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05/01/2012 | FRANCE | N°10BX01911

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 05 janvier 2012, 10BX01911


Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2010 par télécopie, régularisée le 29 juillet 2010, sous le n° 10BX01911, présentée pour M. et Mme Vincent X, demeurant ..., M. et Mme Alain Y, demeurant ..., et l'ASSOCIATION PROTEGEONS NOS ESPACES POUR L'AVENIR, représentée par son président, dont le siège est chez M. Y ..., par Me Maillot, avocat ;

Les requérants demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0604959 et 0604960 du 3 juin 2010 du tribunal administratif de Toulouse rejetant leur demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de deux arrêtés

du 21 juin 2006 par lesquels le préfet de l'Aveyron a délivré à la SNC Esco, d'...

Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2010 par télécopie, régularisée le 29 juillet 2010, sous le n° 10BX01911, présentée pour M. et Mme Vincent X, demeurant ..., M. et Mme Alain Y, demeurant ..., et l'ASSOCIATION PROTEGEONS NOS ESPACES POUR L'AVENIR, représentée par son président, dont le siège est chez M. Y ..., par Me Maillot, avocat ;

Les requérants demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0604959 et 0604960 du 3 juin 2010 du tribunal administratif de Toulouse rejetant leur demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de deux arrêtés du 21 juin 2006 par lesquels le préfet de l'Aveyron a délivré à la SNC Esco, d'une part, le permis de construire trois aérogénérateurs et un poste de livraison à Lavernhe-de-Séverac, et d'autre part, le permis pour construire un aérogénérateur à Séverac-le-Château, l'ensemble devant former le parc éolien de Montfrech ;

2°) d'annuler ces arrêtés ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la SNC Esco une somme de 3.000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

............................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 décembre 2011 :

- le rapport de M. de La Taille Lolainville, conseiller ;

- les observations de Me Larrouy-Castera avocat de la SNC Esco ;

- et les conclusions de M. Katz, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Larrouy-Castera avocat de la SNC Esco ;

Considérant que la SNC Esco a déposé en juillet 2004 deux demandes de permis de construire, la première tendant à l'implantation de trois éoliennes et d'un poste de livraison sur le territoire de la commune de Lavernhe-de-Séverac, la seconde, à l'implantation d'une quatrième éolienne sur celui de la commune voisine de Séverac-le-Château, l'ensemble devant constituer le parc éolien de Montfrech ; que le préfet de l'Aveyron a dans un premier temps refusé la délivrance de ces permis, motif pris, d'une part, des nuisances sonores attendues et de l'existence à proximité d'une conduite de gaz à haute pression, et d'autre part, des risques que feraient peser les installations en cause sur une avifaune de qualité exceptionnelle ; que le 10 janvier 2006, la SNC Esco a formé contre ces refus des recours gracieux, puis produit devant l'autorité administrative de nouvelles pièces le 17 mars suivant ; qu'au vu de ces nouveaux éléments, et après avoir retiré ses précédentes décisions, le préfet de l'Aveyron a finalement accordé les permis de construire sollicités par deux arrêtés du 21 juin 2006 ;

Considérant que par leur première requête, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Toulouse sous le n° 0604959, les époux X, les époux Y et l'association PROTEGEONS NOS ESPACES POUR L'AVENIR ont demandé l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté autorisant la construction du poste de livraison et des trois premières éoliennes à Lavernhe-de-Séverac ; que par leur seconde requête, enregistrée sous le n° 0604960, les requérants ont également demandé l'annulation de l'arrêté relatif à la quatrième éolienne prévue à Séverac-le-Château ; qu'ils relèvent appel du jugement du 3 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulouse, après avoir joint ces deux requêtes, les a rejetées ;

Sur la recevabilité de l'appel :

Considérant que l'article 2 des statuts de l'association PROTEGEONS NOS ESPACES POUR L'AVENIR confère expressément au président de cette association qualité pour intenter, au nom de celle-ci, des actions en justice ; que la requête mentionne que l'association est représentée par son président ; que par suite, la fin de non-recevoir tirée de ce que celui-ci aurait été dépourvu de qualité pour agir en appel doit être écartée ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que les requérants ont fait distinctement valoir, par des mémoires présentés le 23 mars 2009 pour chacune des deux instances, la circonstance que l'étude d'impact jointe au dossier de demande de permis de construire aurait présenté un caractère insuffisant, eu égard au caractère trop succinct de son volet paysager ; que même si la motivation retenue pour écarter d'autres moyens de légalité interne fait état de cette étude d'impact et de son volet paysager, les premiers juges n'ont pas répondu au moyen de procédure ainsi soulevé, qui était distinct de la critique de l'évaluation des mesures compensatoires pour l'environnement, et qui était opérant ; que par cette omission, ils ont entaché leur jugement d'irrégularité ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants sont fondés à demander l'annulation du jugement attaqué pour irrégularité ; qu'il y a lieu pour la cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur les deux requêtes présentées devant le tribunal ;

