La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/06/2014 | FRANCE | N°13BX03230

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 26 juin 2014, 13BX03230


Vu le recours, enregistré le 2 décembre 2013, présentée par le préfet de la Haute-Vienne qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301623 du 8 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé son arrêté du 6 novembre 2013 prononçant l'assignation à résidence de M.A... ;

2°) de rejeter la demande de M.A... ;

----------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés

fondamentales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes admi...

Vu le recours, enregistré le 2 décembre 2013, présentée par le préfet de la Haute-Vienne qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301623 du 8 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé son arrêté du 6 novembre 2013 prononçant l'assignation à résidence de M.A... ;

2°) de rejeter la demande de M.A... ;

----------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2014 :

-le rapport de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, premier conseiller ;

-les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

1. Considérant que le préfet de la Haute-Vienne relève appel du jugement du 8 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé son arrêté du 6 novembre 2013 prononçant l'assignation à résidence de M.A... ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation. Les trois derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve de la durée maximale de l'assignation, qui ne peut excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois " ; qu'aux termes de l'article L. 551-1 de ce code : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant la de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lors que cet étranger : (...) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré (...) " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

4. Considérant que l'arrêté du 6 novembre 2013 portant assignation à résidence de M. A..., de nationalité algérienne, vise les articles applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne que l'intéressé a fait l'objet d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours le 29 mai 2013, notifié le 5 juin 2013, et qu'il n'a pas respecté cette obligation ; qu'il précise également que M.A..., qui possède un passeport et un domicile, justifie de garanties de représentation, et que, si la place d'avion sollicitée auprès de la police des frontières " n'est pas à ce jour délivrée ", l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français " demeure une perspective raisonnable " ; que cet arrêté, qui énonce ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est par suite suffisamment motivé ; que, contrairement à ce que soutient M.A..., le préfet n'avait pas à mentionner les éléments de sa situation familiale, lesquels sont sans influence sur une décision portant assignation à résidence, qui n'a pas en elle-même pour objet de séparer l'étranger de sa famille ; que, de même, le préfet n'était pas tenu de motiver le choix de la durée de quarante-cinq jours, ni de mentionner la circonstance que l'intéressé avait intenté un recours contre l'obligation de quitter le territoire français devant le tribunal administratif de Limoges, lequel recours avait au demeurant été rejeté par ce tribunal à la date de la décision attaquée ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur le défaut de motivation de la décision attaquée et le défaut d'examen de la situation particulière du requérant pour annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 6 novembre 2013 ;

6. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le tribunal administratif de Limoges et devant la cour ;

7. Considérant, en premier lieu, que par arrêté du 20 avril 2013, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département de la Haute-Vienne, le préfet de la Haute-Vienne a donné délégation à M. Alain Castagnier, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer " tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l'État dans le département de la Haute-Vienne ", à l'exception de certaines matières dans lesquelles ne figurent pas les décisions portant assignation à résidence ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte doit être écarté ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que le droit de toute personne d'être entendue avant l'intervention d'une mesure individuelle défavorable, énoncé notamment au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, et qui figure parmi les principes fondamentaux du droit de l'Union européenne, suppose seulement pour l'administration l'obligation d'informer l'intéressé qu'une décision lui faisant grief est susceptible d'être prise à son encontre et de le mettre ainsi en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de solliciter un entretien pour faire valoir ses observations orales ; qu'une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... aurait eu de nouveaux éléments à faire valoir qui auraient conduit le préfet à prendre une décision différente ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'en prenant à son encontre une mesure d'assignation à résidence sans le mettre en mesure de présenter ses observations, le préfet aurait porté atteinte au principe général du droit de l'Union européenne garantissant à toute personne le droit d'être entendue préalablement à l'adoption d'une mesure individuelle l'affectant défavorablement et également méconnu les dispositions de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ne peut qu'être écarté ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile rappelés au point 2 que l'assignation à résidence est applicable à l'étranger qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le requérant ne peut utilement soutenir qu'il ne pouvait faire l'objet d'une telle mesure dès lors qu'il ne présentait aucun risque de fuite ;

10. Considérant, enfin, que le moyen tiré de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de la décision attaquée ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Haute-Vienne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a annulé l'arrêté du 6 novembre 2013 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. A...la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Limoges en date du 8 novembre 2013 est annulé.

Article 2 : La demande portée par M. A...devant le tribunal administratif de Limoges est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. A...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

----------------------------------------------------------------------------------------

''

''

''

''

2

N° 13BX03230


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX03230
Date de la décision : 26/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme RICHER
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SELARL PREGUIMBEAU - GREZE : AEGIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-06-26;13bx03230 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award