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27/05/2014 | FRANCE | N°12BX00544

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 27 mai 2014, 12BX00544


Vu la requête enregistrée le 8 février 2012 et le mémoire complémentaire enregistré le 23 mars 2012 présentés pour M. B...C...demeurant..., par Me Meillon ;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°0903399 en date du 8 décembre 2011 du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2005 ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur

la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2003 au 31 déce...

Vu la requête enregistrée le 8 février 2012 et le mémoire complémentaire enregistré le 23 mars 2012 présentés pour M. B...C...demeurant..., par Me Meillon ;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°0903399 en date du 8 décembre 2011 du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2005 ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2005 ainsi que des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 avril 2014 :

- le rapport de M. Philippe Cristille, premier-conseiller ;

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;

- les observations de Me Meillon, avocat de M.C... ;

1. Considérant que M.C..., qui exerce l'activité d'artisan plâtrier et s'était placé, pour les années 2003, 2004 et 2005, sous le régime des micro-entreprises pour ses bénéfices industriels et commerciaux et sous celui de la franchise en base pour la taxe sur la valeur ajoutée, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les années 2002 à 2005 ; qu'au cours des opérations de contrôle, le vérificateur a constaté que M. C...avait déclaré son chiffre d'affaires au titre de ces années exclusivement dans la rubrique " ventes de marchandises ou assimilées " ; qu'estimant que l'activité du contribuable relevait de la catégorie des activités mixtes, caractérisées par des prestations de services accompagnées de vente de matériaux, le vérificateur a procédé à une ventilation du chiffre d'affaires de chaque année vérifiée entre ventes des matériaux et prestations de services ; que cette ventilation a conduit le service à estimer que, si le chiffre d'affaires global de M. C...des années vérifiées était inférieur au plafond de 76 300 euros en-deçà duquel trouvaient à s'appliquer le régime des micro-entreprises et le régime de franchise en base pour la taxe sur la valeur ajoutée, la part de ce chiffre d'affaires afférente aux prestations de services était, pour chacune des années, supérieure à la limite de 27 000 euros prévue par l'article 50-0 du code général des impôts, ce qui excluait l'application tant du régime des micro-entreprises pour la détermination du bénéfice que de celui de la franchise en base pour la taxe sur la valeur ajoutée ; que l'administration a notifié à M.C..., d'une part, selon la procédure d'évaluation d'office, des redressements en matière de bénéfices industriels et commerciaux au titre des années 2003, 2004 et 2005, d'autre part, selon la procédure de taxation d'office, des redressements en matière de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2005 ; que, par la présente requête, M. C...relève appel du jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 8 décembre 2011 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2005 ainsi que des pénalités correspondantes ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que dans sa demande présentée au tribunal administratif de Bordeaux, M. C...a contesté, d'une part, les compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été seul assujetti au titre des années 2003 à 2005 à raison de l'exercice de son activité de plâtrier, d'autre part, les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquels lui-même et son épouse ont été assujettis au titre des mêmes années ; que, compte tenu de la nature de l'impôt sur le revenu et de celle de la taxe sur la valeur ajoutée, et quels que fussent en l'espèce les liens de fait et de droit entre ces impositions, le tribunal administratif devait, s'agissant d'impositions établies au nom de deux contribuables distincts, inviter l'intéressé à régulariser ses écritures par la production d'une demande distincte pour chacun des contribuables concernés et statuer par deux décisions séparées à l'égard, d'une part, de M. C...en tant que seul redevable de la taxe sur la valeur ajoutée et, d'autre part, de M. et Mme C...en ce qui concerne le litige relatif aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu ; que c'est en méconnaissance de cette règle d'ordre public que le tribunal administratif de Bordeaux a statué par un seul jugement sur l'ensemble des conclusions de la demande dont il avait été saisi ; que, par suite, ce jugement doit être annulé en tant qu'il a statué sur ces impositions ;

3. Considérant qu'il y a lieu, pour la cour de statuer par voie d'évocation sur les conclusions de M. C...tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre des années 2003, 2004 et 2005 ;