Sur la jonction :

Considérant que les deux requêtes enregistrées au greffe du tribunal administratif de Toulouse sous les nos 0604959 et 0604960, présentées pour les mêmes requérants, sont dirigées contre deux permis de construire accordés à la SNC Esco pour l'édification d'un même parc éolien ; qu'il y a lieu, dès lors, de les joindre pour statuer par un même arrêt ;

Sur les demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 21 juin 2006 :

En ce qui concerne les moyens de procédure :

Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 110-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable : I. - Les espaces, ressources et milieux naturels, les sites et paysages, la qualité de l'air, les espèces animales et végétales, la diversité et les équilibres biologiques auxquels ils participent font partie du patrimoine commun de la nation. / II. - Leur protection, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état et leur gestion sont d'intérêt général et concourent à l'objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Elles s'inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, des principes suivants : / (...) 4° Le principe de participation, selon lequel chacun a accès aux informations relatives à l'environnement, y compris celles relatives aux substances et activités dangereuses, et le public est associé au processus d'élaboration des projets ayant une incidence importante sur l'environnement ou l'aménagement du territoire ; qu'aux termes du I de l'article L. 553-2 du même code : L'implantation d'une ou plusieurs installations produisant de l'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent dont la hauteur du mât dépasse 50 mètres est subordonnée à la réalisation préalable : / (...) b) D'une enquête publique soumise aux prescriptions du chapitre III du titre II du livre Ier du présent code (...) ;

Considérant qu'il est constant que le projet litigieux a fait l'objet d'une enquête publique ; que si le 17 mars 2006, postérieurement à cette enquête, la SNC Esco a produit à l'appui du recours gracieux qu'elle avait formé des éléments complémentaires, il ressort des pièces du dossier que la seule modification par rapport au projet initial révélée par ces nouveaux éléments, modification qui répondait au demeurant à une préoccupation sur les nuisances sonores exprimée par les services de l'Etat, concernait le modèle d'éoliennes retenu, les machines à pales fixes initialement envisagées ayant été remplacées par des machines à pales réglables moins bruyantes ; que pour le reste, la SNC Esco s'est bornée, d'une part, à communiquer au préfet sa correspondance avec les propriétaire et exploitant du réseau local de gaz attestant de la possibilité d'édifier les aérogénérateurs à proximité d'une de leurs canalisations, et d'autre part, à lui rappeler la teneur des avis de la direction régionale de l'environnement et de la Ligue de protection des oiseaux quant aux effets du projet sur l'avifaune locale ; que dans ces conditions, ni les conditions d'exploitation de l'ouvrage, ni l'économie générale du projet n'ont été substantiellement modifiées postérieurement à l'enquête publique ; que dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que, pour l'instruction du recours gracieux formé par la SNC Esco, l'autorité administrative aurait dû diligenter une nouvelle fois l'enquête publique prévue à l'article L. 553-2 du code de l'environnement ; que par suite, il ne sont pas non plus fondés à soutenir que le principe de participation prévu à l'article L. 110-1 du même code aurait été méconnu ;

Considérant en second lieu, qu'aux termes du A de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable : Le dossier joint à la demande de permis de construire comporte : / (...) 8° L'étude d'impact, lorsqu'elle est exigée (...) ; qu'en vertu du a) du I de l'article L. 553-2 du code de l'environnement, une telle étude d'impact est exigée pour l'implantation d'éoliennes dont, comme en l'espèce, la hauteur de mât dépasse 50 mètres ; qu'aux termes de l'article R. 122-3 du même code : I. - Le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement. / II. - L'étude d'impact présente successivement : / (...) 2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents du projet sur l'environnement, et en particulier sur (...) les sites et paysages (...) / (...) 4° Les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement et la santé, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes (...) ;

