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15/12/2016 | FRANCE | N°14BX03353

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 15 décembre 2016, 14BX03353


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...F...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'une part, d'annuler les arrêtés du 10 juillet 2012 et du 2 avril 2013 par lesquels le maire de la commune de Cuq-Toulza a délivré à l'exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) " Nico Elevage " un permis de construire en vue de l'édification d'un bâtiment avicole doté d'un silo et d'une fosse étanche, sur un terrain situé au lieu-dit En Racaud, ainsi que la décision du 19 octobre 2012 portant rejet du recours gracieux formé con

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...F...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'une part, d'annuler les arrêtés du 10 juillet 2012 et du 2 avril 2013 par lesquels le maire de la commune de Cuq-Toulza a délivré à l'exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) " Nico Elevage " un permis de construire en vue de l'édification d'un bâtiment avicole doté d'un silo et d'une fosse étanche, sur un terrain situé au lieu-dit En Racaud, ainsi que la décision du 19 octobre 2012 portant rejet du recours gracieux formé contre l'arrêté du 10 juillet 2012 et d'autre part, d' " annuler par la voie de l'exception " la délibération approuvant le plan local d'urbanisme de la commune.

Par un jugement n° 1205575 et 1302429 du 15 octobre 2014, le tribunal administratif de Toulouse a d'une part prononcé un non lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du maire de Cuq-Toulza du 10 juillet 2012 et de la décision de cette même autorité du 19 octobre 2012 et d'autre part, rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 2 décembre 2014, le 23 juillet 2015, le 15 septembre 2015, le 18 novembre 2015, le 23 décembre 2015, le 4 mars 2016, le 29 mars 2016, le 25 avril 2016, le 2 août 2016 et le 17 août 2016, M. A...F..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 15 octobre 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 10 juillet 2012 par lequel le maire de la commune de Cuq-Toulza a accordé un premier permis de construire à l'EARL Nico Elevage, ensemble la décision de rejet du recours gracieux ;

3°) d'annuler l'arrêté du 2 avril 2013 par lequel le maire de la commune de Cuq-Toulza a accordé un second permis de construire à l'EARL Nico Elevage ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Cuq-Toulza et de l'EARL Nico Elevage la somme de 2 000 euros chacun sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le permis de construire attaqué a été délivré en méconnaissance des dispositions des articles L. 431-2 et R. 431-10 du code de l'urbanisme dès lors que la notice paysagère ne fait pas état de la présence d'une fosse étanche en béton ouverte et que l'insertion du projet dans son environnement proche et lointain a été volontairement minimisée et faussée ; les photographies produites, réalisées avec un objectif grand angle, ne correspondent pas à la réalité et ne permettent pas d'apprécier l'impact du projet au regard du château de Nauzel dont il est propriétaire et de son parc, lesquels surplombent le projet et sont situés à moins de 300 mètres ; l'abattage des arbres réalisé alors que le permis de construire faisait l'objet d'un recours gracieux a augmenté l'impact visuel du projet par rapport au château ; le service instructeur a été trompé sur la consistance du bâtiment érigé ;

- en méconnaissance de l'article R 431-20 du code de l'urbanisme, aucun récépissé de déclaration au titre des installations classées pour la protection de l'environnement n'était joint au dossier du second permis de construire ;

- les personnes publiques n'ont pas été consultées au cours de l'instruction du permis de construire accordé le 2 avril 2013 ; compte tenu de la covisibilité avec un édifice qualifié de remarquable par le projet d'aménagement et de développement durable du plan local d'urbanisme de la commune, l'architecte des bâtiments de France devait se prononcer en application de l'article R.425 du code de l'urbanisme ; au vu du risque d'inondation sur le terrain d'assiette du projet, à proximité immédiate d'une zone répertoriée par la DIREN, le service instructeur devait également procéder à la consultation du service chargé des mesures de défense contre les inondations, chargé de la police des cours d'eau en application de l'article R. 425-21 du code de l'urbanisme ; ni l'Agence régionale de santé ni la Chambre d'agriculture du Tarn n'ont été consultées sur le projet alors qu'elles ont donné un avis favorable sur la base d'un dossier frauduleux dans le cadre de l'instruction du permis de construire initial, fraude constituée par la dissimulation du château de Nauzel et des risques de glissement de terrain et d'inondation ; l'avis de la chambre d'agriculture est fondé sur une erreur quant à la couverture de la fosse à lisier ;

- le permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ; le premier avis de l'Agence régionale de santé du 10 mai 2012 est fondé sur des données erronées fournies par le pétitionnaire, à savoir l'éloignement de l'ordre de 450 mètres des premiers riverains, et le second permis délivré le 2 avril 2013, qui annule et remplace le permis délivré le 10 juillet 2012, n'a pas été précédé d'une nouvelle consultation de l'Agence régionale de santé alors qu'il faisait pour la première fois état d'une zone inondable à proximité ; la fosse enterrée mais non couverte et l'épandage du lisier à proximité de sa propriété génèreront des odeurs pestilentielles ; le projet est situé à proximité immédiate d'une zone inondable qui n'était pas indiquée dans le premier dossier de demande de permis de construire et dont les contours n'ont pas été retranscrits de manière fidèle dans le dossier de demande, et le pétitionnaire a commis un faux en transformant une zone N et inondable en zone A agricole ; la distance n'est que de 10 mètres entre la zone inondable et la fosse enterrée et non couverte qui est située au même niveau que le terrain et qui en cas d'inondation pourrait entraîner des déversements dans le milieu naturel ; les crues du Girou ne sont pas exceptionnelles, comme en témoignent les arrêtés de catastrophe naturelle pris en 2011 et 2013 et le constat d'huissier qu'il produit;

- le permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme et des dispositions de l'article A 11 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Cuq-Toulza ; l'atteinte au caractère des lieux avoisinants, en l'occurrence le château de Nauzel, qui correspond à un bâtiment remarquable même s'il n'est pas répertorié dans le document graphique du plan local d'urbanisme, est importante ; l'architecte de bâtiments de France devait se prononcer ; l'aspect extérieur du projet n'est pas compatible avec le caractère et l'intérêt des lieux avoisinants ; le projet autorisé méconnaît l'article 11 qui impose que les murs soient recouverts de crépis ;

- la délivrance du second permis de construire révèle l'existence d'un détournement de pouvoir ; le second permis n'a eu pour objet que de contourner la suspension ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse ; le pétitionnaire a porté atteinte à l'autorité de chose ordonnée par le juge des référés ; le pétitionnaire aurait dû déposer un permis de construire modificatif ; les modifications incluses dans le second permis de construire sont uniquement de détail ; le second permis de construire a été délivré pour permettre au pétitionnaire de continuer à bénéficier des subventions publiques ;

- le permis de construire méconnaît le b) du 4°) de l'article 2 de la directive 2011/92/UE et l'article L. 120-1-1 du code de l'environnement, la commune de Cuq-Toulza devait permettre aux habitants de la commune de participer à l'élaboration de ce projet qui a une incidence sur l'environnement ; aucune évaluation environnementale sérieuse n'a été effectuée par une entité administrative disposant d'une autonomie réelle ;

