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17/01/2017 | FRANCE | N°15BX00137

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 17 janvier 2017, 15BX00137


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Antilles Développement Investissement a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de réduire les bases imposables à l'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées au titre des années 2004 et 2005, à hauteur, respectivement, de 1 682 769 euros et de 427 059 euros et de la décharger, à due concurrence, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005, ainsi que des pénalités correspondantes.


Par un jugement n° 1000714 du 13 novembre 2014, le tribunal administratif de la Guadeloup...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Antilles Développement Investissement a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de réduire les bases imposables à l'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées au titre des années 2004 et 2005, à hauteur, respectivement, de 1 682 769 euros et de 427 059 euros et de la décharger, à due concurrence, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1000714 du 13 novembre 2014, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 janvier 2015 la société Antilles Développement Investissement, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 13 novembre 2014 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sylvie Cherrier,

- et les conclusions de M. B... de la Taille Lolainville, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Antilles Développement Investissement a pour activité la prise de participations dans d'autres sociétés. A la suite d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2003, 2004 et 2005, l'administration a notamment réintégré dans ses bénéfices imposables à l'impôt sur les sociétés au titre des années 2004 et 2005 des provisions constituées au titre de pertes de créances rattachées à ses participations dans ses filiales Capi Color et CEC, au titre de dépréciation des comptes clients ouverts au nom de ses filiales Capi Color et SPI Plomberie et, enfin, une provision pour risque constituée à raison d'une convention de garantie d'actif et de passif liée à la vente de titres à la SA Nesmond. La société Antilles Développement Investissement fait appel du jugement du 13 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie du fait de la réintégration de ces sommes dans ses bénéfices imposables, ainsi que des pénalités correspondantes.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission (...). Il résulte de ces dispositions que les vices de forme ou de procédure dont serait entaché l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'affectent pas la régularité de la procédure d'imposition et ne sont, par suite, pas de nature à entraîner la décharge de l'imposition établie à la suite des rectifications ou redressements soumis à son examen. Par suite, le moyen tiré de ce que la commission aurait siégé dans une composition irrégulière lorsqu'elle a examiné, le 6 octobre 2009, le désaccord existant entre la société requérante et l'administration quant aux provisions ci-dessus évoquées, est inopérant au soutien de la demande en décharge des impositions supplémentaires en litige. Aussi, le moyen ne peut-il qu'être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions contestées :

3. Aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts: " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...), notamment: / 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des évènements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice ". En vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire et auxquelles, en particulier, les dispositions précitées de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales n'ont pas entendu déroger, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier des provisions constituées, quelque soit la régularité de la procédure devant la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. Par ailleurs, il résulte desdites dispositions qu'une entreprise peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables d'un exercice des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne sont supportées qu'ultérieurement par elle, à la condition que ces pertes ou charges soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, qu'elles apparaissent, en outre, comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de clôture de l'exercice et qu'enfin, elles se rattachent par un lien direct aux opérations de toute nature déjà effectuées à cette date par l'entreprise.

En ce qui concerne les provisions afférentes aux créances et comptes clients Capi Color :

4. La société Antilles Développement Investissement a doté, au titre de l'exercice clos en 2004, une provision d'un montant de 164 894,81 euros, égale au solde débiteur d'un compte de classe 267 enregistrant les créances rattachées à des participations dans l'une de ses filiales à 100%, la société Capi Color. Elle a également doté, au titre de l'exercice clos en 2005, deux provisions de montants respectifs de 98 704,58 et 57 845,80 euros pour dépréciation des comptes clients ouverts dans ses écritures au nom de cette même société. Pour procéder à leur réintégration dans les bénéfices, l'administration s'est fondée sur la circonstance que la dépréciation de ces créances, non appuyée de justificatifs, n'était pas cohérente avec la situation comptable de cette filiale. La société requérante soutient que la société Capi Color s'est trouvée dans l'incapacité de rembourser ses dettes dès l'année 2005, le processus s'étant amorcé au milieu de l'année 2004. Elle se prévaut à cet égard de la baisse continue du chiffre d'affaires de sa filiale jusqu'en 2008, de l'augmentation des pertes et de la diminution de l'actif net. Néanmoins, et outre que la société Antilles Développement Investissement ne fait état d'aucun évènement au cours de l'exercice 2004 qui aurait rendu probable la perte des 164 894,81 euros provisionnés à la clôture de celui-ci, la seule circonstance que le résultat d'exploitation, le résultat net et la capacité d'autofinancement de la société Capi Color étaient négatifs à la clôture de l'exercice 2005 ne suffit pas à établir le caractère douteux, à cette date, des créances détenues sur cette société.