Considérant que, d'une part, il ressort des pièces du dossier que l'étude d'impact du projet en cause a comporté un chapitre intitulé impacts paysagers de vingt pages ; que loin d'être succinct, ce chapitre proposait notamment à ses lecteurs des réflexions sur la perception visuelle des éoliennes, des propositions paysagères propres au site et une analyse cartographique de covisibilité ; que des photomontages le complétaient efficacement en figurant l'impact visuel du projet depuis différents points de vue pertinents ; que dans ces conditions, la circonstance que ces photomontages aient adopté un format panoramique plus large que l'angle de la vision humaine n'a pu induire en erreur ni le public, ni l'autorité administrative, lesquels se sont trouvés suffisamment renseignés quant aux effets du projet sur les sites et paysages au regard des exigences du 2° du II de l'article R. 122-3 du code de l'environnement ; que, d'autre part, il ressort des pièces du dossier que cette étude d'impact comprenait également, en page 182, une estimation du coût des mesures compensatoires aux conséquences dommageables du projet sur l'environnement, conformément au 4° du II de cet article ; qu'il s'ensuit que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le contenu de l'étude d'impact aurait été insuffisant ;

En ce qui concerne l'exception tirée de l'illégalité du plan d'occupation des sols de Séverac-le-Château :

Considérant en premier lieu, qu'en vertu de l'article 1er du règlement de la zone ND du plan d'occupation des sols de Séverac-le-Château : 1. - Ne sont admises que les occupations et utilisations suivantes : les aménagements et extensions de constructions existantes sous réserve des conditions fixées ci-dessous ; / 2. - Toutefois, les occupations et utilisations du sol suivantes ne sont admises que si elles respectent les conditions ci-après : / (...) Les bâtiments et ouvrages techniques d'intérêt public (...) ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'édification d'éoliennes peut être autorisée en zone ND lorsque, comme en l'espèce, leur production d'électricité a vocation à alimenter le réseau général, et qu'elles constituent ainsi, au sens de ce règlement, des ouvrages techniques d'intérêt public ;

Considérant que, d'une part, en vertu de l'article R. 123-18 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au plan d'occupation des sols de Séverac-le-Château, les zones ND sont des zones à protéger en raison, d'une part, de l'existence de risques ou de nuisances, d'autre part, de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; que ces dispositions ont été reprises par les auteurs du plan d'occupation des sols de Séverac-le-Château pour définir la zone ND de leur commune ; que toutefois, et contrairement à ce que soutiennent les requérants, ces dispositions n'interdisent pas par principe l'édification d'éoliennes en zone ND ; qu'ainsi, l'article 2 du règlement de la zone ND du plan d'occupation des sols n'est, en tout état de cause, ni incompatible avec la vocation de la zone, ni contradictoire avec les autres dispositions de ce règlement ;

Considérant que, d'autre part, aux termes du II de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme : Les documents et décisions relatifs à l'occupation des sols comportent les dispositions propres à préserver les espaces, paysages et milieux caractéristiques du patrimoine naturel et culturel montagnard ; que ces dispositions n'interdisent pas non plus par principe, et en raison de la nature même de telles installations, l'édification d'éoliennes en zone de montagne ; que par suite, l'exception tirée de la méconnaissance par l'article 2 du règlement de la zone ND du plan d'occupation des sols de Séverac-le-Château du II de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme ne peut être également qu'écartée ;

Considérant enfin qu'aucune disposition en vigueur n'imposait à la commune de Séverac-le-Château de déterminer dans son plan d'occupation des sols des zones d'implantation d'éoliennes ; que par suite, la circonstance que ce document ne comporte aucune planification sur ce point ne peut l'entacher d'illégalité ;

Considérant en second lieu que, dès lors que le plan d'occupation des sols applicable n'était pas illégal, les requérants ne peuvent en tout état de cause utilement soutenir que sa déclaration d'illégalité remettrait en vigueur les dispositions précédentes, et que le permis de construire méconnaîtrait l'article 6, relatif à l'implantation des constructions, du règlement de la zone ND du précédent plan d'occupation des sols de Séverac-le-Château, qui souffrirait des mêmes insuffisances que celui approuvé en 2007, voire l'article 10, relatif à la hauteur des constructions, du règlement de la zone NC approuvé en 1979 ;

En ce qui concerne les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme :

Considérant en premier lieu, que le projet de la SNC Esco, visible depuis des lieux de patrimoine importants, comme le château de Séverac, est implanté à plus de 1.000 mètres d'altitude dans le parc national des Grands Causses, partiellement dans la zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique dite du Puech del Pal , à proximité d'une autre de ces zones, les landes d'Engayresque et du Puech de la Croix ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que les quatre éoliennes en cause sont, dans un rayon de 10 kilomètres, assez largement dissimulées à la vue par le relief, le massif du Puech del Pal, notamment, formant écran pour tout observateur qui se tiendrait à l'Ouest par rapport à elles ; qu'elles sont alignées le long d'un axe qui se prolonge jusqu'au château de Séverac, de sorte que, depuis ce lieu touristique fréquenté, seule l'une des machines est visible ; qu'il est prévu pour toutes les installations une teinte grise très commune dans le secteur ; que les autorisations sont assorties de prescriptions, tenant notamment à l'interdiction de faire figurer sur la nacelle une quelconque inscription ; que le poste de livraison, qui présente un volume simple, est implanté dans une légère dépression en bordure de haie vive ; que les accès au parc sont limités au strict nécessaire ; que les raccordements font l'objet d'un enfouissement ; que dans ces conditions, à supposer que le lieu d'implantation du projet s'inscrive dans un espace, paysage ou milieu caractéristique du patrimoine naturel et culturel montagnard, les dispositions que comportent les arrêtés du 21 juin 2006 sont propres à le préserver ; qu'il s'ensuit que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que ces arrêtés méconnaîtraient le II précité de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme ;

Considérant en second lieu, qu'aux termes du III de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme : Sous réserve de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension limitée des constructions existantes et de la réalisation d'installations ou d'équipements publics incompatibles avec le voisinage des zones habitées, l'urbanisation doit se réaliser en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants (...) ; qu'il ressort des pièces du dossier que le projet de la SNC Esco consiste, ainsi qu'il a été dit, en l'implantation de quatre aérogénérateurs d'électricité au sommet de mâts de plus de 100 mètres de haut, de nature à engendrer des nuisances, notamment sonores, à sa proximité ; qu'un tel projet, eu égard à son importance, est incompatible avec le voisinage des zones habitées ; qu'il ressort également des pièces du dossier que les 15 à 18 gigawatts par heure de production électrique que doit engendrer le parc éolien ont vocation, non pas à faire l'objet d'une consommation privée, mais à être vendus au gestionnaire du réseau général et à alimenter celui-ci ; qu'eu égard à cette destination, et quand bien même elles doivent rester la propriété d'une société privée, ces éoliennes peuvent bénéficier de la dérogation prévue au III de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme ;

En ce qui concerne les autres moyens :

Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 421-1-1 du code de l'urbanisme, alors en vigueur : La demande de permis de construire est présentée soit par le propriétaire du terrain ou son mandataire, soit par une personne justifiant d'un titre l'habilitant à construire sur le terrain, soit par une personne ayant qualité pour bénéficier de l'expropriation dudit terrain pour cause d'utilité publique (...) ; qu'il ressort des pièces du dossier que la SNC Esco, pétitionnaire, a produit devant les services préfectoraux les autorisations écrites des propriétaires des parcelles devant servir d'assiette ou être survolées par son projet d'éoliennes ; qu'ainsi, à la lecture du dossier de demande, l'autorité administrative a pu légalement estimer qu'elle justifiait du titre approprié l'habilitant à construire ; que dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 421-1-1 du code de l'urbanisme doit être écarté ;

Considérant en deuxième lieu que, ainsi qu'il a été dit, l'article 2 du règlement de la zone ND du plan d'occupation des sols de Séverac-le-Château autorise l'édification de bâtiments techniques d'intérêt public, et partant, le parc éolien en cause ; que dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les arrêtés du 21 juin 2006 méconnaîtraient ce règlement ;

Considérant en troisième lieu, que les dispositions précitées du III de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme issues de la loi du 9 janvier 1985 régissent de façon exclusive les conditions dans lesquelles le développement de l'urbanisation est autorisé dans les zones de montagne, en faisant notamment application d'un principe de prohibition générale de l'urbanisation isolée ; que ces dispositions spéciales ont ainsi seules vocation à réglementer l'urbanisation dérogatoire des espaces naturels de ces secteurs ; que les requérants ne peuvent dès lors utilement se prévaloir de l'article R. 111-14-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable, qui permet de façon générale à l'administration de s'opposer à un projet qui favoriserait une urbanisation dispersée incompatible avec les espaces naturels l'environnant ;