- le permis de construire a été délivré en méconnaissance de l'article 6 de la directive 2006/118/CE ;

- le permis de construire litigieux méconnaît les dispositions de l'article 11 de l'arrêté du 7 février 2005 ; le projet est situé à une distance de 100 mètres par rapport au cours d'eau situé au nord, le Girou, et dans une zone inondable ;

- la pétitionnaire a procédé à des manoeuvres de nature à tromper l'administration sur la réalité du projet ; les plans PC3b2 et PC3bl sont faussés car ils montrent une courbe convexe pour limiter la covisibilité avec le château de Nauzel au lieu d'une courbe concave en réalité ; le projet n'est pas situé en zone A et le pétitionnaire a délibérément masqué le château de Nauzel sur le plan cadastral inclus dans le dossier de demande de permis de construire ; la zone inondable répertoriée par la DIREN, indiquée sur le plan local d'urbanisme, ne figure ni sur le plan cadastral PC3 produit par le pétitionnaire ni sur le plan de masse ; le rapport du brigadier de la police municipale dissimule les risques d'inondation ; le fait que des arbres figurent sur le document d'insertion du dossier de demande de permis de construire alors qu'ils ont été abattus en 2012 est constitutif d'une fraude ; les insuffisances de la notice paysagère et architecturale révèlent également l'existence d'une fraude ; le projet est présenté dans le dossier de demande plus en contrebas par rapport au château qu'il ne l'est en réalité ;

- l'avis du conseil d'architecture d'urbanisme et d'environnement du Tarn a été rendu au vu d'un dossier falsifié par le pétitionnaire ; le dossier du premier permis ne précise pas sur le plan PC 7-8 que le bâtiment proche est le "château de Nauzel" ; le pétitionnaire a réalisé les vues avec un objectif grand angle ce qui aurait faussé les perspectives ; le pétitionnaire a dissimulé le caractère remarquable du "château de Nauzel " et l'environnement du projet ; il a réalisé des montages pour tromper le service instructeur ; le dossier présenté ne correspond pas à la réalité d'aujourd'hui ;

- l'EARL Nico Elevage a volontairement omis la suspension du permis de construire par le juge des référés ;

- les pièces PC3b1 et PC3b2 ont été falsifiées et comportent des cotes erronées alors que le projet est bien visible depuis sa propriété comme le montrent les plans du géomètre qu'il a missionné ;

- le permis de construire délivré est illégal au regard du rapport de présentation du plan local d'urbanisme qui préconise de protéger les vues sur les châteaux de Cuq Toulza et de Nauzel ainsi que leur environnement immédiat et les boisements ;

- le risque pour la salubrité et la sécurité publique existe dès lors que la construction exécutée est plus proche de la zone inondable que ce qui était prévu par le permis de construire ; un fossé qui constitue un cours d'eau court le long du terrain d'assiette ; une buse avec de l'eau coulante se déverse dans ledit fossé qui est totalement inondé en cas de forte pluie ; une telle installation est contraire aux articles 1, 3 et 4 de la directive 91/676/CEE applicable au litige ; le risque de pollution des sols est avéré en cas de débordement du Girou et de débordement de la fosse à lisier ; compte tenu du profil du terrain d'assiette, l'épandage pourra provoquer une pollution du ruisseau ;

- l'absence de prescriptions spéciales permettant de prévenir les dangers ou inconvénients de l'épandage méconnaît les dispositions des articles L. 211-1, L. 220-1 et L. 511-1 du code de l'environnement, ainsi que les dispositions du règlement sanitaire départemental ;

- le risque de glissements de terrain n'a pas été pris en compte et les dispositifs d'écoulement projetés pourraient être rapidement obstrués ;

- l'article A4 du règlement du plan local d'urbanisme qui interdit l'évacuation des eaux usées dans les fossés est méconnu ; le fait que les fientes soient évacuées vers la fosse étanche par des racleurs est contraire à la prohibition de l'évacuation des eaux usées dans les fossés ; le dispositif d'évacuation des eaux pluviales contribuera à augmenter le risque inondation dès lors qu'aucun bassin de rétention n'est prévu ; l'absence de réseau communal de collecte des eaux pluviales augmentera le risque inondation ;

- en méconnaissance de l'article A6 du plan local d'urbanisme, le fossé à créer et l'aire de lavage sont situés à moins de 10 mètres de l'axe du chemin de Loubens ;

- le projet autorisé méconnaît l'article N1 du plan local d'urbanisme ;

Par des mémoires en défense, enregistrés le 9 février 2015 et le 30 mars 2016, la commune de Cuq-Toulza conclut au rejet de la requête et à ce que la cour mette à la charge de M. A...F...une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le château de l'appelant est situé à plus de 300 mètres du projet et ne constitue pas le bâtiment le plus proche ; conformément à l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme, la notice paysagère décrit le paysage, fait référence au château de Nauzel et détaille les aménagements du terrain et ses abords, l'implantation de la construction et son volume, les matériaux et couleurs utilisés, les accès et réseaux; les photos produites font bien apparaître le château de l'appelant ; la circonstance que le terrain d'assiette du projet puisse être vu depuis la propriété du requérant n'impose donc pas compte tenu de son éloignement et de la configuration des lieux qu'un reportage photographique soit orienté préférentiellement vers ce dernier pour que le dossier réponde aux exigences des articles R 431-8 et R 431-10 du code de l'urbanisme ;

- l'Agence régionale de santé n'a pas été saisie dans le cadre de l'instruction du second permis dans la mesure où les caractéristiques techniques du projet pour lesquelles son avis était nécessaire n'ont pas évolué, les modifications apportées au projet dans le cadre du second permis intéressant l'aspect extérieur de ce dernier ; les conclusions formulées par l'Agence régionale de santé dans le cadre du premier permis peuvent être reprises pour apprécier la légalité du second permis ; le fait que de nouvelles consultations n'aient pas été entreprises dans le cadre de l'instruction de la seconde demande de permis de construire est inopérant dès lors que les consultations entreprises lors de l'examen de la première demande revêtaient un caractère facultatif ; ni la consultation de l'architecte des bâtiments de France, ni la consultation du service chargé de la police des cours d'eau n'étaient nécessaires ; le document intitulé " avis du Maire " reproduit par l'appelant dans ses écritures pour prétendre que ce dernier aurait dissimulé un risque de glissement de terrain et d'inondation ne fait pas partie du dossier de permis de construire ;

- le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi et il n'est pas interdit de déposer une seconde demande de permis de construire pour une même opération, pour améliorer le projet afin de tenir compte d'éventuelles illégalités relevées par le juge des référés, dont l'ordonnance n'est pas revêtue de l'autorité de la chose jugée ;

- le projet autorisé n'entre pas dans le champ d'application de l'article 2 de la directive 2011/92/UE ;

- les dispositions de la directive 2006/118/CE invoquée par le requérant ne revêtent pas un caractère précis et inconditionnel et les déjections avicoles ne sont pas concernées par ces dispositions ;

