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26/10/2018 | FRANCE | N°18BX01845

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre bis - (formation à 3), 26 octobre 2018, 18BX01845


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...D...épouse E...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2017 par lequel le préfet de Tarn-et-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de renvoi.

Par un jugement n°1705534 du 5 avril 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 mai 2018 et le bo

rdereau de communication de pièces enregistré le 2 août 2018, Mme B...D...épouseE..., représentée...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...D...épouse E...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2017 par lequel le préfet de Tarn-et-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de renvoi.

Par un jugement n°1705534 du 5 avril 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 mai 2018 et le bordereau de communication de pièces enregistré le 2 août 2018, Mme B...D...épouseE..., représentée par MeF..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 5 avril 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2017 du préfet de Tarn-et-Garonne susmentionné ;

3°) d'enjoindre au préfet de Tarn-et-Garonne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'ensemble des décisions attaquées sont entachées d'un défaut de motivation en fait au regard des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, dès lors que l'arrêté contesté ne fait pas référence au fait que son fils a épousé une ressortissante française, que sa mère présente un état de santé très fragile nécessitant des soins réguliers, ni qu'elle a justifié des risques de persécutions qu'elle encoure en cas de retour en Géorgie ;

- l'arrêté contesté est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale et méconnaît les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale, en raison des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine, compte tenu des pressions et des actes d'intimidations qu'elle a subis de la part de son ancien employeur, et des activités frauduleuses de ce dernier ; elle a dû fuir son pays à la suite de l'agression physique dont son fils a été la victime ;

- sa situation justifie l'octroi d'un titre de séjour et l'arrêté contesté méconnaît l'article L. 313-11 7° et L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en dépit du rejet de sa demande d'asile ;

- l'obligation de quitter le territoire français contestée porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privé et familiale en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'expose, en cas de retour en Géorgie, à des traitements inhumains et dégradants prohibés par l'article 3 de la même convention.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 juillet 2018, le préfet de Tarn-et-Garonne conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens invoqués par Mme B...D...épouse E...ne sont pas fondés.

Par une ordonnance en date du 14 juin 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 13 août 2018 à 12 heures.

Par une décision du 13 juin 2018, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle présentée par Mme B...D...épouseG....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre l'administration et le public ;

- le code de justice administrative.

Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné M. Nicolas Normand pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Agnès Bourjol a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B...D...épouseE..., de nationalité géorgienne, née le 7 mai 1970 à Tbilissi (Géorgie), a déclaré être entrée en France le 29 juillet 2014 accompagnée de sa mère, Mme A...D...et de son fils, M. C...E.... Elle a sollicité le bénéfice de l'asile qui lui a été refusé le 23 décembre 2016 par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides et le 29 septembre 2017 par la Cour nationale du droit d'asile. Par un arrêté en date du 6 novembre 2017, le préfet de Tarn-et-Garonne a rejeté sa demande d'admission au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme B...D...épouse E...relève appel du jugement du 5 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 novembre 2017.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Mme B...D...reprend en appel le moyen déjà soulevé en première instance et tiré du caractère insuffisamment motivé de l'arrêté contesté au regard des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Elle ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par le premier juge.

3. Lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code. Il est toutefois loisible au préfet d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à un titre de séjour sur le fondement d'une autre disposition du code. Il lui est aussi possible, exerçant le pouvoir discrétionnaire qui lui appartient dès lors qu'aucune disposition expresse ne le lui interdit, de régulariser la situation d'un étranger en lui délivrant un titre de séjour, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle. Saisi d'une demande d'autorisation de séjour présentée uniquement au titre de l'asile ou de la protection subsidiaire, le préfet n'est pas tenu, ainsi qu'il a été dit au point 1, d'examiner d'office si le demandeur est susceptible de se voir délivrer une autorisation de séjour à un autre titre. Sont inopérants, devant le juge de l'excès de pouvoir, les moyens de légalité interne qui, sans rapport avec la teneur de la décision, ne contestent pas utilement la légalité des motifs et du dispositif qui sont ceux de la décision administrative attaquée.

