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05/11/2018 | FRANCE | N°16BX03459,16BX03483

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre - formation à 3, 05 novembre 2018, 16BX03459,16BX03483


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G...a demandé au tribunal administratif de La Réunion la condamnation de la Poste à lui verser au titre de la reconstitution de carrière, la somme de 161 152 euros représentative des majorations de traitement et de l'indexation afférentes aux rémunérations dues aux fonctionnaires affectés à La Réunion.

Par un jugement n° 1300821 du 24 août 2016, le tribunal administratif de La Réunion a condamné la Poste à verser à Mme G...un rappel de majorations de traitements et rémunérations au tit

re de la période du 1er janvier 1985 au 1er mars 2011, a renvoyé l'intéressée devant La...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G...a demandé au tribunal administratif de La Réunion la condamnation de la Poste à lui verser au titre de la reconstitution de carrière, la somme de 161 152 euros représentative des majorations de traitement et de l'indexation afférentes aux rémunérations dues aux fonctionnaires affectés à La Réunion.

Par un jugement n° 1300821 du 24 août 2016, le tribunal administratif de La Réunion a condamné la Poste à verser à Mme G...un rappel de majorations de traitements et rémunérations au titre de la période du 1er janvier 1985 au 1er mars 2011, a renvoyé l'intéressée devant La Poste pour qu'il soit procédé à la liquidation des sommes dues et a rejeté le surplus de ses conclusions afférentes à l'indexation des rémunérations dues au titre de la reconstitution de carrière.

Procédures devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 26 octobre 2016, sous le n°16BX03459, La Poste, représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 24 août 2016 du tribunal administratif de La Réunion ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme G...devant le tribunal administratif de La Réunion ;

3°) de mettre à la charge de Mme G...la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que:

- le jugement est insuffisamment motivé au regard de l'article L. 9 du code de justice administrative dès lors que pour estimer que Mme G...était en droit de prétendre à la majoration de traitement instituée par la loi du 3 avril 1950, les premiers juges ont estimé que Mme G...avait toujours exercé ses fonctions de postière à La Réunion entre le 1er janvier 1985 et le 1er mars 2011 en qualité de fonctionnaire, sans répondre à l'argumentation de la Poste dans ses mémoires et dans sa note en délibéré, selon laquelle faute d'avoir été affectée sur un poste situé en Ile de France, l'intéressée ne pouvait bénéficier du dispositif de l'article 73 de la loi du 11 janvier 1984, et ne pouvait être titularisée qu'au 1er mars 2011 et que Mme G... ayant accepté d'être titularisée dans ces conditions, elle ne pouvait réclamer à la Poste, l'indemnisation découlant de cette situation ; la Poste faisait également valoir que la titularisation ne constituant pas un droit mais une mesure gracieuse, la responsabilité de la Poste ne pouvait être engagée ; faute d'avoir répondu à cette argumentation circonstanciée, le jugement du tribunal administratif est insuffisamment motivé ;

