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22/12/2021 | FRANCE | N°21BX00851

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 22 décembre 2021, 21BX00851


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 8 septembre 2020 par lequel la préfète de l'Ariège a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de douze mois et l'a informée de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen pour la durée de cette décision.

Par un jugement n° 2004836 du 13 novembre 2020, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Toul

ouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 8 septembre 2020 par lequel la préfète de l'Ariège a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de douze mois et l'a informée de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen pour la durée de cette décision.

Par un jugement n° 2004836 du 13 novembre 2020, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 1er mars 2021 et le 22 novembre 2021, Mme C..., représentée par Me Kosseva-Venzal, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 13 novembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté de la préfète de l'Ariège du 8 septembre 2020 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de l'Ariège, d'une part, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour et, d'autre part, de prendre toute mesure propre à mettre fin au signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens ainsi que la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'une omission à statuer relative au moyen tiré du défaut de base légale ;

- l'arrêté est entaché d'un vice de procédure car il méconnaît son droit d'être entendu ;

- il est entaché d'un défaut de base légale ;

- il est entaché d'une erreur de droit, le préfet s'étant estimé en situation de compétence liée, et d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- il méconnaît les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 novembre 2021, la préfète de l'Ariège conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par Mme C... n'est fondé.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 janvier 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. D... B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante géorgienne, est entrée en France le 18 février 2019 pour solliciter l'asile. Sa demande ayant été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en procédure accélérée le 30 avril 2019, la préfète de l'Ariège a pris à son encontre une décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en date du 2 septembre 2019. Par un nouvel arrêté du 8 septembre 2020, la préfète de l'Ariège a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de douze mois. Mme C... relève appel du jugement rendu par la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Toulouse le 13 novembre 2020, ayant rejeté ses conclusions contre cette dernière décision.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ne ressort ni des mentions du jugement attaqué, ni des écritures de première instance que Mme C... aurait soulevé à l'encontre de l'arrêté préfectoral du 8 septembre 2020, un moyen tiré de ce que la décision d'interdiction de retour sur le territoire français serait dépourvue de base légale eu égard à l'ancienneté de la décision portant obligation de quitter le territoire. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir qu'en ne répondant pas à un tel moyen, le jugement serait entaché d'une omission à statuer.

Sur la légalité de l'arrêté du 8 septembre 2020 :

3. En premier lieu, Mme C... reprend en appel le moyen, qu'elle avait invoqué en première instance et tiré de ce que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français aurait méconnu son droit d'être entendue. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulouse.

4. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme C... a fait l'objet d'un arrêté du 2 septembre 2019 par lequel la préfète de l'Ariège lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. La légalité de cette décision a été confirmée par un jugement du tribunal administratif du 10 décembre 2019. Mme C... qui s'est maintenue sur le territoire en dépit de cette décision n'est pas fondée à soutenir que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français serait, eu égard au délai écoulé depuis l'édiction de l'arrêté du 2 septembre 2019, entachée d'un défaut de base légale.

5. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète de l'Ariège aurait entaché son arrêté d'un défaut d'examen particulier de la situation de Mme C....

6. En quatrième lieu, aux termes des dispositions alors codifiées au III de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. (...) / Lorsque l'étranger ne faisant pas l'objet d'une interdiction de retour s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, l'autorité administrative prononce une interdiction de retour pour une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".

7. Il résulte de ces dispositions que, lorsque l'étranger s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, le préfet est tenu d'assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour. Ainsi qu'il a été dit précédemment, il ressort des pièces du dossier que Mme C... a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français le 2 septembre 2019, dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Toulouse du 10 décembre 2019 et qu'elle n'a pas été exécutée. Si Mme C... fait valoir qu'elle vit depuis juillet 2020, soit deux mois à la date de l'arrêté litigieux, avec un ressortissant marocain en situation régulière, dont elle attend un enfant et qu'elle s'est investie dans des activités bénévoles, notamment musicales, la préfète de l'Ariège n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées du III de l'article L. 511-1 en prenant à son encontre une interdiction de retour d'une durée de douze mois.

8. En dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

9. Eu égard aux éléments indiqués au point 7, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de douze mois porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de la préfète de l'Ariège du 8 septembre 2020. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, d'astreinte ainsi que celles tendant, d'une part, au paiement des entiers dépens du procès, lequel au demeurant n'en comporte aucun, et, d'autre part, à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise à la préfète de l'Ariège.

Délibéré après l'audience du 29 novembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Karine Butéri, présidente,

Mme Sylvie Cherrier, première conseillère,

M. Olivier Cotte, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 décembre 2021.

Le rapporteur,

Olivier B...

La présidente,

Karine Butéri

La greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21BX00851


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX00851
Date de la décision : 22/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BUTERI
Rapporteur ?: M. Olivier COTTE
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : KOSSEVA-VENZAL

Origine de la décision
Date de l'import : 24/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-12-22;21bx00851 ?
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