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07/03/2019 | FRANCE | N°17BX01647

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre - formation à 3, 07 mars 2019, 17BX01647


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

La société Eco Net System a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge des suppléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 juillet 2011, ainsi que des rappels d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos de 2008 à 2011, et des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1501262 du 23 mars 2017, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure de

vant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 mai 2017 et un mémoire enregistré le 1er octo...

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

La société Eco Net System a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge des suppléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 juillet 2011, ainsi que des rappels d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos de 2008 à 2011, et des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1501262 du 23 mars 2017, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 mai 2017 et un mémoire enregistré le 1er octobre 2018, MeB..., mandataire liquidateur de la société Eco Net Système, représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 mars 2017 en tant qu'il rejette ses conclusions portant sur les suppléments de taxe sur la valeur ajoutée contestés et les pénalités correspondantes ;

2°) de faire droit à ses conclusions aux fins de décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la nécessaire reconstitution de la taxe sur la valeur ajoutée due sur l'ensemble de la période vérifiée rend recevable la réclamation pour la totalité des sommes dont la décharge est demandée ;

- il appartenait au tribunal de vérifier si la différence d'assiette à la taxe sur la valeur ajoutée retenue par l'administration procédait ou non d'une erreur de cette dernière sur la base des constatations de la société Eco Net System ; il ne l'a pas fait en se bornant à une comparaison, au titre de seul second contrôle, entre les déclarations souscrites et les livres comptables ;

- la période du 1er janvier 2008 au 30 juin 2008 relève d'un exercice déjà vérifié par l'administration lors d'un précédent contrôle, dont les conséquences n'ont pas été tirées ;

- il a été tenu compte deux fois d'une base imposable de 540 851 euros et il en résulte une double imposition dans la mesure où les rehaussements issus du premier contrôle ont été intégralement réglés ; le poste client restant à encaisser ne peut s'entendre simultanément à la même date pour un montant de 536 170 euros et pour un montant de 1 077 021 euros à la faveur de contrôles successifs ; dès lors que rien ne justifie cette différence d'assiette constatée par le service, elle induit nécessairement une erreur de l'administration à l'origine d'une double imposition ;

- en l'occurrence, l'administration est seule à disposer des éléments relatifs au premier contrôle et elle ne conteste pas sérieusement la double imposition ;

- l'ensemble de sa comptabilité a été saisie, empêchant tout débat contradictoire devant la commission départementale des impôts ;

- le caractère délibéré des omissions n'est pas établi et par conséquent la majoration prévue à l'article 1729 du code général des impôts n'est pas justifiée.

Par des mémoires enregistrés les 4 décembre 2017 et 9 octobre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics (direction de contrôle fiscal sud-ouest), conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- la requête est irrecevable en ce qu'elle porte sur des droits excédant la double imposition, seule invoquée dans la réclamation préalable présentée à l'administration et en première instance ; cette irrecevabilité affecte le quantum de la demande, même si la contestation produirait des incidences sur l'ensemble de la période en litige ;

- la proposition de rectification relative au premier contrôle a été produite ; la société se dispense de faire le rapprochement, qu'elle seule peut faire, entre les encaissements retenus à l'occasion du second contrôle et ceux qui auraient été déjà pris en compte lors du contrôle antérieur à l'occasion du retraitement des dus clients au 31 décembre 2007 ; l'administration a explicité la différence d'assiette constatée au 31 décembre 2007, la double imposition n'est pas caractérisée ;

- la société s'est abstenue sur l'ensemble de la période de déclarer une importante quote-part de la taxe collectée exigible ; il est établi que la souscription de déclaration inexacte a été faite sciemment, dès lors que des rappels de même nature avaient été notifiés à l'issue du contrôle précédent ; la taxe indûment retenue figurait d'ailleurs au passif du bilan.

Par une ordonnance du 12 septembre 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 19 octobre 2018 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Laurent Pouget,

- et les conclusions de Mme Déborah de Paz, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Eco Net System, qui exerçait avant sa liquidation judiciaire en 2013 une activité de prestataire de services dans le domaine du nettoyage de locaux professionnels, a fait l'objet de deux vérifications de comptabilité successives portant, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, sur la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007, puis sur la période du 1er juillet 2007 au 31 juillet 2011. Des rappels en matière de taxe sur la valeur ajoutée collectée ont été notifiés à la société Eco Net System à l'issue de chacun de ces contrôles et MeB..., son liquidateur judiciaire, soutient qu'ils procèdent pour partie d'une double imposition de la même assiette taxable. Il relève appel du jugement du 23 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant notamment à la décharge de rappels de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 577 222 euros en droits et pénalités.

Sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

2. Si le requérant fait état de ce que la comptabilité de la société Eco Net System aurait été saisie par le vérificateur, empêchant tout débat contradictoire devant la commission départementale des impôts, il n'assortit cette allégation d'aucune précision permettant d'en apprécier la portée.