- en ce qui concerne le bien-fondé du jugement, le tribunal a commis une erreur de droit en estimant que le délai de prescription des sommes réclamées par Mme G...courait à compter de la notification de la décision de titularisation du 16 février 2013 et qu'il n'était donc pas expiré à la date du 8 avril 2013 de présentation de sa demande indemnitaire ; en premier lieu, l'analogie qui a été établie par le tribunal administratif entre les règles de prescription de l'article 2224 du code civil et celles posées par la loi du 31 décembre 1968 ne repose sur aucun fondement dès lors que les deux textes sont rédigés différemment et que de surcroit la loi du 31 décembre 1968 n'est pas applicable à la Poste ; en ce qui concerne le raisonnement du tribunal administratif, selon lequel la titularisation de Mme G...aurait du intervenir antérieurement au 16 février 2011, il est inexact, dès lors que la titularisation était subordonnée à l'acceptation d'une affectation en Ile de France, ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat, par un arrêt du 7 août 2007, la Poste contre MmeF..., n° 290394 ; si un accord local a permis, à titre dérogatoire et limité, une titularisation à La Réunion des agents n'ayant pas accepté en 1997 la prise d'un poste en Ile de France, cet accord n'a nullement octroyé à ces agents, un droit acquis à titularisation ; le tribunal administratif ne pouvait donc considérer que le point de départ de la prescription de l'article 2224 du code civil, était sa titularisation du 16 février 2011 ; Mme G... recrutée le 11 février 1982 était en mesure de présenter sa demande de titularisation dès l'année 1985 et elle a été informée des modalités de titularisation dès la diffusion de la note de service interne du 25 juillet 1997 ; elle a par ailleurs été informée du refus de titularisation, et ne pouvait donc, bien avant la présentation le 8 avril 2013, de sa demande indemnitaire, ignorer l'existence de sa créance envers la Poste ; en tout état de cause, sa créance était prescrite au bout de vingt ans, en application de l'article 2232 du code civil ; cette prescription a été méconnue dès lors que le jugement condamne la Poste au titre d'une période s'étendant sur plus de vingt-six ans ; le tribunal administratif a donc commis une erreur de droit en écartant l'exception de prescription opposée en défense par la Poste et en fixant le fait générateur de la créance de Mme G...au 16 février 2011 ; le tribunal administratif a commis une autre erreur de droit et d'appréciation, en considérant que Mme G...était en droit de bénéficier de la majoration de traitement instituée par l'article 3 de la loi du 3 avril 1950 dès lors qu'elle devait être regardée comme ayant assuré son service en qualité de fonctionnaire à La Réunion, du 1er janvier 1985 au 1er mars 2011 ; en effet, si Mme G... a bien été titularisée de manière rétroactive dans un grade correspondant par équivalence à son contrat de travail, son affectation à La Réunion en qualité de fonctionnaire, ne pouvait présenter un caractère rétroactif, dès lors que sa titularisation était subordonnée à la prise d'un poste en Ile de France ; à cet effet, la Poste a procédé le 1er mars 2011 à la nomination de Mme G...au grade d'ASADG au sein de la DPOM de Gentilly en Ile de France, puis conformément au point 4.4.1.a) de la note de service du 25 juillet 1997 a procédé à la reconstitution de sa carrière sur le plan administratif et pécuniaire ; Mme G...a été mutée de façon effective au sein de l'établissement de Saint-Denis Moufia à La Réunion à compter du 2 mars 2011 ; la reconstitution de la carrière de Mme G...a été entreprise par la Poste en tenant compte des sommes qu'elle aurait du percevoir entre janvier 1985 et mars 2011 en qualité de fonctionnaire relevant de la DPOM en Ile de France ; la Poste du fait de cette titularisation et à raison de cette affectation, a donc versé à Mme G...la somme de 69 001,91 euros à titre de rappel de rémunération ; la Poste ne pouvait toutefois verser à l'intéressée des indemnités liées à son service outre-mer, entre le 1er janvier 1985 et le 1er mars 2011, dès lors que son affectation en qualité de fonctionnaire à La Réunion, n'a été effective qu'au 2 mars 2011 et que cette affectation ne pouvait présenter un caractère rétroactif ; Mme G...ayant signé le 31 janvier 2011, l'accusé de réception du document d'acceptation de sa titularisation, ayant accepté sa titularisation, elle ne justifie d'aucun intérêt pour agir à l'encontre des mesures les mettant en oeuvre, dès lors qu'une personne n'a pas intérêt pour agir à l'encontre d'une mesure qu'elle a elle-même sollicitée, quels que soient les motifs pour lesquels elle a obtenu satisfaction ; en l'absence d'acceptation d'un poste vacant en Ile-de-France, Mme G...n'avait plus droit à titularisation ; dans ces conditions, la titularisation dont l'intéressée a bénéficié ne peut s'analyser que comme une mesure gracieuse, en l'absence de toute contrainte juridique imposant à la Poste de l'adopter et cette mesure est insusceptible d'engager la responsabilité de la Poste ; le tribunal administratif a commis une erreur de droit quant à la charge de la preuve en matière indemnitaire, dès lors qu'il appartenait à Mme G...de justifier de son préjudice ; la cour devra donc annuler le jugement et rejeter les conclusions indemnitaires de l'intéressée.

Par un mémoire en défense du 25 janvier 2017, Mme E...G...représentée par Me B..., conclut :

1°) au rejet de la requête de la Poste ;

2°) par la voie de l'appel incident, à la réformation du jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de la Poste à lui payer la somme de 161 152 euros, portant sur l'indexation applicable aux fonctionnaires affectés à La Réunion, du fait de sa titularisation en qualité de fonctionnaire, avec effet au 1er janvier 1985 ;

3°) à la condamnation de la Poste à lui payer la somme de 161 152 euros, portant sur l'indexation applicable aux fonctionnaires affectés à La Réunion, du fait de sa titularisation en qualité de fonctionnaire, avec effet au 1er janvier 1985 ;

4°) à la condamnation de la Poste à lui payer au titre de la reconstitution de sa carrière à compter du 1er janvier 1985, la somme correspondant à ses congés bonifiés ainsi que les primes outre-mer et les avantages fiscaux DOM ;

5°) à ce soit mise à la charge de la Poste la somme de 5 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

- en ce qui concerne la question de la prescription, depuis le changement de son statut juridique le 1er janvier 1991 par la loi du 2 juillet 1990, la Poste est devenue une personne morale de droit public dotée d'une comptabilité de droit commun, et la prescription quadriennale de la loi du 31 décembre 1968 ne lui est pas applicable ; la poste relève de la prescription quinquennale prévue par l'article 2277 du code civil à laquelle renvoie l'article L 143-14 -désormais L 3245-1 - du code du travail ; la jurisprudence du Conseil d'Etat considère que lorsqu'il est demandé l'indemnisation du préjudice résultant de l'illégalité d'une décision administrative, la créance correspondant à la réparation de ce préjudice se rattache non à l'exercice au cours duquel la décision a été prise, mais à celui au cours duquel elle a été régulièrement notifiée, le délai de prescription quadriennale ne courant qu'à compter de l'exercice au cours duquel la notification a été effectuée ;