Au fond :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 293 B du même code, dans sa rédaction applicable aux années en litige, relatif au régime de la franchise en base en matière de taxe sur la valeur ajoutée : " I. - 1. Pour leurs livraisons de biens et leurs prestations de services, les assujettis établis en France (....) bénéficient d'une franchise qui les dispense du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'ils n'ont pas réalisé au cours de l'année civile précédente un chiffre d'affaires supérieur à : a. 76 300 euros s'ils réalisent des livraisons de biens, des ventes à consommer sur place ou des prestations d'hébergement ; b. 27 000 euros s'ils réalisent d'autres prestations de services. 2. Lorsqu'un assujetti réalise des opérations relevant des deux limites définies au 1, le régime de la franchise ne lui est applicable que s'il n'a pas réalisé au cours de l'année civile précédente un chiffre d'affaires global supérieur à 76 300 euros et un chiffre d'affaires afférent à des prestations de services autres que des ventes à consommer sur place et des prestations d'hébergement supérieur à 27 000 euros/ II. 1. Les dispositions du I cessent de s'appliquer aux assujettis dont le chiffre d'affaires de l'année en cours dépasse le montant de 84 000 euros s'ils réalisent des livraisons de biens, des ventes à consommer sur place ou des prestations d'hébergement, ou 30 500 euros s'ils réalisent d'autres prestations de services. / 2. Pour les assujettis visés au 2 du I, le régime de la franchise cesse de s'appliquer lorsque le chiffre d'affaires global de l'année en cours dépasse le montant de 84 000 euros ou lorsque le chiffre d'affaires de l'année en cours afférent aux prestations de services autres que les ventes à consommer sur place et les prestations d'hébergement dépasse le montant de 30 500 euros. / 3. Les assujettis visés aux 1 et 2 deviennent redevables de la taxe sur la valeur ajoutée pour les prestations de services et les livraisons de biens effectuées à compter du premier jour du mois au cours duquel ces chiffres sont dépassés. " ; qu'en vertu du 1° du IV de l'article 256 du code général des impôts, les travaux immobiliers sont considérés comme des prestations de services ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'activité exercée par M. C...consiste à réaliser, au profit de propriétaires immobiliers, des travaux de pose d'enduits, de cloisons, de faux-plafonds et de laine de verre ; qu'une telle activité, qui consiste à fournir des prestations de services correspondant à la main d'oeuvre et au savoir-faire déployés par l'intéressé sur les chantiers où il intervient, en utilisant les matériaux nécessaires à la réalisation de ces prestations, ne saurait être regardée, contrairement à ce que soutient le requérant, comme consistant en des livraisons de biens au sens des dispositions précitées de l'article 293 B du code général des impôts ; qu'il s'agit en réalité de travaux immobiliers, lesquels sont considérés par l'article 256 précité du code général des impôts, relatif au champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, comme des prestations de services ; que, par suite, doit être écarté le moyen tiré de ce que seul était applicable en l'espèce le plafond de 76 300 euros fixé par les dispositions précitées de l'article 293 B, dans leur rédaction alors applicable, pour les entreprises qui réalisent des livraisons de biens, des ventes à consommer sur place ou des prestations d'hébergement ;

6. Considérant que les impositions sont fondées sur ce que les recettes réalisées par M. C... ne relèvent pas du régime de la franchise en base défini par l'article 293 B précité du code général des impôts dès lors que les recettes provenant des prestations de services sont supérieures au plafond de 27 000 euros fixé par le 1 de cet article ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'administration n'a pu légalement opposer au contribuable les réponses ministérielles et l'instruction 4 G 2-99 du 20 juillet 1999 qui qualifient de mixte l'activité des entreprises du secteur du bâtiment ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant que le requérant n'est pas fondé à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des réponses ministérielles du 24 mars 2003 et du 13 juin 2006 faites à MM. A... etD..., députés, concernant les professions d'ébénistes et de prothésistes dentaires, dans les prévisions desquelles il n'entre pas ;

