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13/04/2017 | FRANCE | N°15BX01271

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 13 avril 2017, 15BX01271


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCCV Edmondo a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision en date du 27 septembre 2012 par laquelle le conseil municipal de Saint-Paul a approuvé son plan local d'urbanisme en tant que celui-ci prévoit un emplacement réservé n° 21 en vue de créer une aire de stationnement de 4 710 m² sur une parcelle dont elle est propriétaire, cadastrée section CY n° 830, 915, 916, 917, 918, 919 et 920 d'une surface de 14 602 m² route de Saint-Gilles.

Par un jugement n° 1201092

du 27 novembre 2014, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCCV Edmondo a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision en date du 27 septembre 2012 par laquelle le conseil municipal de Saint-Paul a approuvé son plan local d'urbanisme en tant que celui-ci prévoit un emplacement réservé n° 21 en vue de créer une aire de stationnement de 4 710 m² sur une parcelle dont elle est propriétaire, cadastrée section CY n° 830, 915, 916, 917, 918, 919 et 920 d'une surface de 14 602 m² route de Saint-Gilles.

Par un jugement n° 1201092 du 27 novembre 2014, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 7 avril 2015, le 31 juillet 2015 et le 27 août 2015, la SCCV Edmondo, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 27 novembre 2014 ;

2°) d'annuler la délibération du conseil municipal de Saint-Paul du 27 septembre 2012 en tant que le plan local d'urbanisme classe en emplacement réservé n° 21 les parcelles lui appartenant;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Paul une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'emplacement réservé n° 21 est situé au milieu du parking d'une enseigne de restauration rapide en zone U2c et en bordure de la zone AU2c, à plus de dix kilomètres du centre ville de Saint-Paul et à plus de deux kilomètres du centre ville de Saint-Gilles-Les-Bains et de la plage de Roches Noires, dans une zone où il n'y a pas d'arrêt de bus ;

- la création de cet emplacement réservé a pour but de satisfaire des intérêts privés, il doit servir de parking d'appoint de l'ensemble immobilier à réaliser en zone AU2c dont il n'est séparé que par une voie de circulation, et de parking pour l'enseigne de restauration rapide ;

- la création de cet emplacement réservé est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et d'un détournement de pouvoir ;

- la nécessité d'un parking dans la zone U2c n'est pas justifiée, cette zone est correctement pourvue en places de parking et l'emplacement réservé n°21 est contraire à la vocation de cette zone en interdisant toute possibilité de construire dans une zone où le droit à construire est, compte tenu de la hauteur autorisée de 9 m et de l'absence de restrictions à la densité, important ;

- il n'existe aucun équipement à vocation touristique dans le secteur ;

- les terrains CY 829 et CY 830 sont bénéficiaires et débiteurs de servitude de passage perpétuelle de nature conventionnelle qui font obstacle à tout classement de ces terrains au titre d'un emplacement réservé ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 juillet 2015, la commune de Saint-Paul conclut au rejet de la requête et à ce que la cour mette à la charge de la SCCV Edmondo une somme de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il n'est pas justifié de la qualité pour agir au nom de la SCCV Edmondo ;

- la création de l'emplacement réservé correspond aux besoins de la commune en matière de places de stationnement et ne méconnaît pas le principe de gestion économe du sol prévu à l'article L. 110 du code de l'urbanisme ;

- un plan local d'urbanisme peut créer un emplacement réservé à la réalisation d'aires de stationnement ; les aires de stationnement n'ont pas nécessairement à être mises à la disposition d'un équipement public ; même lorsque les besoins croissants en places de stationnement sont engendrés par l'accès et la desserte de commerces de proximité, la création d'un emplacement réservé répond à un objectif d'intérêt général ;

