La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/12/2015 | FRANCE | N°15BX01684

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 08 décembre 2015, 15BX01684


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...M'A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler, d'une part, l'arrêté du 23 avril 2015 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination, d'autre part, la décision du même jour ordonnant son assignation à résidence.

Par un jugement n° 1501981 du 27 avril 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure deva

nt la cour :

Par une requête enregistrée le 20 mai 2015, Mme C...M'A..., représentée par M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...M'A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler, d'une part, l'arrêté du 23 avril 2015 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination, d'autre part, la décision du même jour ordonnant son assignation à résidence.

Par un jugement n° 1501981 du 27 avril 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 mai 2015, Mme C...M'A..., représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 avril 2015 ;

2°) d'annuler les décisions contestées ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Bertrand Riou a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme M'A..., de nationalité tunisienne, née le 10 juin 1976, est entrée en France le 22 décembre 2012 selon ses déclarations, accompagnée de ses enfants. Suite à son interpellation, le 23 avril 2015, par les services de police, le préfet de la Haute-Garonne a pris le même jour à l'encontre de l'intéressée un arrêté l'obligeant à quitter le territoire français sans délai à destination de son pays d'origine et une décision ordonnant son assignation à résidence. Mme M'A... relève appel du jugement du 27 avril 2015 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté pris dans son ensemble :

2. L'arrêté du 23 avril 2015 faisant obligation à Mme M'A... de quitter le territoire français sans délai à destination de son pays d'origine n'a fait naître aucune décision implicite de refus de séjour susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressée ait présenté une demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour à laquelle le préfet de la Haute-Garonne aurait opposé un refus. Il s'ensuit que la demande de Mme M'A... tendant à l'annulation, en raison d'un défaut de motivation, de la prétendue décision de refus de séjour que comporterait cet arrêté est irrecevable et doit par suite être rejetée.

3. Le tribunal administratif a écarté, par des motifs détaillés et pertinents, les moyens tirés de ce que les décisions que contient l'arrêté en litige étaient insuffisamment motivées, étaient entachées d'erreurs de faits et de ce que le préfet de la Haute-Garonne n'avait pas effectivement procédé à un examen complet de la situation personnelle de la requérante. Il y a lieu d'écarter ces moyens, repris en appel sans que soient apportés des éléments nouveaux utiles et antérieurs ou contemporains de l'arrêté litigieux attaqué, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

4. Mme M'A..., n'ayant pas été en mesure de justifier de son entrée régulière en France, elle se trouvait dans le cas visé au 1° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permet au préfet de prendre une obligation de quitter le territoire français.

5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. Mme M'A... soutient que le centre de ses intérêts se trouve désormais en France où sont scolarisés ses deux enfants dont elle assume seule la charge. Toutefois, à la date de la décision en litige, l'intéressée ne vivait que depuis deux ans et demi sur le sol national, sans ressource et sans logement qui lui soit propre. Les pièces versées au dossier ne justifient pas d'une insertion particulière dans la société française. Elle n'a jamais demandé la régularisation de sa situation administrative. Il n'est pas établi que la requérante et le père des enfants soient dans l'incapacité de subvenir aux besoins ou à l'éducation de ces derniers en Tunisie, pays dont ils ont tous la nationalité et où l'intéressée a conservé à tout le moins une soeur. Dans ces conditions, et eu égard notamment aux conditions de séjour de la requérante sur le territoire français, la mesure d'éloignement litigieuse n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard du but poursuivi et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La même décision n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante.

7. Eu égard à ce qui a été dit précédemment, le moyen tiré de ce que la requérante remplirait les conditions de délivrance de plein droit d'une carte de séjour au titre du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, en tout état de cause, être écarté.

8. Rien ne s'oppose à ce que les enfants de la requérante suivent leur mère en Tunisie et y poursuivent leur scolarité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut être accueilli.

En ce qui concerne le refus d'accorder un délai de départ volontaire :

9. Il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que soutient la requérante, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité. Le moyen tiré du défaut de base légale du refus de lui accorder un délai de départ volontaire ne peut donc qu'être écarté.

10. Mme M'A... ne peut utilement se prévaloir, pour soulever par voie d'exception l'illégalité du refus de délai de départ volontaire, de l'illégalité d'un refus de séjour qui n'est pas intervenu, l'intéressée n'ayant jamais demandé la délivrance d'un tel titre.

11. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) ".

12. Mme M'A... ne peut justifier d'une entrée régulière sur le territoire français et n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour. Elle se maintient irrégulièrement dans l'espace Schengen depuis 2012. L'intéressée se trouvait donc dans la situation où, en application du a) de l'article L. 511-1, le préfet pouvait légalement décider de ne pas lui octroyer de délai de départ volontaire sous réserve de circonstances particulières. En estimant que l'intéressée ne justifiait pas de circonstances particulières permettant d'écarter le risque de fuite, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

13. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6 le moyen tiré de l'atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale de la requérante, tel que garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

14. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en édictant la décision litigieuse.

En ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :

15. Contrairement à ce que soutient Mme M'A..., la décision d'assignation à résidence est justifiée par la perspective raisonnable que constitue l'exécution de la décision du préfet lui faisant obligation de quitter le territoire français. En permettant à l'intéressée de rester sur le territoire français jusqu'au 10 juillet 2015 afin que ses enfants puissent terminer l'année scolaire, le préfet n'a pas entaché d'une erreur manifeste l'appréciation qu'il a portée sur la situation de la requérante.

16. Aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l 'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation (...) ". Le moyen tiré de ce que la requérante ne présentait pas un risque de fuite est inopérant dès lors que les dispositions précitées ne subordonnent pas la mesure d'assignation à résidence à l'existence d'un risque de fuite.

17. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme M'A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions attaquées.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

18. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par la requérante, n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction ne peuvent être accueillies.

Sur les conclusions présentées au titre du 2ème alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

19. L'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées au titre du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme M'A... est rejetée.

''

''

''

''

2

N°15BX01684


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 15BX01684
Date de la décision : 08/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Bertrand RIOU
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : CHMANI

Origine de la décision
Date de l'import : 22/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-12-08;15bx01684 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award