En ce qui concerne les provisions afférentes aux créances rattachées à la participation dans la société CEC :

5. La société Antilles Développement Investissement a doté, au titre des exercices clos en 2004 et 2005, deux provisions égales aux soldes débiteurs de comptes de classe 267 " créances rattachées à des participations ", de montants respectifs de 250 089,76 euros et 101 864,40 euros, afférents aux participations détenues dans une autre de ses filiales, la société CEC. Pour procéder à leur réintégration extracomptable, l'administration s'est là encore fondée sur la circonstance que la dépréciation de ces créances, non appuyée de justificatifs, n'était pas cohérente avec la situation comptable de cette filiale. La société requérante soutient que sa filiale présentait un endettement qui ne permettait pas le remboursement de ses dettes, que sa capacité de remboursement s'est divisée par trois en 2006, pour devenir négative en 2007, et que son secteur d'activité était en récession dès l'année 2004. Il ressort toutefois des chiffres comptables produits par la requérante que la société CEC présentait un résultat d'exploitation et un résultat net positifs, en légère augmentation, au cours des exercices 2004 et 2005. Les considérations d'ordre général avancées par la requérante ne permettent par ailleurs pas d'établir le caractère douteux, à la clôture de ces exercices, des créances détenues sur la société CEC.

En ce qui concerne la dépréciation des comptes clients SPI Plomberie :

6. La société Antilles Développement Investissement a doté, au titre de l'exercice clos en 2005, une provision d'un montant de 168 644,66 euros pour dépréciation du compte client ouvert au nom de la société SPI Plomberie. Elle fait valoir qu'à la suite de la cession de cette filiale, au cours de l'année 2005, les premières échéances de la créance qu'elle détenait sur celle-ci, qui devait être remboursée en 36 mois, n'ont pas été respectées, l'activité de la société ayant du mal à repartir. Néanmoins et outre que la société Antilles Développement Investissement n'établit ni que des échéances étaient impayées au 31 décembre 2005 ni que la société aurait manifesté l'impossibilité de s'acquitter de sa dette, elle ne produit aucune pièce confirmant qu'elle aurait accompli des diligences pour en recouvrer le montant. Par suite, la société requérante n'établissant pas la probabilité du risque de perte de sa créance à la clôture de l'exercice 2005, c'est à bon droit que l'administration a réintégré dans ses résultats imposables la provision pour créance douteuse qu'elle avait constituée au titre de cet exercice en ce qui concerne la créance détenue sur la société SPI Plomberie.

En ce qui concerne la provision pour risques et charges :

7. Il résulte de l'instruction que, par acte du 1er octobre 2004, la société Antilles Développement Investissement a cédé à la société Nesmond des titres qu'elle détenait pour un prix de 3 109 426 euros. Cette cession a été assortie d'une convention de garantie d'actif et de passif du même jour. La société requérante, ayant accordé à la société Nesmond une garantie bancaire à hauteur de 1 100 000 euros, a constitué une provision pour risques et charges de ce montant à la clôture de l'exercice 2004.

8. Il résulte des dispositions précitées de l'article 39 du code général des impôts que doit être prise en compte pour la détermination du bénéfice net une provision constituée pour faire face à un engagement de garantie bancaire, dès lors, d'une part, que le montant de la perte probable est nettement précisé, et que, d'autre part, les événements intervenus au cours de l'exercice rendent probables la mise en jeu de cette garantie. En l'espèce, la société Antilles Développement Investissement se contente de faire valoir qu'en cas de cession d'un ensemble de participations, il existe un " risque certain " justifiant que la garantie bancaire accordée soit intégralement provisionnée. Dans la mesure toutefois où cette société ne fait état d'aucun évènement survenu au cours de l'exercice en cause, permettant de considérer comme probable la mise en jeu de cette garantie à hauteur d'un montant déterminé, c'est à bon droit que le tribunal administratif a considéré qu'une telle mise en jeu ne présentait en l'espèce qu'un caractère éventuel et que le montant de 1 100 000 euros ne pouvait ainsi pas être porté en provision, et donc déduit des bénéfices imposables de l'exercice 2004, sur le fondement des dispositions précitées de l'article 39 du code général des impôts.

9. Il résulte de ce qui précède que la société Antilles Développement Investissement n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Sur les conclusions au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

10. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société Antilles Développement Investissement demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Antilles Développement Investissement est rejetée.

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N° 15BX00137


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