- en application du principe d'indépendance des législations, la méconnaissance des dispositions de l'article 11 de l'arrêté du 7 février 2005 n'est pas invocable à l'encontre d'un arrêté accordant un permis de construire ;

- aucune fraude n'a été commise par le pétitionnaire dans la constitution du dossier de demande ; le bâtiment est situé en zone A et ce sont les règles relatives à cette zone qui s'appliquent ; l'absence du château du requérant sur le plan cadastral s'explique par la distance ; la zone inondable, qui est classée N au plan local d'urbanisme, ne devait figurer ni sur le plan cadastral fourni dans le dossier de demande de permis ni sur le plan de masse ; le rapport rédigé par l'agent de la police municipale n'affecte pas la validité du permis délivré ; les pièces produites ne démontrent pas que les arbres désignés par l'appelant ont été abattus avant le dépôt de la deuxième demande ; la notice paysagère et architecturale consacre des développements suffisants au château du requérant et au château de Rogistan ; il n'existe pas d'obligation de couvrir la fosse à lisier et le projet architectural montre que cette fosse ne sera pas couverte ;

- les griefs invoqués par M. A...F...relèvent du trouble anormal de voisinage et de règles de droit privé ; les nuisances invoquées relèvent d'hypothèses ; le projet de construction a fait l'objet d'un contrôle a priori au titre de la police spéciale des installations classées pour la protection de l'environnement qui a précisément pour objet de veiller à ce qu'un projet relevant de la nomenclature sur les installations classées ait été conçu de manière à ne pas porter atteinte aux intérêts visés à l'article L 511-1 du code de l'environnement ; les canards ne seront pas élevés en plein air et resteront dans l'enceinte du bâtiment, qui sera isolé phoniquement et thermiquement par des panneaux dit " sandwichs " ; le projet de construction ne se situe pas en zone inondable ;

- compte tenu de la distance séparant le projet autorisé et le château de M. A... F..., l'impact visuel du projet sera amoindri ; le pétitionnaire a tenu à modifier les caractéristiques de son projet, suite à la suspension du précédent permis qui lui avait été accordé le 10 juillet 2012, dans le but de prévoir une meilleure intégration dans l'environnement ; la notice paysagère du nouveau permis décrit les mesures prises pour limiter l'impact visuel du projet par rapport au château du requérant, lequel ne présente au demeurant pas de caractéristiques particulières justifiant un classement, qui lui a été refusé ;

- le bardage et les portes métalliques seront de teinte gris souris au lieu de beige clair ou sable et la couverture en panneaux métalliques sera de teinte grise sur prescriptions contenues dans l'arrêté de permis de construire au lieu de vert réséda ; les matériaux et teintes utilisés pour la construction du bâtiment telles que prévues dans le nouveau dossier de demande de permis de construire sont en harmonie avec l'environnement existant et le permis délivré ne contrevient pas aux dispositions de l'article A 11 du plan local d'urbanisme ; le CAUE a donné un avis favorable le 1er mars 2013;

Par des mémoires en défense enregistrés le 28 juillet 2015, le 11 septembre 2015, le 31 mars 2016, le 28 avril 2016, le 26 juillet 2016 et le 16 août 2016, l'EARL Nico Elevage conclut au rejet de la requête et à ce que la cour mette à la charge de M. A...F...une somme de 6 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- l'omission concernant l'ouverture de la fosse ne revêt pas un caractère substantiel et au vu des pièces produites au dossier de demande, l'autorité administrative a pu apprécier les caractéristiques du projet malgré l'absence de mention explicite du caractère ouvert de la fosse ; il ne peut être reproché au pétitionnaire de n'avoir pas fait un reportage photographique orienté sur la propriété du requérant, celle-ci étant peu impactée par le projet du fait de la distance (plus de 300 mètres du bâtiment) et de la topographie des lieux ; le château de Nauzel est bien présent dans le dossier de demande de permis de construire ;

- le projet autorisé n'engendrera que des nuisances modérées ; les conditions d'épandage du lisier ne peuvent être invoquées à l'encontre d'un permis de construire ; le projet ne présente aucun risque pour le milieu naturel, il est situé à 120 mètres du Girou et en dehors de la zone inondable DIREN, seule une petite partie du terrain d'assiette du projet est situé dans une telle zone ; l'avis de l'Agence régionale de santé ne saurait démontrer la moindre erreur manifeste d'appréciation en raison de ce que ce dernier, entre autres critères, rappelle que l'éloignement des habitations serait de l'ordre de 450 mètres, il s'agit d'un ordre de grandeur correspondant à la présence du lotissement situé au nord du projet et la circonstance que l'habitation du requérant soit en réalité à 300 mètres n'est pas de nature à remettre en cause l'appréciation de l'Agence régionale de santé dès lors que la distance réglementaire minimum est de 100 mètres ; l'ensemble des préconisations résultant de la réglementation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement a été intégré par le permis de construire et le requérant ne démontre pas en quoi elles seraient insuffisantes pour préserver la salubrité publique au sein d'une zone agricole au sens des dispositions de l'article R.111-2 du code de l'urbanisme ; le risque de pollution des sols invoqué n'est pas établi ; le risque de glissement de terrain allégué n'est pas caractérisé alors que la construction litigieuse et la fosse sont situées sur un terrain peu pentu, peu vulnérable aux glissements de terrain ;

- l'article 11 du règlement de la zone A du plan local d'urbanisme de la commune de Cuq-Toulza contient des prescriptions qui ne sont pas moindres par rapport aux dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, la branche du moyen développée par l'appelant sur le fondement de l'article R. 111-1 du code de l'urbanisme doit être écartée comme inopérante ; les choix retenus pour l'architecture du projet situé à plus de 300 mètres du " château " du requérant et dont la visibilité doit être relativisée au vu de l'importance des talus les séparant, permettent une bonne insertion dans le site et contribuent à ce que le projet soit le moins visible et ce de tout point de vue ; le projet autorisé présentera les caractéristiques architecturales souhaitées par le conseil d'architecture d'urbanisme et d'environnement du Tarn, composé d'architectes professionnels; les photographies produites par le requérant ne montrent que des points de vue où une covisibilité existe, cependant la propriété de l'appelant est éloignée et masquée par la végétation et donc très peu impactée par le projet autorisé ; celui-ci n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ;

- une nouvelle consultation des personnes publiques n'était pas utile compte tenu du caractère identique des deux projets ; ni la consultation de l'architecte des bâtiments de France, ni la consultation du service chargé de la police des cours d'eau n'étaient nécessaires ; le risque de glissement de terrain a bien été pris en compte par le maire, aucun plan de prévention des risques inondation ne s'applique ; une éventuelle erreur sur la délimitation de la zone constructible est sans incidence sur la légalité du permis, les personnes publiques disposant des données réglementaires nécessaires pour corriger cette erreur ;

- l'annexion du récépissé ICPE au second permis de construire n'était pas nécessaire dès lors que la commune l'avait déjà en sa possession et que le volet exploitation du projet n'a pas changé ;

