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15/12/2021 | FRANCE | N°19BX00809

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 15 décembre 2021, 19BX00809


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau, d'une part, d'annuler la décision du maire de Bourg-de-Bigorre du 30 juin 2017 refusant de procéder au renouvellement de son contrat à durée déterminée, d'autre part, de condamner la commune de Bourg-de-Bigorre à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation des préjudices financier et moral que lui a causés cette décision.

Par un jugement n° 1702418, 1800844 du 28 décembre 2018, le tribunal administra

tif de Pau a annulé cette décision du 30 juin 2017 et a condamné la commune de Bour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau, d'une part, d'annuler la décision du maire de Bourg-de-Bigorre du 30 juin 2017 refusant de procéder au renouvellement de son contrat à durée déterminée, d'autre part, de condamner la commune de Bourg-de-Bigorre à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation des préjudices financier et moral que lui a causés cette décision.

Par un jugement n° 1702418, 1800844 du 28 décembre 2018, le tribunal administratif de Pau a annulé cette décision du 30 juin 2017 et a condamné la commune de Bourg-de-Bigorre à verser à Mme A... la somme de 4 500 euros en réparation de ses préjudices.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 février 2019, la commune de Bourg-de-Bigorre, représentée par Me Bedouret, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 28 décembre 2018 ;

2°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision de non renouvellement est suffisamment motivée et qu'elle n'était pas tenue de communiquer son dossier à l'intéressée dès lors que cette décision ne revêt pas un caractère disciplinaire ;

- elle justifie de manquements de Mme A... dans sa manière de servir ;

- la décision annulée n'est pas entachée d'un détournement de pouvoir ;

- Mme A... ne justifie ni de la réalité ni du montant de ses préjudices.

Par un mémoire enregistré le 29 mai 2019, Mme A..., représentée par Me Fellonneau, conclut au rejet de la requête, à la réformation du jugement attaqué en tant qu'il n'a pas condamné la commune de Bourg-de-Bigorre à lui verser une somme de 15 000 euros en réparation de ses préjudices et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la commune au titre des frais exposés pour l'instance.

Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés et qu'elle justifie du montant de son préjudice.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Manuel Bourgeois ;

- et les conclusions de Mme Isabelle Le Bris, rapporteure publique

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... a conclu un contrat à durée déterminée avec la commune de Bourg-de-Bigorre (Hautes-Pyrénées) pour assurer les fonctions " d'aide, surveillance, repos, cantine, ménage " à l'école primaire pendant le temps scolaire et péri-scolaire au titre de l'année scolaire 2012-2013. Ce contrat a été renouvelé à plusieurs reprises jusqu'au 31 août 2017 mais, par une décision du 30 juin 2017, la maire de la commune de Bourg-de-Bigorre a décidé de ne pas procéder à un nouveau renouvellement du contrat de Mme A.... La commune de Bourg-de-Bigorre relève appel du jugement du 28 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Pau a annulé cette décision du 30 juin 2017 et a condamné la commune de Bourg-de-Bigorre à verser à Mme A... la somme de 4 500 euros en réparation des préjudices que lui a causés l'illégalité de cette décision. Par la voie de l'appel incident, cette dernière demande à la cour de réformer ce jugement en tant qu'il n'a pas condamné la commune à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation des mêmes préjudices.

Sur la légalité de la décision du 30 juin 2017 :

2. Un agent public qui a été recruté par un contrat à durée déterminée ne bénéficie ni d'un droit au renouvellement de son contrat ni, à plus forte raison, d'un droit au maintien de ses clauses si l'administration envisage de procéder à son renouvellement. Toutefois, l'administration ne peut légalement décider, au terme de son contrat, de ne pas le renouveler ou de proposer à l'agent, sans son accord, un nouveau contrat substantiellement différent du précédent, que pour un motif tiré de l'intérêt du service. Un tel motif s'apprécie au regard des besoins du service ou de considérations tenant à la personne de l'agent. Dès lors qu'elles sont de nature à caractériser un intérêt du service justifiant le non renouvellement du contrat, la circonstance que des considérations relatives à la personne de l'agent soient par ailleurs susceptibles de justifier une sanction disciplinaire ne fait pas obstacle, par elle-même, à ce qu'une décision de non renouvellement du contrat soit légalement prise, pourvu que l'intéressé ait alors été mis à même de faire valoir ses observations.