- en l'espèce, elle a été titularisée le 1er mars 2011 et par notification du 4 juin 2012, la Poste a confirmé sa titularisation au grade d'Aburg au 1er janvier 1985, classifié ATG 1 au 1er juillet 1993 ; la Poste en considérant que le délai de prescription devait commencer à courir à compter de 1985, date de sa titularisation, ou à la date de la diffusion de la note de service du 25 juillet 1997, méconnait la jurisprudence du Conseil d'Etat ; la cour devra donc confirmer le jugement en ce qu'il a jugé que le délai de prescription avait débuté à la date de la notification de la titularisation, soit le 16 février 2011 ; en tout état de cause, le cours de la prescription quadriennale doit être regardé comme ayant été interrompu par la présentation, le 7 juin 2010, d'une demande en annulation de la décision de refus de titularisation, titularisation dont finalement la Poste a admis le bien-fondé ; si la Poste fait valoir qu'elle n'a pas droit aux rémunérations correspondant à sa titularisation avec effet rétroactif, dès lors que le versement de ces traitements était subordonné à l'acceptation par les agents non-titulaires concernés d'un poste vacant situé en Ile-de-France, c'est en réalité la Poste de La Réunion qui a assoupli les règles du dispositif de titularisation et a conclu un accord syndical permettant aux agents d'être titularisés à La Réunion, sans nécessité d'être muté en Ile-de-France ; en ce qui la concerne, un courrier du 19 janvier 2011 que lui a adressé M.A..., directeur des ressources humaines, lui indique qu'elle sera mutée le 2 février 2011, sur l'entité de Saint-Denis Moufia à la Réunion ; c'est donc la poste qui a oeuvré elle-même pour qu'elle ne soit pas nommée en Ile-de-France mais à La Réunion ; la Poste qui ne l'a pas nommée en Ile-de France ne saurait invoquer sa propre turpitude pour ne pas la rémunérer ; le Conseil d'Etat, dans l'arrêt Giffard du 26 janvier 2007, a considéré que l'administration ne pouvait faire grief à un agent de ne pas avoir accompli des missions qui lui étaient impossibles à exercer ; au titre de l'appel incident, en ce qui concerne le montant de sa créance, en vertu de la décision du 29 décembre 1993 du Conseil d'Etat et selon le tableau récapitulatif des droits à reconstitution pécuniaire, tenant compte de sa titularisation avec effet rétroactif, le montant des traitements qui étaient dus à Mme G...s'établit à la somme de 541 307,77 euros ; de cette somme, il doit être déduit la somme de 311 153, 31 euros perçue en qualité d'agent contractuel, ainsi que l'acompte de 69 001,81 euros, qui lui a été réglé le 30 mai 2012 ; par suite, le solde de rappel de traitement lui restant dû s'établit à la somme de 161 152,55 euros ; cette somme n'a pas de caractère indemnitaire, mais correspond à un service fait ; le tribunal administratif s'il a reconnu un droit à un rappel de traitements, lui a refusé à tort une indexation de sa rémunération ; à cet égard, les premiers juges se sont contredits dans leur jugement, dès lors que ce jugement, dans ses points 5 à 7 lui reconnait un droit à majoration de traitement mais lui refuse au point 8 du même jugement, un droit à indexation au motif d'une absence de droit à majoration de traitement ; en ce qui concerne les textes applicables et la jurisprudence qui a été rendue sur la base de ces textes, en vertu du décret du 15 mars 1957 portant majoration du revenu alloué aux fonctionnaires de l'Etat dans le département, la majoration de traitement s'établit à 1,35 et après application d'un index de correction complémentaire, à 1,53 ; ces dispositions ont fait l'objet d'une application par le Conseil d'Etat, par un arrêt du 4 décembre 2009, France Telecom contre Kress, n° 324128 ; la Poste, comme l'indique le courrier du 30 août 2010, a accepté de lui accorder la majoration et l'indexation de ses salaires avec application d'un coefficient multiplicateur de 1,53 ; c'est donc la somme de 161 152,55 euros qui lui est due et à cette somme doit s'ajouter la somme due au titre des congés bonifiés auxquels ni sa famille ni elle n'ont eu droit, ainsi que le montant des primes outre-mer et avantages fiscaux DOM.

Par un courrier du 21 septembre 2018, la cour a informé les parties, sur le fondement de l'article R 611-7 du code de justice administrative, de ce qu'elle était susceptible de fonder la solution du litige sur le moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité d'une part pour être des conclusions nouvelles en appel, des conclusions de Mme G...tendant à condamner la Poste à lui verser au titre de la reconstitution de sa carrière, la somme correspondant à ses congés bonifiés ainsi que les primes outre-mer et les avantages fiscaux DOM et d'autre part, pour être des conclusions présentées au titre d'un appel incident, relatives à un préjudice distinct de celui invoqué par la Poste dans son appel principal, des conclusions présentées par Mme G... tendant à la condamnation de la Poste à lui payer la somme de 161 152 euros, portant sur l'indexation des traitements relative aux fonctionnaires affectés à La Réunion.