- le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

- les règles du droit communautaire invoquées par le requérant issues de la directive 2011/92/CE ne sont pas applicables au litige et le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 6 de la directive 2006/118/CE n'est pas fondé ;

- en application du principe de l'indépendance des législations, le moyen tiré de la méconnaissance de l'arrêté du 7 février 2005 ne peut qu'être écarté ;

- la preuve de la fraude doit être apportée par la partie qui l'invoque ; si l'appelant affirme qu'aurait dû être utilisée une courbe concave pour représenter la coupe du terrain depuis le château, il n'explique pourquoi une telle courbe aurait dû être utilisée ; le projet autorisé est situé en zone A et le fait qu'une partie de la parcelle soit située en zone N n'entraîne pas l'application des règles de cette dernière à l'ensemble de la parcelle ; l'absence du château de Nauzel sur le plan cadastral ne relève pas d'une volonté du pétitionnaire mais est induite par la distance de plus de 300 mètres entre la propriété de l'appelant et le projet ; aucune disposition législative ou réglementaire n'oblige le pétitionnaire d'un permis de construire à produire une synthèse règlementaire à l'appui de sa demande de permis de construire ou de faire figurer le zonage sur une des pièces du permis ; le rapport du brigadier de la police municipale n'est pas un acte de la procédure de délivrance du permis de construire, il est uniquement produit comme élément de preuve par la commune ; l'appelant ne démontre pas non plus quelle disposition d'urbanisme tenterait de contourner le bénéficiaire en faisant figurer des arbres déjà abattus sur le document d'insertion ; sur la notice paysagère et architecturale, l'appelant se borne à soulever un moyen de légalité externe, relatif à l'incomplétude de la notice explicative sans démontrer l'existence d'une fraude ;

- les arguments du requérant relatifs à l'exécution du permis de construire sont inopérants ;

- les dispositions de la directive 91/676/CEE et du code de l'environnement invoquées par le requérant ne sont pas applicables au litige ;

- le projet d'aménagement et de développement durable n'est pas opposable aux autorisations d'occupation du sol et l'atteinte au boisement n'est pas établie ;

- l'article A4 du plan local d'urbanisme n'est pas méconnu, les fientes ne sont pas déversées dans un fossé mais dans une fosse étanche ; le projet prévoit un dispositif de fossés afin de permettre l'écoulement des eaux pluviales vers un fossé existant, qui est un élément du réseau collecteur de la commune, même en l'absence d'un réseau de collecte des eaux pluviales ouvragé et il n'est pas démontré que ce dispositif serait insuffisant dans son importance ou augmenterait d'une quelconque manière le risque inondation ;

- l'article A6 du plan local d'urbanisme n'est applicable ni au fossé, ni à l'aire de lavage, qui ne constituent pas des constructions ; l'aire de lavage est située à 10,50 mètres de l'axe du chemin et il est illogique d'affirmer que la présence d'un récupérateur d'hydrocarbures, qui a vocation à empêcher leur déversement dans le milieu naturel, démontrerait un risque de pollution, puisque ce dispositif prévient ce risque ;

Par ordonnance du 21 juin 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 18 août 2016 à 12 heures.

Un mémoire en production de pièces présenté pour M. A...F...a été enregistré le 1er septembre 2016.

Les parties ont été informées par lettre du 3 novembre 2016, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que les conclusions de la requête enregistrée le 2 décembre 2014 sont dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 15 octobre 2014 en tant seulement qu'il a rejeté les conclusions de la demande de M. A...F...dirigées contre le permis de construire délivré à l'EARL Nico Elevage le 2 avril 2013. Les conclusions dirigées contre le permis de construire délivré le 10 juillet 2012 à l'EARL Nico Elevage et contre la décision de rejet du recours gracieux, présentées pour la première fois dans un mémoire enregistré le 23 juillet 2015, sont tardives et par suite irrecevables.

En réponse à la communication de ce moyen d'ordre public, M. A...F...a présenté des observations par un mémoire enregistré le 10 novembre 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 91/676/CEE du 12 décembre 1991 concernant la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles ;

- la directive n° 2006/118/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 sur la protection des eaux souterraines contre la pollution et la détérioration ;

- la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 ;

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

- et les observations de MeC..., représentant M. A...F..., de MeE..., représentant la commune de Cuq-Toulza, et de Me D...représentant l'Earl Nico Elevage.

Deux notes en délibéré ont été présentées pour M. A...F...par Me C...les 18 novembre et 5 décembre 2016, et complétées par des productions enregistrées les 5 et 6 décembre 2016 ;

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 10 juillet 2012, le maire de Cuq-Toulza (Tarn) a délivré à l'exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) Nico Elevage un permis de construire en vue de l'édification d'un bâtiment avicole doté d'un silo et d'une fosse étanche sur un terrain situé au lieu-dit " En Racaud ". M. A...F..., propriétaire du château voisin de Nauzel, a demandé au maire, par un recours gracieux en date du 22 septembre 2012, de retirer cet arrêté. A la suite du refus du maire, M. A...F...a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse qui, par ordonnance du 22 janvier 2013, a suspendu l'exécution de l'arrêté du 10 juillet 2012. Le 18 février 2013, l'EARL Nico Elevage a déposé une nouvelle demande de permis de construire et obtenu, le 2 avril 2013, un nouveau permis de construire un bâtiment avicole doté d'un silo et d'une fosse étanche sur le même terrain. Le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, saisi par M. A...F..., a également suspendu l'exécution de l'arrêté du 2 avril 2013. Par jugement n° 1205575 et 1302429 du 15 octobre 2014, le tribunal administratif de Toulouse a d'une part prononcé un non lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du maire de Cuq-Toulza du 10 juillet 2012 et de la décision de cette même autorité du 19 octobre 2012 rejetant le recours gracieux formé par M. A...F...et d'autre part, rejeté les conclusions à fin d'annulation dirigées contre le permis de construire délivré le 2 avril 2013.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du maire de Cuq-Toulza du 10 juillet 2012 et de la décision de rejet du recours gracieux du 19 octobre 2012 :

2. Dans les conclusions de sa requête enregistrée le 2 décembre 2014, M. A...F...demande à la cour " d'annuler le jugement en date du 15 octobre 2014 rendu par le tribun l administratif de Toulouse, rejetant le recours de Monsieur A...F...tendant à l'annulation du permis de construire PC 081076 13 C0002 en date du 2 avril accordé par la commune de Cuq-Toulza à l'EARL Nico Elevage (...) " Il n'a ainsi présenté aucune conclusion contre l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Toulouse. Par suite son appel doit être regardé comme portant exclusivement sur la réformation du jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de M. A...F...dirigée contre le permis de construire délivré à l'EARL Nico Elevage le 2 avril 2013. Les conclusions dirigées contre le permis de construire délivré le 10 juillet 2012 à l'EARL Nico Elevage et contre la décision de rejet du recours gracieux ont été présentées pour la première fois dans un mémoire enregistré le 23 juillet 2015, au-delà du délai de deux mois suivant la notification du jugement. Elles sont donc tardives et par suite irrecevables.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du maire de Cuq-Toulza du 2 avril 2013 :

En ce qui concerne la composition du dossier :

3. Aux termes de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme : " Sont joints à la demande de permis de construire : / a) Un plan permettant de connaître la situation du terrain à l'intérieur de la commune ; / b) Le projet architectural défini par l'article L. 431-2 et comprenant les pièces mentionnées aux articles R. 431-8 à R. 431-12 ". L'article R. 431-8 dudit code prévoit que : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : (...) b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; / c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain (...) ". Aux termes de l'article R. 431-9 du même code : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. (...) / Il indique également, le cas échéant, les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics ou, à défaut d'équipements publics, les équipements privés prévus, notamment pour l'alimentation en eau et l'assainissement (...) /". L'article R. 431-10 du code de l'urbanisme prévoit que : " Le projet architectural comprend également : / a) Le plan des façades et des toitures ; lorsque le projet a pour effet de modifier les façades ou les toitures d'un bâtiment existant, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; /b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; / c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; / d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse ".

4. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où ces omissions, inexactitudes ou insuffisances ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

5. M. A...F...fait valoir que le dossier de demande de permis de construire ne permet pas d'apprécier l'impact réel du projet autorisé sur son environnement et que la présence de sa propriété a été volontairement minimisée par le pétitionnaire, qui a utilisé des procédés frauduleux. Le dossier de demande de permis de construire comporte une pièce PC3b2 (vue aérienne) qui permet d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement en indiquant la présence des habitations situées à proximité, et notamment la propriété du requérant, ainsi que la topographie des lieux, renseignée par la présence de courbes de niveau, qui permet de constater la situation du projet en contrebas par rapport au château de M. A...F.... La notice paysagère précise les distances séparant le projet des habitations et des châteaux de Nauzel et de Rogistan tout en indiquant également les mesures prises pour limiter l'impact visuel du projet. Contrairement à ce que soutient le requérant, la photographie panoramique n°7 figurant au dossier est de nature à permettre de situer le terrain dans le paysage lointain. Si les profils en coupe du terrain ont pu comporter des erreurs sur les vues susceptibles d'affecter le château du requérant, et sur l'existence de quelques arbres qui avaient déjà été abattus, rien ne permet d'établir que de telles erreurs aient été volontaires, ni qu'elles aient pu affecter les conditions dans lesquelles l'autorité administrative, qui n'était pas tenue de refuser le projet dès lors qu'il serait visible depuis le château ou co-visible avec lui, a pris sa décision. Enfin, la circonstance que l'extrait de plan cadastral fourni ne permette pas d'appréhender le château du requérant situé à 300 mètres ou un plan d'eau situé à 200 mètres de l'autre côté du ruisseau Girou n'est pas de nature à établir que le dossier de la demande de permis de construire n'aurait pas permis au service instructeur d'apprécier l'état initial du terrain et de ses abords, la végétation et les éléments paysagers existants, et l'impact visuel du projet.

6. Si le requérant fait valoir que le pétitionnaire a volontairement modifié les limites de la zone inondable figurées sur la pièce PC3b2 pour tromper le service instructeur sur la présence de la fosse à lisier à proximité de la zone inondable, et que les plans de coupe produits dans le dossier de demande comportent également des erreurs volontaires afin de dissimuler l'impact du projet, il ressort du dossier de demande que les constructions autorisées sont bien situées en zone A constructible, alors même qu'une partie des parcelles cadastrales indiquées dans la demande sont en zone N inondable, et le requérant n'établit pas que les informations figurant dans le dossier de demande de permis de construire aient été de nature à tromper le service instructeur sur les caractéristiques du projet qui lui était soumis.

7. S'il est vrai, ainsi que le relève M. A...F..., que la notice paysagère ne précise pas que la fosse à lisier sera une fosse ouverte, une photographie jointe au dossier de demande montre que la fosse projetée n'est pas couverte, alors au demeurant qu'une telle couverture ne revêt pas un caractère obligatoire, et il ne ressort pas des pièces du dossier que l'absence de précision sur ce point ait empêché le service instructeur d'apprécier la légalité du projet.

8. Aux termes de l'article R. 431-20 du code de l'urbanisme : " Lorsque les travaux projetés portent sur une installation classée soumise à autorisation, enregistrement ou déclaration en application des articles L. 512-1, L. 512-7 et L. 512-8 du code de l'environnement, la demande de permis de construire doit être accompagnée de la justification du dépôt de la demande d'autorisation de la demande d'enregistrement ou de la déclaration. ".

9. Le préfet du Tarn a délivré le 3 avril 2012 un récépissé de déclaration relatif à l'activité d'une installation classée à l'EARL Nico Elevage. Il n'est pas contesté que la justification du dépôt de déclaration était jointe à la première demande de permis de construire déposée par l'EARL Nico Elevage. La seconde demande de permis de construire du même pétitionnaire ne s'accompagnait pas d'un changement de l'activité d'élevage projetée. Dès lors, l'EARL n'était pas tenue de fournir une nouvelle justification à l'appui de sa seconde demande. Ainsi le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article R. 431-20 du code de l'urbanisme ne saurait être accueilli.

10. Les dispositions des articles R. 431-4 et suivants du code de l'urbanisme énumèrent de façon limitative les documents qui doivent être joints à une demande de permis de construire. Dès lors, le requérant ne peut utilement prétendre que le dossier du pétitionnaire devait comprendre une pièce sur laquelle devait figurer la zone inondable telle que délimitée par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement, et la circonstance que cette zone ne figure ni sur le plan cadastral ni sur le plan de masse ne permet pas de caractériser la fraude alléguée.

En ce qui concerne les consultations préalables :

11. Le permis de construire contesté a été délivré après le retrait d'un précédent permis délivré quelques mois auparavant au même pétitionnaire pour le même projet. Les caractéristiques essentielles du projet n'ayant pas changé entre la délivrance de l'une et l'autre des deux autorisations, l'autorité administrative n'avait pas à procéder à une nouvelle instruction avant de se prononcer à nouveau sur la demande dont elle était saisie. Si M. A...F...soutient que l'Agence régionale de santé et la Chambre d'agriculture du Tarn se sont prononcées sur le premier permis de construire délivré au vu d'un dossier de demande de permis constitué de manière frauduleuse dès lors que le château de Nauzel, les caractéristiques de la fosse à lisier et les risques de glissement de terrain et d'inondation ont été dissimulés, il ne ressort pas des avis émis, qui sont produits au dossier, que ces organismes se seraient mépris sur les caractéristiques du projet de l'EARL Nico Elevage, tant au regard de la distance séparant le projet des habitations que des conditions d'exploitation de l'élevage. Par suite, et alors que ces consultations ne revêtaient aucun caractère obligatoire, le moyen tiré de ce que ni l'Agence régionale de santé ni la Chambre d'agriculture du Tarn n'ont été consultées à nouveau avant la délivrance du second permis de construire ne peut qu'être écarté.

