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10/11/2014 | FRANCE | N°14BX01221

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 10 novembre 2014, 14BX01221


Vu la requête enregistrée le 22 avril 2014, présentée pour Mme A...C..., demeurant..., par Me B...;

Mme C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302941 du 26 mars 2014 du tribunal administratif de Poitiers qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 novembre 2013 du préfet de la Charente refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Charen

te de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

4°) ...

Vu la requête enregistrée le 22 avril 2014, présentée pour Mme A...C..., demeurant..., par Me B...;

Mme C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302941 du 26 mars 2014 du tribunal administratif de Poitiers qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 novembre 2013 du préfet de la Charente refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Charente de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 octobre 2014:

- le rapport de M. Bernard Chemin, président ;

- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public ;

1. Considérant que MmeC..., ressortissante malgache, est entrée en France le 26 septembre 2010 sous couvert d'un passeport muni d'un visa de court séjour valable du 2 septembre 2010 au 16 décembre 2010 ; qu'après avoir conclu le 5 février 2013 un pacte civil de solidarité avec un ressortissant de nationalité française, elle a sollicité, le 22 juillet 2013, un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; que par un arrêté du 26 novembre 2013, le préfet de la Charente a rejeté sa demande, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et fixé le pays de renvoi ; que Mme C...fait appel du jugement du 26 mars 2014 du tribunal administratif de Poitiers qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet de la Charente :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les noms et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours. " ; que la requête de MmeC..., alors même qu'elle reprend les mêmes moyens que ceux soulevés en première instance, ne consiste pas dans la seule reproduction littérale de la demande présentée au tribunal administratif et énonce de manière précise les moyens invoqués à l'encontre de l'arrêté litigieux ; qu'elle satisfait ainsi aux prescriptions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative et n'est donc pas irrecevable ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; que l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; " ; que pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ; que si la conclusion d'un pacte civil de solidarité par un ressortissant étranger n'emporte pas délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire, la conclusion d'un tel contrat constitue cependant pour l'autorité administrative un élément de la situation personnelle de l'intéressé, dont elle doit tenir compte, pour apprécier si un refus de délivrance de la carte de séjour sollicitée par le demandeur, compte tenu de l'ancienneté de la vie commune avec son partenaire, n'entraînerait pas une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des attestations de proches, de factures communes et de courriers d'institutions adressées aux intéressés à une adresse commune, que Mme C...et son compagnon de nationalité française vivaient ensemble depuis le mois de janvier 2012, avant même la conclusion le 5 février 2013 du pacte civil de solidarité les unissant, lequel n'a pu être contracté qu'après la dissolution de son mariage à Madagascar ; qu'ainsi, il apparaît que la vie commune du couple était constituée depuis pratiquement deux ans à la date de l'arrêté contesté ; que, compte tenu de la réalité et de la stabilité de la relation, le préfet de la Charente, en refusant de lui délivrer le titre de séjour sollicité, a porté une atteinte excessive au droit de Mme C...au respect de sa vie privée et familiale, et a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que les dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors même que la requérante n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine ; que ce refus de séjour doit donc être annulé, ainsi que, par voie de conséquence, l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi dont il a été assorti ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que Mme C...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande ;

Sur les autres conclusions :

6. Considérant qu'eu égard à son motif, l'annulation prononcée par le présent arrêt implique qu'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " soit délivré à Mme C... ; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Charente de lui délivrer un tel titre dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

7. Considérant que par une décision du 26 mai 2014, le bureau d'aide juridictionnelle a rejeté la demande de Mme C... tendant à l'obtention de cette aide ; que, dès lors, son conseil ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement n° 1302941 du 26 mars 2014 du tribunal administratif de Poitiers et l'arrêté du 26 novembre 2013 du préfet de la Charente sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Charente de délivrer à Mme C...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

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No 14BX01221


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX01221
Date de la décision : 10/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. CHEMIN
Rapporteur ?: M. Bernard CHEMIN
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : SELARL BERTRAND - RAHMANI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-11-10;14bx01221 ?
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