Considérant en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-14-2 du code de l'urbanisme, alors en vigueur : Le permis de construire est délivré dans le respect des préoccupations d'environnement définies à l'article 1er de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature. Il peut n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales, si les constructions, par leur situation, leur destination ou leurs dimensions, sont de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement ; que les requérants font valoir les risques que le projet fait peser sur l'avifaune, et notamment pour certains rapaces rares comme le vautour moine ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que le site d'implantation du projet n'est pas situé dans une zone où les oiseaux font l'objet d'une protection particulière ; que la Ligue de protection des oiseaux, sous la réserve notamment que les parcs éoliens ne se multiplient pas dans la région, n'a pas émis un avis défavorable à la construction du parc en cause, eu égard à la circonstance qu'il se limite à quatre éoliennes ; que la direction régionale de l'environnement a également émis un avis favorable le 12 avril 2006 sous certaines conditions qui ont été reprises à titre de prescriptions par les autorisations litigieuses ; que dans ces conditions, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article R. 111-14-2 précité du code de l'urbanisme ;

Considérant en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable : Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation ou leurs dimensions, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. Il en est de même si les constructions projetées, par leur implantation à proximité d'autres installations, leurs caractéristiques ou leur situation, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'étude d'impact, réalisée sur ce point en se fondant sur un modèle d'aérogénérateurs plus bruyant que celui qui a finalement été retenu, que seule une ferme située au lieu-dit La Roubayre était susceptible de subir, du fait du fonctionnement de l'éolienne n° 4 située à Séverac-le-Château, une nuisance sonore dépassant les niveaux réglementaires, et ce, essentiellement la nuit sous certaines conditions météorologiques ; que pour obvier à cette difficulté, le projet initial qui n'avait pas été autorisé par le préfet a été modifié, les éoliennes choisies en définitive, à pales flexibles, présentant un niveau sonore inférieur ; que les autorisations comportent pour prescriptions, d'une part, que le pétitionnaire respecte un protocole de fonctionnement séquentiel conduisant à l'arrêt de l'éolienne n° 4 la nuit lorsque la vitesse du vent dépasse 8 mètres par seconde, et d'autre part, qu'il évalue l'efficacité de ce protocole ; que la direction régionale de l'environnement a rendu un avis favorable au projet ainsi modifié ; que par ailleurs le maître d'ouvrage d'une canalisation de gaz à haute-pression passant à proximité a donné son accord à la réalisation du projet après étude des modifications proposées par la société Esco ; qu'il s'ensuit que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

Considérant en sixième lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable : Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ; qu'eu égard aux éléments de fait qui ont déjà été exposés pour l'examen du moyen tiré de la méconnaissance du II de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme, en estimant que le projet qui lui était soumis ne portait pas atteinte au site, le préfet n'a pas non plus commis d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant en septième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-19 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable : A moins que le bâtiment à construire ne jouxte la limite parcellaire, la distance comptée horizontalement de tout point de ce bâtiment au point de la limite parcellaire qui en est le plus rapproché doit être au moins égale à la moitié de la différence d'altitude entre ces deux points, sans pouvoir être inférieure à trois mètres (...) ; que pour soutenir que la notion de bâtiment, au sens de ces dispositions, inclurait les éoliennes, les requérants ne sauraient se prévaloir utilement des notions de bâtiments au sens que leur donnent le code civil ou le code général des impôts ; qu'il ne sauraient non plus se prévaloir de la rédaction de l'article R. 111-1 du code de l'urbanisme, au demeurant invoqué dans une rédaction postérieure aux décisions attaquées, qui ne définit ni d'ailleurs ne mentionne la notion de bâtiment ; qu'il résulte au contraire tant de la lettre que de la finalité de l'article R. 111-19 du code de l'urbanisme que les éoliennes ne constituent pas des bâtiments au sens de cet article ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de sa méconnaissance par le projet en cause doit être écarté comme inopérant ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées aux demandes de première instance, que les époux X et Y et l'association PROTEGEONS NOS ESPACES POUR L'AVENIR ne sont pas fondés à demander l'annulation des arrêtés du 21 juin 2006 par lesquels le préfet de l'Aveyron a accordé à la SNC Esco les permis de construire le parc éolien de Montfrech ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement nos 0604959 et 0604960 du 3 juin 2010 du tribunal administratif de Toulouse est annulé.

Article 2 : Les demandes des époux X et Y et de l'association PROTEGEONS NOS ESPACES POUR L'AVENIR, enregistrées au greffe du tribunal administratif de Toulouse sous les nos 0604959 et 0604960, sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de la SNC Esco tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 10BX01911


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10BX01911
Date de la décision : 05/01/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Guillaume de la TAILLE LOLAINVILLE
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : CABINET MAILLOT AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-01-05;10bx01911 ?
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