12. Aux termes de l'article R. 425-1 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est situé dans le champ de visibilité d'un édifice classé ou inscrit au titre des monuments historiques (...) le permis de construire(...) le permis de démolir (...) tient lieu de l'autorisation prévue à l'article L. 621-31 du code du patrimoine dès lors que la décision a fait l'objet de l'accord de l'architecte des Bâtiments de France (...) " Le château de Nauzel n'est ni classé, ni inscrit au titre des monuments historiques, et la circonstance que ce château soit qualifié de " site remarquable " dans le projet d'aménagement et de développement durable du plan local d'urbanisme n'obligeait pas l'administration à solliciter l'accord de l'architecte des bâtiments de France prévu par ces dispositions, quand bien même le château se trouve dans le champ de visibilité du projet autorisé. Par ailleurs, la circonstance que le maire ait émis un avis le 18 février 2013 préconisant, à tort, de demander l'avis de l'architecte des bâtiments de France est sans influence sur l'application des dispositions précitées du code de l'urbanisme.

13. Aux termes de l'article R. 425-21 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet porte sur une construction située dans un plan de surfaces submersibles valant plan de prévention des risques naturels prévisibles en application de l'article L. 562-6 du code de l'environnement, le permis de construire, le permis d'aménager ou la décision prise sur la déclaration préalable ne peut intervenir si le préfet, après consultation du service chargé des mesures de défense contre les inondations et du service chargé de la police des cours d'eau, s'y oppose. Si le préfet subordonne son accord au respect de prescriptions nécessaires pour assurer le libre écoulement des eaux ou la conservation des champs d'inondation, la décision doit imposer ces prescriptions (...) " Toutefois, si le projet autorisé se trouve à proximité d'une zone inondable, il n'est pas situé dans une zone couverte par un plan de prévention des risques naturels prévisibles. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 425-21 doit dès lors être écarté comme inopérant.

14. M. A...F...se prévaut également d'un document intitulé " avis du Maire " pour prétendre que ce dernier a dissimulé un risque de glissement de terrain et d'inondation. Toutefois et d'une part, ce document ne fait pas partie du dossier de permis de construire et d'autre part, et en tout état de cause, ce document mentionne l'existence d'un risque de glissement de terrain et précise que le terrain n'est pas couvert par un plan de prévention des risques inondation, ce qui est conforme à la réalité. Par suite, cette argumentation qui est dépourvue de précisions susceptibles de caractériser un moyen ne peut qu'être écartée.

En ce qui concerne le respect du droit communautaire et des préoccupations d'environnement :

15. Il résulte de l'article 4 de la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011 que ne sont soumis à évaluation environnementale que les projets énumérés à l'annexe I et ceux énumérés à l'annexe II lorsque les Etats membres en décident ainsi. Dès lors que M. A...F...n'établit ni même n'allègue que le permis de construire délivré à l'EARL Nico Elevage serait au nombre des projets figurant sur l'une de ces annexes, il n'est en tout état de cause pas fondé à soutenir que l'arrêté du 2 avril 2013 a été délivré en méconnaissance des orientations de cette directive.

16. Si le requérant soutient que la décision attaquée a été prise en méconnaissance des dispositions de la directive n° 2006/118/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 sur la protection des eaux souterraines contre la pollution et la détérioration, ces dispositions ont été transposées en droit interne par le décret n° 2008-1306 du 11 décembre 2008 relatif aux schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux et modifiant la partie réglementaire du code de l'environnement, l'arrêté du 17 décembre 2008 établissant les critères d'évaluation et les modalités de détermination de l'état des eaux souterraines et des tendances significatives et durables de dégradation de l'état chimique des eaux souterraines, l'arrêté du 27 janvier 2009 modifiant l'arrêté du 17 mars 2006 relatif au contenu des schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux, et l'arrêté du 17 juillet 2009 relatif aux mesures de prévention ou de limitation des introductions de polluants dans les eaux souterraines. Le requérant, qui ne soutient pas que ces éléments n'étaient pas suffisants pour assurer une complète transposition de cette directive, ne peut donc directement se prévaloir, à l'encontre de la décision attaquée, qui n'est pas réglementaire, des dispositions de cette directive. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de cette directive ne peut qu'être écarté.

17. M. A...F...soutient également que les articles 1, 3 et 4 de la directive 91/676/CEE du Conseil du 12 décembre 1991 ont été méconnus en autorisant un projet polluant ouvert dans une zone inondable et dans un secteur régulièrement inondé. Toutefois, il n'indique pas que les dispositions du code de l'environnement n'auraient pas assuré la transposition complète des articles 1, 3 et 4, et ne peut donc pas davantage directement se prévaloir, à l'encontre de la décision attaquée, qui n'est pas réglementaire, des dispositions de cette directive.

18. Le requérant invoque encore l'article L. 120-1-1 du code de l'environnement qui définit les conditions et les limites dans lesquelles le principe de participation du public prévu à l'article 7 de la charte de l'environnement est applicable aux décisions individuelles des autorités publiques ayant une incidence sur l'environnement, sauf décisions pour lesquelles des dispositions spécifiques existent. Toutefois, cet article n'est entré en vigueur que le 1er septembre 2013, soit postérieurement à la date de la décision attaquée. Par suite, M. A...F...ne peut utilement s'en prévaloir.

19. L'arrêté du ministre de l'écologie et du développement durable du 7 février 2005 fixant les règles techniques auxquelles doivent satisfaire les élevages de bovins, de volailles et/ou de gibiers à plumes et de porcs soumis à autorisation au titre du livre V du code de l'environnement a été pris en application de la législation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, en particulier des articles L. 511-1 et L. 512-10 du code de l'environnement. La vérification du respect des prescriptions contenues dans cet arrêté ne s'impose pas à l'autorité délivrant des autorisations d'urbanisme. Le moyen tiré de la méconnaissance des prescriptions de cet arrêté ne peut donc qu'être écarté.

20. M. A...F...soutient que le permis de construire est illégal dès lors qu'il ne contient pas de prescriptions relatives à l'épandage destinées à préserver les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1, L. 220-1 et L. 511-1 du code de l'environnement. Toutefois, les conditions d'épandage du lisier, qui font l'objet de prescriptions spéciales dans le cadre de la procédure au titre des installations classées et ne sont pas liées au bâtiment, ne peuvent être utilement invoquées pour contester un permis de construire. De même, les articles 156 et 159 du règlement sanitaire départemental relatifs au dispositif entourant les fosses à l'air libre et aux conditions d'épandage ne peuvent être utilement invoqués à l'encontre d'une autorisation d'urbanisme.

