La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/07/2017 | FRANCE | N°17BX00811

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 11 juillet 2017, 17BX00811


Vu la procédure suivante :

I. Par une requête enregistrée le 17 mars 2017 sous le n° 17BX00811 et un mémoire ampliatif enregistré le 1er mai 2017, M. D...A...demande à la cour :

1°) de renvoyer au tribunal administratif de Bordeaux ou à tout autre tribunal administratif les affaires n° 1500900-4, 1600245-4 et 1501758-1 dont il a saisi le tribunal administratif de Pau ;

2°) de condamner l'Etat à la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles et aux entiers dépens de l'instance.

Il soutient que :

- il soupçonne l'ensemble des magist

rats du tribunal administratif de partialité, de racisme et de préjugés vis-à-vis de lui ains...

Vu la procédure suivante :

I. Par une requête enregistrée le 17 mars 2017 sous le n° 17BX00811 et un mémoire ampliatif enregistré le 1er mai 2017, M. D...A...demande à la cour :

1°) de renvoyer au tribunal administratif de Bordeaux ou à tout autre tribunal administratif les affaires n° 1500900-4, 1600245-4 et 1501758-1 dont il a saisi le tribunal administratif de Pau ;

2°) de condamner l'Etat à la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles et aux entiers dépens de l'instance.

Il soutient que :

- il soupçonne l'ensemble des magistrats du tribunal administratif de partialité, de racisme et de préjugés vis-à-vis de lui ainsi que de favoritisme envers ses adversaires et en particulier l'université de Pau dont ils sont quasiment tous employés ;

- cette inimitié date de 2013, époque à laquelle il avait signalé au président de la juridiction la désinvolture avec laquelle avait été rédigé un jugement le concernant dans une affaire de suspension de permis de conduire ; en représailles à ce signalement, les magistrats ont décidé de rejeter systématiquement toutes ses requêtes sans examen réel et sérieux allant jusqu'à suggérer des arguments en défense à ses adversaires comme dans une affaire de référé à l'occasion de laquelle il a sollicité la récusation d'un magistrat, récusation rejetée sous un prétexte fallacieux ;

- les magistrats profitent de son impécuniosité car ils savent qu'il n'a pas les moyens financiers de relever appel des jugements, ce qui conduit à des dénis de justice massifs ;

- dans l'affaire n° 1500900-4 qui l'oppose au centre communal d'action sociale (CCAS) de Tarbes, près de deux ans après la présentation de la requête, le tribunal laisse pourrir l'affaire alors qu'il a fourni tous les documents utiles, malgré sa situation de précarité ; les magistrats utilisent ce temps pour rechercher tous les moyens possibles de le débouter ; le délai est déraisonnable au regard de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il procède d'une intention de nuire ; dans cette affaire le tribunal a refusé d'enjoindre le CCAS de produire des documents ; il a dû se procurer ces éléments en saisissant la Commission d'accès aux documents administratifs ; le tribunal n'a imposé aucun délai à la partie adverse pour répondre et ne lui a adressé aucune injonction ;

- dans l'affaire n° 1600245-4 la partie adverse ne n'est vu imposer aucun délai pour répondre ; aucune mise en état sérieuse n'est intervenue ; il y a eu refus manifeste d'audiencer et juger une affaire en état de l'être ; ses demandes de référés ont été systématiquement rejetées malgré des situations d'urgence caractérisées et des risques manifestes de péril ; dans le référé n° 1600244, le juge a même suggéré des arguments de défense à la partie adverse concernant l'absence d'intérêt à agir ;

- dans l'affaire n° 1501758 qui l'oppose à l'université, le tribunal laisse pourrir le dossier alors que la jurisprudence du tribunal administratif de Bordeaux et du Conseil d'Etat est en faveur de la position qu'il défend ; sa demande de référé a même sciemment été rejetée ; il s'agit d'une faute de discernement ou, au pire, d'une intention de nuire ; le refus du tribunal de juger de façon impartiale tient certainement à l'énorme conflit d'intérêts concernant plusieurs magistrats du tribunal qui enseignent auprès de cette université ; d'ailleurs, lors d'un cours donné par l'un de ces magistrats et auquel il assistait, il a entendu l'intervenant exposer que le tribunal avait l'habitude de discriminer les " serial requérants " ; il a d'ailleurs déposé une plainte pour prise illégale d'intérêts ; en effet, une telle situation crée nécessairement une suspicion légitime quant à l'impartialité objective et subjective de ces magistrats au sens de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il prétend au respect des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire enregistré le 10 avril 2017, M.A..., représenté par MeC..., conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens.