Un mémoire a été produit pour la Poste le 25 septembre 2018, mais n'a pas été communiqué.

Mme G...a présenté ses observations sur le moyen d'ordre public le 1er octobre 2018.

II. Par une requête enregistrée le 27 octobre 2016, sous le n° 16BX03483, la Poste, représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) de surseoir à l'exécution du jugement du 24 août 2016 du tribunal administratif de La Réunion ;

2°) de mettre à la charge de Mme G...la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le sursis à exécution du jugement est présenté à la fois sur le fondement de l'article R. 811-16 du code de justice administrative et sur celui de l'article R. 811-17, ainsi que le permet la jurisprudence du Conseil d'Etat ;

- en ce qui concerne l'article R. 811-16, les conditions posées par cet article sont réunies, dès lors que le risque pour la Poste, en cas d'annulation du jugement de condamnation, de perte définitive des sommes qu'elle a été condamnée à verser Mme G...et qui s'élèvent à 105 000 euros, est important compte tenu de ce qu'il n'est pas justifié que Mme G... aurait la capacité de rembourser cette somme ; en ce qui concerne l'application de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, les conditions en sont également réunies, dès lors que la Poste justifie de conséquences difficilement réparables en cas de mise à exécution du jugement, dès lors que MmeG..., en cas d'annulation du jugement de condamnation, ne justifierait pas de garanties suffisante de représentation des fonds dont elle a bénéficiés ; par ailleurs, la Poste justifie de moyens sérieux d'annulation ; en effet, comme il est indiqué dans la requête au fond, le jugement est insuffisamment motivé au regard de l'article L. 9 du code de justice administrative dès lors que pour estimer que Mme G... était en droit de prétendre à la majoration de traitement instituée par la loi du 3 avril 1950, les premiers juges ont estimé que Mme G...avait toujours exercé ses fonctions de postière à La Réunion entre le 1er janvier 1985 et le 1er mars 2011 en qualité de fonctionnaire, sans répondre à l'argumentation de la Poste dans ses mémoires et dans sa note en délibéré, selon laquelle faute d'avoir été affectée sur un poste situé en Ile de France, l'intéressée ne pouvait bénéficier du dispositif de l'article 73 de la loi du 11 janvier 1984, et ne pouvait être titularisée qu'au 1er mars 2011 et que Mme G...ayant accepté d'être titularisée dans ces conditions, elle ne pouvait réclamer à la Poste, l'indemnisation découlant de cette situation ; la Poste faisait également valoir que la titularisation ne constituant pas un droit mais une mesure gracieuse, la responsabilité de la Poste ne pouvait être engagée ; faute d'avoir répondu à cette argumentation circonstanciée, le jugement du tribunal administratif est insuffisamment motivé ; en ce qui concerne le bien-fondé du jugement, le tribunal a commis une erreur de droit en estimant que le délai de prescription des sommes réclamées par Mme G...courait à compter de la notification de la décision de titularisation du 16 février 2013 et qu'il n'était donc pas expiré à la date du 8 avril 2013 de présentation de sa demande indemnitaire ; en premier lieu, l'analogie qui a été établie par le tribunal administratif entre les règles de prescription de l'article 2224 du code civil et celles posées par la loi du 31 décembre 1968 ne repose sur aucun fondement dès lors que les deux textes sont rédigés différemment et que de surcroit la loi du 31 décembre 1968 n'est pas applicable à la Poste ; en ce qui concerne le raisonnement du tribunal administratif, selon lequel la titularisation de Mme G...aurait du intervenir antérieurement au 16 février 2011, il est inexact, dès lors que la titularisation était subordonnée à l'acceptation d'une affectation en Ile de France, ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat, par un arrêt du 7 août 2007, la Poste contre Mme F..., n° 290394 ; si un accord local a permis, à titre dérogatoire et limité, une titularisation à La Réunion des agents n'ayant pas accepté en 1997 la prise d'un poste en Ile de France, cet accord n'a nullement octroyé à ces agents, un droit acquis à titularisation ; le tribunal administratif ne pouvait donc considérer que le point de départ de la prescription de l'article 2224 du code civil, était sa titularisation du 16 février 2011 ; Mme G... recrutée le 11 février 1982 était en mesure de présenter sa demande de titularisation dès l'année 1985 et elle a été informée des modalités de titularisation dès la diffusion de la note de service interne du 25 juillet 1997 ; elle a par ailleurs été informée de refus de titularisation, et ne pouvait donc, bien avant sa présentation le 8 avril 2013, de sa demande indemnitaire, ignorer l'existence de sa créance envers la Poste ; en tout état de cause, sa créance était prescrite au bout de vingt ans, en application de l'article 2232 du code civil ; cette prescription a été méconnue dès lors que le jugement condamne la Poste au titre d'une période s'étendant sur plus de vingt-six ans ; le tribunal administratif a donc commis une erreur de droit en écartant l'exception de prescription opposée en défense par la Poste et en fixant le fait générateur de la créance de Mme G...au 16 février 2011 ; le tribunal administratif a commis une autre erreur de droit et d'appréciation, en considérant que Mme G...était en droit de bénéficier de la majoration de traitement instituée par l'article 3 de la loi du 3 avril 1950 dès lors qu'elle devait être regardée comme ayant assuré son service en qualité de fonctionnaire à La Réunion, du 1er janvier 1985 au 1er mars 2011 ; en effet, si Mme G... a bien été titularisée de manière rétroactive dans un grade correspondant par équivalence à son contrat de travail, son affectation à La Réunion en qualité de fonctionnaire, ne pouvait présenter un caractère rétroactif, dès lors que sa titularisation était subordonnée à la prise d'un poste en Ile de France ; à cet effet, la Poste a procédé le 1er mars 2011 à la nomination de Mme G...au grade d'ASADG au sein de la DPOM de Gentilly en Ile de France, puis conformément au point 4.4.1.a) de la note de service du 25 juillet 1997 a procédé à la reconstitution de sa carrière sur le plan administratif et pécuniaire ; Mme G...a été mutée de façon effective au sein de l'établissement de Saint-Denis Moufia à La Réunion à compter du 2 mars 2011 ; la reconstitution de la carrière de Mme G... a été entreprise par la Poste en tenant compte des sommes qu'elle aurait du percevoir entre janvier 1985 et mars 2011 en qualité de fonctionnaire relevant de la DPOM en Ile de France ; la Poste du fait de cette titularisation et à raison de cette affectation, a donc versé à Mme G...la somme de 69 001,91 euros à titre de rappel de rémunération ; la Poste ne pouvait toutefois verser à l'intéressée des indemnités liées à son service outre-mer, entre le 1er janvier 1985 et le 1er mars 2011, dès lors que son affectation en qualité de fonctionnaire à La Réunion, n'a été effective qu'au 2 mars 2011 et que cette affectation ne pouvait présenter un caractère rétroactif ; Mme G... ayant signé le 31 janvier 2011, l'accusé de réception du document d'acceptation de sa titularisation, ayant accepté sa titularisation, elle ne justifie d'aucun intérêt pour agir à l'encontre des mesures les mettant en oeuvre, dès lors qu'une personne n'a pas intérêt pour agir à l'encontre d'une mesure qu'elle a elle-même sollicité, quels que soient les motifs pour lesquels elle a obtenu satisfaction ; en l'absence d'acceptation d'un poste vacant en Ile-de-France, Mme G...n'avait plus droit à titularisation ; dans ces conditions, la titularisation dont l'intéressée a bénéficié ne peut s'analyser que comme une mesure gracieuse, en l'absence de toute contrainte juridique imposant à la Poste de l'adopter et cette mesure est insusceptible d'engager la responsabilité de la Poste ; le tribunal administratif a commis une erreur de droit quant à la charge de la preuve en matière indemnitaire, dès lors qu'il appartenait à Mme G...de justifier de son préjudice ; la cour devra donc annuler le jugement et rejeter les conclusions indemnitaires de l'intéressée ;