En ce qui concerne la conformité du permis au plan local d'urbanisme :

21. Aux termes de l'article A4 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune : " (... )4.2- ASSAINISSEMENT 1 -Eaux usées : Toute construction doit être raccordée au réseau public d'assainissement. L'évacuation des eaux usées autres que domestiques dans le réseau, si elle est autorisée, est subordonnée à un pré-traitement approprié. En l'absence de réseau collectif, l'assainissement individuel est autorisé à condition que les dispositifs de traitement soient conformes à la législation en vigueur. Une étude géologique pourra être demandée. /Les dispositifs d'assainissement individuel doivent être conçus de façon à pouvoir être mis hors circuit et raccordés au réseau public quand celui-ci sera réalisé. L'évacuation des eaux usées non traitées dans les rivières, fossés (ou égouts d'eaux pluviales) est interdite./2- Eaux pluviales, irrigation et drainage : Les aménagements réalisés sur le terrain doivent garantir l'écoulement des eaux pluviales dans le réseau collecteur. En l'absence de réseau ou en cas d'insuffisance de ce dernier, les aménagements nécessaires au libre écoulement des eaux pluviales (et éventuellement ceux visant à la limitation des débits évacués de la propriété) doivent être adaptés à l'opération et au terrain. "

22. Contrairement à ce que semble soutenir M. A...F..., la notice descriptive du projet prévoit bien que les fientes seront évacuées vers la fosse étanche, laquelle a été dimensionnée pour 12 mois de stockage au lieu des 4 mois réglementaires, et non pas vers un fossé. Par ailleurs, si le requérant allègue que le dispositif d'évacuation des eaux pluviales contribuera à accroitre le risque d'inondation, il ne démontre pas que l'aménagement prévu par le projet, consistant à créer un fossé qui se déversera dans un fossé existant puis dans le ruisseau, ne permettrait pas un libre écoulement des eaux pluviales.

23. Aux termes de l'article A6 du règlement du plan local d'urbanisme : " Les constructions doivent être implantées à une distance au moins égale à 75 m de l'axe de la RN126. Les constructions doivent être implantées à une distance au moins égale à 15 m de l'axe des routes départementales, portée à 20 m en cas de plantations d'alignement. Les constructions doivent être implantées à une distance au moins égale à 10 mètres de l'axe des autres voies. L'aménagement et l'extension mesurée des constructions existantes peuvent être implantés avec le même recul que la construction existante. "

24. Il ressort du plan de masse produit par le pétitionnaire que l'aire de lavage sera située à 10,50 mètres de l'axe du chemin de Loubens. Par ailleurs, le fossé ne constitue pas une construction au sens des dispositions précitées du règlement du plan local d'urbanisme. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article A6 du règlement du plan local d'urbanisme ne peut qu'être écarté.

25. Aux termes de l'article N1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune : " Dans le secteur inondable tel que repéré au document graphique, sont interdits tous les travaux ou aménagements, les constructions ou installations nouvelles, ainsi que l'adaptation, la réfection, le changement de destination ou l'extension des constructions et installations existantes incompatibles avec le caractère inondable du secteur en raison du danger que peuvent représenter les crues. "

26. M. A...F...ne démontre pas que le projet autorisé, qui n'est pas situé en zone inondable du document graphique, méconnaîtrait ces dispositions en se bornant à soutenir que la création d'un nouveau fossé évacuant les eaux pluviales du secteur amont et situé, lui, pour partie dans cette zone, serait incompatible avec le caractère inondable du secteur.

27. Un permis de construire n'a pas d'autre objet que d'autoriser des constructions conformes aux plans et indications fournis par le pétitionnaire. La circonstance que ces plans et indications pourraient ne pas être respectés ou que ces constructions risqueraient d'être ultérieurement transformées ou affectées à un usage non-conforme aux documents et aux règles générales d'urbanisme n'est pas par elle-même, sauf le cas d'éléments établissant l'existence d'une fraude à la date de la délivrance du permis, de nature à affecter la légalité de celui-ci. Si la survenance d'une telle situation après la délivrance du permis peut conduire le juge pénal à faire application, dans les cas déterminés par la loi, des dispositions répressives de l'article L. 480-4 du code de l'urbanisme, elle est en revanche dépourvue d'incidence sur la légalité du permis de construire, sans qu'il soit besoin pour le juge administratif de rechercher l'existence d'une fraude. Dans ces conditions, et alors que la fraude du pétitionnaire alléguée par M. A...F...n'est au demeurant pas établie, ce dernier ne peut utilement soutenir que le permis de construire litigieux serait illégal au motif que la construction du bâtiment d'élevage ne serait pas conforme, du fait de modifications d'implantation, de la création d'une plate-forme surélevée, ou de la méconnaissance des prescriptions sur les couleurs des matériaux, à l'autorisation délivrée.

En ce qui concerne l'atteinte à la sécurité et la salubrité publique :

28. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".

29. Pour contester la légalité du permis de construire délivré à l'EARL Nico Elevage, M. A... F...fait valoir que le projet est situé à proximité immédiate d'une zone inondable et que la distance n'est que de 10 mètres entre la zone inondable et la fosse enterrée, laquelle n'est pas couverte et se trouve au même niveau que le terrain, ce qui en cas d'inondation pourrait entraîner des déversements dans le milieu naturel. M. A...F...fait valoir également que la présence de cette fosse et l'épandage du lisier génèreront des odeurs pestilentielles.

30. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le projet autorisé consiste à créer un atelier de gavage de canards de 1 000 places d'une surface de plancher de 420,25 m², un silo et une fosse étanche en béton de forme circulaire d'une capacité utile de 1 130 m3. Le bâtiment est situé en zone agricole et les premières habitations sont éloignées de plus de 100 mètres, le château du requérant étant situé à plus de 300 mètres comme le souligne l'expertise immobilière qu'il produit. Ainsi, et même si la fosse à lisier n'est pas couverte, il n'est pas établi, alors qu'une telle couverture ne revêt pas un caractère obligatoire, que le projet était de nature à générer des nuisances olfactives portant une atteinte excessive à la salubrité publique. Par ailleurs, si différentes pièces produites au dossier montrent que le terrain d'assiette du projet est situé à proximité d'une zone inondable répertoriée par la DIREN, il n'est pas démontré que l'emplacement des constructions aurait été inondé au cours des précédentes crues de la rivière " Le Girou ". Ainsi, l'atteinte à la salubrité publique qui résulterait de l'éventuelle submersion de la fosse à lisier et de l'insuffisance du système d'évacuation des eaux usées et des eaux pluviales n'est pas établie. La circonstance que l'aire de lavage serait équipée d'un récupérateur d'hydrocarbures n'est pas davantage de nature à démonter l'existence d'un risque de pollution, qu'elle a au contraire pour vocation de prévenir. Enfin, l'existence de risques de glissements de terrains n'est pas davantage démontrée du seul fait de la configuration des fossés en pied de talus. Dès lors, le permis de construire litigieux, qui n'a pas vocation à suppléer les mesures qui pourraient être ordonnées au titre de la législation de installations classées pour la protection de l'environnement, n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

En ce qui concerne l'atteinte au site :

31. M. A...F...soutient qu'en accordant le permis litigieux, le maire de la commune de Cuq-Toulza aurait méconnu les dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, aux termes desquelles : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. " et de l'article A 11 du règlement du plan local d'urbanisme, qui prévoient que : " Aspect extérieur : Les constructions doivent présenter un aspect extérieur compatible avec le caractère ou l'intérêt des lieux avoisinants, en harmonie avec leur environnement architectural et paysager. 11.1- Couvertures : Pour les constructions à usage d'habitation et leurs annexes, les toitures doivent être en tuiles de surface courbe et leur pente comprise entre 30 et 40%. Ces dispositions ne s'appliquent pas aux vérandas, aux serres, aux couvertures de piscines et aux abris de jardin. Des toitures de type contemporain (terrasses végétales, etc ...) pourront être autorisées dès lors qu'elles s'intègrent dans le milieu environnant. 11.2- Matériaux et teinte : Les autres toitures, les revêtements de façade et les clôtures doivent être d'une conception et d'une teinte en harmonie avec celles du bâti traditionnel. Ces dispositions ne s'appliquent pas aux constructions à usage d'équipement public et aux vérandas. Est notamment interdit l'emploi brut en parement extérieur de matériaux destinés à être recouverts d'un enduit. Les clôtures maçonnées doivent être traitées sur les deux faces ". Ces dernières dispositions ont le même objet que celles, également invoquées, de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme et posent des exigences qui ne sont pas moindres. C'est donc par rapport aux dispositions du règlement du plan local d'urbanisme que doit être appréciée la légalité du permis de construire en litige.