- la commune est dans l'obligation d'indiquer précisément la destination future de l'emplacement - voies publiques, ouvrages publics, installations d'intérêt général ou espaces verts publics - elle n'est en revanche par tenue d'indiquer les motifs de la création de l'emplacement réservé ; la destination de l'emplacement réservé n° 21 est clairement identifiée (aire de stationnement) ainsi que son destinataire (la commune) et la superficie concernée (4 710 m²) ;

- le rapport de présentation prévoit qu'en conséquence de la vocation touristique de la zone U2c, il est nécessaire de faciliter l'accès à cette partie du territoire (cf. rapport de présentation, p. 84 et 181), et relève que, jusqu'à présent, les besoins de création de places nouvelles de stationnement n'ont pas tous été satisfaits (rapport de présentation, p. 90) ; ces éléments suffisent à établir l'intérêt public de la création de l'emplacement réservé ;

- cet emplacement réservé contribue à la mise en oeuvre des objectifs fixés dans le projet d'aménagement et de développement durable, dont notamment celui tiré de l'augmentation de l'offre de stationnement via la création de nouveaux espaces de stationnement dans des secteurs névralgiques tels que celui de Saint-Gilles-les-Bains (PADD, p. 25) ;

- il n'est pas établi que l'équipement prévu serait uniquement affecté à la clientèle de l'établissement de restauration rapide ou aux habitants d'un éventuel ensemble immobilier qui serait construit ; la construction d'un nouvel ensemble immobilier évoquée par la société requérante n'est établie par aucune des pièces du dossier, et pas davantage son affectation à des logements sociaux, moins dotés en stationnements selon les exigences légales ;

- l'appréciation selon laquelle les obligations de création de places de stationnement prévues dans le plan local d'urbanisme seraient insuffisantes et qu'ainsi, l'emplacement réservé aurait été institué pour compenser ladite insuffisance est erronée, le règlement de la zone AU2c renvoyant aux dispositions applicables à la zone U2c ;

- même si l'emplacement réservé compensait une insuffisance de stationnements, il n'en demeurerait pas moins d'intérêt public ;

Par ordonnance du 17 janvier 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 22 février 2017 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Claude Pauziès,

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

- et les observations de MeB..., représentant la commune de Saint-Paul ;

Considérant ce qui suit :

1. Par délibération du 27 septembre 2012, le conseil municipal de Saint-Paul a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune. La SCCV Edmondo, propriétaire des parcelles n° CY 830 et 915 à 920 situées en zone U2c du plan local d'urbanisme, relève appel du jugement du tribunal administratif de La Réunion du 27 novembre 2014 rejetant sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 27 septembre 2012 en tant que le plan local d'urbanisme classe en emplacement réservé n° 21 ses parcelles afin de créer une aire de stationnement.

Sur la légalité de la délibération du 27 septembre 2012 en tant qu'elle emporte création de l'emplacement réservé n° 21 :

2. Aux termes de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés à l'article L. 121-1, qui peuvent notamment comporter l'interdiction de construire, délimitent les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger et définissent, en fonction des circonstances locales, les règles concernant l'implantation des constructions./A ce titre, le règlement peut (...)/8° Fixer les emplacements réservés aux voies et ouvrages publics, aux installations d'intérêt général ainsi qu'aux espaces verts ; (...) " Il résulte de ces dispositions qu'une aire de stationnement est au nombre des ouvrages et installations qui peuvent faire l'objet d'un emplacement réservé. Par ailleurs, il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer, notamment, la liste des emplacements réservés pour la création ou l'aménagement des voies et ouvrages publics nécessaires. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

3. La SCCV Edmondo soutient en premier lieu que la création de cet emplacement réservé aurait pour objet de satisfaire des intérêts privés en facilitant à la fois le stationnement des clients d'un restaurant Quick situé à proximité et le stationnement des habitants d'un futur lotissement résidentiel. Toutefois, et d'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le restaurant Quick ne disposerait pas des capacités de stationnement suffisantes pour sa clientèle, d'autre part, l'insuffisance des capacités de stationnement du futur lotissement résidentiel à caractère social alléguée par la requérante présente un caractère purement éventuel et ne suffit donc pas à établir que la création de l'emplacement réservé répondrait aux seuls besoins en stationnement des habitants de cette résidence. Pour les mêmes motifs, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

