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17/12/2015 | FRANCE | N°14BX00901

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre (formation à trois), 17 décembre 2015, 14BX00901


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C...ont demandé au tribunal administratif de Pau de condamner la commune de Bézolles à les indemniser des préjudices subis du fait de l'absence d'entretien de l'accès de la voie communale n° 21 au débouché de la route départementale 112.

Par un jugement n° 1200269 du 23 janvier 2014, le tribunal administratif de Pau a condamné la commune de Bézolles à verser à M. et Mme C...la somme de 5 000 euros en réparation de leur préjudice moral.

Procédure devant la cour :

Par

une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 20 mars 2014 et le 9 juin 2015, la commu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C...ont demandé au tribunal administratif de Pau de condamner la commune de Bézolles à les indemniser des préjudices subis du fait de l'absence d'entretien de l'accès de la voie communale n° 21 au débouché de la route départementale 112.

Par un jugement n° 1200269 du 23 janvier 2014, le tribunal administratif de Pau a condamné la commune de Bézolles à verser à M. et Mme C...la somme de 5 000 euros en réparation de leur préjudice moral.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 20 mars 2014 et le 9 juin 2015, la commune de Bézolles, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Pau du 23 janvier 2014 en tant qu'il condamne la commune à verser aux époux C...la somme de 5 000 euros et met à sa charge les frais d'expertise ;

2°) de rejeter les conclusions des épouxC... ;

3°) de mettre à la charge des époux C...la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les frais d'expertise.

..........................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Claude Pauziès,

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant de la commune de Bézolles et de MeD..., représentant de M. et MmeC....

Vu la note en délibéré, enregistrée à la Cour le 8 décembre 2015, présentée pour M. C... par MeD... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C...sont propriétaires d'une maison d'habitation, d'une exploitation agricole et d'une brasserie desservies par la voie communale n° 21 à Bézolles. Ils ont saisi le juge des référés du tribunal administratif de Pau afin que soit ordonnée une expertise pour constater l'état de l'intersection entre la voie communale n° 21 et la route départementale 112 et déterminer les mesures nécessaires pour prévenir l'aggravation ou assurer l'amélioration de cet état. Par ordonnance du 30 novembre 2010, le juge des référés du tribunal administratif de Pau a ordonné une expertise. Après le dépôt du rapport de l'expert, le 19 mars 2011, M. et Mme C...ont saisi, le 8 février 2012, le tribunal administratif de Pau d'une demande en réparation des préjudices économique et moral résultant selon eux de l'absence d'entretien de la voie communale 21 au niveau de l'intersection avec la route départementale 112 et du danger résultant de cette situation. Par jugement en date du 23 janvier 2014, le tribunal administratif de Pau a fait droit à une partie des conclusions des époux C...en condamnant la commune de Bézolles à leur verser la somme de 5 000 euros au titre de leur préjudice moral. La commune de Bézolles interjette appel de ce jugement et par la voie de l'appel incident, M. et Mme C...demandent la réparation de leur préjudice économique.

Sur la régularité du jugement :

2. Les conclusions de la demande de M. et Mme C...doivent être regardées comme tendant à ce que soit engagée la responsabilité de la commune de Bézolles à la fois sur le terrain du défaut d'entretien normal de l'ouvrage public et de la carence fautive du maire de la commune dans l'exercice de ses pouvoirs de police administrative. En interprétant ainsi les conclusions de M. et MmeC..., les premiers juges n'ont donc pas statué au-delà des conclusions dont ils étaient saisis, ni par suite entaché leur jugement d'irrégularité.

Sur la recevabilité de la demande :

3. La commune de Bézolles reproche aux premiers juges d'avoir écarté la fin de non recevoir tirée de ce que les requérants ne pouvaient demander au juge d'établir l'existence d'un lien de causalité entre les éventuelles fautes commises et les préjudices allégués, preuve qu'il leur revenait d'apporter. M. et Mme C...ont présenté des conclusions demandant au tribunal " d'établir un lien de causalité direct " entre les fautes commises par la commune et les préjudices dont ils demandent réparation. Compte tenu des termes dans lesquels est rédigée la demande, ces conclusions doivent être regardées comme tendant à ce que le tribunal retienne l'existence d'un lien de causalité entre les manquements reprochés à la commune et les préjudices économique et moral dont ils demandent réparation. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté cette fin de non recevoir.

Sur la responsabilité :

En ce qui concerne l'exercice des pouvoirs de police :

4. Pour condamner la commune de Bézolles à verser à M. et Mme C...la somme de 5 000 euros en réparation de leur préjudice moral, le tribunal a retenu qu'en ne réalisant pas avant l'année 2013 des travaux d'élargissement de la voie communale n° 21 au niveau du carrefour avec la RD 112 alors que ce carrefour présente un caractère dangereux, le maire de la commune avait exposé les intimés à un danger et commis une faute dans l'exercice de ses pouvoirs de police.

5. Aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : 1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques (...) 5° Le soin de prévenir, par des précautions convenables (...) les accidents (...) "

6. Le refus opposé par un maire à une demande tendant à ce qu'il fasse usage des pouvoirs de police que lui confèrent les dispositions de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales n'est entaché d'illégalité que dans le cas ou, à raison de la gravité du péril résultant d'une situation particulièrement dangereuse pour le bon ordre, la sécurité ou la salubrité publique et notamment la sécurité de la circulation, cette autorité, en n'ordonnant pas les mesures indispensables pour faire cesser ce péril grave, méconnaît ses obligations légales. En l'espèce, si le rapport de l'expert désigné par le juge des référés du tribunal relève que ce carrefour présente des risques compte tenu de sa configuration pour accéder et sortir de la voie communale, l'expert indique aussi dans son rapport que deux balises blanches avec manchon rouge (balises J3) signalent réglementairement l'entrée de la voie communale et qu'une pré-signalisation verticale de " Danger " est implantée sur la RD 112 à l'approche du carrefour, indiquant dans un sens de circulation la présence d'un carrefour et dans l'autre, la sinuosité de la route et un risque de glissance. Au demeurant, l'expert souligne dans son rapport que le trafic est faible sur la voie communale et il indique également que le bureau de la sécurité routière de la direction départementale des territoires du Gers l'avait informé qu'aucun accident corporel n'avait été enregistré au droit du carrefour au cours des dix dernières années. De même, si l'expert précise que le risque d'accident augmente pour les véhicules longs et lourds semblables à ceux que M. et Mme C...utilisent pour leurs activités, la voie communale dessert aussi trois propriétés agricoles et il ne résulte pas de l'instruction que les autres usagers de la voie communale aient signalé au maire de la commune le caractère dangereux du carrefour litigieux. Enfin, l'expert relève dans son rapport que le diagnostic de la chaussée de la voie communale n° 21 ne laisse apparaître aucun défaut structurel et que les fissures sur la chaussée mentionnées par M. C...sont éloignées du carrefour. Ainsi, les dangers liés à la circulation aux abords du carrefour entre la voie communale n° 21 et la RD 112, qui seraient à l'origine du préjudice moral allégué par M. et MmeC..., ne présentent pas une gravité telle que le maire eût été dans l'obligation de les faire cesser en usant des pouvoirs de police qu'il tient de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales. Par suite, le maire de la commune de Bézolles, dont l'arrêté du 1er décembre 2009 interdisant la voie communale 21 aux véhicules de plus de dix-neuf tonnes a d'ailleurs été annulé par le tribunal administratif de Pau à la demande de M. C..., n'a commis aucune carence fautive en s'abstenant d'exercer plus avant ses pouvoirs de police et c'est à tort que le tribunal administratif a retenu sur ce fondement la responsabilité de la commune.

7. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens présentés par M. et Mme C...à l'encontre de la commune.

En ce qui concerne le défaut d'entretien de la voie communale :

8. M. et Mme C...font valoir que l'état de la voie communale n° 21 et les dangers liés à la circulation aux abords du carrefour de la voie communale avec la route départementale 112 sont à l'origine d'un préjudice économique. Toutefois, et d'une part, ainsi que cela a été dit au point 6, ni la configuration du carrefour, ni l'état de la voie communale ne présentent un danger excédant ceux dont les usagers doivent par leur prudence se prémunir. Les difficultés évoquées par les intéressés tiennent principalement à l'usage de véhicules lourds inadaptés à la largeur de l'accès à la voie communale, que la commune n'était pas tenue de modifier alors qu'ils se sont installés en 2000 en toute connaissance de cause des caractéristiques de la voie de desserte, et qu'ils ont eux-mêmes indiqué devant le tribunal que le chemin de Beaulieu (VC 21) n'a été goudronné par la commune qu'en 2005. D'autre part, M. et Mme C...ne produisent aucun élément permettant de démontrer la réalité du préjudice économique allégué. S'ils invoquent dans leurs écritures une " perte de temps ", ils ne fournissent aucune pièce permettant de constater cette perte de temps et son incidence sur les résultats de leurs activités agricole et brassicole.

9. Il résulte de tout ce qui précède d'une part que la commune de Bézolles est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau l'a condamnée à verser une somme de 5 000 euros à M. et Mme C...au titre d'un préjudice moral, et d'autre part que les conclusions incidentes de ces derniers tendant à ce que leur préjudice économique soit indemnisé à hauteur de 50 euros par jour doivent être rejetées.

Sur les frais d'expertise :

10. Dans les circonstances de l'espèce, les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 1 882,20 euros par ordonnance du président du tribunal administratif de Pau doivent être mis à la charge de M. et MmeC....

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a lieu de faire droit à aucune demande des parties tendant à l'application de ces dispositions.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Pau du 23 janvier 2014 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. et Mme C...devant le tribunal administratif et leurs conclusions d'appel incident sont rejetées.

Article 3 : Les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 1 882,20 euros sont mis à la charge de M. et MmeC....

Article 4 : Les conclusions de la commune de Bézolles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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No 14BX00901


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre (formation à trois)
Numéro d'arrêt : 14BX00901
Date de la décision : 17/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PAUZIÈS
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : CABINET HANDBURGER PLENIER MATHIAS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-12-17;14bx00901 ?
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