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code civil ;

- le code du travail ;

- la loi n° 50-407 du 3 avril 1950 ;

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;

- le décret n° 49-55 du 11 janvier 1949 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pierre Bentolila,

- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., représentant La Poste.

Considérant ce qui suit :

1. Mme G...a été recrutée en 1982 par l'administration des postes à La Réunion en qualité d'agent auxiliaire. En 2006, elle a demandé à la Poste de prononcer sa titularisation en application des dispositions de l'article 73 de la loi du 11 janvier 1984. La Poste a admis que les conditions étaient satisfaites pour une titularisation rétroactive en qualité de fonctionnaire et a décidé, le 16 février 2011, de titulariser Mme G...à compter du 1er janvier 1985. La carrière de Mme G...en qualité de titulaire a été reconstituée à compter du 1er janvier 1985. MmeG..., qui a bénéficié de la part de la Poste, au mois de mai 2012 d'un rappel de rémunération pour un montant total de 69 001 euros, pour la période comprise entre le 1er janvier 1985 et le 16 février 2011, a demandé au tribunal administratif de La Réunion la condamnation de la Poste à lui verser au titre de la reconstitution de carrière, la somme de 161 152 euros représentative des majorations de traitement et de l'indexation afférentes aux rémunérations dues aux fonctionnaires affectés à La Réunion. Par un jugement du 24 août 2016, le tribunal administratif de La Réunion a condamné la Poste à verser à Mme G... un rappel de majorations de traitements et rémunérations au titre de la période du 1er janvier 1985 au 1er mars 2011, a renvoyé l'intéressée devant La Poste pour qu'il soit procédé à la liquidation des sommes dues et a rejeté le surplus de ses conclusions afférentes à l'indexation des rémunérations dues au titre de la reconstitution de carrière. La Poste relève appel du jugement du 24 août 2016 en tant qu'il donne satisfaction à Mme G...et par la voie de l'appel incident, Mme G...conclut à la réformation du jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation de la Poste à lui accorder sur les sommes devant lui être attribuées au titre de la reconstitution de carrière en qualité de titulaire avec effet au 1er janvier 1985, l'indexation de ces rémunérations, selon elle applicable aux fonctionnaires affectés à La Réunion. Elle demande par ailleurs de condamner la Poste à lui payer au titre de la reconstitution de sa carrière à compter du 1er janvier 1985, la somme correspondant à ses congés bonifiés ainsi que les primes outre-mer et les avantages fiscaux afférents aux départements d'outre-mer. Par une seconde requête, la Poste demande le sursis à exécution du jugement du 24 août 2016 du tribunal administratif de la Réunion

