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12/07/2012 | FRANCE | N°12BX00470

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 12 juillet 2012, 12BX00470


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 24 février 2012, par télécopie, régularisée le 27 février 2012, présentée pour Mme Isabelle A demeurant ..., par l'AARPI Brel-Bachet-Kosseva-Venzal, avocats associés ;

Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103047 en date du 12 janvier 2012, du tribunal administratif de Toulouse rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juin 2011, par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et

a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) d'enjoindre au...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 24 février 2012, par télécopie, régularisée le 27 février 2012, présentée pour Mme Isabelle A demeurant ..., par l'AARPI Brel-Bachet-Kosseva-Venzal, avocats associés ;

Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103047 en date du 12 janvier 2012, du tribunal administratif de Toulouse rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juin 2011, par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1.500 euros au bénéfice de son avocat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le décret n° 2001-492 du 6 juin 2001, pris pour l'application du chapitre II du titre II de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 et relatif à l'accusé de réception des demandes présentées aux autorités administratives ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 juin 2012 :

- le rapport de Mme Evelyne Balzamo, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. David Katz, rapporteur public ;

Considérant que Mme A, de nationalité mauricienne, relève appel du jugement n° 1103047 du 12 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 8 juin 2011 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 2 du décret du 6 juin 2001, pris pour l'application de l'article 19 de la loi du 12 avril 2000 : " Lorsque la demande est incomplète, l'autorité administrative indique au demandeur les pièces manquantes dont la production est indispensable à l'instruction de la demande et celles des pièces rédigées dans une langue autre que le français dont la traduction et, le cas échéant, la légalisation sont requises. Elle fixe un délai pour la réception de ces pièces. / Le délai au terme duquel, à défaut de décision expresse, la demande est réputée acceptée ne court qu'à compter de la réception des pièces requises. / Le délai au terme duquel, à défaut de décision expresse, la demande est réputée rejetée est suspendu pendant le délai imparti pour produire les pièces requises. Toutefois, la production de ces pièces avant l'expiration du délai fixé met fin à cette suspension. / La liste des pièces manquantes, le délai fixé pour leur production et la mention des dispositions prévues, selon les cas, au deuxième ou au troisième alinéa du présent article figurent dans l'accusé de réception. Lorsque celui-ci a déjà été délivré, ces éléments sont communiqués par lettre au demandeur. " :

Considérant que si la requérante fait valoir que le préfet n'a pu, sans méconnaître les dispositions de l'article 2 du décret n° 2001-492 du 6 juin 2001, faire état dans son arrêté du défaut de production d'un contrat de travail visé par les services de l'emploi et d'un certificat de contrôle médical alors qu'il ne l'a pas invitée préalablement à produire ces documents, il ressort des termes de l'arrêté attaqué que le préfet s'est d'abord fondé sur le défaut de considérations humanitaires et de motifs exceptionnels ; que ce seul motif suffisait à justifier légalement le refus de délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet ayant ajouté de sa propre initiative l'examen de la situation de la requérante sur le fondement de l'article L 313-10, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 2 du décret du 6 juin 2001 ne saurait, en tout état de cause, être accueilli ;

Considérant, en deuxième lieu, que Mme A soutient que la décision litigieuse est entachée d'erreurs de fait ; que si elle fait valoir d'une part, que l'arrêté mentionne à tort que sa fille vit à l'Ile Maurice, alors que celle-ci est entrée sur le territoire français en novembre 2010, il ressort des pièces du dossier que la requérante a précisé dans sa demande de titre de séjour que sa fille ne résidait pas en France ; que si elle soutient d'autre part, qu'elle n'a pas démissionné de l'emploi qu'elle occupait au sein de la SARL Pastel mais qu'en raison des pratiques contraires à la législation du travail de cette entreprise, elle s'est vue contrainte de changer d'emploi, il ressort des pièces du dossier que le contrat de travail pour lequel Mme A a obtenu un visa de long séjour a été rompu par le départ volontaire de la requérante, en avril 2010 ; que Mme A n'apporte aucun justificatif probant permettant de contredire le fait qu'elle n'a pas été privée involontairement de son emploi ; qu'ainsi, le départ de Mme A de la société Pastel a pu être considéré à juste titre comme une démission par le préfet de la Haute-Garonne ; que, dès lors, le moyen tiré des erreurs de fait qui entacheraient la décision litigieuse doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. " ; qu'en présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 313-14, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ; que par la référence au troisième alinéa de l'article L. 313-10, le législateur a entendu, ainsi qu'il ressort des travaux parlementaires préalables à l'adoption de la loi du 20 novembre 2007, limiter le champ de l'admission exceptionnelle à la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " aux cas dans lesquels cette admission est sollicitée pour exercer une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national, laquelle était, à la date de la décision attaquée, annexée à l'arrêté des ministres chargés de l'emploi et de l'immigration du 18 janvier 2008 ; que, dans l'hypothèse de l'examen de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat lui permettant d'exercer une activité figurant dans la liste annexée à l'arrêté interministériel du 18 janvier 2008, ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi ; qu'il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et recensés comme tels dans l'arrêté du 18 janvier 2008, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ;

Considérant que Mme A soutient que sa situation personnelle et professionnelle lui ouvre droit, à titre exceptionnel, à un titre de séjour temporaire ; que toutefois, les violences conjugales auxquelles elle aurait été exposée à l'île Maurice, qui ne sont pas établies, ne constituent pas par elles-mêmes un motif exceptionnel ; que si Mme A produit un contrat de travail à durée indéterminée conclu le 1er novembre 2010 en qualité d'agent de service hospitalier au sein de la société Résidence sénior Toulouse, la profession d'agent de service hospitalier ne figure pas sur les listes annexées à l'article 1er de l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, en vigueur à la date de la décision attaquée ; que, dans ces conditions, en l'absence de toute autre circonstance particulière justifiant une régularisation de la situation de la requérante, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant de délivrer un titre de séjour à Mme A sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;

Considérant que le refus de titre de séjour litigieux n'a ni pour objet ni pour effet de séparer Mme A de sa fille ; qu'en outre, la circonstance que l'enfant soit scolarisée en classe de cinquième et bien intégrée ne saurait, par elle-même, révéler une méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; que, dès lors, rien ne fait obstacle à ce qu'elle retourne avec sa mère à l'Ile Maurice, où elle a été scolarisée jusqu'à l'âge de douze ans ; que la circonstance, à la supposer même établie, qu'elle soit prise en charge pour des troubles psychologiques, n'est pas de nature à faire obstacle à son retour dans son pays d'origine, dès lors que la gravité desdits troubles n'est pas attestée par les pièces du dossier et qu'il n'est pas même allégué qu'ils ne pourraient être pris en compte à l'Ile Maurice ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de cet article doit être écarté ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ne peut qu'être écarté ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

Considérant que Mme A fait valoir qu'elle encourrait des risques en cas de retour à l'Ile Maurice, où elle soutient avoir été victime de violences de la part de son époux ; que, toutefois, Mme A n'apporte à l'appui de ses allégations aucun élément probant de nature à établir l'existence des risques qu'elle encourrait personnellement en cas de retour à l'Ile Maurice ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par le préfet, Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ;

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté attaqué, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que dès lors, les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme A ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de quelque somme que ce soit au profit de l'avocat de Mme A, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

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No 12BX00470


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12BX00470
Date de la décision : 12/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Evelyne BALZAMO
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : BREL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-07-12;12bx00470 ?
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