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13/04/2017 | FRANCE | N°15BX01010

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 13 avril 2017, 15BX01010


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par un recours enregistré le 13 août 2014, sous le n° 2372 T, la SARL Chrisdan a demandé à la Commission nationale d'aménagement commercial d'annuler la décision de la commission départementale d'aménagement commercial de Haute-Garonne en date du 15 juillet 2014 accordant aux sociétés " SC Foncière Chabrières " et " SAS Seynet " l'autorisation de procéder à l'extension de 1 150 m² d'un supermarché " Intermarché ", portant ainsi la surface de vente à 2 000 m², et à la création de trois boutiqu

es spécialisées non alimentaires de 217 m², 250 m² et 249 m² à Buzet-sur-Tarn.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par un recours enregistré le 13 août 2014, sous le n° 2372 T, la SARL Chrisdan a demandé à la Commission nationale d'aménagement commercial d'annuler la décision de la commission départementale d'aménagement commercial de Haute-Garonne en date du 15 juillet 2014 accordant aux sociétés " SC Foncière Chabrières " et " SAS Seynet " l'autorisation de procéder à l'extension de 1 150 m² d'un supermarché " Intermarché ", portant ainsi la surface de vente à 2 000 m², et à la création de trois boutiques spécialisées non alimentaires de 217 m², 250 m² et 249 m² à Buzet-sur-Tarn.

Par décision du 27 novembre 2014, la Commission nationale d'aménagement commercial a rejeté ce recours et autorisé ce projet.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 mars 2015, la SARL Chrisdan, représentée par la SCP CGCB et Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler la décision du 27 novembre 2014 de la Commission nationale d'aménagement commercial confirmant l'autorisation précitée ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- elle exploite à Bessières un magasin de type supermarché à l'enseigne SUPER U sur le point d'être porté à 2 646 m² de surface de vente, ainsi qu'une station-service ;

- M. Valdiguié ne pouvait siéger en qualité de président de la commission qu'en cas d'absence ou d'empêchement du président ;

- le dossier de demande présenté devant la commission départementale d'aménagement commercial n'était pas suffisamment précis sur l'existence d'autres activités commerciales dans la zone d'activités Al Cros ;

- le dossier de demande ne comportait aucun élément permettant de démontrer que la société Seynet aurait qualité pour exploiter commercialement le projet autorisé ;

- le dossier de demande était également insuffisant en ce qui concerne les effets du projet sur l'environnement ; il ne précise pas que l'assiette foncière du projet est située dans un champ anciennement destiné à l'agriculture, ni n'indique la faune présente sur le site ; il ne précise pas non plus que la commune de Buzet-sur-Tarn est soumise à un plan de prévention des risques concernant les mouvements différentiels de terrains approuvé par arrêté préfectoral du 18 novembre 2011, et ne précise pas les dispositions constructives de nature à permettre d'apprécier la sécurité des consommateurs ; il appartenait aux pétitionnaires de présenter les résultats de l'éventuelle étude géotechnique réalisée ; le dossier de demande ne présente pas l'existence d'une ZNIEFF de type 1 située à trois kilomètres du site du projet et ne présente pas les effets du projet sur les espèces résidant dans cette zone et qui, notamment pour les oiseaux, pourraient être gênées tant au stade de la construction que de l'exploitation ; il énonce que le site du projet n'est pas concerné par le plan de prévention des risques inondation, alors que le projet a pour effet de rapprocher l'ensemble commercial de la zone d'aléa fort du plan de prévention matérialisée par le cours d'eau le " Marignol " mais également d'augmenter l'occurrence du risque d'inondation en raison de la très importante imperméabilisation des sols du terrain d'assiette, jusque-là en nature de terre agricole ;

- le projet autorisé n'est pas compatible avec le SCOT du Vaurais en cours d'élaboration et notamment avec les objectifs du projet d'aménagement et de développement durable, qui souhaitent contenir le développement de Buzet-sur-Tarn et conforter l'offre commerciale de Saint-Sulpice ;

- le projet présente des inconvénients en matière d'aménagement du territoire dès lors qu'il est situé en dehors des parties agglomérées de la commune sur des terres agricoles à plus d'un kilomètre du centre-ville et qu'il aura pour effet de déstabiliser le commerce local ; les besoins des consommateurs de la zone de chalandise primaire sont sur le point d'être satisfaits par l'ouverture prochaine de trois équipements commerciaux à Bessières, et le projet autorisé peut contribuer à empêcher le développement de la zone commerciale de Bessières ; le projet aura pour effet d'augmenter les flux de transport sans pour autant réduire l'évasion commerciale ;