32. Il résulte de ces dispositions que, si les constructions projetées portent atteinte aux paysages avoisinants, l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site. Eu égard à la teneur des dispositions de l'article A 11 du règlement, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, d'apprécier si l'autorité administrative a pu légalement autoriser la construction projetée, compte tenu de ses caractéristiques et de celles des lieux avoisinants, sans méconnaître les exigences résultant de cet article. Dans l'exercice de ce contrôle, le juge doit tenir compte de l'ensemble des dispositions de l'article et de la marge d'appréciation qu'elles laissent à l'autorité administrative pour accorder ou refuser de délivrer une autorisation d'urbanisme.

33. M. A...F...fait valoir tout d'abord que le projet autorisé porte atteinte au caractère des lieux avoisinants, en l'occurrence le château dont il est propriétaire, qui constitue un bâtiment remarquable. Toutefois, et ainsi qu'il a été dit au point 30, le projet qui autorise la construction d'un bâtiment agricole de 420,25 m², d'une hauteur sous faîtage de 5 mètres, et d'un silo, est situé à plus de 300 mètres du château et près de 200 mètres de la limite du parc de M. A... F.... Compte tenu du relief et notamment de la situation du projet, situé en contrebas par rapport au château, de ce que le projet autorisé prévoit la création de ceintures végétales afin de limiter son impact visuel, et de ce que l'arrêté attaqué prescrit de choisir une couleur particulière afin d'améliorer l'insertion du projet, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'intégration du bâtiment dans le site ne serait pas assurée. La circonstance que le bâtiment ne serait pas revêtu d'un crépi est sans incidence, dès lors que sa construction en panneaux sandwich n'est pas destinée à être recouverte d'un enduit. Par ailleurs, la construction projetée est située dans une zone rurale, qui ne constitue pas un espace remarquable au regard de sa qualité paysagère. Par suite, le projet autorisé n'est pas de nature à porter atteinte à l'intérêt des lieux avoisinants.

En ce qui concerne le détournement de pouvoir :

34. Revêt le caractère d'un détournement de pouvoir ou de procédure le fait pour une autorité administrative de prendre un acte, même dans un intérêt public, si cet intérêt n'est pas celui pour lequel les pouvoirs en cause ont été conférés à cette autorité. M. A...F...fait valoir que le permis de construire attaqué n'a eu pour objet que de contourner la suspension du précédent permis ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse et que le pétitionnaire a porté atteinte à " l'autorité de la chose ordonnée par le juge des référés ". Il ajoute que le pétitionnaire aurait dû déposer un permis de construire modificatif et que les modifications incluses dans le second permis de construire sont uniquement de détail. Enfin, il soutient que le second permis de construire a été délivré pour permettre au pétitionnaire de continuer à bénéficier de subventions publiques.

35. Si, eu égard à leur caractère provisoire, les décisions du juge des référés n'ont pas, au principal, l'autorité de la chose jugée, elles sont néanmoins, conformément au principe rappelé à l'article L. 11 du code de justice administrative, exécutoires et, en vertu de l'autorité qui s'attache aux décisions de justice, obligatoires. Il en résulte que lorsque le juge des référés a prononcé la suspension d'une décision administrative et qu'il n'a pas été mis fin à cette suspension - soit, par l'aboutissement d'une voie de recours, soit dans les conditions prévues à l'article L. 521-4 du code de justice administrative, soit par l'intervention d'une décision au fond - l'administration ne saurait légalement reprendre une même décision sans qu'il ait été remédié au vice que le juge des référés avait pris en considération pour prononcer la suspension. Une décision intervenue pour l'exécution de l'ordonnance par laquelle le juge des référés d'un tribunal administratif a suspendu l'exécution d'un acte administratif revêt, par sa nature même, un caractère provisoire jusqu'à ce qu'il soit statué sur le recours en annulation présenté parallèlement à la demande en référé.

36. Il ressort des pièces du dossier que pour ordonner la suspension de l'arrêté du 10 juillet 2012, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a retenu le seul moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles R. 111-21 du code de l'urbanisme et A 11 du plan local d'urbanisme de la commune. A la suite de cette ordonnance, l'EARL Nico Elevage, qui n'était pas tenue de solliciter un permis modificatif, a déposé une nouvelle demande de permis de construire, qui contenait des éléments d'information plus précis sur l'insertion du projet dans son environnement, notamment par rapport au château du requérant, et le nouveau permis de construire délivré contient des prescriptions spéciales relatives à cette insertion. Par suite, le nouvel arrêté délivrant le permis de construire du 2 avril 2013 doit être regardé comme remédiant au vice pris en considération par le juge des référés et la circonstance que le pétitionnaire ait sollicité un nouveau permis de construire après la suspension du permis délivré le 10 juillet 2012 ne saurait révéler l'existence du détournement de pouvoir allégué. Enfin si l'appelant fait valoir que le second permis de construire a été délivré pour permettre au pétitionnaire de continuer à bénéficier de subventions publiques, cette circonstance ne suffit pas non plus à démontrer que la délivrance du nouveau permis aurait été motivée par la poursuite d'un but étranger aux pouvoirs conférés à l'autorité délivrant une autorisation d'urbanisme.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

37. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Cuq-Toulza et de l'EARL Nico Elevage, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A...F...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge du requérant deux sommes de 1 500 euros à verser à ce titre, d'une part, à la commune de Cuq-Toulza, et d'autre part, à l'EARL Nico Elevage.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...F...est rejetée.

Article 2 : M. A...F...versera à la commune de Cuq-Toulza d'une part, et à l'EARL Nico Elevage d'autre part, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...F..., à la commune de Cuq-Toulza et à l'EARL Nico Elevage.

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2016 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

M. Paul-André Braud, premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 15 décembre 2016.

Le rapporteur,

Jean-Claude PAUZIÈSLe président,

Catherine GIRAULTLe greffier,

Delphine CÉRON

La République mande et ordonne au ministre du logement et de l'habitat durable en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

No 14BX03353


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14BX03353
Date de la décision : 15/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PAUZIÈS
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SCP CANDELIER CARRIERE-PONSAN

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-12-15;14bx03353 ?
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