4. En deuxième lieu, et contrairement à ce que soutient la requérante, la circonstance qu'un emplacement réservé pour la réalisation d'une aire de stationnement est situé sur des parcelles classées en zone U2c du règlement du plan du plan local d'urbanisme, définie comme " une zone résidentielle mixte dont la vocation touristique doit être renforcée " ne révèle aucune contradiction dans les choix des auteurs du plan local d'urbanisme, alors même qu'il est situé à deux kilomètres de la plage.

5. En troisième lieu, ainsi que l'ont relevé à juste titre les premiers juges, la nécessité d'améliorer la capacité de stationnement figure expressément au nombre des objectifs fixés par le projet d'aménagement et de développement durables qui prévoit, page 25, que le développement de la capacité de stationnement est essentiel pour faire face à l'augmentation du trafic, organiser l'intermodalité et favoriser l'accès aux transports en commun. Le projet d'aménagement et de développement durable prévoit également d' " organiser des surfaces de stationnement dans les secteurs névralgiques comme par exemple Saint-Gilles les Bains (...) ". De même, ainsi qu'il a été dit au point précédent, la création de l'aire de stationnement envisagée n'est pas incompatible avec le renforcement de la vocation touristique de la zone U2c. Dans ces conditions, la création de l'emplacement n° 21 n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation.

6. La SCCV Edmondo fait valoir en quatrième lieu que la création de l'emplacement réservé porte atteinte à son droit de propriété en la privant des droits à construire qu'elle détient en application du règlement du plan local d'urbanisme. Toutefois, le classement des terrains appartenant à la SCCV Edmondo auquel a procédé le plan local d'urbanisme n'apparaît pas comme apportant à l'exercice du droit de propriété de l'intéressée des limites qui seraient disproportionnées au regard du but d'intérêt général poursuivi par la délibération approuvant le plan et découlant du parti d'urbanisme retenu. Notamment, les contraintes liées à l'existence d'un emplacement réservé sont prévues par la loi et répondent à un but d'intérêt général et le propriétaire concerné a toujours la possibilité d'exercer le droit de délaissement prévu par les dispositions de l'article L. 123-17 du code de l'urbanisme, en exigeant de la collectivité publique au bénéfice de laquelle le terrain a été réservé qu'elle procède à l'acquisition de ce bien.

7. En cinquième et dernier lieu, la circonstance que la parcelle CY 830 serait grevée d'une servitude de passage au profit de la parcelle CY 829, n'empêchait pas la création de l'emplacement réservé litigieux, dont il n'est pas établi au demeurant que la destination ne serait pas compatible avec le maintien de cette servitude.

8. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par la commune, que la SCCV Edmondo n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. En vertu de ces dispositions, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par la SCCV Edmondo doivent dès lors être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées sur ce même fondement par la commune de Saint-Paul.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SCCV Edmondo est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Paul tendant à la condamnation de la SCCV Edmondo au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCCV Edmondo et à la commune de Saint-Paul.

Délibéré après l'audience du 16 mars 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, président,

M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,

M. Paul-André Braud, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 avril 2017.

Le rapporteur,

Jean-Claude PAUZIÈSLe président,

Catherine GIRAULT

Le greffier,

Delphine CÉRON

La République mande et ordonne au ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

6

No 15BX01271


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15BX01271
Date de la décision : 13/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-02-02-16-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU). Application des règles fixées par les POS ou les PLU. Règles de fond. Règles applicables aux secteurs spéciaux. Emplacements réservés.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Jean-Claude PAUZIÈS
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SCP BELOT CREGUT HAMEROUX

Origine de la décision
Date de l'import : 25/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-04-13;15bx01271 ?
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