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08/12/2015 | FRANCE | N°15BX01255

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 08 décembre 2015, 15BX01255


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...E...a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler l'arrêté en date du 26 février 2014 par lequel la préfète de la Guadeloupe lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1400435 du 18 décembre 2014, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et une mémoire complémentaire enregistrés respectivement l

es 13 avril 2015 et 19 mai 2015, M. E..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...E...a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler l'arrêté en date du 26 février 2014 par lequel la préfète de la Guadeloupe lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1400435 du 18 décembre 2014, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et une mémoire complémentaire enregistrés respectivement les 13 avril 2015 et 19 mai 2015, M. E..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 18 décembre 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 février 2014 de la préfète de la Guadeloupe portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre à la préfète de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de trente jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Sabrina Ladoire a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. E...est né le 6 mars 1966 en Haïti. Il serait entré en France, selon ses propres déclarations, au mois de mai 1993. Il a fait une première demande de titre de séjour le 24 janvier 2011, sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, laquelle a donné lieu à un arrêté de rejet en date du 9 mai 2011, assorti d'une obligation de quitter le territoire dans le délai d'un mois et d'une décision fixant le pays de renvoi. N'ayant pas exécuté cette mesure d'éloignement, il a été interpellé par les services de police le 26 février 2014. La préfète de la Guadeloupe a, le même jour, adopté à son encontre un arrêté portant obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixation du pays de renvoi. M. E... relève appel du jugement du 18 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté du 26 février 2014 :

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". L'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".

3. Si un étranger peut, à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir formé contre une décision préfectorale l'obligeant à quitter le territoire, soutenir que, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, la décision du préfet serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, il ne peut utilement se prévaloir des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu, dans le cadre de la politique du Gouvernement en matière d'immigration, adresser aux préfets, sans les priver de leur pouvoir d'appréciation de chaque cas particulier, pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation. Aussi, M. E... ne peut-il utilement se prévaloir des énonciations de la circulaire du 28 novembre 2012 et notamment de celles relatives aux conditions d'examen des demandes d'admission exceptionnelle au séjour des ressortissants étrangers en situation irrégulière.

4. M. E... fait valoir qu'il vit en Guadeloupe depuis le mois de mai 1993, qu'il vit en couple depuis l'année 2004 avec une compatriote, également en situation irrégulière dont il a eu deux enfants, nés le 18 janvier 2005 et le 5 septembre 2006, qu'il participe à l'entretien et à l'éducation des quatre autres enfants de sa compagne, que les six enfants sont scolarisés depuis plusieurs années, qu'il travaille en qualité de maçon et dispose de revenus suffisants, qu'il maîtrise parfaitement la langue française et n'a plus d'attaches en Haïti à l'exception de sa mère.

5. Néanmoins, M. E... n'établit pas, par les pièces qu'il produit, qu'il vivrait en Guadeloupe depuis l'année 1993. Les seules pièces afférentes à sa résidence dans cette région sont deux contrats de bail datés respectivement du 1er janvier 2012 et du 1er janvier 2015, une attestation du propriétaire de la maison ainsi louée certifiant que le requérant y loge gratuitement depuis 2007, une attestation émanant du président de l'association Guadeloupe Mission Service, rédigée en des termes très généraux et qui ne comporte aucune précision quant aux modalités de la participation de M. E... aux activités de ladite association, un certificat de vie commune avec Mme A...daté du 4 janvier 2011, deux factures établies par la société Générale des Eaux de Guadeloupe, datées du 7 novembre 2013 et du 11 février 2015, trois avis d'imposition portant respectivement sur les revenus des années 2010, 2011 et 2013, indiquant d'ailleurs, pour chacune de ces années, un revenu égal à 0 euros, trois attestations établies par des proches, dépourvues de valeur probante, et, enfin, des certificats de scolarité datés du mois de mars 2015. Ces documents ne permettent pas d'établir que l'intéressé aurait résidé de manière continue en Guadeloupe depuis 1993.

6. Par ailleurs, la compagne du requérant, de même nationalité que lui, est également en situation irrégulière. L'intéressé n'établit pas qu'il disposerait de revenus stables issus de son travail et qu'il participerait à l'entretien et à l'éducation de ses deux enfants, nés respectivement en 2005 et 2006, qu'il n'a reconnus que le 15 avril 2010, et des quatre autres enfants de sa compagne. Enfin, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Haïti où résident, selon les déclarations qu'il a faites à l'agent de police qui l'a entendu le 26 février 2014, sa mère, son frère et sa soeur, ainsi que ses deux enfants majeurs. Dans ces conditions, et dès lors que rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue en Haïti, le préfet de la Guadeloupe, en adoptant l'obligation de quitter le territoire français en litige, n'a méconnu ni les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

7. Dans la mesure par ailleurs où l'arrêté attaqué n'a pas eu pour objet de répondre à une demande de titre de séjour formée par M. E... mais constitue une simple mesure d'éloignement prise sur le fondement du 3° de l'article L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les dispositions de l'article L. 312-2 du même code n'imposaient pas au préfet de saisir la commission du titre de séjour préalablement à son adoption. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions est par conséquent inopérant.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 février 2014 par lequel le préfet de la Guadeloupe lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Ses conclusions en annulation et, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent dès lors qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

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N° 15BX01255 - 2 -


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 15BX01255
Date de la décision : 08/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Sylvie CHERRIER
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : COTELLON

Origine de la décision
Date de l'import : 22/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-12-08;15bx01255 ?
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