2. Les deux requêtes n°s 16BX03459 et 16BX03483 présentées par la Poste sont relatives au même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par le même arrêt.

Sur l'appel principal de la Poste :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

3. La Poste fait valoir que pour estimer que Mme G...était en droit de prétendre à la majoration de traitement instituée par la loi du 3 avril 1950, les premiers juges ont considéré que Mme G...avait toujours exercé ses fonctions de postière à La Réunion entre le 1er janvier 1985 et le 1er mars 2011 en qualité de fonctionnaire, sans répondre à l'argumentation de la Poste dans ses mémoires et dans sa note en délibéré, selon laquelle faute d'avoir été affectée sur un poste situé en Ile-de-France, l'intéressée ne pouvait bénéficier du dispositif de l'article 73 de la loi du 11 janvier 1984, et ne pouvait être titularisée qu'au 1er mars 2011 et que Mme G...ayant accepté d'être titularisée dans ces conditions, elle ne pouvait réclamer à la Poste, l'indemnisation découlant de cette situation. La Poste soutient également que le tribunal administratif n'aurait pas répondu à son moyen selon lequel, la titularisation ne constituant pas un droit mais une mesure gracieuse, la responsabilité de la Poste quant aux modalités dont cette titularisation avait été assortie ne pouvait être engagée.

4. Contrairement à ce que soutient la Poste, le jugement du tribunal administratif est suffisamment motivé dès lors que dans son point 5. il indique " (...) qu'il résulte de l'instruction que Mme G...a toujours exercé ses fonctions de postière à La Réunion ; que si La Poste nie l'existence d'une affectation en qualité de fonctionnaire à La Réunion depuis 1985 en soulignant que, conformément aux règles en vigueur dans l'institution depuis 1997, la décision de titularisation du 16 février 2011 a été assortie d'une décision d'affectation en Ile-de-France à la date du 1er mars 2011, il est constant que l'affectation donnée à l'intéressée sur un poste implanté à Gentilly (Val-de-Marne) présentait un caractère fictif, ayant été immédiatement suivie d'une affectation à Saint-Denis (Réunion) à la date du 2 mars 2011 sans qu'il n'ait été demandé à l'agent de rejoindre son poste en métropole ; qu'ainsi, il y a lieu de constater que la titularisation rétroactive au 1er janvier 1985 s'est accompagnée d'une affectation en tant que fonctionnaire à La Réunion avec, de même, rétroactivité au 1er janvier 1985 ; que le droit à la majoration de traitement doit être reconnu depuis cette date (...) ". La circonstance selon laquelle le tribunal administratif n'a pas répondu au moyen invoqué en défense par la Poste selon lequel Mme G... aurait accepté une affectation en Ile-de -France, n'est pas de nature à regarder le jugement comme se trouvant insuffisamment motivé, dès lors que le tribunal a considéré que cette affectation présentait un caractère fictif. Il en est de même du moyen selon lequel la titularisation était subordonnée à une affectation en Ile-de-France, moyen que les premiers juges ont nécessairement écarté, en considérant que de fait, la titularisation de Mme G... avait été prononcée à raison d'une affectation à La Réunion et que cette titularisation rétroactive non assortie des majorations applicables aux fonctionnaires se trouvant en poste à La Réunion, engageait la responsabilité de la Poste. Enfin, le fait que le tribunal administratif n'ait pas répondu à la circonstance qu'aurait invoquée la Poste en première instance, selon laquelle, la titularisation ne constituerait pas un droit mais une mesure gracieuse, se trouve sans incidence sur la régularité formelle de la motivation, la circonstance juridique invoquée par la Poste étant erronée, et donc inopérante. Les moyens invoqués par la Poste tirés de l'irrégularité du jugement, doivent donc être écartés.