4. Dans le cas où le préfet se borne à rejeter une demande d'autorisation de séjour présentée uniquement au titre de l'asile, sans examiner d'office d'autres motifs d'accorder un titre à l'intéressé, ce dernier ne peut utilement soulever, devant le juge de l'excès de pouvoir saisi de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus du préfet, des moyens de légalité interne sans rapport avec la teneur de la décision contestée. Ainsi, par exemple, un moyen tiré de la méconnaissance du droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'appui du recours formé contre une décision de refus motivée uniquement par le rejet de la demande d'asile ou de la protection subsidiaire, l'invocation des stipulations de l'article 8 étant sans incidence sur l'appréciation que doit porter l'autorité administrative sur les conditions posées aux 1° et 8° des articles L. 313-13 et L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour la délivrance des autorisations de séjour demandées au titre de l'asile ou de la protection subsidiaire.

5. Il ressort des pièces du dossier que Mme B...D...épouse E...a saisi le préfet de Tarn-et-Garonne d'une demande d'autorisation de séjour présentée uniquement au titre de l'asile ou de la protection subsidiaire. Il ressort également de la rédaction de l'arrêté attaqué que ladite autorité s'est bornée à rejeter cette demande en tirant les conséquences du rejet de la demande d'asile formulée par l'intéressée, sans examiner d'office si elle était susceptible de se voir délivrer un titre de séjour sur un autre fondement. Dès lors, les moyens invoqués à l'appui de la contestation du refus de séjour litigieux, tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, sont inopérants.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. /2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l' exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

7. Mme B...D...épouseE..., entrée irrégulièrement en France le 29 juillet 2014, soutient qu'en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale dès lors que sa mère et son fils résident en France et qu'elle justifie craindre pour sa vie en cas de retour dans son pays d'origine. Toutefois, l'intéressée n'a été admise à séjourner en France qu'à titre temporaire dans l'attente de l'examen de sa demande d'asile et elle ne n'établit ni même n'allègue être dépourvue d'attaches personnelles et familiales en Géorgie où elle a vécu jusqu'à l'âge de 44 ans. Sa mère, Mme A...D...et son fils, M. C...E..., font également l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. Il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B...D...épouse E...serait dans l'impossibilité de poursuivre sa vie familiale avec sa mère et son fils hors de France. Par ailleurs, ni le certificat médical produit en appel par la requérante, ni ceux produits en première instance, qui se bornent à indiquer que l'état de santé de l'intéressée nécessite un suivi régulier et la mise en place d'un traitement psychotrope, ne permettent d'établir la gravité de l'état de santé de la requérante. Dans ces conditions, ainsi qu'en ont jugé à bon droit les premiers juges, le préfet de Tarn-et-Garonne n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de la requérante une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, l'arrêté contesté n'est pas davantage entaché d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante.

8. Le tribunal administratif de Toulouse a considéré que : " si l'intéressée, dont la demande d'asile a été rejetée, fait état de ses craintes de persécutions en cas de retour dans son pays d'origine, elle n'apporte aucun élément probant de nature à corroborer ses allégations et n'établit ni qu'elle serait directement et personnellement exposée à des risques de traitements inhumains et dégradants soit du fait des autorités géorgiennes, soit du fait de personnes ou de groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. ". Mme B...D...épouseE..., qui se borne en appel à reprendre dans les mêmes termes son argumentation développée en première instance ne se prévaut d'aucun élément de fait ou de droit nouveau utile de nature à remettre en cause l'appréciation des premiers juges. Par suite, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par adoption des motifs pertinemment retenus par le tribunal administratif de Toulouse tels qu'ils viennent d'être rappelés.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...D...épouse E...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...épouse E...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...D...épouse E...et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée au préfet de Tarn-et-Garonne.

Délibéré après l'audience du 4 octobre 2018, à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Pouget, président,

M. Paul-André Braud, premier conseiller,

Mme Agnès Bourjol, conseiller.

Lu en audience publique, le 26 octobre 2018.

Le rapporteur,

Agnès Bourjol

Le président,

Marianne PougetLa greffière,

Florence Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

6

N° 18BX01845


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre bis - (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX01845
Date de la décision : 26/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme POUGET M.
Rapporteur ?: Mme Agnès BOURJOL
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SCP LARROQUE - REY - ROSSI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-10-26;18bx01845 ?
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