Par un mémoire enregistré le 21 juin 2017, Pôle emploi Occitanie, représenté par Me de la Marque, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. A...à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le requérant ne justifie pas avoir déposé la plainte dont il fait état ni, en tout état de cause des suites données à cette plainte ; la plainte dont il se prévaut ne vise que les magistrats qui auraient des intérêts avec l'université mais ne vise pas une partialité en rapport avec Pôle emploi ;

- les délais de traitement de l'affaire opposant M. A...à Pôle emploi ne sont pas excessifs ;

- la requête de M.A..., qui ne produit aucun justificatif corroborant ses allégations, traduit un abus de droit d'agir ; le requérant multiplie les procédures en vue d'obtenir des indemnisations pour ensuite reprocher aux juridictions la lenteur des procédures ; cette attitude justifie le versement d'une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'université de Pau et des pays de l'Adour, représentée par MeB..., a présenté un mémoire enregistré le 25 juin 2017.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 juillet 2017.

II. Par une requête enregistrée le 1er mai 2017 sous le n° 17BX01371, M.A..., représenté par MeC..., conclut aux mêmes fins que la requête n° 17BX00811 analysée ci-dessus en ce qui concerne le renvoi de l'affaire n° 1500900-4 et demande la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles et à supporter les entiers dépens de l'instance, par les mêmes moyens.

III. Par une requête enregistrée le 1er mai 2017 sous le n° 17BX01372, M.A..., représenté par MeC..., conclut aux mêmes fins que la requête n° 17BX00811 analysée ci-dessus en ce qui concerne le renvoi de l'affaire n° 1500245-4 et demande la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles et à supporter les entiers dépens de l'instance, par les mêmes moyens.

Par un mémoire enregistré le 21 juin 2017, Pôle emploi Occitanie, représenté par Me de la Marque, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. A...à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le requérant ne justifie pas avoir déposé la plainte dont il fait état ni, en tout état de cause des suites données à cette plainte ; la plainte dont il se prévaut ne vise que les magistrats qui auraient des intérêts avec l'université mais ne vise pas une partialité en rapport avec Pôle emploi ;

- les délais de traitement de l'affaire opposant M. A...à Pôle emploi ne sont pas excessifs ;

- la requête de M.A..., qui ne produit aucun justificatif corroborant ses allégations, traduit un abus de droit d'agir ; le requérant multiplie les procédures en vue d'obtenir des indemnisations pour ensuite reprocher aux juridictions la lenteur des procédures ; cette attitude justifie le versement d'une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M.A..., représenté par MeC..., a présenté un mémoire enregistré le 24 juin 2017.

Le 22 juin 2017, le greffier en chef du tribunal administratif de Pau a présenté des observations dans les trois instances susvisées.

M.A..., représenté par MeC..., a présenté un mémoire enregistré le 26 juin 2017 dans chacune des trois instances susvisées, postérieurement à la clôture d'instruction.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la Constitution ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Elisabeth Jayat,

- et les conclusions de M. David Katz, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Tout justiciable est recevable à demander à la juridiction immédiatement supérieure qu'une affaire dont est saisie la juridiction compétente soit renvoyée devant une autre juridiction du même ordre si, pour des causes dont il appartient à l'intéressé de justifier, la juridiction compétente est suspecte de partialité.

2. M.A..., par trois requêtes enregistrées sous les n° 17BX00811, 17BX01371 et 17BX01372, demande à la cour de renvoyer pour cause de suspicion légitime au tribunal administratif de Bordeaux ou à tout autre tribunal administratif les affaires n° 1500900-4, 1600245-4 et 1501758-1 dont il a saisi le tribunal administratif de Pau. Il y a lieu de joindre ces trois requêtes, qui concernent la suspicion d'un même requérant envers une même juridiction, pour statuer par un seul arrêt.

