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22/11/2005 | FRANCE | N°05DA00745

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation a 3, 22 novembre 2005, 05DA00745


Vu la requête, enregistrée le 20 juin 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Willie X, demeurant ..., par Me Corbanesi ; M. X demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0204834 du 19 avril 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du

24 octobre 2002 par laquelle le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au préfet du Nord de lui délivrer le titre sollicité ;<

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3°) d'enjoindre, sou...

Vu la requête, enregistrée le 20 juin 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Willie X, demeurant ..., par Me Corbanesi ; M. X demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0204834 du 19 avril 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du

24 octobre 2002 par laquelle le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au préfet du Nord de lui délivrer le titre sollicité ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ladite décision ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet du Nord de lui délivrer le titre de séjour sollicité ;

Il soutient que, contrairement à ce qu'a estimé le Tribunal administratif, la décision de refus de séjour attaquée a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en effet, la circonstance que ses parents vivent toujours au Cameroun ne saurait être la seule prise en considération, dès lors qu'il n'a plus aucune relation, même épistolaire avec ceux-ci ; qu'en revanche, il est fondé à se prévaloir de ce que sa vie privée et familiale se situe en France, où il vit depuis plus de six ans et où réside son oncle qui l'héberge depuis sa majorité et pourvoit tant à son entretien qu'à son éducation ; qu'il poursuit d'ailleurs en France une scolarité exemplaire ; qu'enfin, la décision attaquée a été prise sur une procédure irrégulière, le préfet ayant omis de consulter la commission du titre de séjour, alors que l'exposant était en droit de se prévaloir de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'il remplissait effectivement les conditions fixées par les articles 12 bis et 15 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu l'ordonnance en date du 20 juillet 2005, par laquelle le président délégué par le président de la Cour administrative d'appel de Douai fixe la clôture de l'instruction au 4 novembre 2005 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 septembre 2005, présenté par le préfet du Nord ; il conclut au rejet de la requête ; il soutient que les attaches familiales du requérant, au sens des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, sont situées au Cameroun, les liens unissant l'intéressé avec son oncle n'étant pas suffisamment caractérisés ; que M. X n'est nullement isolé dans son pays d'origine où résident, selon les renseignements qu'il a lui-même portés dans sa demande de titre de séjour, ses parents ; que s'il soutient ne plus entretenir aucun lien avec ces derniers, il ne l'établit pas ; que, par ailleurs, le moyen tiré du défaut de consultation de la commission du titre de séjour est inopérant dès lors que M. X ne remplit aucune des conditions de fond permettant la délivrance d'un titre de séjour et ne peut davantage se prévaloir des stipulations protectrices de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la décision en date du 20 octobre 2005 par laquelle le président du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accorde à M. X l'aide juridictionnelle totale pour la présente procédure ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 novembre 2005 à laquelle siégeaient Mme Helmholtz, président de chambre, Mme Signerin-Icre, président-assesseur et

M. Bauzerand, premier conseiller :

- le rapport de Mme Signerin-Icre, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Le Goff, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Considérant que, par la décision attaquée en date du 24 octobre 2002, le préfet du Nord a rejeté la demande de titre de séjour dont l'avait saisi M. X, ressortissant camerounais né en 1983 et entré en France en 1998, aux motifs, notamment, que faute de justifier être l'enfant naturel ou légitime, ou l'enfant adopté du ressortissant français qui le prenait en charge, il n'entrait pas dans le champ d'application de l'article 15-2° de l'ordonnance du 2 novembre 1945, et que, célibataire et sans charge de famille en France, et non dépourvu d'attaches avec son pays d'origine où résidait sa mère, il ne remplissait pas davantage les conditions prévues pour obtenir un titre de séjour sur le fondement de l'article 12 bis 7° de la même ordonnance ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;

Considérant que si M. X se prévaut de la durée de son séjour en France, de la circonstance qu'il y est scolarisé depuis son arrivée, et des liens qui l'unissent à M. Y, son oncle, qui le prend en charge, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment de ce que le requérant ne résidait, à la date de la décision attaquée, que depuis quatre années en France, et eu égard à la nature des liens familiaux dont il fait état et à la circonstance qu'il ne justifie pas être isolé en cas de retour dans son pays, faute d'établir avoir rompu tout lien avec sa mère qui y réside, ladite décision ait porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'il suit de là que M. X n'est pas fondé à soutenir que cette décision serait intervenue en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 12 quater de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 modifiée, alors applicable : « Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (…). La commission est saisie par le préfet (…) lorsque celui-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article 12 bis ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné à l'article

15 (…) » ; qu'aux termes de l'article 12 bis de la même ordonnance du 2 novembre 1945 : « … la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : (…) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus » ;

Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que, contrairement à ce qu'il soutient,

les liens personnels et familiaux en France de M. X n'étaient pas tels que le refus d'autoriser son séjour ait pu porter à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs dudit refus ; que l'intéressé n'était pas, par suite, au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour temporaire en application des dispositions précitées de l'article 12 bis-7° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ; que le requérant n'apporte, en outre, aucun élément de nature à établir qu'il remplirait, comme il se borne à l'alléguer, les conditions fixées par les dispositions de l'article 15-2° de la même ordonnance ; que, par suite, le préfet du Nord n'était pas tenu, en vertu des dispositions précitées de l'article 12 quater de cette même ordonnance, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction assortie d'astreinte :

Considérant que l'article L. 911-1 du code de justice administrative dispose que : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. » ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : « Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet » ; que la présente décision, qui rejette la requête de M. X, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction assortie d'astreinte présentées par M. X doivent être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. Willie X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Willie X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

Copie sera transmise au préfet du Nord.

2

N°05DA00745


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 05DA00745
Date de la décision : 22/11/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: Mme Corinne Signerin-Icre
Rapporteur public ?: M. Le Goff
Avocat(s) : CORBANESI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2005-11-22;05da00745 ?
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