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06/04/2023 | FRANCE | N°22BX01808

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 06 avril 2023, 22BX01808


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 17 août 2021 par lequel la préfète de la Gironde lui a retiré sa carte de résident pour la remplacer par une carte de séjour d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 2105400 du 5 mai 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 juillet 2022, M. A... hrouy, représenté par Me Georges, demande à la cour :

1°) d'a

nnuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 5 mai 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 ao...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 17 août 2021 par lequel la préfète de la Gironde lui a retiré sa carte de résident pour la remplacer par une carte de séjour d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 2105400 du 5 mai 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 juillet 2022, M. A... hrouy, représenté par Me Georges, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 5 mai 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 août 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde, à titre principal, de lui délivrer une carte de résident, et à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision lui retirant sa carte de résident est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 432-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : il est gérant de la société Renobat depuis 1997 et emploie depuis plus de quinze ans neuf salariés ; il n'avait jamais enfreint auparavant la législation du travail ; il a embauché M. D... sur présentation de sa carte de séjour italienne, ce dernier ayant menti sur la possibilité pour lui de travailler en France et affirmé être dans l'attente de la délivrance imminente d'un numéro de sécurité sociale ; il a transmis au comptable de la société les demandes d'embauche et celui-ci a procédé aux déclarations relatives à l'embauche d'un salarié ; il n'a été informé que le 18 mai 2020 de la méconnaissance de l'article L. 432-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors que M. D... était embauché dans sa société depuis 2015 ; il n'a fait preuve d'aucune complaisance à l'égard de M. D..., qui a fait l'objet de sanctions disciplinaires pour ses absences ; en outre, l'infraction au code de la route qu'il a commise n'entre pas dans le champ d'application de l'article L. 432-11 du code précité ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : il est entré en France en 1981 et est titulaire d'une carte de résident depuis 36 ans ; son épouse est titulaire d'une carte de résident d'une durée de dix ans et deux de ses enfants sont français et vivent en France ; il ne constitue pas une menace à l'ordre public eu égard à l'ancienneté et la faible importance de l'infraction au code de la route qu'il a commise ; le remplacement de sa carte de résident par une simple carte de séjour d'une durée d'un an met en cause la pérennité de sa situation et ne permet pas de garantir efficacement le respect de son droit à une vie privée et familiale.

Par un mémoire enregistré le 20 décembre 2022, la préfète de la Gironde conclut

au rejet de la requête.

Elle renvoie aux termes de son mémoire de première instance, qu'elle produit.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant marocain, est entré en France en juin 1981. Il s'est vu délivrer une carte de résident valable du 27 décembre 1984 au 26 décembre 1994. Celle-ci a été renouvelée sans interruption, en dernier lieu par une carte de résident valable du 1er décembre 2015 au 30 novembre 2025. Par un arrêté du 17 août 2021, la préfète de la Gironde lui a retiré cette carte de résident, sur le fondement de l'article L. 432-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour la remplacer par une carte de séjour temporaire d'une durée d'un an portant la mention " vie privée et familiale ". Par le jugement n° 2105400 du 5 mai 2022 dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 août 2021.

Sur la légalité de l'arrêté du 17 août 2021 :

2. Aux termes de l'article L. 432-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout employeur titulaire d'une carte de résident peut se la voir retirer s'il a occupé un travailleur étranger en violation des dispositions de l'article L. 8251-1 du code du travail. ". Aux termes de l'article L. 8251-1 du code du travail : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France. (...) ". L'article R. 5221-41 du même code précisait : " Pour s'assurer de l'existence de l'autorisation de travail d'un étranger qu'il se propose d'embaucher, en application de l'article L. 5221-8, l'employeur adresse au préfet du département du lieu d'embauche ou, à Paris, au préfet de police une lettre datée, signée et recommandée avec avis de réception ou un courrier électronique, comportant la transmission d'une copie du document produit par l'étranger. A la demande du préfet, il peut être exigé la production par l'étranger du document original. "

3. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est gérant de la société à responsabilité limitée Renobat depuis 1997 et que le 12 juillet 2016, un contrat de travail à durée indéterminée a été conclu entre M. G... D..., de nationalité tunisienne, et la société de l'intéressé alors que M. D... ne disposait pas d'autorisation de travail à cette date. M. B... a ainsi embauché un salarié non autorisé à travailler. Si l'appelant soutient que M. D... a menti sur la possibilité pour lui de travailler en France au vu d'une carte de séjour italienne et d'une simple affirmation selon laquelle il aurait été dans l'attente de la délivrance imminente " d'un numéro de sécurité sociale ", un tel numéro ne vaut pas autorisation de travail et il appartenait à l'employeur de procéder aux vérifications utiles rapidement, sans qu'il puisse échapper à sa responsabilité en invoquant une prétendue délégation de formalités à son comptable, qui reste un préposé. Au demeurant, il ressort des pièces qu'il produit que M. B... a signé lui-même une proposition de prolongation du contrat de travail de son salarié sans aucunement évoquer l'autorisation de travail nécessaire, qu'il lui appartenait de vérifier à nouveau à cette occasion. Dans ces conditions, ni le paiement de cotisations sociales pendant cinq ans, ni la circonstance que la société Renobat n'a été informée par la préfecture de la méconnaissance des dispositions précitées que le 18 mai 2020 ne suffisent à établir sa bonne foi. En outre, la préfète de la Gironde fait valoir que M. B... avait complété une demande d'autorisation de travail le 25 juillet 2017 pour le compte de M. D..., et a produit ce document devant le tribunal. Contrairement à ce que soutient l'appelant, il était donc informé de ses obligations d'employeur. Ainsi, la préfète de la Gironde, en retirant à M. B... sa carte de résident pour la remplacer par un titre provisoire, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 432-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des conséquences qu'emporte sa décision.

4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits de libertés d'autrui ".

5. La décision prise en application de l'article L. 432-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lorsqu'elle est accompagnée de la délivrance d'un autre titre de séjour, n'a ni pour objet ni pour effet de mettre fin au droit au séjour de l'étranger concerné. Si la préfète de la Gironde a, par son arrêté du 17 août 2021, retiré la carte de résident de M. B..., elle a, par ce même arrêté, délivré à celui-ci une carte de séjour temporaire d'une durée d'un an. Par suite, le requérant, qui ne démontre aucune atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, n'est pas fondé à soutenir que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales auraient été méconnues.

6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... B..., et au ministre de l'intérieur

et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 14 mars 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, présidente,

Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,

M. Olivier Cotte, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 avril 2023.

La présidente-assesseure,

Anne MeyerLa présidente, rapporteure,

Catherine E...

La greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22BX01808


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX01808
Date de la décision : 06/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Catherine GIRAULT
Rapporteur public ?: Mme GALLIER
Avocat(s) : GEORGES

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-04-06;22bx01808 ?
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