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20/05/2020 | FRANCE | N°18BX00972

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 20 mai 2020, 18BX00972


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Poitiers la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2008.

Par un jugement n° 1403369 du 16 janvier 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 mars et 18 octobre 2018, M. et Mme B..., représentés par Me C..., demanden

t à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 janvier 2018 ;

2°) de prononcer la décharge de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Poitiers la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2008.

Par un jugement n° 1403369 du 16 janvier 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 mars et 18 octobre 2018, M. et Mme B..., représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 janvier 2018 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2008 ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la taxation d'office est irrégulière dès lors que M. B... a répondu de façon suffisante aux demandes de justifications ;

- les investigations judiciaires, et notamment les écoutes téléphoniques et les procès-verbaux d'audition, établissent clairement que la somme de 51 750 euros en espèces correspond bien à des fonds remis par M. F... pour compléter le prix de vente du terrain cédé, ce que retient le tribunal correctionnel de Bordeaux ;

- l'autorité de la chose jugée s'attache aux constatations de faits de la juridiction pénale, ce que reconnaît la doctrine administrative ;

- l'administration ne peut affirmer que la valeur du terrain était de 20 000 euros s'agissant de taillis simples, alors que le terrain répondait aux critères de constructibilité ;

- la majoration pour absence de bonne foi est inapplicable s'agissant de revenus d'origine indéterminée, et la plus-value était exonérée en raison de la détention de l'immeuble depuis plus de 15 ans.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 21 septembre 2018 et 16 septembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête, et fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 30 août 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 30 septembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme G...,

- et les conclusions de M. D... E....

Considérant ce qui suit :

1. Dans le cadre d'une instruction pénale et à l'occasion d'une perquisition judiciaire, une somme de 51 750 euros en six paquets de billets de 20 et de 50 euros a été découverte au domicile de M. B..., sous les tuiles du toit. L'administration a alors adressé à l'appelant, le 18 juin 2010, une demande d'éclaircissement et de justification pour connaître l'origine et la nature de cette somme et, estimant que les réponses apportées étaient insuffisantes, l'a taxée d'office dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée au titre de l'année 2008. M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 16 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande tendant à la décharge de cette imposition.

2. Les constatations de faits contenues dans les jugements rendus par les tribunaux répressifs sur l'action publique et qui sont le support nécessaire du dispositif du jugement ont, lorsque le jugement n'est plus susceptible de recours à effet suspensif, l'autorité de la chose jugée à l'égard de l'administration.

3. Le jugement du tribunal correctionnel de Bordeaux du 1er juillet 2011, confirmé le 4 juillet 2012 par la cour d'appel de Bordeaux, relève que " L'enquête a établi qu'Alain B... avait vendu à Rachid F... un terrain sis à Garat le 6 mars 2009 et qu'un projet de vente, également au profit de F... mais sous couvert du nom de son frère, Mohamed Zaoui, concernant un second terrain à Garat, était en cours lors de l'interpellation de F... en avri12009 ; il s'agissait de terrains non constructibles destinés à devenir constructibles en 2013. ". M. B... a reconnu " au vu des échanges téléphoniques enregistrés avec Fethi Bouagila, que le prix réel était de 110 000 euros pour les deux terrains, prix incluant un dessous-de-table de 60 000 euros, somme payée en espèces et correspondant à l'argent caché dans la toiture de la maison de Saint-Yrieix que lui avait remis en décembre 2008, réparti dans deux enveloppes, Rachid F... ". Le jugement relève également que " L'expertise biologique aux fins de recherche et mise en évidence de profils génétiques, effectuée sur les billets de banque saisis chez Alain B... a conclu à la présence de l'empreinte génétique de Rachid F... sur plusieurs liasses de ces billets (...) une contamination majeure par le cannabis et un peu par l'héroïne sur ces mêmes billets de banque a également été mise en évidence par expertise ".

4. Les constatations de ce jugement, relatives à l'origine et à la nature de la somme de 51 750 euros en cause, versée par M. F... en paiement du prix de la vente de terrains destinés à devenir constructibles, sont le support nécessaire du dispositif du jugement condamnant M. B... pour recel et blanchiment de fonds issus d'infractions à la législation sur les stupéfiants. Par suite, les appelants sont fondés à soutenir que la somme de 51 750 euros ne peut être imposée dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée.

5. Il résulte de ce qui précède, l'administration ne présentant pas de demande de substitution de base légale, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. et Mme B... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande tenant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2008.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État, au profit de M. et Mme B..., la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 16 janvier 2018 est annulé.

Article 2 : M. et Mme B... sont déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2008.

Article 3 : L'État versera à M. et Mme B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... B... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 12 mars 2020 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme G..., présidente-assesseure,

M. Manuel Bourgeois, premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 20 mai 2020.

Le président,

Éric Rey-Bèthbéder

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 18BX00972 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 18BX00972
Date de la décision : 20/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02-05-02-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Établissement de l'impôt. Taxation d'office. Pour défaut de réponse à une demande de justifications (art. L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales).


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : SELARL ARNAUD - FORESTAS - ROBIN ROQUES SFP

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-05-20;18bx00972 ?
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