- le projet ne présente qu'une médiocre qualité environnementale, sans amélioration thermique du bâtiment existant, ; il implique une importante imperméabilisation des sols à proximité d'une zone inondable d'aléa fort , sans parkings en evergreen ou bassins enterrés pour la récupération des eaux pluviales ; il ne prévoit aucune mesure de nature à réduire les risques d'atteinte aux espèces protégées par la ZNIEFF de type 1 ; la desserte par les transports publics est insuffisante et le projet ne comporte pas d'amélioration en termes de transports doux ;

- le projet présente de graves inconvénients pour la sécurité du consommateur en matière de circulation automobile en l'absence d'entrée réservée pour les véhicules lourds ; il se situe dans une zone soumise à un risque géologique identifié dans le plan de prévention des risques naturels liés au retrait-gonflement des sols argileux et à proximité d'une zone inondable ; le projet autorisé, qui s'ajoute à deux autres extensions dans le secteur, entraînera un gaspillage des équipements commerciaux et n'améliorera pas le confort d'achat du consommateur local ;

- à la date du 2 juillet 2003, le terrain d'assiette du projet était situé dans une zone non constructible et en application de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme aucune autorisation d'exploitation commerciale ne pouvait être délivrée ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2015, la société civile Foncière Chabrières et la SAS Seynet concluent au rejet de la requête et à ce que la cour mette à la charge de la SARL Chrisdan la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- la requête est tardive ;

- la forme juridique de la société requérante est erronée, ce qui ne permet pas d'identifier l'appelante en méconnaissance des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

- la Commission nationale d'aménagement commercial était régulièrement présidée par M. Valdiguié ;

- le dossier de demande comportait des informations relatives à la zone commerciale où le projet est implanté ; la société Foncière Chabrières, propriétaire de l'assiette foncière du projet, pouvait en cette seule qualité présenter la demande d'autorisation ;

- le terrain d'assiette du projet est situé dans une zone d'activités commerciales, il est en friche depuis 2010 et ne consommera pas d'espaces agricoles supplémentaires, le dossier de demande n'avait donc pas à indiquer que le terrain d'assiette serait un champ destiné à l'agriculture ; le plan de zonage concernant les risques de mouvements différentiels de terrain comporte une zone unique caractérisée comme faiblement à moyennement exposée et il n'est pas démontré que l'absence dans le dossier de demande d'éléments relatifs à ce plan ait empêché la commission de se prononcer au regard des critères prévus par l'article 752-6 du code de commerce ; la ZNIEFF est située à trois kilomètres du projet et il n'est pas démontré que le projet aurait des effets négatifs sur celle-ci; le projet est situé hors zonage du plan de prévention des risques d'inondation, le dossier n'avait donc pas à faire état de préconisations spécifiques à cette situation ;

- le SCOT du Vaurais est en cours d'élaboration et n'a pas été approuvé, et en application des dispositions du code de l'urbanisme, les autorisations délivrées par la Commission nationale d'aménagement commercial doivent être compatibles avec le document d'orientation et d'objectifs et non pas avec le projet d'aménagement et de développement durable ; la commune de Buzet-sur-Tarn n'est pas un pôle rural, mais un pôle relais qui permet une diversification de l'offre ;

- le projet se situe au sein de la zone artisanale et commerciale intercommunale d'Al Cros en entrée de commune à environ 1 km à l'Ouest du centre bourg et à 5 mn de ce dernier dans une zone urbaine, et dans le périmètre d'un kilomètre se trouvent des équipements publics, des équipements sportifs et de l'habitat individuel et collectif ; la population de la zone de chalandise a augmenté de plus de 40 % entre 1999 et 2011 ; l'extension de la grande surface est nécessaire pour répondre aux attentes et aux besoins de la population locale et la création de nouveaux espaces de vente et de moyenne surface du secteur non alimentaire permettra de diversifier l'offre commerciale sans pour autant gêner les petits commerces, peu nombreux, du centre de Buzet qui ne proposent pas d'offre de cette nature ; le projet permettra de réduire l'évasion commerciale vers l'agglomération toulousaine et il participe à la vie locale en sponsorisant plusieurs associations et en s'approvisionnant auprès de fournisseurs locaux ; 30 emplois supplémentaires seront créés ;

- le projet est desservi par deux routes départementales, il est accessible à pied du fait de sa proximité avec des logements individuels et en vélo ; le site est desservi par des transports en commun et en tout état de cause l'absence de transports en commun n'est pas un motif justifiant à lui seul un refus d'autorisation ; l'impact sur les flux de circulation des véhicules légers et de livraison est limité ;

