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14/09/2023 | FRANCE | N°21BX03348

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 14 septembre 2023, 21BX03348


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler les arrêtés du 15 juin 2021 par lequel le préfet de la Charente-Maritime lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et l'a assigné à résidence dans le département de la Charente-Maritime pour une durée de cinq mois.

Par un jugement n° 2101567 et 2101568 du 8 juillet 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Pr

océdure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 août 2021, M. B..., représenté ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler les arrêtés du 15 juin 2021 par lequel le préfet de la Charente-Maritime lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et l'a assigné à résidence dans le département de la Charente-Maritime pour une durée de cinq mois.

Par un jugement n° 2101567 et 2101568 du 8 juillet 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 août 2021, M. B..., représenté par Me Makpawo, demande à la cour :

1°) de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 8 juillet 2021 ;

3°) d'annuler les arrêtés du 15 juin 2021 ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Charente-Maritime de réexaminer sa situation dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi

du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- les arrêtés en litige ont été pris au terme d'une procédure irrégulière : il n'a pas été assisté d'un interprète lors de sa retenue pour vérification de son droit au séjour par les services de police le 14 juin 2021, en méconnaissance de l'article L. 813-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors qu'il ne parle ni n'écrit correctement le français ; il a, en outre, été privé de la possibilité de fournir les justificatifs relatifs à sa situation ;

- ils sont entachés d'erreurs de fait dès lors qu'ils indiquent qu'il n'a pas déclaré sa fille, C... B..., aux services de police lors de son audition ; ces arrêtés indiquent d'ailleurs qu'il a bien déclaré avoir deux enfants nés en France ;

- ils méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne

de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : il réside en France depuis le 1er février 2017 et entretient une relation de longue durée avec Mme D..., avec laquelle il a eu deux enfants ; par ailleurs, il souffre d'une maladie chronique pour laquelle il est actuellement suivi au centre hospitalier universitaire (CHU) de Poitiers ; son assignation

à résidence à La Rochelle ferait obstacle à ce suivi ;

- ils méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : les enfants qu'il a eus avec Mme D..., alors âgés de 2 ans et six mois, sont sous son entière responsabilité dès lors que leur mère est sujette à des crises d'angoisse et souffre de pathologies psychiatriques ; en outre, il établit contribuer

à l'éducation et à l'entretien des enfants.

Par une ordonnance du 14 mars 2023, la clôture de l'instruction a été fixée

au 14 avril 2023 à 12 heures.

Par une décision du 2 septembre 2021, M. B... a été admis à l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant guinéen, est entré en France le 1er février 2017.

Le 22 mars 2017, il a présenté une demande d'asile, qui a été rejetée par l'Office français

de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 17 décembre 2018, puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 30 août 2019. Ayant sollicité un titre de séjour en raison de son état de santé, il s'est vu délivrer ce titre sur le fondement du 11° de

l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, valable

du 20 janvier au 19 avril 2020. Par un arrêté du 2 novembre 2020, la préfète de la Vienne

a refusé de renouveler ce titre de séjour, a fait obligation à M. B... de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi. Le 14 juin 2021, M. B... a été interpellé par les services de police de La Rochelle pour des faits d'infraction routière. Par un arrêté du 15 juin 2021, le préfet de la Charente-Maritime lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Par un arrêté du même jour, le même préfet l'a assigné à résidence dans le département de la Charente-Maritime. M. B... a demandé l'annulation de ces arrêtés. Par un jugement n° 2101567 et 2101568 du 8 juillet 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. M. B... relève appel de ce jugement.

Sur les conclusions à fin d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Par une décision du 2 septembre 2021, M. B... a été admis à l'aide juridictionnelle totale. Ainsi, ses conclusions tendant à son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet.

Sur la légalité des arrêtés du 15 juin 2021 :

3. Il ressort du procès-verbal de son audition par les services de police

du 14 juin 2021 que M. B..., s'il a mentionné qu'il ne l'écrivait pas, a indiqué parler le français et a renoncé au concours d'un interprète. Il ressort en outre du dossier qu'il a déposé à la préfecture le 23 juin 2020 pour le renouvellement de son titre de séjour, alors qu'il était en France depuis plus de trois ans, qu'il a indiqué parler le français. En outre, il a répondu aux questions qui lui ont été posées lors de son audition par les services de police. Enfin, s'il soutient qu'il n'a pas été mis en mesure de fournir les justificatifs relatifs à sa situation familiale et à son état de santé, il ne démontre pas devant la cour qu'il aurait sollicité un délai pour ce faire ni qu'il aurait disposé d'autres pièces que celles qu'il a produites à la juridiction, lesquelles sont insuffisantes pour établir la réalité de sa relation avec Mme D... et sa contribution à l'éducation de leurs enfants. Dans ces conditions, ce moyen ne peut qu'être écarté.

4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré sur le territoire français le 1er février 2017. Il a ainsi passé la majeure partie de sa vie en Guinée, où résident ses parents, deux de ses enfants nés en 2013 et 2016, son frère et ses trois sœurs. L'intéressé produit des actes de naissance pour deux enfants nés en France le 26 août 2019 et le 12 février 2021. Toutefois, les factures qu'il produit pour démontrer qu'il participe à leur entretien sont postérieures de 15 jours au moins au jugement attaqué, et, au demeurant, celles concernant l'achat de vêtements pour enfants ne couvrent qu'une période de trois jours. En outre, l'attestation du 22 juillet 2021 qu'il verse au dossier, rédigée par un compatriote en situation régulière, est postérieure à la décision en litige et peu circonstanciée. S'il établit que l'une de ses deux enfants nés en France a obtenu l'asile, cette circonstance est postérieure à la décision en litige. L'attestation médicale selon laquelle Mme D..., la mère de ses enfants nés en France, présente des épisodes de malaises avec chutes, agressivité et fugues est postérieure à la décision et ne fait que retranscrire les déclarations de l'intéressé. Enfin, M. B..., qui ne justifie pas d'une communauté de vie avec celle-ci, n'établit pas l'existence d'une relation stable. Par ailleurs, s'il fait valoir qu'il souffre d'une maladie chronique, les certificats médicaux qu'il produit n'indiquent pas qu'un suivi médical de son diabète et un traitement adaptés à son état de santé seraient indisponibles dans son pays d'origine. L'intéressé n'établit pas que la mesure d'assignation à résidence dans le département de la Charente-Maritime serait incompatible avec son état de santé et l'empêcherait de se rendre à des rendez-vous médicaux qui auraient été programmés à Poitiers et ne pourraient faire l'objet d'une demande d'autorisation de sortir du département. Dans ces conditions, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés.

6. Si M. B... fait valoir que les arrêtés en litige sont entachés d'erreurs de fait en ce qu'ils énoncent qu'il n'a pas mentionné l'existence de sa fille, C... B..., ces erreurs sont sans incidence sur la légalité de ces arrêtés dès lors qu'il résulte des termes de ces décisions que le préfet aurait pris les mêmes décisions s'il n'avait pas retenu cette omission.

7. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. B... tendant à son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : La requête de M. B... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Charente-Maritime.

Délibéré après l'audience du 29 août 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, présidente,

Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,

M. Olivier Cotte, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 septembre 2023.

La présidente-assesseure,

Anne Meyer

La présidente, rapporteure,

Catherine E...

La greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21BX03348


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX03348
Date de la décision : 14/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Catherine GIRAULT
Rapporteur public ?: Mme ISOARD
Avocat(s) : RABESANDRATANA

Origine de la décision
Date de l'import : 24/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-09-14;21bx03348 ?
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