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25/04/2018 | FRANCE | N°16BX01230

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 25 avril 2018, 16BX01230


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. Magid D...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux, à titre principal, de condamner le centre hospitalier universitaire de Toulouse (CHU) à lui verser la somme globale de 19 406,67 euros à raison des préjudices qu'il a subis au décours de l'intervention chirurgicale du 28 mars 2008. La caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne (CPAM) a également demandé que le CHU soit condamné à lui verser la somme de 40 446,40 euros en remboursement de ses débours.

Par un jugement n° 13

04090 du 18 février 2016, le tribunal administratif de Toulouse a condamné le CH...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. Magid D...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux, à titre principal, de condamner le centre hospitalier universitaire de Toulouse (CHU) à lui verser la somme globale de 19 406,67 euros à raison des préjudices qu'il a subis au décours de l'intervention chirurgicale du 28 mars 2008. La caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne (CPAM) a également demandé que le CHU soit condamné à lui verser la somme de 40 446,40 euros en remboursement de ses débours.

Par un jugement n° 1304090 du 18 février 2016, le tribunal administratif de Toulouse a condamné le CHU à verser à M. D...une somme globale de 3 500 euros et à verser à la CPAM la somme demandée de 40 446,40 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 avril 2016, et un mémoire, enregistré le 6 novembre 2016, M.D..., représenté par la SCP Goguyer, Lalande-Degioanni, demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 18 février 2016 ;

2°) de condamner le CHU à lui verser la somme globale de 19 406,67 euros en réparation de ses préjudices ;

3°) de mettre à la charge du CHU la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés pour l'instance.

Il soutient que :

- il a été victime d'une infection nosocomiale ;

- il justifie de la réalité et du montant de ses préjudices.

Par un mémoire, enregistré le 29 juin 2016, la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne (CPAM), représentée par SELARL Thevenot Mays Bosson, demande à la cour de confirmer le jugement attaqué en tant qu'il la concerne et de mettre à la charge du CHU la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés pour l'instance.

Elle soutient que M. D...a été victime d'une infection nosocomiale et qu'elle justifie de ses débours.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 10 janvier et 27 novembre 2017, le CHU, représenté par MeA..., conclut à l'annulation du jugement attaqué et, subsidiairement, au rejet de la requête.

Il soutient que M. D...n'établit pas qu'il a subi une infection nosocomiale et qu'il n'établit pas davantage la réalité de ses pertes de gains professionnels et son besoin d'une aide à domicile.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique,

- le code de la sécurité sociale,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M.E...,

- les conclusions de M. Katz, rapporteur public ;

- et les observations de MeF..., représentant le CHU de Toulouse.

Considérant ce qui suit :

1. Le 28 mars 2008, M. D...a bénéficié d'une cure de hernie discale au sein du service de neurochirurgie du centre hospitalier universitaire de Toulouse (CHU). Il a été a nouveau hospitalisé au sein du même établissement du 18 au 22 juillet 2008, puis du 25 juillet au 22 août 2008 en raison de la persistance de douleurs lombaires. Une des biopsies réalisées dans ce cadre ayant révélé une infection dans la zone opératoire, M. D...a saisi la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux (CRCI) de Midi-Pyrénées. Il demande à la cour de réformer le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 18 février 2016 en tant qu'il a limité à 3 500 euros la somme que le CHU a été condamné à lui verser. Ce dernier a présenté des conclusions incidentes tendant à l'annulation de ce jugement.

Sur la responsabilité :

2. Aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique dans sa version alors en vigueur : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. / Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère. ".

3. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport établi le 5 janvier 2010 par l'expert nommé par la CRCI, que M. D...a souffert de douleurs lombaires basses à compter du mois de juin 2008, que ces douleurs se sont ensuite aggravées et que l'examen tomodensitométrique de contrôle effectué le 9 juillet 2008 ainsi que l'examen par imagerie par résonance magnétique réalisé le 24 juillet 2008 ont mis en évidence des phénomènes inflammatoires permettant de suspecter une infection. Plusieurs prises de sang ont, en outre, mis en évidence un dosage anormalement élevé de la protéine C réactive permettant de caractériser une inflammation. De plus, les deux prélèvements disco-vertébraux réalisés le 8 août 2008 par voie chirurgicale ont permis d'isoler la bactérie staphylococcus capitis. Le traitement antibiotique mis en place dès le lendemain a progressivement fait disparaître les douleurs dont souffrait l'intéressé et a permis de ramener le dosage de la protéine C réactive à des valeurs normales. Enfin, l'expert, pour retenir le caractère nosocomial de cette infection, a précisé qu'il s'agissait d'un germe peu virulent, " fréquemment à l'origine de tableau biologique faussement rassurant (VS et CRP normales), ce qui retarde le diagnostic qui est souvent fait par des examens tels les radiographies, IRM, et surtout grâce à des prélèvements réalisés dans des conditions chirurgicales ".

4. Dans ces conditions, la situation de M. D...remplissant de surcroît les critères prévus pour l'identification d'une spondylodiscite infectieuse (cas n°3 douleur du site atteint et radiographie montrant une image de lésion infectieuse), l'existence d'une infection du site opératoire doit, contrairement à ce que soutient le CHU en défense, être regardée comme établie. Cet établissement n'apportant par ailleurs pas la preuve, qui lui incombe, d'une cause étrangère à cette infection, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que M. D...avait été victime d'une infection nosocomiale de nature à engager sa responsabilité.

Sur les préjudices :

5. En premier lieu, si M. D...soutient que cette infection nosocomiale ne lui a pas permis de reprendre le travail, il résulte de l'instruction, en particulier de ses bulletins de salaire ainsi que de l'expertise susmentionnée, qu'il a été placé en arrêt maladie en mars 2008, a été reconnu travailleur handicapé pour un motif inconnu en juin 2008, et n'a jamais repris le travail avant son licenciement pour inaptitude, dont il a été informé par courrier du 31 juillet 2009, alors que l'infection en cause était guérie depuis le mois de novembre 2008 et qu'il ne souffrait plus d'aucun déficit fonctionnel temporaire depuis le 12 février 2009. Par suite, faute d'établir qu'il aurait pu reprendre le travail s'il n'avait pas été victime d'une infection nosocomiale, le requérant n'est pas fondé à se plaindre du rejet, par les premiers juges, de ce chef de préjudice.

6. En deuxième lieu si M. D...fait valoir que le traitement de l'infection dont s'agit l'a contraint à un repos strict et au port d'un corset pendant trois mois, il ne produit aucun élément permettant de considérer que ces contraintes ont rendu nécessaire l'assistance d'une tierce-personne à domicile alors qu'il ressort au contraire de ses propres écritures qu'il n'a bénéficié d'aucune aide extérieure pendant cette période.

7. En troisième lieu, il résulte de l'instruction, d'une part, que M. D...a subi un déficit fonctionnel total du 18 au 22 juillet 2008 et du 25 juillet au 22 août 2008 puis un déficit fonctionnel partiel à compter du 23 août 2008 jusqu'au 12 février 2009, date de la consolidation de son état de santé, d'autre part qu'il a enduré des souffrances évaluées à 3 sur 7. Dès lors, la fixation par les premiers juges des indemnités correspondantes aux sommes, respectivement, de 1 000 et 2 500 euros, résulte de justes appréciations qu'il y a lieu de confirmer.

8. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de M. D...tendant à la réformation du jugement attaqué doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CHU les sommes que demandent M. D...et la CPAM au titre des frais exposés pour l'instance et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions incidentes présentées par le centre hospitalier universitaire de Toulouse sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Majid D..., au centre hospitalier universitaire de Toulouse et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 20 mars 2018 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 avril 2018

Le rapporteur,

Manuel E...

Le président,

Éric Rey-BèthbéderLe greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°16BX01230


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX01230
Date de la décision : 25/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01-02 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation. Responsabilité pour faute médicale : actes médicaux.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : SCP GOGUYER-LALANDE DEGIOANNI

Origine de la décision
Date de l'import : 22/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-04-25;16bx01230 ?
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