3. Pour justifier la suspicion dont il fait état à l'encontre du tribunal administratif de Pau, M. A...invoque la durée d'instruction des affaires dont il demande le renvoi et le fait que le tribunal n'aurait pas imposé de délai de réponse aux parties adverses. Toutefois, les éléments dont il fait état sur ces points ne révèlent aucune partialité à son encontre.

4. La circonstance que le tribunal administratif de Pau a, par plusieurs jugements, rejeté des demandes présentées par M. A...n'est pas, par elle-même, de nature à faire suspecter ce tribunal de partialité à l'égard de l'intéressé. Si M. A...soutient que, lors du jugement de certaines affaires le concernant, notamment en référé, le tribunal aurait fourni des arguments aux parties adverses, le seul exemple qu'il expose, tenant à une question de recevabilité, qui est d'ordre public et que le tribunal se doit de relever d'office, ne peut traduire une volonté de discrimination vis-à-vis de lui.

5. Si le président du tribunal administratif de Pau a rejeté une demande de récusation présentée par M. A...dans une affaire qui avait déjà donné lieu à une décision, ce rejet, fondé sur la seule application des dispositions de l'article R. 721-1 du code de justice administrative, ne saurait en aucun cas révéler un manque d'impartialité.

6. Le requérant fait état de ce que trois des magistrats du tribunal administratif de Pau, enseignants à l'université de Pau, ne peuvent siéger dans la formation de jugement appelée à connaître de l'affaire n° 1501758-1 qui l'oppose à cette université. Il expose également qu'un quatrième magistrat a été nommément mis en cause par lui dans un courrier qu'il aurait adressé au président de la juridiction en 2013 pour la " désinvolture " de la rédaction d'une décision rendue sur l'une de ses requêtes. Toutefois, il ne produit aucun élément permettant d'estimer que " quasiment tous " les magistrats sont enseignants auprès de l'université de Pau ni de soupçonner que les magistrats de la juridiction auraient décidé d'exercer des " représailles " en rejetant systématiquement ses demandes sans examen réel et sérieux et d'avantager ses adversaires, en particulier l'université de Pau. Si les intérêts de certains magistrats du tribunal doivent les conduire, en vertu notamment de l'article 32 de la charte de déontologie de la juridiction administrative, à ne pas siéger dans certaines des affaires concernant M.A..., il ne résulte pas des éléments de l'instruction que cette circonstance, eu égard au nombre des magistrats en fonction dans la juridiction, mettrait cette juridiction dans l'impossibilité de juger les requêtes présentées par M.A.... Les éléments dont ce dernier fait état devant la cour ne justifient donc pas le renvoi de ces affaires devant un autre tribunal, sans préjudice de l'application, le cas échéant, de l'article R. 312-5 du code de justice administrative par le président de la juridiction.

7. Enfin, M. A...n'apporte aucun élément à l'appui des accusations de racisme qu'il porte à l'encontre des magistrats du tribunal administratif de Pau.

8. Ainsi, M. A...n'établit pas que le tribunal administratif compétent puisse être légitimement suspecté de partialité à son encontre. Dès lors, ses requêtes à fin de renvoi pour cause de suspicion légitime doivent être rejetées, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. A...sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A..., au centre communal d'action sociale de Tarbes, à Pôle emploi Occitanie, à l'université de Pau, au président du tribunal administratif de Pau et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2017 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. Gil Cornevaux, président-assesseur,

M. Philippe Delvolvé, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 juillet 2017.

Le président assesseur,

Gil Cornevaux

Le président-rapporteur,

Elisabeth Jayat

Le greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX00811,17BX01371,17BX01372


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX00811
Date de la décision : 11/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-05-025 Procédure. Incidents. Renvoi pour cause de suspicion légitime.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Elisabeth JAYAT
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : PEYROUZET

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2017-07-11;17bx00811 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award