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09/02/2021 | FRANCE | N°19BX02627

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 09 février 2021, 19BX02627


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. M... I... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 17 décembre 2018 par lequel le préfet de la Guadeloupe a refusé de lui délivrer

un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1900055 du 21 mai 2019, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 juin 2019, M. I..., représenté pa

r Me F...,

doit être regardé comme demandant à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ainsi que l'arrêté...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. M... I... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 17 décembre 2018 par lequel le préfet de la Guadeloupe a refusé de lui délivrer

un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1900055 du 21 mai 2019, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 juin 2019, M. I..., représenté par Me F...,

doit être regardé comme demandant à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ainsi que l'arrêté du préfet de la Guadeloupe

du 17 décembre 2018 ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Guadeloupe de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement motive insuffisamment la réponse au moyen relatif à l'incompétence du signataire ;

- en l'absence de justification de l'empêchement du préfet, l'arrêté est entaché d'incompétence ;

- il justifie, par les pièces produites, de sa vie privée et familiale en Guadeloupe avec son épouse et leur fils depuis 14 ans à la date de l'arrêté ; il subvient aux besoins de sa famille, est inconnu des services de police et de gendarmerie, dispose d'une promesse d'embauche et n'a plus d'attaches en Haïti ; son fils est scolarisé au collège ; ainsi, l'arrêté méconnaît les stipulations des articles 6 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique,

sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. I..., de nationalité haïtienne, a déclaré être entré en France le 13 juin 2005. Sa demande d'asile, puis sa demande de réexamen, ont été rejetées par décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides des 21 février 2006 et 10 mai 2007. Il a fait l'objet d'une décision de refus de titre de séjour assortie d'une mesure d'éloignement par un arrêté du 8 août 2014. Le 1er octobre 2018, il a sollicité à nouveau la délivrance d'un titre de séjour. Par un arrêté du 17 décembre 2018, le préfet de la Guadeloupe a rejeté cette demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. I... relève appel du jugement du 21 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Les premiers juges ont suffisamment répondu au moyen tiré de l'incompétence du signataire en mentionnant les références de l'arrêté lui donnant délégation et de sa publication, et en relevant qu'il appartenait au requérant d'établir que les conditions d'exercice de cette délégation n'étaient pas réunies. La critique de cette dernière réponse relève du bien-fondé,

et non de la régularité du jugement.

Sur la légalité de l'arrêté du préfet :

3. Par un arrêté du 28 mai 2018 publié au recueil des actes administratifs

spécial n° 971-2018-038 du 29 mai 2018, le préfet de la Guadeloupe a donné délégation

à M. K... C..., sous-préfet de l'arrondissement de Pointe-à-Pitre, à l'effet de signer, dans la limite de cet arrondissement, les arrêtés et décisions relevant de l'entrée et du séjour des étrangers, et en particulier les refus de titre de séjour assortis d'une obligation de quitter le territoire français. Il ressort des pièces du dossier que M. I..., domicilié dans cet arrondissement, a déposé sa demande auprès des services de la sous-préfecture. Par suite, la compétence de M. C... pour prendre l'arrêté contesté n'était pas subordonnée à un empêchement du préfet.

4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française

est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la

République ; / (...)." Pour l'application des stipulations et dispositions précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

5. Si M. I... fait valoir qu'il réside en France depuis 2005, il ne produit aucune pièce pour en justifier au titre des années 2008 et 2010, et les pièces relatives aux autres années, peu nombreuses, ne démontrent ni une présence continue, ni l'existence d'une vie sociale ou familiale. Alors que l'arrêté du 8 août 2014 rejetait sa demande de titre de séjour au motif qu'il avait l'essentiel de ses attaches familiales dans son pays d'origine, et particulièrement un enfant mineur, le requérant, qui ne conteste pas que son épouse de même nationalité se trouve également en situation irrégulière, n'apporte aucune précision sur la date d'entrée en France de son fils né en Haïti le 29 novembre 2002, dont il justifie seulement qu'il y était scolarisé au cours de l'année 2017-2018. Dans ces circonstances, et alors que la date d'entrée en France de son épouse n'est pas davantage précisée, M. I..., alors même qu'il a présenté une promesse d'embauche en contrat à durée indéterminée dans une entreprise " Bacs et jardins ", ne justifie pas en France d'une vie privée et familiale d'une durée telle qu'elle puisse faire regarder l'arrêté contesté comme contraire aux stipulations et dispositions précitées, ni comme entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

6. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, relatives au droit à un procès équitable, n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.

7. Il résulte de ce qui précède que M. I... n'est pas fondé à se plaindre

de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté

sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre

des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. I... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. M... I... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée au préfet de la Guadeloupe.

Délibéré après l'audience du 12 janvier 2021 à laquelle siégeaient :

Mme J... H..., présidente,

Mme A... E..., présidente-assesseure,

Mme D... G..., conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 février 2021.

La rapporteure,

Anne E...

La présidente,

Catherine H...La greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX02627


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX02627
Date de la décision : 09/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme anne MEYER
Rapporteur public ?: Mme BEUVE-DUPUY
Avocat(s) : DIALLO

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-02-09;19bx02627 ?
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