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement :

5. La Poste soutient en premier lieu que Mme G...n'aurait pas intérêt à agir contre la décision de titularisation, et donc pas intérêt à demander réparation à raison de cette décision, dès lors que cette décision de titularisation est intervenue à sa demande. Toutefois, même si une décision est prise sur demande, son destinataire qui en est le bénéficiaire, peut contester les modalités dont cette décision se trouve assortie et en l'espèce, Mme G...conteste les modalités selon lesquelles sa carrière a été reconstituée, quant au versement de sa rémunération, sur le fondement de la décision de titularisation

6. La Poste soutient en deuxième lieu, que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en estimant que le délai de prescription des sommes réclamées par Mme G...courait à compter de la notification de la décision de titularisation du 16 février 2011 et qu'il n'était donc pas expiré à la date du 8 avril 2013 de présentation par Mme G...de sa demande indemnitaire. La Poste soutient en effet, que l'analogie qui a été établie par le tribunal administratif entre les règles de prescription de l'article 2224 du code civil et celles posées par la loi du 31 décembre 1968 ne repose sur aucun fondement dès lors que les deux textes sont rédigés différemment et que la loi du 31 décembre 1968 n'est pas applicable à la Poste. Il résulte en effet des dispositions combinées de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 et des articles 14 et 15 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation de la poste et du service des télécommunications, que la Poste, qui n'est plus soumise aux règles de la comptabilité publique, n'est plus autorisée à se prévaloir de la prescription quadriennale.

7. Aux termes de l'article L. 3245-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2008, applicable aux agents de la Poste, y compris ceux relevant d'un statut d'agent public et applicable à la date de l'action en paiement engagée par Mme G...: " L'action en paiement ou en répétition de salaire se prescrit par cinq ans conformément à l'article 2224 du code civil ". Aux termes de l'article 2224 du code civil : " Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ". En vertu de l'article 2277 du code civil : " Se prescrivent par cinq ans les actions en paiement : Des salaires ; Des arrérages des rentes perpétuelles et viagères et de ceux des pensions alimentaires ; Des loyers, des fermages et des charges locatives ; Des intérêts des sommes prêtées, et généralement de tout ce qui est payable par année ou à des termes périodiques plus courts. Se prescrivent également par cinq ans les actions en répétition des loyers, des fermages et des charges locatives ".

8. Dès lors qu'en ce qui concerne le préjudice causé à un agent du fait du retard dans la régularisation de sa situation statutaire, notamment pour ce qui est de sa titularisation, le délai de prescription de la créance court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle est intervenu l'acte ayant régularisé sa situation, le point de départ de la prescription que la Poste était en droit d'opposer à MmeG..., était constitué par la notification à Mme G... le 16 février 2011, de la décision de titularisation. Dans ces conditions, à la date du 8 avril 2013 de présentation par Mme G...de sa demande indemnitaire, sa créance n'était pas atteinte par la prescription quinquennale qui lui était applicable. Dès lors, et alors même que le tribunal administratif s'est référé à tort aux conditions d'application de la prescription quadriennale, pour déterminer le point de départ de la prescription quinquennale qui pouvait être opposée à MmeG..., la Poste n'est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, le tribunal administratif a considéré que la créance dont se prévalait Mme G... n'était pas atteinte par la prescription quinquennale.

9. Toujours au titre de la prescription, la Poste soutient qu'en tout état de cause, la créance de Mme G...était au moins partiellement, atteinte par la prescription de vingt ans prévue par l'article 2232 du code civil et que cette prescription a été méconnue dès lors que le jugement condamne la Poste au titre d'une période s'étendant sur plus de 26 ans (remontant de 2011 à 1985). En vertu de l'article 2232 du code civil : " Le report du point de départ, la suspension ou l'interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit ". En tout état de cause, la prescription extinctive de vingt ans de l'article 2232 du code civil ne joue qu'à compter de la naissance du droit et donc en l'espèce, n'était pas opposable à Mme G...dont le point de départ de la prescription était constitué par la notification le 16 février 2011, de la décision de titularisation et qui a présenté le 8 avril 2013 une demande indemnitaire.

10. La Poste soutient en troisième lieu que c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que Mme G...devait être regardée comme ayant accompli son service à La Réunion en qualité de fonctionnaire du 1er janvier 1985 au 1er mars 2011 dès lors qu'en vertu des dispositions applicables à la Poste, sa titularisation était subordonnée à la prise d'un poste en Ile de France. Toutefois, le document d'accusé de réception de proposition de titularisation adressée à Mme G...le 31 janvier 2011 indiquait qu'elle " accept(ait) d'être titularisée comme ASADG en février 2011 et mutée le 2 février 2011 sur Saint-Denis Moufia à la Réunion ", ce qui correspond à son affectation effective à compter du 2 février 2011, alors que par ailleurs il est constant que Mme G...a été en poste à la Réunion durant toute la période de 1985 à 2011. La Poste en versant à Mme G...un rappel de traitements et de rémunérations pour la période du 1er janvier 1985 au 28 février 2011 a donc acté la titularisation rétroactive de l'intéressée à compter du 1er janvier 1985, sur une affectation qui ne pouvait être que celle, à La Réunion, qui a été la sienne entre 1985 et 2011. La circonstance invoquée par la Poste, à la supposer exacte, selon laquelle Mme G...pour être titularisée devait nécessairement être affectée en Ile-de-France se trouve sans incidence en l'espèce, dès lors que la Poste ne saurait opposer l'illégalité de ses propres actes, lesquels ont prononcé la titularisation de l'intéressée avec effet rétroactif au 1er janvier 1985 sur une affectation qui ne pouvait être que celle, à La Réunion, qui a été la sienne entre 1985 et 2011 et affectation le 2 février 2011 à Saint-Denis Moufia à La Réunion, l'affectation en Ile de France qui a été attribuée à Mme G..., le 1er février 2011, étant une nomination pour ordre, sans valeur juridique.