3. En l'occurrence la commune soutient que la décision de ne pas procéder au renouvellement du contrat de travail de Mme A... était justifiée par des manquements dans la manière de servir de cette dernière, notamment un refus de déférer aux ordres de son autorité hiérarchique, un manque de sérieux et des manquements à son devoir de réserve. A l'appui de ces allégations, elle produit un extrait du cahier des incidents tenu par la directrice de l'école, l'attestation d'une ajointe administrative de la commune indiquant que la mère de Mme A... s'est présentée à la mairie pour contester de façon véhémente les motifs de la décision de non renouvellement du 30 juin 2017, une attestation établie pour les besoins de la cause le 4 février 2019 par le vice-président de la communauté de communes faisant état des doléances de la maire de Bourg-de-Bigorre et d'élus du territoire concernant le refus de Mme A... de participer aux animations de TAP et ses manquements répétés à son devoir de réserve, qui auraient été à l'origine du départ en mutation d'une enseignante, enfin, une attestation non datée établie par le fournisseur des repas de la cantine et indiquant que, le 30 mai 2017, Mme A... aurait omis de l'avertir de l'absence des élèves ce jour, laquelle aurait entraîné une facturation inutile de quarante repas.

4. Toutefois, il ressort de cet extrait du cahier des incidents, non daté, que la directrice de l'école y soutenait Mme A... suite à sa convocation par Mme Le maire. En outre, la commune ne peut pas utilement se prévaloir du comportement de la mère de Mme A..., postérieurement à la décision litigieuse, pour justifier du bien-fondé de cette décision tandis que l'attestation établie par le vice-président de la communauté de communes plusieurs années après des faits dont il précise n'avoir eu connaissance que par ouï-dire ne présente pas un caractère suffisamment probant. Par ailleurs, si la dernière de ces allégations permet effectivement de caractériser un manquement de l'intéressée dans sa manière de servir, le caractère ponctuel et isolé de ce manquement ne permet pas, à lui seul, de justifier un motif tiré de l'intérêt du service. Enfin, la commune n'établit pas que " la violence verbale " dont pourrait faire preuve la mère de Mme A... entretiendrait un climat nauséabond au sein de l'école du village, qui aurait fait obstacle à la production de témoignages attestant des manquements de sa fille.

5. Il résulte de ce qui précède que la commune n'est pas fondée à soutenir que c'est tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont annulé, pour ce motif, la décision litigieuse du 30 juin 2017.

Sur les préjudices :

6. Lorsqu'un agent public sollicite le versement d'une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité de la décision de ne pas renouveler son contrat, il appartient au juge de plein contentieux, forgeant sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties, de lui accorder une indemnité versée pour solde de tout compte et déterminée en tenant compte notamment de la nature et de la gravité de l'illégalité, de l'ancienneté de l'intéressé, de sa rémunération antérieure et des troubles dans ses conditions d'existence.

7. Il résulte de ce qui précède que la décision de ne pas renouveler le contrat de travail de Mme A... n'est pas justifiée par l'intérêt du service. En outre, les parties ne contestent plus, en appel, que cette décision a causé à Mme A... un préjudice économique d'un montant de 2 000 euros. Enfin et ainsi qu'il a été dit précédemment, celle-ci était employée depuis cinq années par la commune. Dans ces conditions, et contrairement à ce que soutient la commune, la décision de ne pas renouveler le contrat de travail de Mme A... lui a nécessairement causé un préjudice moral. En revanche, Mme A..., qui se borne à faire valoir que la décision de non renouvellement est fondée sur des manquements à ses obligations professionnelles qui ne sont, pour l'essentiel, pas établis mais dont le conseil d'école a été informé et que cette décision présente un caractère arbitraire, n'établit pas que les premiers juges auraient fait une inexacte appréciation du montant de son préjudice moral en le fixant à la somme de 2 500 euros.

8. Il résulte de tout ce qui précède que ni la commune de Bourg-de-Bigorre ni Mme A... ne sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont condamné cette commune à verser à Mme A... une somme de 4 500 euros en réparation de ses préjudices. Par suite, tant la requête que les conclusions incidentes de Mme A... doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Bourg-de-Bigorre une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête est rejetée.

Article 2 : Les conclusions incidentes de Mme A... tendant à la réformation du jugement attaqué sont rejetées.

Article 3 : La commune de Bourg-de-Bigorre versera à Mme A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié Mme B... A... et à de la commune de Bourg-de-Bigorre.

Délibéré après l'audience du 29 novembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Didier Artus, président,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 décembre 2021.

Le rapporteur,

Manuel Bourgeois

Le président,

Didier ArtusLa greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au préfet des Hautes-Pyrénées en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°19BX00809


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX00809
Date de la décision : 15/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-12-03-02 Fonctionnaires et agents publics. - Agents contractuels et temporaires. - Fin du contrat. - Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : M. ARTUS
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : CABINET FELLONNEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-12-15;19bx00809 ?
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