'intégrer de la façon la plus harmonieuse possible au cadre bâti et à son patrimoine. Les dispositifs comportant des locaux directement ouverts sur voie (de type comptoir sans devanture) sont proscrits. (...) Les matériaux et couleurs des devantures proposés doivent être en accord avec l'architecture du bâtiment qui les supporte ".

4. Il ressort des pièces du dossier que le projet de la société requérante auquel la Ville de Paris s'est opposée consiste en la réalisation", sur l'ensemble du rez-de-chaussée de la façade de l'immeuble situé à l'intersection du 22 rue Hippolyte Maindron et du 33 rue Bénard, d'une fresque constituée de figures géométriques peintes en quinze teintes de couleur distinctes, très vives, telles que le " rouge feu " et l'" orange pur ", tandis que ledit immeuble présente une architecture de style Louis-Philippe et une teinte particulièrement sobre. A cet égard, l'architecte des Bâtiments de France, dans son avis du 21 octobre 2020, a précisé que, si l'immeuble en litige " n'est pas situé dans le champ de visibilité d'un monument historique ", la fresque projetée " entre en totale contradiction avec la qualité architecturale de l'immeuble concerné dans son environnement proche ". Or, il résulte des dispositions réglementaires précitées que les devantures des commerces doivent s'intégrer " de la façon la plus harmonieuse au cadre bâti ", et il est constant que la Ville de Paris met à disposition des exploitants un fascicule intitulé " Concevoir sa devanture commerciale et son enseigne " qui invite, en conséquence, à y " limiter le nombre de couleurs " et " éviter les couleurs trop vives ou fluorescentes ". En outre, et contrairement à ce que soutient la requérante, il ne ressort pas des pièces du dossier que les autres établissements commerciaux de la voie auraient fait le choix de devantures assorties de couleurs aussi nombreuses et vives. Dans ces conditions, et comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges, la Ville de Paris n'a pas, en prenant l'arrêté attaqué, commis d'erreur dans l'appréciation des dispositions, précitées, du 2° de l'article UG 11.1.4 du règlement du plan local d'urbanisme. Le moyen doit donc être écarté.

5. En troisième et dernier lieu, la société requérante soutient que la réalisation de la fresque en litige a été confiée à une artiste renommée et que, dans le cadre de la promotion du street-art, la Ville de Paris a non seulement autorisé mais encore promu des œuvres similaires, de telle sorte que l'arrêté attaqué méconnaîtrait le principe d'égalité. Toutefois, aucune des photographies de fresques murales produites par la requérante ne concerne la devanture d'un établissement commercial. Ainsi, en tout état de cause, et comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges, le principe d'égalité - à supposer même qu'il puisse être utilement invoqué en l'espèce - ne faisant pas obstacle à ce que des pétitionnaires placés dans une situation différente fassent l'objet d'un traitement différent, le moyen tiré de sa méconnaissance doit être écarté.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la société S.E.M.E.H n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a, par le jugement attaqué, rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 novembre 2020 par lequel le maire de Paris a fait opposition à l'exécution de travaux sur l'immeuble situé 22 rue Hippolyte Maindron dans le XIVème arrondissement. Ses conclusions d'appel qui tendent à l'annulation dudit jugement et de cet arrêté doivent donc être rejetées.

Sur les frais du litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société S.E.M.E.H, qui succombe dans la présente instance, en puisse invoquer le bénéfice. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à sa charge le versement à la Ville de Paris d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société S.E.M.E.H est rejetée.

Article 2 : La société S.E.M.E.H versera à la Ville de Paris une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société S.E.M.E.H et à la Ville de Paris.

Délibéré après l'audience du 16 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Diémert, président de la formation de jugement en application des articles L. 234-3 (1er alinéa) et R. 222-6 (1er alinéa) du code de justice administrative,

- Mme Jasmin-Sverdlin, première conseillère,

- M. Gobeill, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 décembre 2023.

Le président - rapporteur,

S. DIÉMERTL'assesseure la plus ancienne,

I. JASMIN-SVERDLIN

La greffière,

C. POVSE

La République mande et ordonne préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA00427


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23PA00427
Date de la décision : 07/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DIEMERT
Rapporteur ?: M. Stéphane DIEMERT
Rapporteur public ?: M. DORE
Avocat(s) : FALALA

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-07;23pa00427 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award