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15/05/2018 | FRANCE | N°17BX03750

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre - formation à 3, 15 mai 2018, 17BX03750


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... G...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 1er août 2017 par laquelle le préfet de la Charente-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1702043 du 6 octobre 2017, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er décembre 20

17, MmeG..., représentée par MeH..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal adm...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... G...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 1er août 2017 par laquelle le préfet de la Charente-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1702043 du 6 octobre 2017, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er décembre 2017, MmeG..., représentée par MeH..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 6 octobre 2017 et l'arrêté préfectoral du 1er août 2017 ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Charente-Maritime de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté litigieux est insuffisamment motivé et a été signé en vertu d'une délégation de signature irrégulière ;

- cet arrêté porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français a méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de destination est contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à celles de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 janvier 2018, le préfet de la Charente-Maritime conclut au rejet de la requête et soutient que les moyens soulevés par Mme G... ne sont pas fondés.

Mme G...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 novembre 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. E...a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. MmeG..., de nationalité russe, est entrée irrégulièrement en France le 18 août 2015. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) par décision du 30 septembre 2016, confirmée le 20 juin 2017 par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Elle demande à la cour d'annuler le jugement du 1er décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Charente-Maritime du 1er août 2017 lui refusant le séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

2. En premier lieu, par arrêté n° 17-1419 du 19 juillet 2017, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Charente-Maritime, le préfet de ce département a donné délégation de signature à M. Michel Tournaire, secrétaire général de la préfecture, en ce qui concerne la mise en oeuvre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ce même arrêté a également organisé, en ses articles 2 et 3, la suppléance des fonctions du secrétaire général en confiant l'exercice de ses attributions et en donnant délégation de signature à M. A...C..., directeur de cabinet du préfet et, en cas d'empêchement et d'absence simultanée du secrétaire général et du directeur de cabinet, à M. F... D..., sous-préfet de Rochefort. Dans ces conditions, eu égard en particulier aux fonctions exercées par le signataire de l'arrêté litigieux et dès lors qu'il n'est pas établi que le secrétaire général de la préfecture et le directeur de cabinet du préfet n'aient pas été simultanément absents ou empêchés, le moyen tiré de ce que la délégation de signature susmentionnée présente un caractère trop général et que les conditions donnant délégation à M. F... D...n'étaient pas réunies, doit être écarté comme manquant en fait.

3. En deuxième lieu, l'arrêté litigieux comporte, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé d'en comprendre les motifs, les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement. Par suite il est suffisamment motivé au regard des dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

5. Mme G...soutient qu'elle réside chez sa fille et ses deux petits-enfants, âgés de 3 et 15 ans, dont elle s'occupe quotidiennement, qu'elle est atteinte de plusieurs affections graves et qu'elle n'a plus aucune attache en Russie, en Géorgie ou en Ukraine. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté litigieux, l'appelante ne séjournait en France que depuis deux ans, qu'elle est célibataire et sans enfant à charge et qu'elle n'établit pas être dépourvue d'attaches dans son pays d'origine, la Géorgie, où elle a vécu avec son époux, ou en Ukraine, où elle indique avoir résidé de 2008 à 2015 auprès de son beau-père, dont elle soutient, cependant sans l'établir, qu'il serait décédé. Enfin, Mme G...ne justifie pas de son intégration dans la société française et ne s'y prévaut d'autres liens que ceux qui l'unissent à sa fille et à ses petits-enfants avec lesquels elle déclare n'avoir repris contact que lors de son arrivée en France. Dans ces conditions, compte tenu en particulier de la durée et des conditions de son séjour en France, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté litigieux a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise au sens du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

6. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) ".

7. Mme G... soutient que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'un traitement approprié n'est pas disponible dans son pays d'origine. Toutefois, elle ne produit à l'appui de ces allégations que trois attestations médicales établies, pour les deux premières, par un médecin endocrinologue et, pour la dernière, par un praticien hospitalier dont il ne ressort ni qu'un défaut de prise en charge de son état de santé pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ni qu'un traitement approprié ne serait pas disponible dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

8. En cinquième lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 5 et 7 du présent arrêt que Mme G...n'est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

9. En sixième lieu et aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".

10. Mme G...n'établit pas qu'elle pourrait ne pas avoir conservé la nationalité russe en se bornant à faire valoir qu'elle a quitté la Russie depuis de nombreuses années et qu'elle s'est vu délivrer un titre de résidence permanent en Ukraine. Par suite, elle ne peut pas utilement se prévaloir des risques qu'elle encourrait en cas de retour en Ossétie du Sud (Géorgie) alors, au demeurant, qu'elle n'établit pas la réalité des persécutions dont elle aurait fait l'objet dans cette région et que sa demande d'asile a été rejetée par la Cour nationale du droit d'asile le 20 juin 2017. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que l'appelante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter les conclusions de la requête tendant à l'annulation de ce jugement et de l'arrêté préfectoral du 1er août 2017 ainsi que ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme G...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...G...et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée au préfet de la Charente-Maritime.

Délibéré après l'audience du 3 avril 2018 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

M. Didier Salvi, président-assesseur,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 mai 2018

Le rapporteur,

Manuel E...Le président,

Éric Rey-BèthbéderLe greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX03750


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX03750
Date de la décision : 15/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : MARQUES - MELCHY

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-05-15;17bx03750 ?
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