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20/02/2020 | FRANCE | N°18BX00514

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 20 février 2020, 18BX00514


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Saint-Exupéry a demandé au tribunal administratif de Toulouse de la décharger des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011 pour un montant de 28 594 euros ainsi que des compléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 30 juin 2009 au 30 juin 2011 pour un montant total de 13 741 euros.

Par un jugement n° 1405678

du 5 décembre 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Saint-Exupéry a demandé au tribunal administratif de Toulouse de la décharger des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011 pour un montant de 28 594 euros ainsi que des compléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 30 juin 2009 au 30 juin 2011 pour un montant total de 13 741 euros.

Par un jugement n° 1405678 du 5 décembre 2017, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 février 2018, la société Saint-Exupéry, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 5 décembre 2017 ;

2°) de la décharger des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011 pour un montant de 28 594 euros ainsi que des compléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 30 juin 2009 au 30 juin 2011 pour un montant total de 13 741 euros.

Elle soutient que :

- la proposition de rectification, qui n'indique pas combien de tickets ont été examinés sur la période vérifiée et reprend les affirmations erronées de la personne qui assure la maintenance des caisses enregistreuses, n'est pas suffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

- la comptabilité qu'elle a présentée est régulière en la forme et au fond, dès lors que les recettes bar sont identifiées et correspondent aux tarifs affichés, qu'aucune anomalie n'a été relevée, que l'administration autorise la comptabilisation globale des recettes en fin de journée et que le 3° du I de l'article 286 du code général des impôts permet de globaliser en fin de journée les opérations au comptant d'un montant inférieur à 76 euros ;

- la méthode de reconstitution est sommaire et radicalement viciée ;

- l'administration n'a eu recours qu'à une seule méthode de reconstitution en méconnaissance de la doctrine administrative 4 G 3342 n°4 ;

- les chiffres communiqués à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires sont différents de ceux communiqués au contribuable et que l'administration n'a pas suivi l'avis de cette commission ;

- l'année 2008 est prescrite au regard de l'impôt sur les sociétés ;

- l'achat de végétaux en 2008, dont la facture a été rejetée, a été réalisé dans l'intérêt de l'entreprise ;

- l'administration ne rapporte pas la preuve de l'intention délibérée d'éluder l'impôt en se bornant à invoquer l'importance des sommes éludées ou l'absence de conservation des pièces justificatives.

Par un mémoire, enregistré le 17 août 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B... C...,

- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Saint-Exupéry exploite un bar-restaurant situé au 12 avenue Saint-Exupéry à Toulouse (Haute-Garonne). À l'issue de la vérification de comptabilité dont cette société a fait l'objet en 2012 et portant sur la période du 1er juillet 2008 au 30 juin 2011, l'administration a rejeté la comptabilité de la société et a procédé à une reconstitution du chiffre d'affaires et du bénéfice réalisés. Une proposition de rectification, modifiée à plusieurs reprises à raison de la prise en compte partielle des réclamations présentées par la société Saint-Exupéry, lui a ensuite été notifiée. L'administration a, en définitive, mis à la charge de la société des impositions supplémentaires à l'impôt sur les sociétés pour un montant de 28 694 euros et des compléments de taxe sur la valeur ajoutée pour un montant de 13 741 euros. La société Saint-Exupéry demande à la cour d'annuler le jugement du 5 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires et de ces compléments de taxe sur la valeur ajoutée.

2. En premier lieu, à l'appui des moyens tirés de ce que la notification de redressement litigieuse n'aurait pas été assez motivée au regard des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales et ne mentionnerait en particulier pas combien de tickets ont été examinés sur la période vérifiée, de ce que la comptabilité qu'elle a présentée serait probante dès lors que les recettes bar sont identifiées et correspondent aux tarifs affichés, qu'aucune anomalie n'aurait été relevée, que la comptabilisation globale des recettes en fin de journée serait autorisée et que le 3° du I de l'article 286 du code général des impôts permet de globaliser en fin de journée les opérations au comptant d'un montant inférieur à 76 euros, de ce que l'administration n'a eu recours qu'à une seule méthode de reconstitution en méconnaissance de la doctrine administrative 4G 3342 n° 4, de ce que les chiffres communiqués à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires sont différents de ceux communiqués au contribuable, de ce que l'année 2008 est prescrite au regard de l'impôt sur les sociétés et que l'achat de végétaux en 2008, dont la facture a été rejetée, a été réalisé dans l'intérêt de l'entreprise, la société appelante ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas utilement la réponse apportée par le tribunal administratif. Par suite, il y a lieu de rejeter ces moyens par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.