8. Considérant que les factures délivrées par M. C...à ses clients ne faisaient pas apparaître de façon distincte les prestations de services et les ventes de matériaux, mais comportaient généralement une facturation en fonction du m² réalisé et, pour quelques chantiers, une facturation à la journée ; qu'à défaut de tout élément fourni par le contribuable permettant de procéder à la ventilation des recettes selon qu'elles proviennent des prestations de services ou de la vente de matériaux, le vérificateur a procédé à une évaluation du coefficient permettant de déterminer la part du chiffre d'affaires global des années 2002 à 2005 provenant des prestations de services afin de déterminer si le plafond de 27 000 euros fixé pour les prestations de services par l'article 293 B du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable avait été ou non dépassé ; que, pour ce faire, il a évalué, pour chacune des onze catégories de travaux les plus fréquemment réalisés par M.C..., le pourcentage représenté par les prestations de services dans les prix facturés aux clients pour chacune de ces catégories, en tenant compte du prix d'achat des différents matériaux, des menues fournitures s'ajoutant aux matériaux principaux, des spécificités liées aux chantiers (neuf ou rénovation), et des quantités de matériaux nécessaires pour chaque catégorie de travaux ; qu'en fonction de ces éléments, le vérificateur a fixé à 72% en moyenne la part des prestations de service dans le prix facturé, pourcentage ramené à 65% pour tenir compte des différents éléments propres à chaque chantier ; que le requérant ne conteste ni le choix par le vérificateur des catégories de travaux, ni les quantités de matériaux qu'il a estimé nécessaires pour chaque catégorie de travaux, ni les prix d'achat de ces matériaux, ni les prix au m² facturés aux clients ; qu'il fait seulement valoir que la méthode du vérificateur est viciée et excessivement sommaire en ce qu'il a calculé la part de la vente de matériaux dans le prix facturé aux clients en retenant tel quel le prix d'achat de ces matériaux, sans tenir compte de la marge nécessairement prise par l'artisan ; que, toutefois, il n'apporte pas le moindre élément permettant de confirmer la réalité de la pratique d'une telle marge et a fortiori permettant d'évaluer l'ampleur de cette hypothétique marge ; que, s'il revendique un coefficient multiplicateur de 2,5 qui serait habituellement pratiqué dans la profession, sans toutefois apporter le moindre élément en ce sens, l'application de ce coefficient aux prix d'achat de matériaux retenus par le vérificateur aboutirait, pour certaines catégories de travaux, à des ventes de matériaux d'un montant supérieur aux prix facturés par M. C...pour l'ensemble constitué par la prestation de service et la fourniture de matériaux ; que, dans ces conditions, la méthode retenue par le vérificateur pour déterminer si les recettes de M. C...provenant des prestations de services ont dépassé le seuil de 27 000 euros pour les années 2002 à 2005, qui repose sur des données tirées du fonctionnement de l'entreprise dont la pertinence n'est pas sérieusement contestée, ne peut être regardée comme présentant un caractère vicié ou excessivement sommaire ;

9. Considérant que l'application du pourcentage de 65% indiqué au point 8 ci-dessus aux sommes totales facturées par M. C...à ses clients au cours de l'année 2002 et de chacune des années 2003 à 2005 en litige aboutit à des montants de recettes provenant des prestations de services supérieurs à 27 000 euros hors taxes ; que, par suite, M. C...ne relevait pas, pour la taxe sur la valeur ajoutée des années 2003 à 2005, du régime de la franchise en base ; qu'il en résulte que, d'une part, en ne souscrivant pas de déclarations en matière de taxe sur la valeur ajoutée, M. C...s'est exposé, en application de l'article L. 66-3° du livre des procédures fiscales, à la taxation d'office de son chiffre d'affaires, et que, d'autre part, l'administration était fondée à l'assujettir à la taxe sur la valeur ajoutée ; que le requérant qui, en vertu de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, supporte la charge de la preuve, ne conteste ni les chiffres d'affaires retenus par l'administration pour déterminer les droits dus, ni les taux de taxe appliqués, et n'apporte ainsi aucun élément propre à remettre en cause les bases d'imposition retenues pour l'établissement des impositions contestées ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à demander la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qu'il conteste ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, soit condamné à verser à M. C...la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er: Le jugement n°0903399 du tribunal administratif de Bordeaux en date du 8 décembre 2011 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de M. C...tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre de la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2005 sont rejetées, de même que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative tant en première instance qu'en appel.

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N°12BX00544


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX00544
Date de la décision : 27/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Philippe CRISTILLE
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : MEILLON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-05-27;12bx00544 ?
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