- en matière de développement durable, le projet comporte des mesures permettant de limiter les pollutions associées à l'activité et de maîtriser les consommations énergétiques ; il s'insère correctement dans l'environnement existant ; il n'est pas justifié de la nécessité de prendre des mesures particulières au regard de la présence de la ZNIEFF à trois kilomètres du projet ;

- la sécurité du consommateur n'est pas au nombre des critères d'appréciation prévu à l'article L. 752-6 du code de commerce de même que la notion de gaspillage des équipements commerciaux ; il n'est pas non plus justifié qu'un risque géologique ou qu'un risque d'inondation mettent en cause la sécurité des consommateurs ;

- une dérogation a été accordée le 3 mars 2014 aux pétitionnaires pour ce projet par la Communauté des Communes Tarn Agout en application de l'article L 122-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur ainsi que cela a été précisé dans le rapport de la DDT et le rapport d'instruction ;

Par ordonnance du 7 février 2017 la clôture d'instruction a été fixée au 27 février 2017 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- l'arrêté du 21 août 2009 fixant le contenu de la demande d'autorisation d'exploitation de certains magasins de commerce de détail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Claude Pauziès,

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

- et les observations de MeB..., représentant la Sarl Chrisdan, et de MeC..., représentant les sociétés Seynet et Chabrieres ;

Une note en délibéré présentée par Me A...a été enregistrée le 29 mars 2017 ;

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 15 juillet 2014, la commission départementale d'aménagement commercial de Haute-Garonne a accordé aux sociétés " SC Foncière Chabrières " et " SAS Seynet " l'autorisation de procéder à l'extension de 1 150 m² d'un supermarché " Intermarché ", portant ainsi la surface de vente à 2 000 m², et à la création de trois boutiques spécialisées non alimentaires de 217 m², 250 m² et 249 m² à Buzet-sur-Tarn. La SARL Chrisdan, qui exploite à Bessières, à moins de 3 km, un magasin à l'enseigne Super U qui doit être porté à 2 646 m² de surface de vente, a saisi la Commission nationale d'aménagement commercial d'un recours enregistré le 13 août 2014, sous le n° 2372 T, tendant à l'annulation de cette décision. La SARL Chrisdan demande à la cour l'annulation de la décision du 27 novembre 2014 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a rejeté son recours et autorisé le projet.

Sur la légalité de la décision attaquée :

En ce qui concerne la régularité de la présidence de la Commission nationale d'aménagement commercial :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 751-6 du code de commerce dans sa rédaction alors applicable, la Commission nationale d'aménagement commercial se compose notamment de : " (...) 1° Un membre du Conseil d'État désigné par le vice-président du Conseil d'État ; 2° Un membre de la Cour des comptes désigné par le premier président de la Cour des comptes (...) ". Aux termes de l'article R. 751-8 du code de commerce, dans sa rédaction alors applicable : " Le président de la Commission nationale d'aménagement commercial est suppléé, en cas d'absence ou d'empêchement, par le membre de la Cour des comptes (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'en cas d'absence ou d'empêchement du président de la Commission nationale d'aménagement commercial, la présidence de la séance est assurée par le membre titulaire de la Commission désigné par le premier président de la Cour des comptes.

3. Il ressort des pièces du dossier que la présidence de la séance du 27 novembre 2014 a été assurée par M. Valdiguié, conseiller maître honoraire à la Cour des comptes, nommé membre titulaire de la Commission par décret du 10 avril 2012, en sa qualité de suppléant du président en titre de la Commission. Il n'est pas établi ni même au demeurant soutenu que ce dernier n'était pas, lors de cette séance, absent ou empêché. Ainsi, le moyen tiré de ce que la Commission nationale aurait été irrégulièrement présidée doit être écarté.

En ce qui concerne la composition du dossier de demande :

4. Si la requérante soutient en premier lieu que le dossier de demande était incomplet car il ne précisait pas la situation du projet au sein d'un ensemble commercial préexistant, il ressort toutefois du dossier de demande que celui-ci indiquait que le projet d'extension se situait au sein de la zone artisanale et commerciale intercommunale d'Al Cros, et précisait la nature des activités existantes dans cette zone ainsi que les projets d'implantation d'activités commerciales en cours dans la zone, indications qui ont été reprises dans le rapport d'instruction devant la Commission nationale d'aménagement commercial.

5. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que la demande d'autorisation a été présentée conjointement par la SC Foncière Chabrières et par la SAS Seynet. Dès lors que la SC Foncière Chabrières, ainsi qu'elle en justifie par la production d'une attestation notariale, est le propriétaire du terrain d'assiette du projet au titre duquel l'autorisation était demandée, ladite demande satisfaisait à la condition tenant à la qualité du pétitionnaire découlant des dispositions de l'article R. 752-6 du code de commerce selon lesquelles : " La demande d'autorisation prévue à l'article L. 752-1 (...) est présentée soit par le propriétaire de l'immeuble, soit par une personne justifiant d'un titre l'habilitant à construire sur le terrain ou à exploiter commercialement l'immeuble. " Dans ces conditions, la circonstance que la société Seynet n'aurait pas justifié être autorisée à exploiter commercialement le futur supermarché ne peut être utilement invoquée.

6. En troisième lieu, la SARL Chrisdan soutient que le dossier de demande contenait des informations insuffisantes au titre des effets du projet en matière d'environnement en ne précisant pas la nature du terrain d'assiette ainsi que la situation du projet sur le territoire d'une commune soumise à un plan de prévention des risques concernant les mouvements différentiels de terrain approuvé par arrêté préfectoral du 18 novembre 2011, couverte par une zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique de niveau 1 et également soumise à un plan de prévention des risques inondation. Toutefois, un supermarché est exploité depuis 2010 sur le terrain d'assiette du projet, qui ne constitue donc pas une parcelle " destinée à l'agriculture ". Par ailleurs, si le dossier de demande ne mentionne pas que le territoire de la commune est soumis à un plan de prévention des risques concernant les mouvements différentiels de terrain approuvé par arrêté préfectoral du 18 novembre 2011, il ressort de ce plan que le territoire de la commune est situé dans " une zone unique caractérisée comme faiblement à moyennement exposée " et il n'est pas soutenu que la mention de cette information dans le dossier de demande aurait pu avoir une influence sur le sens de la décision attaquée, qui ne se prononce pas sur les dispositions constructives relevant le cas échéant du permis de construire . De même, en ne mentionnant pas la présence d'une zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique à trois kilomètres du projet, le dossier de demande n'a pas empêché la commission nationale d'apprécier les effets du projet en matière de protection de l'environnement. Enfin, le dossier de demande précisait que la commune de Buzet-sur-Tarn est dotée d'un plan de prévention des risques inondation et que le site du projet n'est pas concerné par ce plan, ce que confirme le rapport d'instruction devant la Commission nationale d'aménagement commercial. Dans ces conditions, les éléments fournis par le pétitionnaire étaient suffisants pour permettre à la commission nationale d'apprécier la conformité du projet aux objectifs fixés par le législateur.

En ce qui concerne la compatibilité avec le schéma de cohérence territoriale :

7. Si, en vertu de l'article L. 122-1-15 du code de l'urbanisme dans sa version en vigueur à la date de la décision attaquée, les autorisations délivrées par la commission nationale doivent être compatibles avec les schémas de cohérence territoriale, la requérante ne peut utilement soutenir que le projet n'est pas compatible avec le schéma de cohérence territoriale du Vaurais qui, à la date à laquelle la commission nationale s'est prononcée sur la demande d'autorisation, était en cours d'élaboration.

En ce qui concerne l'appréciation de la Commission nationale d'aménagement commercial :

8. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles se prononcent sur un projet d'exploitation commerciale soumis à autorisation en application de l'article L. 752-1 du code de commerce, d'apprécier la conformité de ce projet aux objectifs prévus à l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et à l'article L. 750-1 du code de commerce, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du même code. L'autorisation ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet compromet la réalisation de ces objectifs.

9. La SARL Chrisdan soutient que la décision attaquée méconnaît l'objectif fixé par le législateur en matière d'aménagement du territoire en ce qui concerne l'animation de la vie locale et l'effet du projet sur les flux de transport. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport d'instruction, que le projet autorisé est situé à 1 kilomètre du centre ville dans une zone artisanale et commerciale, à proximité de zones d'habitat individuel et collectif. L'extension envisagée de 1 150 m² et la création de trois boutiques spécialisées dans le commerce non alimentaire a pour objet de renforcer le rôle de proximité du magasin en développant de nouveaux espaces de ventes et permettra d'une part, d'améliorer le confort d'achat des consommateurs dans une zone de chalandise qui connaît une croissance démographique de plus de 40 % depuis 1999 sans avoir d'effet néfaste sur l'animation du centre-ville où le nombre de petits commerces est réduit, et d'autre part de limiter l'évasion commerciale vers l'agglomération toulousaine située à environ une demi-heure en voiture. Si la société requérante soutient que le projet autorisé aura des effets négatifs sur les flux de transport, les pièces du dossier, et notamment les avis des ministres chargés de l'urbanisme et de l'environnement et du ministre du commerce, établissent que les RD 22 et RD 630 desservant le projet sont suffisamment dimensionnées pour supporter l'augmentation du trafic générée par l'ouverture des magasins envisagés, et que les accès sont sécurisés par un giratoire et un tourne à gauche existants. Par suite, ce projet ne méconnaît ni l'objectif de protection des consommateurs ni l'objectif d'aménagement du territoire pour ce qui concerne son impact sur l'animation de la vie urbaine.

