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20/05/2020 | FRANCE | N°19BX03239

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 20 mai 2020, 19BX03239


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1900037 du 15 mai 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 21 août et

30 décembre 2019, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1900037 du 15 mai 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 21 août et 30 décembre 2019, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 mai 2019 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) avant dire droit, d'appeler l'Office français de l'immigration et de l'intégration dans la cause et lui enjoindre de produire son dossier ;

3°) d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2018 ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, ou à défaut, de réexaminer sa situation, et de le munir, dans l'attente, d'une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jours de retard;

5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation entachant la décision portant refus de titre de séjour n'est pas mentionné dans les visas ;

Sur le refus de titre de séjour,

- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation particulière, dès lors que l'arrêté affirme qu'il est célibataire et sans enfant alors qu'il est père de deux enfants nés en France, dont la mère, de nationalité guinéenne, a demandé l'asile, et qu'il ne peut bénéficier en Guinée des soins nécessaires à son état de santé ;

- la décision est entachée d'un vice de procédure, dès lors qu'il ne ressort d'aucune des pièces du dossier, et notamment pas de l'avis qui comporte des signatures électroniques, que l'avis aurait été rendu à l'issue d'une délibération collégiale ;

- l'avis n'indique pas la date de la délibération et ne comporte aucune indication quant aux conditions concrètes de la délibération de sorte qu'il est impossible de vérifier si la collégialité a été respectée, le cas échéant " au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle " compte tenu de l'éloignement géographique des médecins ;

- il ne peut recevoir en Guinée les soins nécessaires à son état de santé, dès lors que les ressources humaines et les infrastructures dans le domaine de la santé y sont très insuffisantes, et les médicaments nécessaires au traitement de ses affections ne sont pas disponibles ;

- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il réside depuis 2012 de manière régulière, stable et continue sur le territoire français, est père de deux enfants nés sur le territoire français en 2017 et 2018, est dépourvu d'attaches en Guinée et est autoentrepreneur ;

- la décision méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français,

- elle est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi,

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il ne peut être soigné en Guinée ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 décembre 2019, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête et fait valoir qu'elle n'est pas fondée.

Par ordonnance du 15 novembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 14 janvier 2020 à 12 heures.

Par décision du 12 septembre 2019, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfants ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant guinéen, est entré en France irrégulièrement, selon ses dires, en 2011 et a demandé, le 12 avril 2012, la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade, qui lui a été accordée. Il en a sollicité le renouvellement le 3 août 2017 mais, par l'arrêté litigieux du 8 novembre 2018, le préfet de la Haute-Garonne a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Il relève appel du jugement du 15 mai 2019 du tribunal administratif de Toulouse rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Le jugement attaqué, dans son point 11, écarte le moyen tiré par M. B..., à l'encontre de la décision de refus de titre de séjour, de l'erreur manifeste qu'aurait commise le préfet dans l'appréciation de la situation de l'intéressé. Par suite, la circonstance que ce moyen n'aurait pas été mentionné dans les visas est sans influence sur la régularité du jugement.

Sur le refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, et en particulier de la motivation de la décision litigieuse, que le préfet s'est livré à un examen sérieux de la situation de M.B.... Si celui-ci fait valoir que la décision affirme qu'il est célibataire et sans enfant, alors que ses deux enfants sont nés sur le territoire français, il n'a toutefois pas mentionné leur existence dans sa demande de titre de séjour, produite par le préfet devant les premiers juges, dans laquelle il a barré la mention " enfants du déclarant " et n'a pas davantage mentionné leur mère.

4. En deuxième lieu, l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 4 janvier 2018 porte la mention " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'OFII émet l'avis suivant ", et est signé des trois médecins composant ce collège. Il ne ressort pas des pièces du dossier que cet avis, qui n'avait pas à mentionner la date et les conditions de la délibération, n'aurait pas été rendu à l'issue d'une délibération collégiale.

5. En troisième lieu, M. B... reprend en appel, sans l'assortir d'arguments nouveaux ou de critiques utiles du jugement, le moyen tiré de ce que les soins nécessaires à son état de santé ne seraient pas disponibles en Guinée, et se borne à produire devant la cour, en plus des pièces déjà produites devant les premiers juges, les certificats de psychiatres des 10 et 26 juillet 2019, qui décrivent son état de santé et le traitement qui lui est prescrit, et de deux médecins généralistes en date des 25 mai et 2 août 2019, qui ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration sur la disponibilité des soins dans le pays d'origine. Il convient d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

6. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. M. B... fait état de sa présence en France depuis 2011 et de celle de ses deux enfants, nés en 2017 et 2018 de sa relation avec une compatriote. Toutefois, M. B..., qui n'a été autorisé à séjourner en France que le temps nécessaire au traitement de sa maladie et ne justifie d'aucune intégration particulière sur le sol français, le récapitulatif fiscal de la période 2018 faisant état de revenus extrêmement faibles, ne produit aucune pièce de nature à établir qu'il entretiendrait des liens avec les enfants et leur mère et qu'il contribuerait à leur entretien et leur éducation. Dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le moyen tiré par M. B... de ce que le refus de titre de séjour attaqué porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision et méconnaîtrait par suite les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté.

8. En cinquième lieu, pour les motifs exposés ci-dessus, le moyen tiré par M. B... de ce que le refus de séjour attaqué porterait atteinte aux droits de ses enfants, tels qu'ils sont protégés par l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant, doit être écarté.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour doit être écarté.

10. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

11. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 7 et 8, il y a lieu d'écarter les moyens tirés de la méconnaissance des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

12. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

13. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 5, 7 et 8, il y a lieu d'écarter les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

14. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de demander avant dire droit à l'Office français de l'immigration et de l'intégration de produire le dossier de l'appelant, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 20 février 2020 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme D..., présidente-assesseure,

Mme Florence Madelaigue, premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 20 mai 2020.

Le président,

Éric Rey-Bèthbéder

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 19BX03239 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 19BX03239
Date de la décision : 20/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : DUJARDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-05-20;19bx03239 ?
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