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10/03/2009 | FRANCE | N°08DA01353

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 10 mars 2009, 08DA01353


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 19 août 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, et régularisée par la production de l'original le 29 août 2008, présentée pour Mme Lila épouse , demeurant ..., par Me Hached ; Mme demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0801895 du 2 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 février 2008 du préfet du

Pas-de-Calais portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français à destination de l'Algéri

e, pays dont elle a la nationalité ;

2°) d'enjoindre audit préfet de lui délivrer...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 19 août 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, et régularisée par la production de l'original le 29 août 2008, présentée pour Mme Lila épouse , demeurant ..., par Me Hached ; Mme demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0801895 du 2 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 février 2008 du préfet du

Pas-de-Calais portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français à destination de l'Algérie, pays dont elle a la nationalité ;

2°) d'enjoindre audit préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » sous astreinte de 50 euros par jour de retard suivant la notification du présent arrêt ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, la réalité de la vie commune avec M. dès son arrivée sur le territoire français le 25 janvier 2004 est établie ; qu'ils se sont mariés le 23 septembre 2006 ; qu'en raison des risques de reconduite à la frontière dans le département de la Seine-Saint-Denis depuis septembre 2007, ils se sont installés ensemble à Saint-Omer dans le Pas-de-Calais ; que ce changement d'adresse ne constitue nullement une rupture de vie commune ; que la circonstance que Mme conserve des attaches familiales dans son pays d'origine constitue une menace pour elle ; qu'elle ne peut recourir à la procédure ordinaire de regroupement familial en raison des craintes pour sa sécurité en cas de retour en Algérie ; que le fait d'avoir épousé un autre homme que celui choisi pour elle par sa famille en Kabylie et d'avoir vécu en concubinage avec lui ne sera jamais admis par sa famille ; qu'elle produit trois attestations de sa soeur, d'une cousine et d'une amie proche qui confirment à quel point sa vie serait menacée si elle venait à retourner en Algérie même pour une courte durée ; que le préfet du Pas-de-Calais n'a pas tenu compte de cette situation exceptionnelle lors de l'examen de son dossier ; qu'elle produit également trois attestations de personnes résidant en Algérie, son frère, un de ses amis et celle d'un voisin qui témoignent de ce que son père n'a jamais accepté son projet de mariage et l'a sans cesse menacée ; que c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que le préfet du Pas-de-Calais n'avait pas commis d'erreur manifeste d'appréciation et que sa décision ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que son époux dispose d'un contrat de travail à durée indéterminée, ce qui lui a permis d'obtenir un certificat de résidence d'une durée de dix ans ; que son retour en Algérie risque de lui être fatal ; qu'elle produit des attestations supplémentaires devant la Cour et, en particulier, d'un commissariat de police, qui démontrent qu'elle ne peut retourner dans son pays d'origine et que l'arrêté préfectoral viole les dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 décembre 2008, présenté par le préfet du

Pas-de-Calais, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'en application de l'article 4 de l'accord franco-algérien, peut-être exclu du regroupement familial un membre de la famille séjournant irrégulièrement sur le territoire français ; que la requérante est arrivée en France le

25 janvier 2004 sous couvert d'un passeport algérien revêtu d'un visa pour un séjour de 30 jours, valable entre le 25 décembre 2003 et le 8 février 2004 ; qu'elle n'a sollicité que le 30 octobre 2007 un titre de séjour, soit près de quatre ans après son entrée en France ; qu'elle pouvait bénéficier d'une procédure de regroupement familial à l'initiative de son époux ; que les pièces ne permettent pas d'établir la réalité d'une vie commune depuis son arrivée en France, ni des représailles qu'elle pourrait subir en cas de retour dans son pays d'origine ; que la requérante ne fournit pas d'explications précises quant à la domiciliation de M. et d'elle-même à des adresses distinctes courant l'année 2007, ni au sujet du bail établi au nom de M. à Saint-Omer le 31 août 2007 et ses bulletins de salaires attestant qu'il travaille à Saint-Denis en Seine-Saint-Denis ; qu'en raison des conditions de séjour de Mme en France et du caractère récent de son mariage, la décision ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni n'est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la vie personnelle de l'intéressée ; que les attestations totalement stéréotypées de proches faisant valoir les risques qu'elle encourrait en cas de retour en Algérie sont peu précises et datées, pour celles qui le sont, du 8 août 2008 ;

Vu le mémoire en réponse, enregistré le 29 décembre 2008, présenté pour Mme , qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ; elle insiste sur le caractère probant des pièces qu'elle a produites ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Elisabeth Rolin, premier conseiller, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public et, les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Hached, pour Mme et M. Y, pour le préfet du Pas-de-Calais ;

Considérant que Mme épouse de nationalité algérienne, fait appel du jugement du Tribunal administratif de Lille en date du 2 juillet 2008 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 février 2008 du préfet du Pas-de-Calais refusant son admission au séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français à destination du pays dont elle a la nationalité ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, que Mme , de nationalité algérienne, est entrée en France en 2004, à l'âge de 31 ans, munie d'un visa court séjour et s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire national après l'expiration de la durée de validité de ce document ; que si elle fait valoir qu'elle vit avec son époux, de nationalité algérienne, titulaire d'une carte de résident, avec lequel elle est mariée depuis le 23 septembre 2006, elle n'établit pas, par les pièces qu'elle produit, la réalité d'un concubinage de deux années avant ce mariage ; qu'il n'est pas contesté qu'elle ne serait pas dépourvue de toute famille dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, eu égard au caractère récent de son mariage à la date de la décision attaquée, le préfet du Pas-de Calais en refusant de lui délivrer un titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette mesure a été prise et n'a pas méconnu, par suite, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que si Mme soutient également qu'elle ne peut bénéficier d'une procédure de regroupement familial, alors même que son époux dispose d'un contrat de travail à durée indéterminée, car elle craint de retourner en Algérie où elle risque de subir des violences et menaces de la part de son père qui voulait la contraindre à un mariage forcé, il ne ressort pas, toutefois, des pièces du dossier qu'elle ne pourrait pas bénéficier de la protection des autorités de son pays d'origine lors de son retour en Algérie ; que, par suite, les témoignages qu'elle produit, datés de 2008, relatant des violences et menaces de son père qui se seraient produites en 2000 ne peuvent permettre, en tout état de cause, de regarder la décision attaquée comme violant les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni établir que l'arrêté préfectoral serait entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur la situation personnelle de Mme ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 février 2008 ; que ses conclusions à fin d'injonction doivent, en conséquence, également être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administratif :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à Mme la somme demandée de 2 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Lila et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera transmise au préfet du Pas-de-Calais.

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N°08DA01353 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08DA01353
Date de la décision : 10/03/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Mendras
Rapporteur ?: Mme Elisabeth Rolin
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS HACHED-EDJANG-BELHADI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2009-03-10;08da01353 ?
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