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05/10/2010 | FRANCE | N°09DA01584

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (bis), 05 octobre 2010, 09DA01584


Vu la requête, enregistrée le 9 novembre 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Bruno A, demeurant ..., par Me Coin ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702975 du 22 septembre 2009 par lequel le magistrat désigné du Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de la décision en date du 30 octobre 2007 par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté la perte de l'ensemble des points de son permis de conduire et, d'autre part, des décisions de retraits de quatre, trois, t

rois et deux points du capital dont était affecté son permis de cond...

Vu la requête, enregistrée le 9 novembre 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Bruno A, demeurant ..., par Me Coin ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702975 du 22 septembre 2009 par lequel le magistrat désigné du Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de la décision en date du 30 octobre 2007 par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté la perte de l'ensemble des points de son permis de conduire et, d'autre part, des décisions de retraits de quatre, trois, trois et deux points du capital dont était affecté son permis de conduire consécutivement aux infractions commises respectivement les 29 avril 2001, 5 et 26 février 2004 et 19 décembre 2006 ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui restituer les points illégalement retirés ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ont été méconnues ; que les décisions de retrait de points attaquées ne lui ont pas été notifiées par lettre avec accusé de réception ; que la réalité des infractions ayant entraîné les décisions de retrait de points attaquées n'est pas établie dès lors que le ministre de l'intérieur, à qui incombe cette preuve, n'en justifie pas ; que la décision 48 S procédant au retrait de son permis sans décision judiciaire définitive méconnaît son droit à un procès équitable ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 février 2010, présenté par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, qui conclut au rejet de la requête ; il fait valoir qu'il s'en remet aux mémoires qu'il a présentés devant les premiers juges ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Vladan Marjanovic, premier conseiller, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que le capital de points du permis de conduire de M. A a été réduit de 17 points suite aux infractions commises les 22 mars et 30 août 1999, 11 avril 2000, 29 avril 2001, 5 et 26 février 2004 et 19 décembre 2006 ; que le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales a constaté, par une décision référencée 48 S en date du 30 octobre 2007, la perte de validité du titre de conduite de M. A ; que ce dernier relève appel du jugement du 22 septembre 2009 en tant que le magistrat désigné du Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de la décision précitée du 30 octobre 2007 et, d'autre part, des décisions de retraits de quatre, trois, trois et deux points du capital dont était affecté son permis de conduire consécutivement aux infractions commises respectivement les 29 avril 2001, 5 et 26 février 2004 et 19 décembre 2006 ;

Sur les conclusions à fin d'annulation des décisions de retrait de points en litige :

En ce qui concerne les décisions consécutives aux infractions qui auraient été commises les 5 et 26 février 2004 et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant que, s'agissant des infractions commises les 5 et 26 février 2004, les mentions amende forfaitaire portées dans la décision ministérielle 48 S, ne sauraient être regardées comme établissant la réalité du paiement par M. A des amendes forfaitaires relatives aux infractions en cause, dès lors que le ministre de l'intérieur s'est abstenu de produire le relevé intégral d'information relatif à la situation du permis de conduire de l'intéressé ; que, par suite, M. A est fondé à demander l'annulation de ces décisions retirant six points du capital affecté à son permis de conduire consécutivement à ces infractions ;

En ce qui concerne les décisions de retrait de points consécutives aux infractions commises le 29 avril 2001 et le 19 décembre 2006 :

Considérant, en premier lieu, que M. A se borne à soutenir devant la Cour, comme il l'a fait devant le premier juge, qu'il n'a pas été avisé par courrier recommandé avec accusé de réception des décisions de retrait de points litigieuses et que l'administration ne lui a pas communiqué les informations exigées par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; qu'il y a donc lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge, d'écarter ces moyens ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 223-1 du code de la route : (...) La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que l'infraction au code de la route commise par M. A le 29 avril 2001 a donné lieu à un jugement du Tribunal de police d'Yvetot en date du 13 mars 2002 dont il n'est pas contesté qu'il est devenu définitif ; que, dès lors, le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que la réalité de cette infraction est établie ;