3. Aux termes du 2 de l'article 269 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " La taxe est exigible: (...) c) Pour les prestations de services, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits. / En cas d'escompte d'effet de commerce ou de transmission de créance, l'exigibilité intervient respectivement à la date du paiement de l'effet par le client ou à celle du paiement de la dette transmise entre les mains du bénéficiaire de la transmission (...) ".

4. Me B...fait valoir que la période du 1er janvier au 30 juin 2008 se rattache à un exercice fiscal qui a fait l'objet d'un double contrôle, dans le cadre de chacune des deux procédures de vérification de comptabilité successives de la société Eco Net System. Il relève qu'à l'issue du premier contrôle, l'administration avait constaté au 31 décembre 2007 une somme de 536 170 euros au poste " client restant à facturer ", alors que dans le cadre du second contrôle le vérificateur a retenu, pour ce même poste, un montant de 1 077 822 euros, différentiel qu'il explique par une erreur de l'administration dans le calcul de l'assiette de la taxe. Il ne résulte toutefois pas de l'instruction qu'il en résulterait une double imposition, ainsi que l'affirme le requérant. En effet, il est constant qu'à l'occasion de la seconde vérification de comptabilité, le service a notamment procédé logiquement à la reconstitution de la taxe sur la valeur ajoutée exigible pour la période du 1er janvier 2008 au 30 juin 2011 par rapprochement entre les montants des encaissements inscrits au crédit des postes clients et le chiffre d'affaires déclaré sur les déclarations CA3 déposées. La société Eco Net System ayant conclu un contrat d'affacturage avec une société spécialisée, la date d'exigibilité de la taxe afférente aux créances remises au factor correspondait à la date d'encaissement par celui-ci desdites créances, qui était antérieure à celle à laquelle la société constatait effectivement en comptabilité les règlements des clients. Le ministre explique qu'en conséquence, si les dus clients constatés en comptabilité au 31 décembre 2007 ressortaient à 1 078 087 euros, ce montant a été corrigé à hauteur de 536 170 euros afin de tenir compte de paiements clients encaissés par le factor au 31 décembre 2007, d'un montant de 496 979 euros, et d'une livraison de bien meuble corporel, pour laquelle l'exigibilité n'était pas liée à l'encaissement du prix, d'un montant de 44 938 euros. Il n'est pas contesté par le requérant qu'à l'issue de chacun des deux contrôles, le service a communiqué à la société Eco Net System la liste détaillée et exhaustive des encaissements mensuels résultant des enregistrements comptables retenus pour la liquidation du rappel tenant à l'insuffisance de déclaration de TVA collectée. Or, Me B...n'apporte aucune précision quant aux encaissements retenus à l'occasion du second contrôle qui auraient le cas échéant d'ores et déjà été pris en compte lors du premier contrôle, à l'occasion du retraitement des dus clients au 31 décembre 2007. Dans ces conditions, la double imposition alléguée n'est pas établie.

Sur les pénalités :

5. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : /a. 40 % en cas de manquement délibéré ".

6. Il résulte de l'instruction que la vérification de comptabilité de la société Eco Net System a révélé l'existence de minorations de taxe sur la valeur ajoutée collectée représentant, selon les mois concernés, entre 38 % et 57 % de la taxe sur la valeur ajoutée nette due au titre de l'ensemble de la période d'imposition litigieuse. L'existence de ces minorations ressortait de la comptabilité de la société, qui ne pouvait dès lors les ignorer, d'autant que des omissions de chiffre d'affaires avaient également été constatées lors de deux précédents contrôles. Dans ces conditions, la requérante doit être regardée comme ayant eu l'intention délibérée d'éluder l'impôt, et c'est par suite à bon droit que le service a appliqué la majoration de 40 % prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts aux rappels effectués selon la procédure de redressement contradictoire.

7. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à une partie des conclusions de la requête par le ministre de l'action et des comptes publics, que le liquidateur judiciaire de la société Eco Net System n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à Me B... la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Me B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me C...B..., liquidateur judiciaire de la société Eco Net System et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 7 février 2019, à laquelle siégeaient :

M. Aymard de Malafosse, président,

M. Laurent Pouget, président-assesseur,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, premier conseiller,

Lu en audience publique le 7 mars 2019.

Le rapporteur,

Laurent POUGET Le président,

Aymard de MALAFOSSE Le greffier,

Christophe PELLETIER

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

3

N° 17BX01647


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17BX01647
Date de la décision : 07/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Fait générateur.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Liquidation de la taxe - Base d'imposition.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET L.
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : GAJU et GOLAB

Origine de la décision
Date de l'import : 19/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-03-07;17bx01647 ?
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