3. En second lieu, le contribuable, à qui incombe la charge de prouver l'exagération des bases d'imposition retenues par le service, peut, s'il n'est pas en mesure d'établir le montant exact de ses résultats en s'appuyant sur une comptabilité régulière et probante, soit critiquer la méthode d'évaluation que l'administration a suivie et qu'elle doit faire connaître au contribuable et démontrer que cette méthode aboutit, au moins sur certains points et pour certains montants, à une exagération des bases d'imposition, soit soumettre à l'appréciation du juge de l'impôt une nouvelle méthode d'évaluation permettant de déterminer les bases d'imposition avec une précision meilleure que celle qui pouvait être atteinte par la méthode utilisée par l'administration.

4. En l'occurrence, la société appelante soutient la méthode utilisée pour reconstituer ses recettes est excessivement sommaire et viciée dans son principe dès lors que le service a inclus les croissants dans sa méthode dite " des liquides ", n'a pas pris en compte les doses affichées sur la carte et a retenu des doses différentes au bar et au restaurant, n'a pas pris en compte de " pertes machine " et un coulage de 5 % sur le café ainsi que sur des produits spécifiques tels que les anisés, le vin en " bib ", les apéritifs et les digestifs, enfin, qu'il n'a pas appliqué un taux de produits offerts de 7 % sur l'ensemble des ventes de liquides tant en ce qui concerne l'activité bar que l'activité restaurant.

5. Toutefois, il résulte de l'instruction que, contrairement à ce que soutient la société appelante, les croissants ont été inclus dans les solides dans toutes les étapes de la démarche utilisée pour reconstituer les recettes de la société au titre de son activité de ventes de solides accompagnés de liquides, qui a permis de déterminer une recette " restaurant ", laquelle inclut donc en réalité des ventes de solides au bar, de sorte que cette reconstitution ne saurait être regardée comme faussée à raison de l'inclusion des ventes de croissants dans les recettes " restaurant ". En outre, la société appelante ne produit aucun élément permettant d'établir que l'ensemble des pertes machines et de coulage doivent être fixées, comme elle le soutient, à 5 %. Elle ne justifie, en particulier, ni vendre du vin " à la pression " ni que cette vente occasionnerait des pertes en se bornant à se prévaloir d'une attestation de France Boissons qui confirme l'existence d'une installation de tirage de bière en fût et de vin en " bib ". Par ailleurs, il résulte également de l'instruction que, conformément à l'avis notifié par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires le 21 juin 2013, l'administration a effectivement minoré de 7 % l'ensemble des liquides consommés par les clients qu'ils aient ou non été accompagnés d'aliments solides. Enfin, si l'administration n'a accepté de retenir les dosages mentionnés au tarif des consommations affichés dans l'établissement que pour la seule activité bar, la société appelante n'établit pas qu'elle pratiquerait un dosage identique lorsque ces boissons sont servies dans le cadre de son activité de restauration, alors, ainsi qu'il a été dit précédemment, qu'il lui appartient d'établir le caractère insuffisant des dosages retenus par l'administration, lesquels correspondent à ceux habituellement pratiqués par la profession.

6. Dans ces conditions, la société appelante, qui ne peut utilement faire valoir ni que la reconstitution de ces recettes se traduit par un doublement des bases d'imposition retenues d'un exercice sur l'autre ni, faute de proposer une autres méthode d'évaluation permettant de déterminer les bases d'imposition avec une précision meilleure, que l'écart entre le chiffre d'affaires qu'elle a déclaré et le chiffre d'affaires reconstitué serait inférieur à la marge d'erreur inhérente à la méthode d'évaluation utilisée, n'est pas fondée à critiquer les résultats de la reconstitution des recettes à laquelle le service s'est livré.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". Pour établir la mauvaise foi du contribuable, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt.

8. En l'occurrence, eu égard au caractère systématique et substantiel des irrégularités affectant la comptabilité de la société Saint-Exupéry au point de lui ôter tout caractère probant et du caractère tout aussi systématique des minorations de recettes que ces irrégularités ont permis de dissimuler, l'administration a pu, à bon droit, considérer que ces manquements de la société à ses obligations comptables et déclaratives caractérisaient une volonté délibérée de se soustraire à ses obligations fiscales et lui appliquer, pour ce motif, les pénalités mentionnées à l'article 1729 précité du code général des impôts.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la société Saint-Exupéry n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011 ainsi que des compléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 30 juin 2009 au 30 juin 2011. Sa requête doit, par suite, être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Saint-Exupéry est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Saint-Exupéry et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Ouest.

Délibéré après l'audience du 23 janvier 2020 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme D..., présidente-assesseure,

M. B... C..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 février 2020.

Le rapporteur,

Manuel C...

Le président,

Éric Rey-Bèthbéder

La greffière,

Camille Péan

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N°18BX00514


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX00514
Date de la décision : 20/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : DUPEY

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-02-20;18bx00514 ?
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