11. Enfin, contrairement à ce que soutient la Poste, Mme G...avait devant le tribunal administratif justifié de la réalité et de la consistance du préjudice invoqué au titre du rappel de majoration de traitement au titre de la période du 1er janvier 1985 au 1er mars 2011. L'appel principal présenté par la Poste ne peut donc être que rejeté.

Sur l'appel incident de MmeG... :

12. En premier lieu, comme l'indique le courrier susvisé du 21 septembre 2018, la cour a informé les parties, sur le fondement de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce qu'elle était susceptible de fonder la solution du litige sur le moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité, pour être nouvelles en appel des conclusions présentées par Mme G...tendant à la condamnation de la Poste, à lui payer au titre de la reconstitution de sa carrière à compter du 1er janvier 1985, la somme correspondant à ses congés bonifiés ainsi que les primes outre-mer et les avantages fiscaux des départements d'outre-mer.

13. En second lieu, en vertu de l'article 2 du décret susvisé du 11 janvier 1949 : " (...) En cas de disparité entre le franc et la monnaie ayant cours dans un département d'outre-mer, le montant établi en francs du traitement indiciaire, de l'indemnité compensatrice prévue par le décret du 10 septembre 1947, de l'indemnité de résidence et du supplément familial de traitement ainsi que de la majoration de traitement instituée par la loi n° 50-407 du 3 avril 1950 et de ses compléments est payé aux fonctionnaires en service dans le département considéré pour sa contre-valeur en monnaie locale d'après la parité en vigueur au cours de la période sur laquelle porte la liquidation multipliée par un index de correction fixé par arrêté du ministre de l'Economie et des Finances et du ministre d'Etat chargé des Départements et Territoires d'outre-mer ". Les dispositions du décret modifié du 11 janvier 1949 subordonnent l'application de l'index de correction qu'elles prévoient, notamment à la condition qu'une monnaie différente du franc métropolitain ait cours dans les départements d'outre-mer qu'elles visent. En vertu des dispositions combinées de l'article 17 de la loi de finances rectificative du 27 décembre 1974 et du décret du 30 décembre 1974, les billets et les monnaies ayant cours légal et pouvoir libératoire en France métropolitaine ont cours légal et pouvoir libératoire dans les départements de la Guadeloupe, de Guyane, de la Martinique et de La Réunion à compter du 1er janvier 1975. Les dispositions du décret modifié du 11 janvier 1949 ne sont, par suite, plus applicables depuis cette date.

14. Il résulte de ce qui précède, qu'ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, et sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité dans le cadre de l'appel incident, les conclusions de Mme G...tendant à l'application d'un coefficient d'indexation sur les rémunérations dues au titre de la reconstitution de carrière ne peuvent être que rejetées. L'appel incident de Mme G...doit donc être rejeté.

15. Compte tenu de ce que la cour statue sur le fond sur la requête présentée par la Poste, la requête n°16BX03483 à fins de sursis à exécution présentée par la Poste est devenue sans objet.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme G...qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par le et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de ce même article et de mettre à la charge de la Poste la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme G...et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 16BX03483 présentée par la Poste tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 1300821 du 24 août 2016 par lequel le tribunal administratif de La Réunion l'a condamnée à verser à Mme G...un rappel de majoration de traitement au titre de la période du 1er janvier 1985 au 1er mars 2011 et a renvoyé l'intéressée devant La Poste pour qu'il soit procédé à la liquidation des sommes dues.

Article 2 : La requête n° 16BX03459 de la Poste est rejetée.

Article 3 : L'appel incident de Mme G...est rejeté.

Article 4 : La Poste versera à Mme G...la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la Poste et à Mme E...G...

Délibéré après l'audience du 8 octobre 2018 à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

M. Pierre Bentolila, président-assesseur,

M. Axel Basset, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 novembre 2018.

Le rapporteur,

Pierre Bentolila

Le président,

Pierre LarroumecLe greffier,

Cindy Virin

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Cindy Virin

2

N°s 16BX03459, 16BX03483


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16BX03459,16BX03483
Date de la décision : 05/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-13-02-01 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Effets des annulations. Reconstitution de carrière.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Pierre BENTOLILA
Rapporteur public ?: Mme MOLINA-ANDREO
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS MICKAEL NATIVEL

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2018-11-05;16bx03459.16bx03483 ?
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