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30/03/2017 | FRANCE | N°15BX00559

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 30 mars 2017, 15BX00559


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Antilles Etudes a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe, à titre principal, d'annuler la décision du 18 novembre 2013 par laquelle le gérant de la société TAV/CGP, titulaire d'une convention de délégation de service public pour l'exploitation et le développement du port de plaisance " Marina Bas du Fort ", lui a signifié le terme de la convention d'occupation temporaire du domaine public relative au lot n° 17 du centre commercial " Les Poirier

s de la Marina ", ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Antilles Etudes a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe, à titre principal, d'annuler la décision du 18 novembre 2013 par laquelle le gérant de la société TAV/CGP, titulaire d'une convention de délégation de service public pour l'exploitation et le développement du port de plaisance " Marina Bas du Fort ", lui a signifié le terme de la convention d'occupation temporaire du domaine public relative au lot n° 17 du centre commercial " Les Poiriers de la Marina ", ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux.

Par une ordonnance n° 1400429 du 8 décembre 2014, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de la Guadeloupe a donné acte du désistement de la société Antilles Etudes et a rejeté la demande du Grand Port Maritime de la Guadeloupe présentée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 février 2015, la société Transat Antilles Voyages, dont le nom commercial est Compagnie générale portuaire, ci après TAV/CGP, prise en la personne de son gérant, M. D...E..., représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de la Guadeloupe en date du 8 décembre 2014 en tant qu'elle a rejeté sa demande présentée sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de mettre à la charge de la société Antilles Etudes la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le désistement ne fait pas obstacle à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En l'espèce, il aurait été équitable de ne pas laisser à la charge de la partie non perdante l'intégralité des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la situation économique de la partie perdante soit de nature à justifier l'absence de condamnation aux frais exposés et non compris dans les dépens. La demande présentée à ce titre était justifiée au regard de la complexité du litige ;

- la requête de première instance est partiellement irrecevable, les conclusions tendant à l'annulation de la " décision " du 18 novembre 2013 étant entachées de forclusion eu égard à la date d'enregistrement de la requête le 18 avril 2014 ;

- le courrier du 18 novembre 2013 ne peut être qualifié de décision puisqu'il se borne à informer l'intéressé que la convention d'occupation temporaire arrive à son terme le 28 février 2014. La demande d'annulation de cet acte est donc également irrecevable au motif qu'il ne s'agit pas d'une décision faisant grief. Il appartenait à la société Antilles Etudes de répondre à la proposition de location au nouveau tarif au lieu d'entamer un contentieux ;

- le caractère précaire de l'autorisation d'occupation consentie ne méconnaît nullement les dispositions du code général de la propriété des personnes publiques, ce caractère étant expressément rappelé à l'article L. 2122-2 du code général de la propriété des personnes publiques ;

- s'agissant du moyen tiré de l'incompétence, si elle n'est pas la société avec laquelle la société requérante a signé la convention d'autorisation d'occupation temporaire, elle vient aux droits de cette dernière dans la mesure où elle lui a succédé en tant que concessionnaire ;

- s'agissant du caractère prétendument acquis du renouvellement de l'autorisation d'occupation temporaire, les courriers du concédant, le port autonome de la Guadeloupe, ne font qu'inviter les occupants temporaires à se rapprocher du concessionnaire pour obtenir le renouvellement de l'autorisation. Au regard du caractère nécessairement précaire des autorisations d'occupation du domaine public, un occupant ne peut soutenir bénéficier à ce titre d'un droit acquis ;

- s'agissant de l'existence d'un détournement de pouvoir, elle n'a méconnu aucune de ses obligations contractuelles, notamment celles résultant de l'alinéa 5 de l'article 1-1 de la convention de concession. La circonstance que son objet social lui permette d'exercer des activités susceptibles de concurrencer celles de certains amodiataires ne signifie pas que cette faculté a été mise en oeuvre. La société a réduit son objet statutaire peu après la signature de la convention de concession. La circonstance que son gérant soit également le gérant de la société Antilles.Sail.com ne peut être qualifié de manquement à l'alinéa 5 susmentionné dès lors que celui-ci ne concerne que la société TAV/CGP. En outre, elle a toujours traité à égalité la société Antilles.Sail.com avec les autres sociétés de location de bateaux. Contrairement à ce qui est soutenu par l'intéressée, le départ de la société Amel est uniquement motivé par l'existence de perspectives attractives ailleurs. Le détournement de pouvoir n'est donc pas établi ;

- sur l'augmentation du montant de la redevance, le montant demeure dérisoire au regard de l'état du marché locatif commercial actuel. Les augmentations visent précisément à rattraper progressivement ce décalage ;

- au regard du caractère non fondé ainsi démontré des moyens invoqués en première instance, le désistement n'a été motivé que par la volonté d'éviter une condamnation au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