Considérant, d'autre part, que les mentions de la décision 48 S, en tant qu'elle procède au retrait de deux points du capital dont est affecté le permis de conduire de M. A consécutivement à l'infraction du 19 décembre 2006, extraites du système national du permis de conduire, établissent qu'un titre exécutoire d'une amende forfaitaire majorée a été émis ou payé le 25 juin 2007 ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la réalité de cette infraction n'est pas établie ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'article L. 223-1 du code de la route que le retrait de points peut légalement intervenir dès lors que la réalité de l'infraction a été établie, par le paiement par le contrevenant de l'amende forfaitaire, par une composition ou une condamnation pénale, ou encore par l'émission d'un titre exécutoire pour non paiement de l'amende ; que bien qu'il prévoit que le retrait de points est prononcé par une autorité administrative, compte tenu des garanties accordées à l'auteur de l'infraction, l'ensemble des dispositions du code de la route relatives au permis à points doit être regardé comme respectant les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il s'ensuit que le requérant, qui se borne à faire valoir l'absence de condamnation devenue définitive, n'est pas fondé à soutenir que les retraits de points litigieux seraient, pour ce motif, irréguliers et auraient méconnu le droit à un procès équitable ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné du Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions de retrait de trois points, chacune, du capital dont est affecté son permis de conduire consécutivement aux infractions relevées à son encontre les 5 et 26 février 2004 ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du ministre de l'intérieur en date du 30 octobre 2007 :

Considérant que, par voie de conséquence de l'annulation des retraits de trois points chacun consécutifs aux infractions commises les 5 et 26 février 2004 , le solde de points du permis de conduire de M. A n'était pas nul à la date du 30 octobre 2007 ; que, dès lors, M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné du Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision 48 S du 30 octobre 2007 du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que l'article L. 911-1 du code de justice administrative dispose que : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;

Considérant que le présent arrêt prononce l'annulation de la décision 48 S du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales du 30 octobre 2007 en tant qu'elle invalide le permis de conduire de M. A ; qu'il résulte de ce qui précède que six points ont été irrégulièrement retirés au capital de douze points dont était affecté le titre de conduite de M. A ; qu'ainsi, le titre de conduite de l'intéressé n'était pas, à la date de ladite décision du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales portant injonction de le restituer, privé de sa validité pour défaut de points ; que, par suite, l'exécution du présent arrêt implique, et sous réserve que le requérant n'ait pas commis depuis lors d'autres infractions ayant pu entraîner une perte de validité de son titre de conduite, que l'administration restitue à M. A son titre de conduite et procède à la réaffectation des six points illégalement retirés dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions relatives aux dépens :

Considérant qu'aucun dépens n'a été engagé dans le cadre de la présente instance ; que, dès lors, les conclusions présentées à cet égard par M. A sont dépourvues d'objet et, par suite, doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. A une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les décisions ministérielles portant retrait de trois points, chacune, du capital dont était affecté le permis de conduire de M. A consécutivement aux infractions qu'il aurait commises les 5 et 26 février 2004 ainsi que la décision 48 S du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales du 30 octobre 2007, en tant qu'elle porte invalidation du permis de conduire et restitution de celui-ci, sont annulées.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, de restituer à M. A, dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt, six points au capital dont est affecté son permis de conduire et, sous réserve que celui-ci n'ait pas commis d'autres infractions ayant entraîné une perte de points, son permis de conduire.

Article 3 : L'Etat versera à M. A une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le jugement n° 0702975 du 22 septembre 2009 du magistrat désigné du Tribunal administratif de Rouen est réformé en tant qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. Bruno A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

Copie sera transmise au préfet de la région Haute-Normandie, préfet de la Seine-Maritime.

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N°09DA01584


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 09DA01584
Date de la décision : 05/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Vladan Marjanovic
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : COIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-10-05;09da01584 ?
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