10. Si la requérante soutient que la décision attaquée méconnaît l'objectif fixé par le législateur en matière de développement durable en ce qui concerne la qualité environnementale du projet et son insertion dans les réseaux de transport en commun, il ressort des pièces du dossier que le projet n'est pas inclus dans le périmètre de la zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique " Forêt de Buzet " distante de trois kilomètres et qu'il n'est pas davantage situé dans une zone à risque d'inondation, le premier ruisseau étant à 500 mètres. De même, le projet prévoit des dispositifs suffisants en matière d'économie d'énergie et de récupération des eaux pluviales. Il présente une qualité architecturale satisfaisante et les espaces paysagers représenteront plus de 25 % de l'assiette foncière liée à l'opération. La circonstance que les aires de stationnement ne seront pas engazonnées ne peut à elle seule permettre de regarder les efforts en matière de développement durable comme insuffisants. Compte tenu de son implantation à proximité des zones d'habitation, le projet sera accessible à pied ou en vélo par une partie de la population de la commune. Enfin, la circonstance que le projet n'est desservi que par deux lignes de transports en commun, dont la fréquence de passage à proximité du site est faible, ne saurait permettre à elle seule de le regarder comme de nature à compromettre la réalisation de l'objectif de développement durable.

11. Contrairement à ce que soutient la société requérante, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet entraînerait un " grave conflit d'usage entre les véhicules de livraison et les véhicules légers " alors que le rapport d'instruction relève notamment que les flux de livraison liés au projet de supermarché seront les mêmes que ceux générés par l'équipement commercial existant, et que les boutiques ne généreront que peu de livraisons. De même, la société requérante n'établit pas que, compte tenu de sa localisation, le projet présenterait un risque pour la sécurité du consommateur au regard des caractéristiques géologiques des sols ou du prétendu caractère inondable de la zone.

12. La SARL Chrisdan soutient aussi que le projet entraînerait un gaspillage des équipements commerciaux en se référant à la densité commerciale dans la zone de chalandise. Toutefois, ce critère n'est plus, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 4 août 2008, au nombre de ceux que la commission nationale est susceptible de prendre en compte pour se prononcer sur la demande d'autorisation dont elle est saisie.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme :

13. Il ressort des pièces du dossier que la communauté de communes de Tarn-Agout, chargée de l'élaboration du schéma de cohérence territoriale du Vaurais et dont la commune de Buzet-sur-Tarn fait partie, a délivré le 3 mars 2014 la dérogation prévue à l'article L. 122-2-1 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée. Par suite, le moyen tiré de ce que le projet serait situé dans une zone rendue constructible après l'entrée en vigueur de la loi n° 2003-590 du 2 juillet 2003 ne peut qu'être écarté.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la SARL Chrisdan le versement d'une somme globale de 2 000 euros au titre des frais exposés par les sociétés Foncière Chabrières et Seynet et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Chrisdan est rejetée.

Article 2 : La SARL Chrisdan versera aux sociétés Foncière Chabrières et Seynet une somme globale de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Chrisdan, à la société civile Foncière Chabrières, à la société par actions simplifiée Seynet et au ministre de l'économie et des finances - Commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience du 16 mars 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

M. Paul-André Braud, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 avril 2017.

Le rapporteur,

Jean-Claude PAUZIÈSLe président,

Catherine GIRAULTLe greffier,

Delphine CÉRON

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

No 15BX01010


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX01010
Date de la décision : 13/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

14-02-01-05-02-02 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. Réglementation des activités économiques. Activités soumises à réglementation. Aménagement commercial. Procédure. Commission nationale d`aménagement commercial.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PAUZIÈS
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SCP CGCB et ASSOCIES MONTPELLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 25/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-04-13;15bx01010 ?
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