- le premier juge a commis une erreur de droit ou a statué infra petita en estimant que la demande de frais exposés et non compris dans les dépens était formulée par le Grand Port Maritime de la Guadeloupe alors qu'elle émanait indiscutablement de la société TAV/CGP.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 août 2015, la SARL Antilles Etudes, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société TAV-CGP la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- il résulte de la jurisprudence sur les frais exposés et non compris dans les dépens que la partie qui se désiste est regardée comme celle qui succombe, à moins que le désistement ne soit motivé par une satisfaction même partielle. En l'espèce, un accord entre les occupants, le concessionnaire et le concédant est intervenu le 19 août 2014. Cet accord a fait droit à nombre de prétentions des occupants en renouvelant l'autorisation d'occupation temporaire pour une durée de 7 ans, en revoyant " à la baisse " le montant de la redevance, en autorisant la sous-location et en laissant l'impôt foncier à la charge du concédant. De ce fait, les occupants doivent être regardés comme ayant obtenu satisfaction. Dès lors, faute d'être la partie qui succombe, elle ne pouvait être condamnée sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- l'appel interjeté par le concessionnaire sans faire mention de cet accord n'est pas loyal. Il en résulte que l'équité et la situation économique du concessionnaire font que la demande présentée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doit être accueillie.

Par ordonnance du 29 février 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 29 mars 2016 à midi.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Paul-André Braud,

- et les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Par une convention d'occupation temporaire du domaine public signée le 1er août 1986 avec le directeur du Port Autonome de la Guadeloupe, M. C...a été autorisé à occuper pendant une durée de trente ans le lot numéro 17 du centre commercial " Les Poiriers de la Marina " située dans le port de plaisance " Marina Bas-du-Fort ". A la suite d'une adjudication à la barre, cette autorisation a été cédée à la société Antilles Etudes. Par une convention de concession conclue le 28 décembre 2005, le Port Autonome de la Guadeloupe a notamment délégué à la société Transat Antilles Voyages-Compagnie générale portuaire (TAV/CGP) l'exploitation et le développement du port de plaisance " Marina Bas-du-Fort " pour une durée de quinze années à compter du 1er janvier 2006. Le gérant de la société TAV/CGP a, par un courrier en date du 18 novembre 2013, avisé la société Antilles Etudes que la convention d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public arrivait à son terme le 28 février 2014 en précisant qu'il n'y aurait pas de possibilité de renouvellement ou de prolongation de cette convention. A la suite du rejet implicite de son recours gracieux, la société Antilles Etudes a saisi le tribunal administratif de la Guadeloupe afin d'obtenir l'annulation de la décision du 18 novembre 2013 et de la décision implicite rejetant son recours. Le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de la Guadeloupe, par une ordonnance en date du 8 décembre 2014, a donné acte du désistement de la société Antilles Etudes et a rejeté " les conclusions du Grand Port Maritime de la Guadeloupe tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ". La société TAV/CGP relève appel de cette ordonnance en tant qu'elle a rejeté sa demande présentée sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. La société TAV/CGP soutient que le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de la Guadeloupe a omis de statuer sur sa demande tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens. Si l'ordonnance attaquée se borne à rejeter les conclusions présentées à ce titre par le Grand Port Maritime de la Guadeloupe, il ressort des visas, qui ne visent aucun mémoire émanant de cette personne morale mais visent un mémoire présenté pour la société TAV/CGP, et de l'article 3 du dispositif qui prévoit notamment la notification de l'ordonnance non pas au Grand Port Maritime de la Guadeloupe mais à la société TAV/CGP, que la mention du Grand Port Maritime de la Guadeloupe, tant dans les motifs que dans l'article 2 du dispositif, constitue une erreur de plume qui, pour regrettable qu'elle soit, est sans incidence sur la régularité de l'ordonnance attaquée.

Sur la demande de frais exposés en première instance par la société TAV/CGP et non compris dans les dépens :

3. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ". Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge d'une personne qui n'est ni tenue aux dépens ni la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En outre, lorsque le requérant déclare se désister purement et simplement de sa requête et qu'un défendeur a présenté une demande au titre de ces dispositions, il appartient au juge d'apprécier, en fonction des circonstances de l'espèce, s'il y a lieu de faire droit à ces conclusions.

4. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que le désistement de la société Antilles Etudes était motivé par la signature le 19 août 2014 avec la société TAV/CGP, en sa qualité de concessionnaire, d'une nouvelle convention d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public l'autorisant à occuper pendant une durée de 7 ans le lot numéro 17 du centre commercial " Les Poiriers de la Marina ", moyennant un loyer inférieur à celui initialement proposé, et permettant une sous-location. Dès lors, c'est par une juste appréciation des circonstances de l'espèce que le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté, dans les conditions énoncées au point 2, la demande de la société TAV/CGP tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens.

Sur les frais exposés en appel et non compris dans les dépens :

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Antilles Etudes, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la société TAV/CGP au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société TAV/CGP la somme demandée par la société Antilles Etudes au même titre.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société TAV/CGP est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société Antilles Etudes présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Antilles Etudes et à la société Transat Antilles Voyages-Compagnie générale portuaire.

Délibéré après l'audience du 23 février 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

M. Paul-André Braud, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 mars 2017.

Le rapporteur,

Paul-André BRAUDLe président,

Catherine GIRAULTLe greffier,

Vanessa BEUZELIN

La République mande et ordonne au ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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No 15BX00559


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX00559
Date de la décision : 30/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-06-05-11 Procédure. Jugements. Frais et dépens. Remboursement des frais non compris dans les dépens.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : CABINET DEPORCQ

Origine de la décision
Date de l'import : 11/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-03-30;15bx00559 ?
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